Présentateur : 6 février 2014 Cour d’appel de Paris RG n° 12/16379

·

·

Présentateur : 6 février 2014 Cour d’appel de Paris RG n° 12/16379
Ce point juridique est utile ?

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 06 FEVRIER 2014

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/16379

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 09/068804

APPELANTE

SA COVEA CAUTION prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Assistée par Me Dorothée LOURS, avocat au barreau de PARIS, toque : P133

INTIMEES

Madame [H] [Y]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Non constituée

SA CREDIT LYONNAIS pris en la personne de ses représentants léguax domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

siège central [Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Nathalie HERSCOVICI de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée par Me Gachucha COURREGE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0159

SA BNP PARIBAS Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée par Me Philippe DENQUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L20

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 Décembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN

ARRET :

– Défaut,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

Par jugement rendu le 3 juillet 2012, le tribunal de commerce de Paris a:

– joint les causes,

– dit la société COVEA CAUTION recevable en sa demande envers le CREDIT LYONNAIS,

– débouté la société COVEA CAUTION de ses demandes,

– dit sans objet les recours en garantie du CREDIT LYONNAIS et de la BNP PARIBAS,

– condamné la société COVEA CAUTION à payer au CREDIT LYONNAIS la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs autres demandes,

– condamné la société COVEA CAUTION aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la Cour le 6 septembre 2012, la société COVEA CAUTION a interjeté appel de ce jugement. La déclaration d’appel a été signifiée à Madame [Y] par huissier le 26 septembre 2012.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 21 mars 2013, la société COVEA CAUTION demande à la Cour :

– de confirmer le jugement en ce qu’il l’a déclarée recevable en son recours subrogatoire dirigé contre le CREDIT LYONNAIS,

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté ses demandes à l’encontre du CREDIT LYONNAIS,

– statuant à nouveau,

– de dire que le CREDIT LYONNAIS a commis une faute en sa qualité de banquier présentateur dans le cadre de son devoir de vérification,

– de condamner le CREDIT LYONNAIS à lui verser la somme de 60.979,61 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2008,

– de condamner le CREDIT LYONNAIS à payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 28 janvier 2013, le CREDIT LYONNAIS demande à la Cour :

– de dire la société COVEA CAUTION irrecevable et subsidiairement mal fondée en son appel et l’en débouter,

– à titre principal,

– de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, en rectifiant cependant le prénom de Madame [Y] qui apparaît être [E] et en faisant état de ce que le CREDIT LYONNAIS a sollicité, dès la première instance, non seulement la garantie de la BNP PARIBAS mais aussi celle de Madame [Y],

– y ajoutant de condamner la société COVEA CAUTION à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens,

– à titre subsidiaire,

– de débouter la société COVEA CAUTION de ses demandes,

– de condamner la BNP PARIBAS à le garantir de toute condamnation en principal, indemnités, intérêts et dépens qui seraient prononcés à son encontre,

– de condamner Madame [Y] à le garantir de toutes condamnations qui seraient prononcés à son encontre,

– de condamner toute partie succombante à payer la somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles de 1ère instance et d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 25 mars 2013, la BNP PARIBAS demande à la Cour :

– de l’accueillir en ses conclusions et de les déclarer recevables et bien fondées,

– de statuer ce que de droit sur le litige opposant la société COVEA CAUTION au CREDIT LYONNAIS,

– de débouter le CREDIT LYONNAIS de ses demandes à son encontre,

– subsidiairement, de condamner Madame [Y] à la garantir de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son égard,

– en tant que de besoin, de rejeter toutes demandes à son égard,

– de condamner toute partie succombante à payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par acte d’huissier du 13 décembre 2012, la société COVEA CAUTION a signifié à Madame [Y] ses conclusions du 5 décembre 2012.

Par acte d’huissier du 26 février 2013, le CREDIT LYONNAIS a signifié à Madame [Y] ses conclusions du 23 janvier 2013.

Par acte d’huissier du 28 mars 2013, la BNP PARIBAS a signifié à Madame [Y] ses conclusions du 25 mars 2013.

Madame [E] [Y] n’a pas constitué avocat.

SUR CE

Considérant que Madame [W] avait souscrit un prêt auprès du CREDIT AGRICOLE qui l’a assignée en paiement ; que dans le cadre de cette procédure, Maître [N], avocat de Madame [W], a remis à Maître [Y], avocat du CREDIT AGRICOLE, un chèque CARPA, daté du 29 novembre 2001, d’un montant de 400.000 francs, à l’ordre de ‘CARPA ME PONTVIANNE ELISABETH 7092’, qui a été débité le 10 décembre 2001 du compte CARPA de Maître [N], mais n’a pas été porté au crédit du compte CARPA de Maître [Y], qui l’a déposé sur son compte professionnel au CREDIT LYONNAIS ; que le CREDIT AGRICOLE n’ayant pas reçu les fonds qui lui étaient destinés, a fait une réclamation auprès de la société COVEA CAUTION, assureur du Barreau de Paris au titre de l’insolvabilité de ses membres et de la non représentation des fonds ;

Considérant que la société COVEA CAUTION a réglé au CREDIT AGRICOLE la somme de 60.979,61 euros, selon quittance du 23 octobre 2008 ;

Considérant que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 février 2009, la société COVEA CAUTION a mis en demeure le CREDIT LYONNAIS de payer cette somme et que par lettre du 2 juin 2009, le CREDIT LYONNAIS a répondu qu’il ne pouvait accéder à sa demande, le compte de Madame [Y] ayant été clôturé le 25 août 2006 ;

Considérant que par acte d’huissier du 21 octobre 2009, la société COVEA CAUTION a assigné le CREDIT LYONNAIS devant le tribunal de commerce de Paris ; que par acte d’huissier du 31 mai 2010, le CREDIT LYONNAIS a assigné en intervention forcée et en garantie la BNP PARIBAS et que par acte d’huissier du 9 mars 2011, la BNP PARIBAS a assigné Madame [Y] en garantie ;

Considérant que c’est dans ces circonstances que le jugement déféré a été rendu;

Considérant que la société COVEA CAUTION soutient qu’en application de l’article L121-12 du Code des assurances, les conditions de la subrogation légale sont réunies et qu’elle est recevable en son recours subrogatoire pour solliciter la réparation intégrale des sommes versées au CREDIT AGRICOLE, victime du détournement ; qu’elle prétend aussi qu’elle dispose d’une subrogation conventionnelle résultant de la quittance subrogatoire signée par le CREDIT AGRICOLE ; qu’elle ajoute qu’elle est subrogée dans les droits du CREDIT AGRICOLE à l’encontre de toute personne responsable de la non représentation des fonds ; que sur la responsabilité, elle allègue que le CREDIT LYONNAIS a commis une faute en prenant à l’encaissement un chèque à l’ordre de la CARPA, qui était un bénéficiaire distinct de celui du titulaire du compte ;

Considérant qu’en réponse, le CREDIT LYONNAIS fait valoir que seule la CARPA, tireur du chèque, qui a subi un préjudice lors du détournement du chèque, pouvait agir contre la banque tirée ou la banque présentatrice, que le CREDIT AGRICOLE n’étant ni le tireur ni le bénéficiaire du chèque litigieux ne pouvait pas engager la responsabilité des banques, mais seulement celle de sa débitrice Madame [W] ou de son mandataire Madame [Y] et que la société COVEA CAUTION, subrogée dans les droits du CREDIT AGRICOLE, n’a pas d’intérêt à agir contre lui ; qu’il mentionne encore que le CREDIT AGRICOLE, n’étant pas le bénéficiaire du chèque litigieux, n’a pas subi de préjudice réparable et que c’est la CARPA qui a commis une faute en ne contrôlant pas le crédit du chèque CARPA correspondant au débit ; qu’il estime qu’il n’a commis aucune faute, le chèque ne comportant pas d’anomalie et étant établi à l’ordre de Maître [Y] ; qu’à titre subsidiaire, il affirme que la BNP PARIBAS, agence de la CARPA, aurait du vérifier que le paiement du chèque s’effectuait bien au bénéfice de la CARPA et qu’elle doit être condamnée à le garantir de toute condamnation éventuelle, de même que Madame [E] [Y], dont le détournement effectué à son profit est à l’origine du litige ;

Considérant que la BNP PARIBAS rappelle que le chèque était parfaitement régulier, qu’il ne comportait pas d’anomalie et qu’elle n’avait aucun motif de s’opposer au paiement d’un chèque régulier, présenté au paiement par une banque tierce ;

Considérant que s’agissant de la recevabilité de la demande de la société COVEA CAUTION, cette dernière se prévaut de la subrogation légale en application de l’article L121-12 du Code des assurances ;

Considérant qu’aux termes de l’article L121-12 du Code des assurances, ‘l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance, est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur’ ;

Considérant que l’article L121-12 susvisé n’exige pas que le paiement soit fait entre les mains de l’assuré lui-même et qu’il peut être effectué entre les mains d’un tiers;

Considérant qu’en l’espèce la société COVEA CAUTION, assureur de la CARPA, a payé au CREDIT AGRICOLE la somme de 60.979,61 euros, selon quittance du 23 octobre 2008 ; qu’aux termes de cette quittance, le CREDIT AGRICOLE a reconnu avoir reçu cette somme en règlement total définitif du préjudice subi consécutivement aux malversations commises par Madame [E] [Y], alors avocat au Barreau de Paris, laquelle n’a pas représenté la somme à due concurrence ;

Considérant qu’il est ainsi établi que la société COVEA CAUTION a versé au CREDIT AGRICOLE la somme de 60.979,61 euros, correspondant au préjudice résultant du détournement du chèque litigieux par Madame [E] [Y] et que le CREDIT AGRICOLE est bien la victime du détournement de ce chèque dont le montant devait lui être versé ;

Considérant en conséquence que les conditions de la subrogation légale sont réunies et que la société COVEA CAUTION est en droit d’exercer son recours subrogatoire à l’encontre de toute personne responsable du dommage ;

Considérant que la société COVEA CAUTION doit dès lors être déclarée recevable en sa demande à l’égard du CREDIT LYONNAIS et que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Considérant que la société COVEA CAUTION reproche au CREDIT LYONNAIS d’avoir encaissé le chèque litigieux sur le compte professionnel de Madame [E] [Y] ;

Considérant que le chèque était libellé à l’ordre de ‘CARPA ME PONTVIANNE ELISABETH 7092’ et que cette mention dactylographiée ne présentait pas de surcharge ou de rajout ;

Considérant que la double mention du bénéficiaire, CARPA et ME [Y], constituait en revanche une anomalie apparente qui aurait du attirer l’attention du CREDIT LYONNAIS ; que notamment la première mention ‘CARPA’ ne pouvait laisser croire au CREDIT LYONNAIS que ce chèque était destiné à être encaissé sur le compte de Madame [E] [Y], puisque dans ce cas seul le nom de Madame [E] [Y] aurait du figurer sur le chèque ;

Considérant qu’il appartenait au CREDIT LYONNAIS, en sa qualité de banquier présentateur, de s’assurer du bénéficiaire du chèque avant de l’encaisser sur le compte de Madame [E] [Y] et qu’il a commis un manquement à son devoir de vigilance ;

Considérant que l’absence de contrôle par le CREDIT LYONNAIS a permis à Madame [E] [Y] de détourner le chèque litigieux ; que la société COVEA CAUTION est fondée à rechercher la responsabilité du CREDIT LYONNAIS et à obtenir la réparation du dommage, qui ne serait pas produit en l’absence de la faute de ce dernier ;

Considérant que le CREDIT LYONNAIS doit dans ces conditions être condamné à payer à la société COVEA CAUTION la somme de 60.979,61 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, compte tenu du caractère indemnitaire de la créance;

Considérant que le CREDIT LYONNAIS demande à être garanti par la BNP PARIBAS, banquier tiré ;

Considérant que le chèque litigieux a été émis par la CARPA, dont l’agence bancaire est la BNP PARIBAS, et qu’il était également à l’ordre de la CARPA ; qu’en sa qualité de banquier tiré, la BNP PARIBAS aurait du se rendre compte de l’anomalie consistant dans la présentation, par une autre banque qu’elle-même, de ce chèque ;

Considérant cependant que la BNP PARIBAS n’a pas commis de faute à l’égard du CREDIT LYONNAIS et que ce dernier est donc mal fondé en son appel en garantie à l’encontre de la BNP PARIBAS ;

Considérant que le CREDIT LYONNAIS est en revanche en droit de demander la condamnation de Madame [E] [Y], qui a détourné le chèque litigieux, à le garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;

Considérant que le CREDIT LYONNAIS, qui succombe, supportera ses frais irrépétibles et les dépens de première instance et d’appel ;

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société COVEA CAUTION les frais non compris dans les dépens, exposés en première instance et en appel et qu’il convient de condamner le CREDIT LYONNAIS à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ; que l’équité n’impose pas en l’espèce de faire application des dispositions de l’article 700 susvisé au profit de la BNP PARIBAS ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré la société COVEA CAUTION recevable en sa demande à l’encontre du CREDIT LYONNAIS.

L’infirme en toutes ses autres dispositions.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne le CREDIT LYONNAIS à payer à la société COVEA CAUTION la somme de 60.979,61 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Condamne le CREDIT LYONNAIS à payer à la société COVEA CAUTION la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamne Madame [E] [Y] à garantir le CREDIT LYONNAIS toutes condamnations prononcées à son encontre.

Déboute les parties de toutes autres demandes.

Condamne le CREDIT LYONNAIS aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x