Une société a fait valoir en vain que le site marchand d’un concurrent a créé un risque de confusion dans l’esprit du public conduisant à instaurer un lien avec son site, en reproduisant l’ensemble des éléments distinctifs de son propre site, tels que les éléments de la page d’accueil (le header qui permet de capter l’attention de l’internaute, la charte graphique, la combinaison des couleurs violet/rouge/vert/bleu/orange), l’ordonnancement des rubriques, l’arborescence du site (l’organisation et les intitulés), outre la reprise de plusieurs gammes de produits et des textes d’accroches.
Le seul fait de commercialiser des produits identiques ou similaires à ceux, qui ne font pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, distribués par un concurrent relève de la liberté du commerce et n’est pas fautif, dès lors que cela n’est pas accompagné de manoeuvres déloyales constitutives d’une faute, telle que la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.
L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.
En l’occurrence, les pages d’accueil ainsi décrites offrent une présentation habituelle en matière de site internet, s’agissant de la présence d’un bandeau déclinant le nom de la société avec la gamme des produits commercialisés, des textes d’accroches usuels ( ‘besoin d’un devis personnalisé »), les deux sites se distinguent nettement cependant par leur charte graphique et le choix de la page de présentation centrale.
S’il ne peut qu’être constaté que, globalement, les dénominations des rubriques présentant les produits, puis les sous-catégories et enfin les produits eux-mêmes, comportent des similitudes, la cour rappelle que, dans la mesure où les deux sociétés commercialisent les mêmes produits de signalétiques, ces similitudes découlent de la nature et de l’usage même des produits mis en vente, outre que, les textes descriptifs des produits sont ceux des fournisseurs, qui sont communs aux deux sociétés.
Ainsi, les seules ressemblances établies, s’agissant d’une certaine proximité organisationnelle, ne résultent que des codes habituellement utilisés par les sites marchands sur internet, qui sont présents également chez les autres sociétés intervenant dans le même domaine, et ne saurait générer un risque de confusion auprès du public concerné, habitué à ce type de présentation standardisée.
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRÊT DU 02 MARS 2021
Numéro d’inscription au répertoire général :19/06991 –��N° Portalis 35L7-V-B7D-B7UGM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Février 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS – 15e chambre – RG n° 2017045892
APPELANTE
SAS X Y
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de HAZEBROUCK sous le numéro 451 191 266
Agissant poursuites et diligences de son président en exercice et ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistée de Me Ignacio DIEZ de la SCP ANDRE BERTRAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L207
INTIMÉE
SARL TOUTELASIGNALETIQUE
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d’ANGERS sous le numéro 824 456 6574
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me Eléonore DELATOUCHE-BIOTTEAU de la SELARL DELATOUCHE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1143
Assistée de Me Julie CAMBIANICA, avocat au barreau de PARIS, toque : P127 substituant Me Eléonore DELATOUCHE-BIOTTEAU de la SELARL DELATOUCHE AVOCATS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Françoise BARUTEL, Conseillère et Mme Déborah BOHEE, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente
Mme Françoise BARUTEL, conseillère,
Mme Déborah BOHEE, conseillère,
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
ARRET :
• Contradictoire
• par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
• signé par Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et par Karine ABELKALON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE
La société X Y, créée en 2003, est spécialisée dans le commerce au détail de produits de signalétiques tels que des panneaux de signalisation, panneaux routiers ou consignes de sécurité. Elle distribue ces produits sur son site marchand internet www.X-Y.com créé au cours de l’année 2007.
La société TOUTELASIGNALETIQUE.COM est une filiale créée en 2016 par la société OUEST GRAVURE, elle-même créée en 1936, en vue de distribuer sur internet les produits de signalétiques qu’elle conçoit et fabrique. Le site internet www.toutelasignaletique.com a été mis en ligne le 23 janvier 2017.
Pendant plusieurs années, la société OUEST GRAVURE a fabriqué des produits signalétiques pour la société X Y.
Considérant que la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM aurait fautivement parasité son site marchand lors de la création de son propre site www.toutelasignaletique.com, la société X S I G N A L E T I Q U E , p a r a c t e d u 2 8 f é v r i e r 2 0 1 7 , a m i s e n d e m e u r e l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM de cesser la poursuite des actes argués de concurrence déloyale et parasitaires par reproduction de la charte graphique, du header et de l’arborescence utilisés sur son site internet, puis, par assignation du 11 juillet 2017, la société X Y a fait assigner la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement rendu le 4 février 2019 dont appel, le tribunal de commerce de Paris a rendu la décision suivante :
— Déboute la société X Y de l’intégralité de ses demandes ;
— Déboute la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de ses demandes en dommages-intérêts pour procédure abusive ;
— Déboute les parties des demandes plus amples, autres et contraires ;
— C o n d a m n e l a s o c i é t é D I R E C T S I G N A L E T I Q U E à v e r s e r à l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 CPC ;
— Condamne la société X Y aux dépens, dont ceux à recouvrer par le Greffe, liquidés à la somme de 115,41 € dont 19,02 € de TVA.
La société X Y a interjeté appel de ce jugement le 29 mars 2019.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 9 novembre 2020 la société X Y, appelante et intimée incidente, qui demande à la cour, de:
Vu les articles 1240 et suivants du Code Civil,
Vu l’article 121-1 et suivants du Code de la Consommation,
— DECLARER recevable et bien fondée la société X Y en ses demandes et en son appel à l’encontre du jugement rendu le 4 Février 2019 par le Tribunal de Commerce de Paris ce qu’il a :
— débouté la société X Y de l’intégralité de ses demandes ;
— débouté la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de ses demandes en dommages- intérêts pour procédure abusive ;
— débouté les parties des demandes plus amples, autres et contraires ;
— c o n d a m n é l a s o c i é t é D I R E C T S I G N A L E T I Q U E à v e r s e r à l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 code de procédure civile.
— L’INFIRMER de ces chefs et statuant à nouveau,
— CONSTATER que la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société X Y.
— INTERDIRE à la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM, et ce sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir, la poursuite de l’exploitation en l’état du site internet éponyme.
A tout le moins,
— ORDONNER sous la même astreinte, la modification de la chartre graphique, des arborescences, de l’organisation et des intitulés du site TOUTELASIGNALETIQUE.COM pour que ne subsiste aucun risque de confusion dans l’esprit du public.
— CONDAMNER la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM au paiement des sommes de :
— 50 000 euros de dommages et intérêts provisionnels au titre du préjudice commercial subi par la société X Y.
— 100 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice d’image subi par la société X Y.
— 50 000 euros au titre des faits de concurrence déloyale et parasitaire au bénéfice de la société X Y.
— ORDONNER la publication de l’arrêt à intervenir dans cinq revues ou journaux au choix de l’appelante pour un montant n’excédant pas 5 000 euros par publication.
— ORDONNER la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir sur la page d’accueil du site Internet TOUTELASIGNALETIQUE.COM pendant une durée de 6 mois.
— DEBOUTER la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de ses demandes reconventionnelles, lesquelles ne reposent sur aucun argument autre celui d’avoir été attraite en justice par l’appelante, cette dernière étant fondée à assurer la sauvegarde de ses droits.
— CONDAMNER la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM à payer à X Y la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel y compris les frais de constat qui pourront être recouvrés directement par Maître TEYTAUD conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 14 décembre 2020 par la société TOUTESIGNALETIQUE.COM, intimée et appelante incidente, qui demande à la cour de:
Vu articles 1240 du code civil et 121-1 et suivants du Code de la consommation,
— DEBOUTER la société X Y de ses demandes, fins et conclusions;
— CONFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 4 février 2019 en ce qu’il a débouté la société X Y de toutes ses demandes ;
— REFORMER le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 4 février 2019 en ce qu’il a débouté la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de sa demande reconventionnelle pour procédure abusive ;
— C O N D A M N E R l a s o c i é t é D I R E C T S I G N A L E T I Q U E à p a y e r à l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM la somme de 20 000€ (Vingt mille Euros) à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
— C O N D A M N E R l a s o c i é t é D I R E C T S I G N A L E T I Q U E à p a y e r à l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM la somme de 10 000€ (Dix mille Euros) au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
— CONDAMNER la société X Y aux dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2021,
MOTIFS DE L’ARRÊT
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.
– Sur les actes de concurrence déloyale:
La société X Y soutient que le site marchand de la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM crée un risque de confusion dans l’esprit du public le conduisant à instaurer un lien entre elles, en reproduisant l’ensemble des éléments distinctifs de son propre site, tels que les éléments de la page d’accueil (le header qui permet de capter l’attention de l’internaute, la charte graphique, la combinaison des couleurs violet/rouge/vert/bleu/orange), l’ordonnancement des rubriques, l’arborescence du site (l’organisation et les intitulés), outre la reprise de plusieurs gammes de produits et des textes d’accroches, et ce d’autant qu’elle sont deux entreprises directement concurrentes, autant d’éléments concrets qui n’ont pas été pris en considération par le tribunal, selon elle.
L’intimée demande la confirmation du jugement rendu en première instance. Elle souligne qu’elle a commandé et validé la création de son logo et de son site marchand antérieurement à la mise en ligne des modifications du site de la société X Y. Elle prétend que l’appelante échoue à démontrer, cumulativement, que son site serait une copie fautive, que son propre site constituerait une valeur économique individualisée, fruit d’un savoir-faire et qu’elle aurait manifesté une volonté de se placer dans son sillage, alors que la société X Y est une société plus jeune que la société OUEST GRAVURE et qu’elle a fait appel aux services de cette dernière. Elle rappelle que la société X Y ne peut s’arroger un monopole de la vente en ligne de produits signalétiques.
Sur ce, la cour rappelle que le seul fait de commercialiser des produits identiques ou similaires à ceux, qui ne font pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, distribués par un concurrent relève de la liberté du commerce et n’est pas fautif, dès lors que cela n’est pas accompagné de manoeuvres déloyales constitutives d’une faute, telle que la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.
L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou mois servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.
À titre liminaire, il convient de relever que le site de la société X Y, prétendument copié, a, en réalité, été modifié en début d’année 2017, alors que le site créé pour la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM a été conçu en octobre 2016, de sorte que la comparaison à laquelle se livre l’appelante n’est pas pertinente, la version ancienne de son site, telle qu’elle apparaît dans les pièces versées par l’intimée, démontrant que ce dernier a été remodelé, la version initiale présentant un bandeau différent avec une prédominance de la couleur grise et une déclinaison des rubriques avec des cartouches de couleurs.
Par ailleurs, il résulte de l’examen auquel s’est livré la cour que les deux sites présentent, en 2017, sur leur page d’accueil un bandeau, en haut de page, mentionnant le nom de la société, avec chacun un logo très distinct, les mentions habituelles concernant les modalités pour les contacter, la possibilité de se créer un compte client et un panier. Immédiatement en dessous, figure l’arborescence du site, déclinant les différentes rubriques de produits vendus soulignées d’une couleur différente, par grandes catégories (Y intérieur/Y interne, accessibilité, fabrication sur mesure/ sur mesure), puis déclinées en sous catégories. Le graphisme employé diffère, et si les deux sites présentent certaines mêmes couleurs vives dans les tons bleu, vert, orange, marron ou violet, la cour constate qu’elles font écho, pour le site de la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM, à son logo,
créé en octobre 2016, constitué précisément de son nom entouré par un cartouche reprenant ces mêmes couleurs. Enfin, dans la partie centrale de la page d’accueil, qui occupe la grande majorité de l’espace, figure pour le site de la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM une photographie représentant une main en train de dessiner des signalétiques alors que, pour la société X Y, figure un dessin représentant une offre publicitaire.
Force est donc de constater que les pages d’accueil ainsi décrites offrent une présentation habituelle en matière de site internet, s’agissant de la présence d’un bandeau déclinant le nom de la société avec la gamme des produits commercialisés, des textes d’accroches usuels ( ‘besoin d’un devis personnalisé »), les deux sites se distinguent nettement cependant par leur charte graphique et le choix de la page de présentation centrale.
S’il ne peut qu’être constaté que, globalement, les dénominations des rubriques présentant les produits, puis les sous-catégories et enfin les produits eux-mêmes, comportent des similitudes, la cour rappelle que, dans la mesure où les deux sociétés commercialisent les mêmes produits de signalétiques, ces similitudes découlent de la nature et de l’usage même des produits mis en vente, outre que, comme le souligne la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM, les textes descriptifs des produits sont ceux des fournisseurs, qui sont communs aux deux sociétés.
P a r a i l l e u r s , l e f a i t q u e l a s o c i é t é a y a n t c r é é e l e s i t e i n t e r n e t d e l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM s’est livrée, au préalable, à une étude des sites des concurrents, en ce compris le site de la société X Y, ne saurait constituer la preuve d’un comportement fautif, tant ce genre d’étude préalable du marché est habituel.
Enfin, il ne peut sérieusement être reproché par la société X Y à la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de commercialiser la même gamme de produits, les indications de signalétiques étant précisément conçues pour présenter les mêmes pictogrammes sous un aspect connu de tous et, ce, alors qu’elles interviennent dans le même secteur d’activité et que l’intimée constitue une filiale de la société OUEST GRAVURE, créée en 1936, qui est à l’origine de la conception de certains de ces produits.
Ainsi, les seules ressemblances établies par la société X Y, s’agissant d’une certaine proximité organisationnelle, ne résultent que des codes habituellement utilisés par les sites marchands sur internet, qui sont présents également chez les autres sociétés intervenant dans le même domaine, et ne saurait générer un risque de confusion auprès du public concerné, habitué à ce type de présentation standardisée.
La société X Y doit en conséquence être déboutée des demandes formulées sur ce point et le jugement entrepris confirmé.
– Sur les actes de parasitisme économique:
L’appelante soutient que le tribunal a commis une erreur de droit relativement au fondement juridique de la demande qui ne relève pas de la propriété littéraire et artistique mais du parasitisme économique. Elle considère avoir effectué des investissements conséquents pour la création de ce site (frais d’étude, de mise au point, investissements créatifs) afin de se différencier des autres acteurs du marché, ce qui est mis à mal par la reproduction de son site internet et l’offre des produits identiques ou quasi-identiques à des prix inférieurs, issue d’une démarche parasitaire.
L’intimée souligne que la société X Y ne démontre nullement qu’elle aurait copié son site internet, dans le but de se placer dans son sillage en bénéficiant ainsi d’avantages concurrentiels indus.
Sur ce, la cour rappelle que le parasitisme, fondé sur l’article 1240 du code civil qui dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, est caractérisé dès lors qu’une personne morale ou physique, à titre lucratif et de façon injustifiée, copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements, et ce, indépendamment de tout risque de confusion.
Et comme déjà mentionné, la société X Y échoue à démontrer que la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM aurait copié son site internet, dont la présentation a été notablement modifiée postérieurement à la création du site litigieux, les procès-verbaux de constat ayant été réalisés en février et juillet 2017.
En outre, comme déjà relevé par le premier juge, si la société X Y verse aux débats une attestation de son expert comptable mentionnant des investissements réalisés sur la période 2007-2016 ‘pour le développement du site internet’, à hauteur de 257.022€ ( soit une somme de moyenne de 25.000€ sur dix années), les annexes visées dans le rapport ne sont pas jointes, de sorte qu’il n’est pas possible d’apprécier la réalité de la valeur économique prétendument parasitée, la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM démontrant, quant à elle, avoir fait appel à une société prestataire pour la création du site en 2016 pour un coût de 14.876€ et ne pas avoir ‘pillé’ les investissements de son concurrent.
Par ailleurs, le fait que la création de la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM et du site internet dédié par la société OUEST GRAVURE s’inscrive dans le contexte de la rupture de ses relations avec la société X Y, ne saurait constituer la preuve de la volonté de capter la clientèle de son concurrent, spécialisé dans la vente sur internet, mais révèle, uniquement la nécessité, dans un marché de libre concurrence, de trouver de nouveaux débouchés pour ses produits, dans un contexte de généralisation de la vente sur internet, la société X Y ne pouvant s’arroger un monopole de la vente en ligne dans ce domaine.
Enfin, comme déjà rappelé, la société X Y n’est pas fondée à reprocher à la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de commercialiser des produits identiques aux siens, ne démontrant nullement que ces derniers seraient également vendus à vil prix.
Il résulte de ces éléments que la société X Y ne démontre pas la valeur économique qu’elle aurait créée et qui aurait été indûment captée par la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM. Ses demandes sur le fondement du parasitisme seront donc rejetées, et le jugement entrepris confirmé sur ce point.
– Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive:
La société TOUTELASIGNALETIQUE.COM soutient que la procédure a été intentée de mauvaise foi s’agissant d’un contentieux purement artificiel engagé par la société X Y afin de freiner son développement économique et qu’elle s’est abstenue, en raison du présent litige, d’investir davantage dans son site marchand.
Il n’est cependant pas démontré que la société X Y ait agi avec une évidente mauvaise foi, ou une absence de tout fondement ou de façon malveillante avec une intention de nuire, de nature à faire dégénérer en abus son action en justice, de sorte que la demande de la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM de ce chef sera rejetée.
– Sur les dépens et les frais irrépétibles:
Il convient d’abord de confirmer les dispositions du jugement de première instance concernant les dépens et les frais irrépétibles.
Ensuite, la société X Y, partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens d’appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés à l’occasion de la présente instance.
Enfin, l’équité et la situation des parties commandent de condamner la société X Y à verser à la société TOUTELASIGNALETIQUE.COM une somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en toutes ces dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société X Y au paiement des dépens de l’instance en appel,
C o n d a m n e l a s o c i é t é D I R E C T S I G N A L E T I Q U E à v e r s e r à l a s o c i é t é TOUTELASIGNALETIQUE.COM la somme de 6 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE