Prescription et Exigibilité : Clarifications sur les Échéances et le Capital Restant Dû dans le Cadre d’un Crédit Immobilier

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Prescription et Exigibilité : Clarifications sur les Échéances et le Capital Restant Dû dans le Cadre d’un Crédit Immobilier

Le 23 février 2011, le Crédit du Nord a accordé à M. [X] [P] un prêt de 111 000 euros pour l’achat d’un bien immobilier, remboursable en 144 mensualités de 934,55 euros à un taux de 3,30%. M. [X] [P] a également souscrit un crédit renouvelable de 2 000 euros et un prêt à la consommation de 10 000 euros remboursable sur 60 mois. Le 30 décembre 2021, le Crédit du Nord, représenté par la Société Générale, a assigné M. [X] [P] devant le tribunal judiciaire de Perpignan pour obtenir le paiement de 64 317,45 euros, avec intérêts à partir du 11 octobre 2021. M. [X] [P] a contesté l’action en invoquant la prescription et l’absence d’acte de déchéance du terme. Le 2 novembre 2023, le juge a déclaré irrecevable la demande de la Société Générale et a condamné celle-ci à verser 1 000 euros à M. [X] [P]. M. [X] [P] a interjeté appel le 4 décembre 2023. L’affaire a été fixée à l’audience du 27 juin 2024. La Société Générale a demandé l’infirmation de l’ordonnance et la recevabilité de ses demandes, tandis que M. [X] [P] a demandé la confirmation de l’ordonnance et une condamnation de la Société Générale à verser 2 500 euros. La Cour a finalement infirmé la décision du juge de la mise en état, déclaré l’action de la Société Générale recevable, et débouté les parties de leurs demandes relatives aux frais d’avocat.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 octobre 2024
Cour d’appel de Montpellier
RG
23/05928
ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 10 OCTOBRE 2024

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 23/05928 – N° Portalis DBVK-V-B7H-QBIW

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 02 NOVEMBRE 2023 JUGE DE LA MISE EN ETAT DE PERPIGNAN N° RG 22/00114

APPELANTE :

La SOCIETE GENERALE, société anonyme au capital de 1.062.354.722,50 €, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 552 120 222, dont le siège social est [Adresse 3] à [Localité 5], venant aux droits et obligations du CREDIT DU NORD en suite de la fusion-absorption intervenue en date du 1er janvier 2023, dûment habilitée à cet effet- agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me BEAUREGARD substituant Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [X] [P]

né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 6] DE LA REUNION

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me AGIER substituant Me Olivier BOURGANCIER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-001867 du 24/04/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 20 Juin 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 JUIN 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre

Madame Nelly CARLIER, Conseiller

Mme Virginie HERMENT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Laurence SENDRA

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 23 février 2011, le Crédit du nord a consenti à M. [X] [P] un prêt d’un montant de 111 0000 euros, destiné à l’acquisition d’un bien immobilier, remboursable en 144 échéances d’un montant de 934, 55 euros, au taux de 3, 30%.

II a également souscrit un crédit utilisable par fractions, renouvelable, d’un montant maximum autorisé de 2 000 euros, ainsi qu’un prêt à la consommation d’un montant de 10 000 euros remboursable en 60 mois.

Par assignation du 30 décembre 2021, le Crédit du Nord, aux droits duquel vient le SOCIETE GENERALE, a saisi le tribunal judiciaire de Perpignan afin d’obtenir la condamnation de Monsieur [X] [P] au paiement de la somme de 64 317, 45 euros, assortie des intérêts au taux contractuel à compter du 11 octobre 2021.

Monsieur [X] [P] a saisi le juge de la mise en état afin qu’il constate l’irrecevabilité de l’action de la Société générale tenant la prescription et subsidiairement compte tenu de l’absence d’acte de déchéance du terme.

Par ordonnance rendue le 2 novembre 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béziers a :

– déclaré irrecevable la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE en ses demandes,

– débouté la Société générale de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la Société générale à payer à Monsieur [X] [P] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Le 4 décembre 2023, Monsieur [X] [P] a interjeté appel de cette ordonnance.

Par ordonnance rendue en date du 13 décembre 2023, l’affaire a été fixée à l’audience du 27 juin 2024 en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile.

Vu les conclusions notifiées le 11 mars 2024 par la partie appelante;

Vu les conclusions notifiées le 29 janvier 2024 par la partie intimée ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 20 juin 2024 ;

PRETENTIONS DES PARTIES

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE demande à la cour de :

– infirmer l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 novembre 2023,

Statuant à nouveau,

– déclarer recevables les demandes par elle formées à l’encontre de M. [X] [P], en ce qu’elle vient aux droits du Crédit du Nord,

– renvoyer les parties devant le juge de la mise en état ;

– condamner M. [X] [P] à lui verser la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [X] [P] demande à la cour de :

– confirmer l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 02.11.2023, en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action de la Société Générale, tenant l’absence d’acte de déchéance valablement prononcée concernant le prêt immobilier invoqué au soutien de l’assignation,

– condamner la Société générale venant aux droits de la société Crédit du Nord à verser à son conseil la somme de 2 500 euros en cause d’appel, sur le fondement des articles 700 2° code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la Cour entend se référer aux dernières écritures des parties ci dessus visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions qu’elles ont développés.

DISCUSSION

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription :

A l’égard d’une dette payable par termes successifs tel le crédit immobilier, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.( Civ. 1re, 11 février 2016, n° 14-29.539, 14-27.143, 14-22.938 et 14-28.383)

En l’espèce, la SOCIETE GENERALE a conclu devant le juge de la mise en état qu’elle ne réclamait pas les échéances des mois de novembre et décembre 2019, qui précèdent de plus de deux ans son assignation en paiement du 30 décembre 2021.

L’action en paiement des échéances échues à compter du mois de janvier 2020 n’est en conséquence pas prescrite.

En ce qui concerne le capital restant dû, les parties souscrivent à l’analyse du premier juge selon laquelle la déchéance du terme à prendre en compte n’était pas celle du 4 avril 2018, la SOCIETE GENERALE y ayant renoncé pour appliquer les ordonnances reportant l’exigibilité des échéances, mais celle du 3 novembre 2021.

Le délai de deux ans de l’article L.137-2 du code de la consommation n’était donc pas écoulé au jour de l’introduction de l’instance. Il convient de rejeter la fin de non recevoir tirée de la prescription concernant le capital restant dû.

Sur la déchéance du terme :

Monsieur [X] [P] demande la confirmation de la décision du juge de la mise en état qui a dit l’acte de déchéance inopposable pour n’avoir pas été valablement prononcée, et partant, a déclaré irrecevable l’action de l’établissement de crédit, faute d’acte de déchéance valable ayant précédé ladite action.

Selon les dispositions de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Le défaut d’exigibilité de la créance constitue une question de fond qui échappe à la compétence du juge de la mise en état et ne peut constituer une fin de non recevoir.

Dès lors, la demande en paiement de la SOCIETE GENERALE, qui sera soumise au juge du fond saisi notamment quant à la validité et l’opposabilité de la déchéance du terme, est recevable.

La décision sera en conséquence réformée et l’action de la SOCIETE GENERALE déclarée recevable.

Sur les dépens et l’article 700 du Code de procédure civile :

Monsieur [X] [P], qui succombe, sera condamné aux entiers dépens.

En raison de l’équité, il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme la décision en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription,

Déclare l’action de la SOCIETE GENERALE recevable,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [X] [P] aux dépens,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le greffier La présidente


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