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COMM.
IK
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 juillet 2016
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10172 F
Pourvoi n° E 15-18.073
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société […] , société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 12 mars 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l’opposant :
1°/ à la Société générale, dont le siège est […] ,
2°/ à la société Bred banque populaire, dont le siège est […] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 7 juin 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Guérin, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Henry, avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société […] , de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la Société générale, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Bred banque populaire ;
Sur le rapport de M. Guérin, conseiller, l’avis de Mme Henry, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société […] aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société générale la somme de 3 000 euros et à la société Bred banque populaire la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société […]
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société […] de ses demandes indemnitaires dirigées contre la Société Générale et la Bred ;
Aux motifs propres que « la société […] , qui a une activité d’administration de biens, de syndic de copropriétés, de gestion locative et de transactions immobilières, avait dans le cadre des mandats de gestion de copropriétés d’immeubles, ouvert des comptabilités autonomes de copropriétés auxquelles étaient attachés des comptes bancaires individuels à la Société Générale ; qu’elle utilisait les chéquiers de copropriétés pour régler les dépenses engagées par chaque copropriété et que pour le paiement de ses honoraires de gestion, elle émettait directement à son ordre des chèques tirés sur les comptes des copropriétés ; qu’à compter d’avril 2009, le comptable de la société, M. U… a détourné des chèques de copropriétés et des chèques de la société […] et les a déposés à la Société Générale sur le compte de sa compagne ou sur son propre compte à la BRED ; que M. U… a également donné des chèques reçus sans ordre à des tiers et réglé directement des dépenses pour le compte de tiers sur des chéquiers de copropriétés ; que le 06/07/2011, la société […] a porté plainte à l’encontre de M. U…, qu’une information a été ouverte et que par ordonnance du 31/07/2012, M. U… a été renvoyé devant le tribunal correctionnel ; que c’est dans ces circonstances que par acte d’huissier du 13/12/2012, la société […] a assigné la Societe Générale et la BRED devant le tribunal de commerce de Paris ; que par jugement du tribunal de commerce du 04/04/2013, l’affaire a fait l’objet d’un sursis à statuer dans l’attente du jugement du tribunal correctionnel à l’encontre de M. U… ; que par jugement du 10/04/2013, rendu contradictoirement à l’égard de M. U…, le tribunal correctionnel a déclaré M. U… coupable des faits d’abus de confiance commis du 1er janvier 2009 au 28 février 2011, l’a condamné à un emprisonnement de 15 mois et à payer à la société […] la somme de 133.316,39 € en réparation du préjudice matériel de cette dernière ; que c’est dans ces conditions que le jugement déféré a été rendu ; que la SARL […] prétend que les sociétés intimées ont engagé leur responsabilité à son égard, sur le fondement de l’article L. 561-1 du code monétaire et financier, qu’elles ont encaissé des chèques sur le compte de M. U… ou de sa compagne, alors qu’ils n’en étaient pas les bénéficiaires, que le détournement était visible et qu’un simple contrôle des chèques aurait permis aux banques de constater l’infraction ; qu’elle soutient que la faute commise par les sociétés intimées lui a causé un préjudice, que sa perte financière résulte du détournement des chèques par M. U… et que cette perte aurait pu être évitée si les intimées avaient respecté leur obligation de contrôler la régularité des chèques ; qu’elle précise que M. U… est insolvable ; que la Societé Générale fait valoir que sa responsabilité est recherchée en sa qualité de banquier présentateur, que la société […] ne peut solliciter réparation de l’intégralité de son préjudice à son encontre au titre des chèques détournés sans opérer une quelconque distinction entre les différents établissements bancaires présentateurs et la nature de l’irrégularité affectant les chèques; qu’elle rappelle que M. U… a notamment détourné des chèques arrivant sans ordre dans la société […] ; qu’elle mentionne aussi que la société […] n’établit pas avoir indemnisé les syndicats de copropriétaires pour les chèques dont ils étaient bénéficiaires ou ceux tirés sur leurs comptes et qu’elle ne démontre pas son préjudice ; qu’elle affirme également que la faute de la société […] est à l’origine de son préjudice et que cette faute de la victime l’exonère de toute responsabilité ; qu’elle précise que la société […] a été défaillante dans le contrôle interne de sa comptabilité pendant plus de deux ans, qu’elle a engagé son préposé sans se renseigner auprès des précédents employeurs, alors que ces derniers avaient porté plainte pour des agissements frauduleux commis par M. U… qu’elles avaient embauché comme comptable et que M. U… a été condamné le 25 mars 2009 pour des faits de vols au préjudice de la société Guayapi et le 31 août 2010 pour abus de confiance au préjudice de la société Guibaut ; qu’elle considère que les fautes de la société […] sont la cause exclusive du dommage qu’elle a subi ; que la BRED expose que la société […] recherche sa responsabilité sur le fondement de l’article L. 561-1 du code monétaire et financier, mais qu’elle n’établit pas que cet article relatif à la lutte contre le blanchiment est applicable en l’espèce et que sa demande indemnitaire ne repose sur aucun fondement juridique pertinent; qu’elle allègue que la société […] est responsable de son préjudice dès lors qu’elle ne démontre pas s’être renseignée sur les références de M. U… lors de son embauche, alors que ce dernier n’était pas un primo délinquant et qu’elle n’a procédé à aucun contrôle comptable pendant plus de deux ans ; qu’elle conteste le montant du préjudice invoqué par l’appelante, qui n’est pas justifié ; qu’elle souligne également qu’elle n’est pas tenue solidairement avec la Société Générale et que le dossier pénal produit aux débats en première instance mettait en exergue l’intervention de six autres établissements bancaires ; qu’elle estime enfin qu’elle ne saurait être condamnée pour résistance abusive, n’ayant pas à suppléer l’appelante dans l’administration de la preuve ; que la SARL […] qui prétend que la Société Générale et la BRED ont engagé leur responsabilité à son égard, fonde sa demande dans le dispositif de ses conclusions sur l’article L561-1 du code monétaire et financier ; que l’article L561-1 du code monétaire et financier, relatif aux personnes soumises à une obligation de déclaration au Procureur de la République, concerne la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ; que la société […] n’établit pas que les dispositions de l’article susvisé sont applicables au présent litige ; que la société […] reproche à la Société Générale et à la BRED d’avoir encaissé des chèques sur le compte de M. U… ou de sa compagne, alors que ces derniers n’en étaient pas les bénéficiaires et qu’elle invoque donc la responsabilité des banques présentatrices pour des manquements à leurs obligations de contrôle ; qu’à l’appui de sa demande, la société […] verse aux débats l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et le jugement du 10 avril 2013; qu’il ressort de ces pièces que M. U…, qui a reconnu les faits, a expliqué qu’il prenait soit des chèques arrivant sans ordre à la société […] , soit des chèques de comptes de copropriété qu’il falsifiait et que le préjudice de la société […] a été fixé à 133.316,39 € correspondant au montant total des chèques détournés ; que la société […] communique également un tableau de chèques des syndicats tirés sur la Société Générale Paris Lepic, un tableau synoptique des remises de chèques sur le compte de Mme E… H… , un tableau des chèques déposés sur le compte de M. U… et un extrait des écritures de son journal; que la faute alléguée à l’encontre des banques consiste dans I’ absence de contrôle lors de la remise de chèques présentés à l’encaissement et qu’il ne peut s’agir que d’une responsabilité personnelle de chaque banque pour les chèques présentés dans son établissement ; que la société […] ne verse pas aux débats les chèques litigieux et que les seules listes qu’elle a elle-même établies ne permettent pas de vérifier quels sont les chèques qui ont été présentés à la Société Générale ou à la BRED ; qu’en outre qu’en l’absence de production des chèques litigieux, la société […] ne démontre pas que la falsification de ces chèques était apparente et qu’un employé normalement diligent aurait dû s’en rendre compte, alors qu’il ressort de l’ordonnance de renvoi que M. U… a détourné certains chèques reçus en blanc, pour lesquels il n’y a donc pas eu de falsification ; que par ailleurs que les chèques détournés étaient soit des chèques tirés sur le compte de la société […] , soit des chèques tirés sur les comptes des copropriétés gérées par la société […] , soit des chèques dont la société […] ou les copropriétés étaient bénéficiaires ; que la société […] ne justifie pas avoir indemnisé lesdites copropriétés et qu’elle ne démontre pas l’existence d’un préjudice personnel concernant les chèques détournés au préjudice des copropriétés gérées par elle ; qu’en conséquence, la société […] doit être déboutée de ses demandes à l’encontre de la Société Générale et de la BRED ; que le jugement doit dès lors être confirmé en toutes ses dispositions; qu’en appel, la société […] sollicite des dommages et intérêts pour résistance abusive des intimées ; que la société […] , appelante, étant déboutée de ses prétentions, sa demande de dommages et intérêts sur ce fondement doit être rejetée » ;
Et aux motifs, à les supposer adoptés des premiers juges, que « sont versés aux débats :
. l’Ordonnance de renvoi du 31 juillet 2012, décrivant les opérations frauduleuses effectuées par M. U… ;
. le jugement correctionnel du 10 avril 2013 condamnant M. U… pour escroquerie à une peine d’emprisonnement et à dédommager J… des sommes détournées ;
. Quatre listes établies par J…, de chèques émis par J… ou dont J… était bénéficiaire, et de chèques émis par les syndicats de copropriétés ou dont ils étaient bénéficiaires, détournés par M. U… sur son compte à la BRED ou sur le compte de sa compagne à la Société Générale ;
. les photocopies des formules de remises de chèques et les chèques détournés obtenus des services de police ; que dans la présente instance, J… argue que les banques se sont comportées de manière fautive en créditant les chèques présentés par M. U… sur son compte ou celui de sa compagne, alors qu’ils n’en étaient pas les bénéficiaires, et que ce comportement fautif lui a causé un préjudice qu’il y a lieu d’indemniser ; que la BRED soutient de son côté que l’action de J… est sans fondement juridique du fait que cette société n’a pas de compte dans ses livres, mais attendu que la BRED – tout comme la Société Générale -, a concouru aux faits allégués par J… en encaissant les chèques litigieux sur le compte de M. U… ou celui de sa compagne sans contrôler les bénéficiaires, le tribunal dira que J… est recevable en sa demande envers les banques défenderesses ; que, nonobstant le fait que pour masquer toutes ces opérations dans les comptes, M. U… a établi de fausses écritures comptables qui soldaient artificiellement les créances détenues par J… sur des comptes de copropriétés en les transférant sur des comptes d’attente, qu’en revanche J… a, à l’évidence, manqué à son devoir de contrôle vis-à-vis de son salarié et des comptes dont elle avait la charge, d’autant plus nécessaire qu’elle gère les comptes de syndicats de copropriété ; que néanmoins, il n’y a lieu pour le tribunal de statuer sur l’éventuelle responsabilité des banques et le partage de responsabilité entre J… et les banques que pour autant que J… justifie de son préjudice ; qu’en effet, le simple fait que le tribunal correctionnel ait mis en évidence le détournement de chèques ne saurait justifier un préjudice de J… demandeur à l’action à hauteur de ce montant et qu’il lui appartient de démontrer tant l’existence que le quantum du préjudice dont il demande réparation ; que dans la mesure où les banques ne sauraient, au cas particulier, être condamnées solidairement, J… devait ventiler sa demande chiffrée globalement à 133 410 €, majorés ensuite de 12.819,43 €, entre les deux banques, que le tribunal relève que J… a fait un décompte par banque dans ses pièces, fixant sa demande dirigée contre la Société Générale à 102.557,65 € et celle dirigée contre la BRED à 30.853,20 €, montants qui sont néanmoins contestés par les banques ; que la société […] n’explique pas en quelle qualité elle intervient ; qu’elle intervient certes à titre personnel, mais que si elle agit aussi en qualité de syndic de copropriétés, elle doit ventiler le préjudice allégué entre les différentes copropriétés, ce qu’elle ne fait pas ; qu’elle pourrait néanmoins être personnellement indemnisée des préjudices subis par les copropriétés, mais seulement si elle justifiait qu’elle a indemnisé les copropriétés des préjudices subis, ce qu’elle ne fait pas non plus ; que J… ne donne aucune indication sur la nature des opérations sous-jacentes aux chèques détournés qui ne sont pas tous versés aux débats et ne justifie pas du préjudice occasionné par le détournement de chacun d’eux ; qu’il apparait que les opérations frauduleuses opérées par M. U… ont consisté notamment à détourner des chèques, qu’il a déposé les chèques détournés sur son compte personnel à la BRED ou celui de sa compagne à ta Société Générale, qu’il s’agissait notamment :
. de chèques tirés sur des comptes de copropriétés émis à l’ordre de J…, ou à l’ordre de prestataires et fournisseurs, ou à l’ordre de personnes tierces ;
. de chèques reçus de tiers au bénéfice des comptes de copropriétés ou de J… ;
. de chèques arrivant sans ordre chez J…, que M. U… a distribués à des tiers pour solder ses dettes ; qu’ainsi donc les chèques détournés sont, soit des chèques tirés sur les comptes de J… ou des copropriétés gérées par J…, soit des chèques dont J… et les copropriétés sont bénéficiaires :
. que dans les premiers cas J… ne justifie pas avoir indemnisé le bénéficiaire qui est a priori la personne qui a subi le préjudice, ou lui avoir fait un nouveau paiement, que J… ne justifie donc pas d’un préjudice propre ;
o que s’agissant des chèques dont J… est bénéficiaire, elle doit démontrer qu’elle n’a pas obtenu un nouveau règlement en remplacement, notamment des chèques correspondants à la rémunération qui lui était due par les copropriétés qui seraient alors les seules victimes de ces détournements ;
o que s’agissant des chèques émis par les tiers au bénéfice des copropriétés vraisemblablement en provenance de copropriétaires payant leurs provisions sur charges -, aucun décompte des sommes appelées par copropriété n’est fourni et qu’encore une fois, J… ne justifie pas avoir indemnisé à partir de son compte personnel les syndicats de copropriété ; que quoi qu’il en soit, compte tenu des éléments versés aux débats et des explications, le tribunal dit que J… n’apporte pas la preuve qui lui incombe de l’existence et du quantum du préjudice dont elle demande réparation à la Société Générale et à la BRED et il la déboutera de ses demandes » ;
Alors 1°) que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en soulevant d’office le moyen selon lequel en l’absence de production aux débats des chèques détournés par son ancien comptable M. U…, la société […] ne démontrait pas que la falsification de ces chèques était apparente et qu’un employé normalement diligent aurait dû s’en rendre compte, sans solliciter préalablement les observations des parties sur ce point, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que la société […] soutenait dans ses écritures d’appel (p. 5), qu’ainsi que l’avait constaté l’ordonnance du juge d’instruction renvoyant M. U… devant le tribunal correctionnel de Paris pour abus de confiance, le superviseur risques de la Société Générale avait signalé aux enquêteurs, lors de son audition le 7 juillet 2011, le « fonctionnement douteux » des comptes de M. U… ; qu’en particulier, à la question « par quel mode opératoire plusieurs chèques pour une somme totale de 47.000 € ont été crédités sur le compte d’un particulier alors que sans falsification ils étaient libellés à l’ordre de ces sociétés ? », il avait répondu : « Il s’agit d’un manque de contrôle évident » ; qu’en déboutant la société […] de ses demandes d’indemnisation des préjudices résultant du détournement des chèques litigieux, sans rechercher, comme elle y était invitée, s’il ne résultait pas des informations fournies aux enquêteurs par le superviseur risques de la Société Générale une reconnaissance par la banque de sa responsabilité dans le préjudice subi par la société […] , la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1354, 1382 et 1383 du code civil ;
Alors 3°) que dans ses conclusions d’appel (p. 4-5), la société […] faisait valoir qu’il résultait d’un courrier adressé le 7 août 2012 à son ancien conseil par le directeur juridique de la Bred que cet établissement bancaire avait reconnu sa responsabilité dans la survenance des détournements de chèques par M. U…, et « qu’au regard des éléments communiqués concernant la prise en charge par la Société Générale », il avait accepté d’indemniser la société […] à hauteur des 35% restants ; qu’en s’abstenant de rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, s’il ne résultait pas de ce courrier, régulièrement produit aux débats, une reconnaissance par la Bred de sa responsabilité et du préjudice subi par la société […] , lesquels ne pouvaient dès lors plus être contestés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1354, 1382 et 1383 du code civil ;
Alors 4°) que sauf en cas de faute du déposant constituant la cause exclusive du dommage, et même s’il n’a lui-même commis aucune faute, le banquier n’est pas libéré envers le client qui lui a confié des fonds lorsqu’il se défait de ces derniers sur présentation d’un faux ordre de paiement revêtu dès l’origine d’une fausse signature ; qu’il résulte des constatations de l’arrêt attaqué que parmi les chèques détournés par M. U… figuraient des chèques reçus sans ordre ainsi que des chèques tirés sur le compte de la société […] , sur lesquels il avait apposé sa signature ; qu’en rejetant les demandes indemnitaires de la société […] au titre de ces chèques qui constituaient de faux ordres de paiement, sans constater une faute de cette dernière qui aurait constitué la cause exclusive du préjudice, la cour d’appel a méconnu les articles 1147 et 1937 du code civil ;
Alors 5°) que subit un préjudice direct et personnel le syndic de copropriétés qui, du fait de détournements, par l’un de ses préposés, de chèques provenant des copropriétés dont il assure la gestion, ou dont celles-ci étaient bénéficiaires, se trouve dans l’obligation légale de rembourser à ses mandants les fonds détournés ; qu’en jugeant néanmoins que dès lors qu’elle ne justifiait pas avoir indemnisé les copropriétés au titre des détournements commis par son ancien comptable de chèques tirés sur les comptes des copropriétés qu’elle gérait, et de chèques dont ces copropriétés étaient bénéficiaires, la société […] ne démontrait pas l’existence d’un préjudice personnel concernant les chèques détournés au préjudice des copropriétés, la cour d’appel a violé les articles 1147, 1382 et 1383 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Alors 6°) que les décisions des juridictions pénales statuant sur l’existence du préjudice de la partie civile sont dotées de l’autorité de chose jugée à l’égard de tous ; qu’ainsi que le soulignait la société […] dans ses écritures d’appel (p. 2), le tribunal correctionnel de Paris, par jugement du 10 avril 2013, dont le caractère définitif n’était pas contesté, avait déclaré M. U… coupable des faits d’abus de confiance et, sur l’action civile de la société […] , l’a condamné à verser à cette dernière la somme de 133.316,39 euros ; qu’en jugeant néanmoins que la société […] ne rapportait pas la preuve du préjudice qu’elle invoquait au titre des chèques détournés par M. U…, la cour d’appel a méconnu l’article 1351 du code civil ;
Alors 7°) que les juges du fond doivent examiner, fût-ce de manière sommaire, les pièces soumises à leur analyse destinées à établir la preuve d’un fait juridique, quand bien même elles émanent de l’une des parties au litige ; que la société […] avait versé aux débats (cf pièce n°2 de son bordereau de communication de pièces annexé à ses conclusions) trois listes répertoriant, d’une part, les « chèques des syndicats tirés sur la Société Générale Paris Lepic », d’autre part, « les remises de chèques sur le compte de [Mme] E… », compagne de M. U…, ouvert au sein de la Société Générale et, enfin, les « chèques déposés sur le compte de […] , ouvert dans les livres de la BRED N°822 00 9174 » ; qu’en jugeant que « la société […] ne vers[ait] pas aux débats les chèques litigieux et que les seules listes qu’elle a elle-même établies ne permettent pas de vérifier quels sont les chèques qui ont été présentés à la Société Générale ou à la BRED », sans procéder à la moindre analyse des listes établies par la société […] , la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (EVENTUEL)
Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société […] de ses demandes indemnitaires dirigées contre la Société Générale et la Bred ;
Aux motifs, à les supposer adoptés des premiers juges, que « sont versés aux débats :
. l’Ordonnance de renvoi du 31 juillet 2012, décrivant les opérations frauduleuses effectuées par M. U… ;
. le jugement correctionnel du 10 avril 2013 condamnant M. U… pour escroquerie à une peine d’emprisonnement et à dédommager J… des sommes détournées ;
. Quatre listes établies par J…, de chèques émis par J… ou dont J… était bénéficiaire, et de chèques émis par les syndicats de copropriétés ou dont ils étaient bénéficiaires, détournés par M. U… sur son compte à la BRED ou sur le compte de sa compagne à la Société Générale ;
. les photocopies des formules de remises de chèques et les chèques détournés obtenus des services de police ; que dans la présente instance, J… argue que les banques se sont comportées de manière fautive en créditant les chèques présentés par M. U… sur son compte ou celui de sa compagne, alors qu’ils n’en étaient pas les bénéficiaires, et que ce comportement fautif lui a causé un préjudice qu’il y a lieu d’indemniser ; que la BRED soutient de son côté que l’action de J… est sans fondement juridique du fait que cette société n’a pas de compte dans ses livres, maïs attendu que la BRED – tout comme la Société Générale -, a concouru aux faits allégués par J… en encaissant les chèques litigieux sur le compte de M. U… ou celui de sa compagne sans contrôler les bénéficiaires, le tribunal dira que J… est recevable en sa demande envers les banques défenderesses ; que, nonobstant le fait que pour masquer toutes ces opérations dans les comptes, M. U… a établi de fausses écritures comptables qui soldaient artificiellement les créances détenues par J… sur des comptes de copropriétés en les transférant sur des comptes d’attente, qu’en revanche J… a, à l’évidence, manqué à son devoir de contrôle vis-à-vis de son salarié et des comptes dont elle avait la charge, d’autant plus nécessaire qu’elle gère les comptes de syndicats de copropriété ; qu’il n’y a lieu pour le tribunal de statuer sur l’éventuelle responsabilité des banques et le partage de responsabilité entre J… et les banques que pour autant que J… justifie de son préjudice ; que le simple fait que le tribunal correctionnel ait mis en évidence le détournement de chèques ne saurait justifier un préjudice de J… demandeur à l’action à hauteur de ce montant et qu’il lui appartient de démontrer tant l’existence que le quantum du préjudice dont il demande réparation ; que dans la mesure où les banques ne sauraient, au cas particulier, être condamnées solidairement, J… devait ventiler sa demande chiffrée globalement à 133 410 €, majorés ensuite de 12.819,43 €, entre les deux banques, que le tribunal relève que J… a fait un décompte par banque dans ses pièces, fixant sa demande dirigée contre la Société Générale à 102.557,65 € et celle dirigée contre la BRED à 30.853,20 €, montants qui sont néanmoins contestés par les banques ; que la société […] n’explique pas en quelle qualité elle intervient ; qu’elle intervient certes à titre personnel, mais que si elle agit aussi en qualité de syndic de copropriétés, elle doit ventiler le préjudice allégué entre les différentes copropriétés, ce qu’elle ne fait pas ; qu’elle pourrait néanmoins être personnellement indemnisée des préjudices subis par les copropriétés, mais seulement si elle justifiait qu’elle a indemnisé les copropriétés des préjudices subis, ce qu’elle ne fait pas non plus ; que J… ne donne aucune indication sur la nature des opérations sous-jacentes aux chèques détournés qui ne sont pas tous versés aux débats et ne justifie pas du préjudice occasionné par le détournement de chacun d’eux ; qu’il apparait que les opérations frauduleuses opérées par M. U… ont consisté notamment à détourner des chèques, qu’il a déposé les chèques détournés sur son compte personnel à la BRED ou celui de sa compagne à la Société Générale, qu’il s’agissait notamment :
. de chèques tirés sur des comptes de copropriétés émis à l’ordre de J…, ou à l’ordre de prestataires et fournisseurs, ou à l’ordre de personnes tierces ;
. de chèques reçus de tiers au bénéfice des comptes de copropriétés ou de J… ;
. de chèques arrivant sans ordre chez J…, que M. U… a distribués à des tiers pour solder ses dettes ; qu’ainsi donc les chèques détournés sont, soit des chèques tirés sur les comptes de J… ou des copropriétés gérées par J…, soit des chèques dont J… et les copropriétés sont bénéficiaires :
. que dans les premiers cas J… ne justifie pas avoir indemnisé le bénéficiaire qui est a priori la personne qui a subi le préjudice, ou lui avoir fait un nouveau paiement, que J… ne justifie donc pas d’un préjudice propre ;
o que s’agissant des chèques dont J… est bénéficiaire, elle doit démontrer qu’elle n’a pas obtenu un nouveau règlement en remplacement, notamment des chèques correspondants à la rémunération qui lui était due par les copropriétés qui seraient alors les seules victimes de ces détournements ;
o que s’agissant des chèques émis par les tiers au bénéfice des copropriétés vraisemblablement en provenance de copropriétaires payant leurs provisions sur charges -, aucun décompte des sommes appelées par copropriété n’est fourni et qu’encore une fois, J… ne justifie pas avoir indemnisé à partir de son compte personnel les syndicats de copropriété ; que quoi qu’il en soit, compte tenu des éléments versés aux débats et des explications, le tribunal dit que J… n’apporte pas la preuve qui lui incombe de l’existence et du quantum du préjudice dont elle demande réparation à la Société Générale et à la BRED et il la déboutera de ses demandes » ;
Alors que le titulaire d’un compte bancaire ne peut voir limiter son droit à indemnisation du fait du paiement par le banquier dépositaire de chèques faux ou falsifiés qu’en cas de faute de sa part ayant concouru à la réalisation de son propre préjudice ; qu’en se contentant d’énoncer que « nonobstant le fait que pour masquer toutes ces opérations dans les comptes, M. U… a établi de fausses écritures comptables qui soldaient artificiellement les créances détenues par J… sur des comptes de copropriétés en les transférant sur des comptes d’attente, qu’en revanche J… a, à l’évidence, manqué à son devoir de contrôle vis-à-vis de son salarié et des comptes dont elle avait la charge, d’autant plus nécessaire qu’elle gère les comptes de syndicats de copropriété », sans constater, autrement qu’en l’affirmant péremptoirement, une défaillance fautive de la société […] dans la surveillance de son salarié, ni préciser en quoi aurait consisté cette défaillance qui ne pouvait se déduire du seul fait que l’auteur des détournements était le comptable de la société titulaire du compte, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, 1382 et 1383 du code civil.