La société HSBC Continental Europe a accordé un prêt immobilier à M. et Mme [S] en août 2012. En octobre 2018, ils ont assigné HSBC en justice, arguant d’une erreur dans le calcul des intérêts, qui auraient été basés sur une année bancaire de 360 jours. Ils demandaient la substitution du taux d’intérêt légal, le remboursement d’un trop-perçu, la déchéance des intérêts conventionnels, ainsi que des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté. Le tribunal de commerce de Pau a jugé leur action prescrite en janvier 2022 et a débouté leurs demandes, les condamnant à payer 2.500 euros à HSBC. M. et Mme [S] ont fait appel de cette décision. En décembre 2023, la cour a partiellement infirmé le jugement, rejetant la prescription, mais a confirmé le reste de la décision, condamnant M. et Mme [S] à payer 3.000 euros à HSBC pour les frais d’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Numéro 24/3046
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRET DU 10/10/2024
Dossier : N° RG 22/03117 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IL35
Nature affaire :
Autres demandes relatives au prêt
Affaire :
[F] [S]
[Z] [G] épouse [S]
C/
S.A. HSBC CONTINENTAL EUROPE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 10 octobre 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 03 Juin 2024, devant :
Madame Laurence BAYLAUCQ, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l’appel des causes,
Laurence BAYLAUCQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries,et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Présidente
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [F] [S]
né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 7] (64)
de nationalité française
[Adresse 4]
[Localité 5] / FRANCE
Madame [Z] [G] épouse [S]
née le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 8] (09)
de nationalité française
[Adresse 4]
[Localité 5] / FRANCE
Représentés par Me Arnaud SABIN de la SELARL PYRENEES AVOCATS, avocat au barreau de Pau
Assistés de Me Jérémie BOULAIRE (Selarl Boulaire), avocat au barreau de Douai
INTIMEE :
S.A. HSBC CONTINENTAL EUROPE
immatriculée au RCS de Paris sous le n° 775.670.284,
agissant poursuites et diligences de son Directeur Général domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Jon BERTIZBEREA de la SCP UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA, avocat au barreau de Bayonne
Assistée de Me Anne-Gaëlle LE MERLUS (SCP LUSSAN & Associés), avocat au barreau de Paris
sur appel de la décision
en date du 18 JANVIER 2022
rendue par le PRESIDENT DU TC DE PAU
RG : 2018007176
Suivant offre préalable en date du 31 août 2012 acceptée le 13 septembre suivant, la société HSBC Continental Europe a consenti à M. [F] [S] et Mme [Z] [G] épouse [S] un prêt immobilier d’un montant de 198.208,91 euros d’une durée de 142 mois stipulant un taux d’intérêt nominal annuel de 3,40% et un taux effectif global (TEG) de 4,31% l’an.
Invoquant une erreur affectant le calcul des intérêts conventionnels au motif qu’ils auraient été calculés sur la base d’une année bancaire de 360 jours, M. et Mme [S] ont, par actes d’huissier du 24 octobre 2018, assigné la société HSBC Continental Europe (ci-après HSBC) devant le tribunal de commerce de Pau, aux fins de voir notamment ordonner la substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel, condamner la banque à leur restituer un trop-perçu, subsidiairement prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêt, en tout état de cause condamner la société HSBC à leur payer des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation contractuelle de loyauté.
Suivant jugement du 18 janvier 2022, le tribunal de commerce de Pau a :
Vu les dispositions des articles 1304 du code civil, L110-4 du code de commerce,
Dit que l’action entreprise par M. [F] [S] et Mme [Z] [S] par l’assignation du 24 octobre 2018 de la banque HSBC est prescrite,
Débouté M. [F] [S] et Mme [Z] [S] de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et prétentions,
Dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision,
Les a condamnés à payer à la société HSBC Continental Europe la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance dont les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 63,36 euros en ce compris l’expédition de la présente décision,
Débouté la société HSBC du surplus de ses demandes.
Par déclaration du 18 novembre 2022, M. [F] [S] et Mme [Z] [G] épouse [S] ont relevé appel de ce jugement.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 décembre 2023.
***
Vu les dernières conclusions de M. [F] [S] et de Mme [Z] [G] épouse [S] notifiées le 26 juin 2023 aux termes desquelles ils demandent à la cour de :
Vu l’article 1907 du code civil ;
Vu les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation et les articles R. 313-1 et suivants du même code ;
Vu l’article L. 312-33 du code de la consommation, désormais codifié à l’article L. 341-34 du même code ;
Vu l’ancien article 1147 du code civil, ensemble les articles 1231 et suivants nouveau du même code ;
Vu la jurisprudence applicable ;
Vu les pièces versées aux débats ;
INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il :
DIT que leur action entreprise par l’assignation du 24 octobre 2018 à la banque HSBC est prescrite.
LES DEBOUTE de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et prétentions.
LES CONDAMNE à payer à la société HSBC CONTINENTAL EUROPE la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance dont les frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 63.36 € en ce compris l’expédition de la présente décision.
Statuant à nouveau et, y ajoutant,
DECLARER leurs demandes recevables et bien fondées ;
PRONONCER la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêt souscrit par eux auprès de la société HSBC CONTINENTAL EUROPE;
CONDAMNER la société HSBC CONTINENTAL EUROPE à leur restituer le montant des intérêts indument par l’effet de la pratique du diviseur 360 ;
CONDAMNER la société HSBC CONTINENTAL EUROPE à leur payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté contractuelle ;
CONDAMNER la société HSBC CONTINENTAL EUROPE à leur payer la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
REJETER toutes demandes et prétentions contraires de la société HSBC CONTINENTAL EUROPE ;
CONDAMNER la société HSBC CONTINENTAL EUROPE aux entiers dépens de l’instance ;
*
Vu les conclusions de la société anonyme HSBC Continental Europe (ci-après société HSBC) notifiées le 27 avril 2023 aux termes desquelles elle demande à la cour de :
Vu l’article L.110-4 du Code de commerce
Vu l’article 122 du Code de procédure civile
Vu les articles 1304 et 1907 du Code civil
Vu les articles L.312-1 et suivants du Code de la consommation
Vu les articles L.313-1 et suivants du Code de la consommation
A titre principal
– CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
– et en tout cas, DECLARER prescrite l’action de Monsieur [F] [S] et
Madame [Z] [S] et LES EN DECLARER irrecevables ;
– DEBOUTER en tout état de cause Monsieur [F] [S] et Madame
[Z] [S] de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire,
– DEBOUTER en tout état de cause Monsieur [F] [S] et Madame [Z] [S] de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et conclusions ;
En tout état de cause,
– CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur [F]
[S] et Madame [Z] [S] à lui payer une somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens ;
– et Y AJOUTANT, CONDAMNER solidairement Monsieur [F] [S] et Madame [Z] [S] au paiement, à son profit, d’une somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’au paiement de l’ensemble des dépens d’appel.
Sur l’irrecevabilité de l’action en déchéance du droit aux intérêts et en dommages et intérêts
La société HSBC soulève l’irrecevabilité des demandes tendant à la déchéance de son droit aux intérêts au titre du prêt et à sa condamnation à des dommages et intérêts pour manquement à une obligation contractuelle au motif que l’action serait prescrite. Elle explique que le délai de prescription quinquennale qui avait commencé à courir le 13 septembre 2012 avait expiré lorsque les époux [S] l’ont assignée le 24 octobre 2018. Elle ajoute que si la cour retenait que le point de départ de la prescription était le jour de la découverte de la prétendue erreur, elle constaterait que l’offre de prêt comporte l’ensemble des informations permettant d’apprécier l’exactitude du calcul des intérêts de sorte que l’action des appelants est irrémédiablement prescrite.
Elle ajoute que la demande indéterminée des époux [S] qui sollicitent la condamnation d’HSBC à leur restituer le montant des intérêts « indûment perçus par l’effet de la pratique du diviseur 360 » qu’ils ne chiffrent pas, est également de ce chef manifestement irrecevable.
M. et Mme [S] soutiennent que leur action n’est pas prescrite car le délai de prescription a commencé à courir à la date du rapport d’étude de l’offre de prêt, date avant laquelle ils ont ignoré les faits leur permettant d’agir. Ils ajoutent que le principe d’égalité des armes consacré par l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme interdit à la banque d’opposer la prescription des irrégularités affectant la validité d’un prêt en cours d’exécution.
En application de l’article L. 110-4 du code de commerce issu de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 l’action en déchéance des intérêts conventionnels pour inexactitude du TEG se prescrit par cinq ans.
Le point de départ du délai de prescription court à compter du jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître l’erreur affectant, dans l’offre de crédit immobilier, le taux effectif global ou le calcul des intérêts conventionnels.
Il convient par conséquent d’examiner à quel moment l’emprunteur pouvait déceler par lui-même l’erreur alléguée.
En l’espèce, M. et Mme [S] soutiennent que la banque a institué un calcul des intérêts périodiques basé sur la pratique prohibée du diviseur 360 jours alors que les intérêts devaient être calculés sur l’année civile.
L’offre préalable de prêt immobilier litigieuse mentionne le taux fixe du prêt (3,400% l’an), le taux de l’assurance (0,700%), le taux effectif global (4,31% l’an) le taux de période (0,359% pour une période d’un mois), le montant des frais, le coût total du crédit (252.730,18 euros).
Le contrat précise au surplus « Pour le calcul du taux effectif global propre à chaque prêt indiqué ci-dessus, il a été tenu compte du taux d’intérêt à la date d’émission de l’offre, du coût de l’assurance et des frais et commissions de toute nature, des charges estimées liées aux garanties et honoraires d’officiers ministériels dont le montant n’est pas connu avec précision. » Elle n’apporte pas de précision sur la base de calcul du taux effectif global et des intérêts conventionnels. Au regard de ces éléments, M. et Mme [S], emprunteurs profanes du crédit, n’étaient pas en mesure de déceler par eux-mêmes, à la simple lecture du contrat, le prétendu calcul des intérêts conventionnels sur 360 jours, dont ils indiquent s’être convaincus au vu d’une étude financière datée du mois de janvier 2019 postérieurement à la délivrance de l’assignation introductive d’instance.
La fin de non-recevoir tirée de la prescription sera donc rejetée et le jugement déféré infirmé sur ce point.
Sur la demande de déchéance des intérêts conventionnels
A titre liminaire il y a lieu de constater que les appelants n’ont pas maintenu leur demande tendant à voir prononcer la substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel. Il convient d’examiner leur demande de déchéance du droit aux intérêts.
M. et Mme [S] soutiennent que la société HSBC a institué un calcul des intérêts périodiques sur la base prohibée d’une année de 360 jours alors que la cour de cassation juge que le calcul des intérêts dus au cours d’une période donnée doit être effectué sur la base d’une année civile et sur aucune autre. Ils font valoir que la jurisprudence de la cour de cassation qui paraît subordonner désormais toute sanction de cette pratique à la démonstration d’une erreur de TEG franchissant un certain seuil qui, interprété comme un seuil d’un dixième, méconnait l’exigence du caractère « réellement dissuasif » des sanctions et la jurisprudence de la CJUE. Ils ajoutent que cette jurisprudence rétroactive méprise la sécurité juridique et le droit au procès équitable garanti par l’article 6§1 de la CEDH. Ils font valoir qu’il résulte de l’analyse financière qu’ils produisent que l’application du diviseur 360 a engendré s’agissant de l’exemple de l’échéance d’octobre 2012 un surcoût au détriment de l’emprunteur d’un montant de 8,28 euros, ce qui représente sur la période considérée une majoration dissimulée des intérêts de 1,666%. Ils demandent de prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts eu égard à la gravité des manquements de la banque. Ils ajoutent que si la déchéance partielle devait être privilégiée, celle-ci, pour assurer sa fonction dissuasive, devrait à tout le moins, être très largement retenue.
La société HSBC répond que les intérêts mentionnés dans l’offre de prêt litigieuse sont conformes à la règlementation qui leur est applicable et que les époux [S] ne rapportent pas la preuve du caractère erroné du TEG et des intérêts ni celle d’une erreur supérieure à la décimale. Elle conteste l’ensemble des conclusions du rapport d’expertise produit par les appelants dénué selon elle de toute valeur probante. Elle relève que la prétendue erreur de 8,28 euros ne doit pas être rapportée au montant des intérêts sur un seul mois mais au coût total du prêt. Elle ajoute qu’elle démontre le calcul des intérêts du prêt sur la base de l’année civile en référence à une année de 365 jours et un mois normalisé de 30,41666 tels qu’indiqués à l’annexe de l’article R. 313-1 du code de la consommation. Elle ajoute que les appelants sollicitent la déchéance totale des intérêts sans pour autant établir que l’inexactitude du taux entraîne un écart supérieur à la décimale sur le TEG mentionné dans l’offre de prêt.
Il résulte des dispositions des articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, le premier de ces textes dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016, le second dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, et le dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016, que le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt et que l’inexactitude de ce taux n’est sanctionnée que si elle est supérieure à la décimale.
En effet le taux effectif global est calculé selon la formule figurant en annexe à l’article R. 313-1 du code de la consommation précité.
Il a été jugé que le recours à l’année lombarde ou bancaire de 360 jours n’est sanctionné que s’il entraîne un écart du taux d’intérêt égal ou supérieur à la décimale prévue par l’article R. 313-1 (cassation 1ère civile 27 mars 2019 pourvoi n° 17-23.363).
La cour de cassation précise que dans l’hypothèse où le taux conventionnel aurait été calculé sur la base d’une année autre que l’année civile, le taux concerné par l’erreur supérieure à la décimale est le taux effectif global (avis n°15004 du 10 juin 2020- 1ère civ.).
L’erreur affectant le taux effectif global mentionné dans l’acte de prêt était autrefois sanctionnée par la nullité de la clause de stipulation des intérêts avec substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel en application des articles 1907, L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation.
Il résulte de l’ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019 relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d’erreur du taux effectif global, qui généralise la sanction jusqu’alors applicable en cas d’irrégularité affectant la mention du taux effectif global dans une offre de crédit immobilier, qu’en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global dans un écrit constatant un contrat de prêt, le prêteur n’encourt pas l’annulation de la stipulation de l’intérêt conventionnel mais peut être déchu de son droit aux intérêts dans une proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice subi par l’emprunteur.
Si, conformément au droit commun, les dispositions de cette ordonnance ne sont applicables qu’aux contrats souscrits postérieurement à son entrée en vigueur, la chambre commerciale de la cour de cassation a jugé nécessaire, compte tenu de l’évolution de ce contentieux et du droit du crédit, de modifier sa jurisprudence pour juger désormais, à l’instar de la première chambre civile, qu’en cas d’omission du taux effectif global dans l’écrit constatant un contrat de crédit conclu avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 17 juillet 2019, comme en cas d’erreur affectant la mention de ce taux dans un tel écrit, le prêteur peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice subi par l’emprunteur (cassation, chambre commerciale, 24 mars 2021, pourvoi numéro 19-14.404).
En l’espèce, Il incombe aux époux [S] de rapporter la preuve du calcul des intérêts sur une base autre que l’année civile et, dans ce cas, de l’existence d’une erreur supérieure à la décimale résultant de ce calcul prohibé.
L’analyse financière non contradictoire émanant de Pôle Expert Nord-Est produite par M. et Mme [S] est insuffisante pour établir un calcul des intérêts conventionnels sur une base autre que l’année civile, en l’occurrence sur la base alléguée de 360 jours, alors qu’elle est contestée et n’est pas corroborée sur ce point par d’autres éléments.
En outre ce rapport d’analyse financière ne démontre pas que le calcul des intérêts conventionnels par la société HSBC dans l’offre préalable de prêt litigieuse a pour conséquence une erreur dans le taux effectif global supérieure à la décimale.
En effet la dite analyse conclut que c’est le diviseur 360 qui a servi de base au calcul des intérêts de la première échéance du prêt qui porte sur 27 jours, et que les intérêts périodiques ont été calculés non pas sur l’année civile mais sur la base d’une année de 360 jours pour chacune des échéances du prêt jusqu’à son terme. L’analyste se base sur le tableau d’amortissement définitif fourni par la société HSBC. Il explicite le calcul conduisant à sa conclusion à partir de trois mensualités faisant ressortir les différences suivantes :
Octobre 2012 : mensualités sur l’année civile de 497,15 euros alors que celle utilisée par HSBC est de 505,43 euros,
Mai 2013 : mensualité calculée sur l’année civile de 535,52 euros alors que celle du tableau d’amortissement est de 542,96 euros,
Octobre 2014 : mensualité calculée sur l’année civile de 481,35 euros, alors que celle du tableau d’amortissement est de 488, 04 euros.
L’analyste ne calcule pas le taux effectif global selon lui réellement appliqué, ni la différence dans le coût total du crédit.
Ces éléments de calcul, très partiels et contestés, basés sur trois mensualités calculées au cours du début du prêt (deux premières années) qui est d’une durée d’amortissement de 142 mois n’établissent pas que l’erreur alléguée du calcul des intérêts périodiques, aurait généré au détriment des appelants un surcoût d’un montant supérieur à la décimale prévue à l’article R. 313-1 précité.
M. et Mme [S] échouent par conséquent à rapporter la preuve que le recours allégué à l’année lombarde ou bancaire de 360 jours entraîne un écart du taux effectif global égal ou supérieur à la décimale. Dès lors, aucune sanction n’est encourue à ce titre. Le fait de subordonner la sanction de la déchéance du droit aux intérêts applicable en cas de non respect du calcul des intérêts sur la base d’une année civile, à la démonstration d’une erreur de TEG supérieure à la décimale, aboutit à une sanction conforme aux textes applicables, efficace, proportionnée et dissuasive en prenant en compte le préjudice réellement subi par l’emprunteur. En ce qu’elle permet une sanction unifiée en cas de défaut ou d’erreur du taux effectif global, une telle solution respecte le droit à un procès équitable ainsi que la sécurité juridique.
M. et Mme [S] seront par conséquent déboutés de leur demande de déchéance du droit aux intérêts et de restitution d’intérêts afférentes.
Sur la demande de dommages et intérêts
M. et Mme [S] invoquent un manquement de la banque à son obligation contractuelle de loyauté engageant sa responsabilité en ce qu’elle a institué un calcul des intérêts périodiques basés sur la pratique prohibée du diviseur 360 jours alors qu’elle ne pouvait ignorer que les intérêts devaient être calculés sur l’année civile. Ils expliquent subir un préjudice moral du fait de la prise de conscience d’avoir été trompés notamment sur les modalités de calcul des intérêts.
Ils seront toutefois déboutés de leur demande en dommages et intérêts fondée sur un prétendu manquement de la société HSBC à leur égard.
Tout d’abord l’expertise mathématique et financière non contradictoire qu’ils produisent est insuffisante pour établir l’usage par la banque d’un calcul des intérêts conventionnels sur 360 jours. Ensuite le préjudice allégué n’est pas distinct de celui exclusivement réparable par la déchéance des intérêts conventionnels en cas d’inexactitude du TEG résultant d’un calcul erroné ou illicite.
Enfin ils n’établissent pas subir le moindre préjudice moral en lien avec l’erreur invoquée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Eu égard à la solution du litige il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné M. et Mme [S] aux dépens et au paiement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
M. et Mme [S], parties perdantes, seront également condamnés in solidum aux dépens d’appel, sur le fondement de l’article 696 du code de procédure civile.
Il convient de condamner in solidum M. et Mme [S] à payer à la société HSBC Continental Europe la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel et de les débouter de leur demande formulée à ce titre.
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme partiellement le jugement déféré rendu le 18 janvier 2022 par le tribunal de commerce de Pau,
Statuant à nouveau,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société HSBC Continental Europe ;
Confirme le jugement déféré pour le surplus ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum M. [F] [S] et Mme [Z] [G] épouse [S] aux dépens d’appel ;
Condamne in solidum M. [F] [S] et Mme [Z] [G] épouse [S] à payer à la société HSBC Continental Europe la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Déboute M. [F] [S] et Mme [Z] [G] épouse [S] de leur demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière, La Présidente,