→ Résumé de l’affaireL’affaire concerne un litige entre M. et Mme [L] et la SAS Fédrigo Entreprise Générale de Bâtiment, ainsi que les Assurances du Crédit Mutuel IARD (ACM), suite à un incendie survenu dans leur habitation. Après des travaux de réparation effectués par la SAS Fédrigo, un différend est né concernant le paiement des travaux. Le tribunal d’instance d’Orléans a rendu un jugement en mars 2018, qui a été partiellement infirmé par la cour d’appel d’Orléans en décembre 2018. Suite à un pourvoi en cassation, la Cour de cassation a annulé une partie de la décision de la cour d’appel et renvoyé l’affaire devant la cour d’appel d’Angers. La cour d’appel d’Angers a déclaré irrecevables certaines demandes des parties et a ordonné une expertise pour évaluer les désordres électriques dans l’immeuble. Cependant, en raison de la vente de l’immeuble par les appelants, l’expertise n’a pas pu être menée à bien. Les parties ont formulé de nouvelles demandes devant la cour d’appel d’Angers, avec M. et Mme [L] demandant des dommages et intérêts pour les défaillances électriques et la chute de leur fille, tandis que la SAS Fédrigo demande des dommages et intérêts pour résistance abusive. Les ACM demandent la confirmation de la décision précédente et des indemnités. L’affaire est en attente d’une audience de plaidoiries fixée pour mai 2024. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
LE/CG
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 21/00878 – N° Portalis DBVP-V-B7F-EZXP
arrêt du 14 Janvier 2021 Cour de Cassation de PARIS n° H19-12.042
arrêt du 12 Décembre 2018 Cour d’Appel D’ORLEANS RG N°18/1248
jugement du 1er mars 2018 Tribunal d’Instance D’ORLEANS RG N°15/2129
ARRET DU 20 AOUT 2024
APPELANTS :
Monsieur [X] [L]
né le 05 Mars 1969 à [Localité 7] (ex Yougoslavie)
[Adresse 1]
[Localité 6]
Madame [R] [Y] épouse [L]
née le 28 Septembre 1976 à [Localité 5] (ex Yougoslavie)
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentés par Me Thierry BOISNARD, substituant Me Christian NOTTE-FORZY, avocats au barreau d’ANGERS – N° du dossier 00084050
INTIMEES :
S.A.S. FEDRIGO ENTREPRISE GENERALE DE BATIMENT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 3]
Représentée par Me Julien TRUDELLE, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 210317 et par Me Delphine BOURILLON de la SELARL BOURILLON CONSEILS, avocat plaidant au barreau d’ORLEANS
S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL – IARD, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Philippe RANGE de la SELARL LEXCAP, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 21A01688 et par Me Clémence STOVEN BLANCHE de la SCP STOVEN PINCZON du SEL, avocat plaidant au barreau
d’ORLEANS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 27 Mai 2024 à 14H00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Madame GNAKALE
Greffier lors du prononcé : Monsieur DA CUNHA
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 20 août 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Leïla ELYAHYIOUI, vice-présidente placée, pour la présidente empêchée et par Tony DA CUNHA, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 18 septembre 2009, M. [X] [L] et Mme [R] [Y] épouse [L] ont souscrit un contrat de prêt auprès de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8] afin de financer l’acquisition d’un bien immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 6] (45). Ils ont également souscrit un contrat d’assurance auprès des Assurances du Crédit Mutuel IARD (ACM).
A la suite d’un incendie survenu dans leur habitation et l’ayant partiellement affectée, M. et Mme [L] ont signé le 11 juillet 2014 un premier devis auprès de la SAS Fédrigo Entreprise Générale de Bâtiment pour un montant total de 64.256,50 euros TTC, puis un second, le 11 décembre 2014, pour la somme de 9.900,88 euros TTC.
Le 25 février 2015, un procès-verbal de réception des travaux a été signé sans réserves, en présence de l’expert mandaté par les ACM IARD.
La SAS Fédrigo, ayant émis diverses factures dont elle n’a pas obtenu paiement intégral de la part des maîtres de l’ouvrage, a engagé une procédure d’injonction de payer et, selon ordonnance du 18 septembre 2015, signifiée à M. et Mme [L] le 27 octobre 2015, elle a obtenu leur condamnation à lui payer une somme de 7.549,10 euros TTC au titre du solde des travaux.
Par courrier reçu au greffe du tribunal d’instance d’Orléans le 27 novembre 2015, M. et Mme [L] ont formé opposition à cette ordonnance.
Par exploits des 30 septembre et 14 octobre 2016, les époux [L] ont fait assigner en intervention forcée la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8] puis les ACM IARD.
Par jugement du 1er mars 2018, le tribunal d’instance d’Orléans a notamment :
– débouté la SAS Fédrigo de sa demande en paiement du solde de la facture et de sa demande de dommages et intérêts,
– débouté Mme et M. [L] de leurs demandes à l’égard des ACM IARD et la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8],
– débouté Mme et M. [L] de leurs demandes reconventionnelles à l’égard de la SAS Fédrigo relatives à la conformité de l’installation électrique,
– ordonné à la SAS Fédrigo de remettre à Mme et M. [L] l’attestation Consuel, sous astreinte de 20 euros par jour pendant 60 jours, passé un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision,
– rejeté la demande reconventionnelle de Mme et M. [L] de dommages et intérêts toutes causes confondues,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision,
– fait masse des dépens,
– dit qu’ils seront supportés par moitié entre la SAS Fédrigo et M. et Mme [L],
– condamné chacune des parties à sa part des dépens.
Suivant déclaration déposée au greffe de la cour d’appel d’Orléans le 10 mai 2018, la SAS Fédrigo a interjeté appel de ce jugement.
Par déclaration du 14 mai de la même année, Mme et M. [L] ont également formé appel de cette décision, les deux instances ayant été jointes le 31 août 2018.
Suivant arrêt du 12 décembre 2018, la cour d’appel d’Orléans a notamment :
– déclaré Mme et M. [L] irrecevables en leurs demandes nouvelles,
– confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté la SAS Fédrigo de ses demandes et en ce qu’il l’a condamnée à remettre sous astreinte l’attestation Consuel,
Statuant à nouveau sur les points infirmés, a :
– condamné Mme et M. [L] à payer à la SAS Fédrigo la somme de 7.549,10 euros outre intérêts au taux légal à compter du 21 avril 2015, et a ordonné la capitalisation de ces intérêts,
– débouté Mme et M. [L] de leur demande tendant à se voir remettre le Consuel,
Y ajoutant, a :
– débouté la SAS Fédrigo de sa demande de dommages et intérêts,
– condamné Mme et M. [L] à payer, en application de l’article 700 du Code de procédure civile, à la SAS Fédrigo la somme de 2.000 euros et à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8] et aux ACM IARD prises ensemble la somme de 1.000 euros,
– condamné Mme et M. [L] aux dépens avec application de l’article 699 du Code de procédure civile.
Par arrêt du 14 janvier 2021, sur le pourvoi formé par Mme et M. [L] à l’encontre de ce dernier arrêt, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a :
– cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il déclare M. et Mme [L] irrecevables en leurs demandes nouvelles, l’arrêt rendu le 12 décembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel d’Orléans,
– mis hors de cause la Caisse régionale de Crédit Mutuel du Centre,
– rejeté la demande de mise hors de cause de la société ACM,
– remis, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel d’Angers,
– condamné la SAS Fédrigo aux dépens,
– en application de l’article 700 du Code de procédure civile, a condamné la SAS Fédrigo à payer à M. et Mme [L] la somme de 3.000 euros et a rejeté les autres demandes.
La Cour de cassation a considéré qu’en retenant, pour déclarer irrecevables les demandes de rétablissement d’une électricité conforme sous astreinte, d’expertise et d’indemnisation, que ces prétentions étaient nouvelles, alors que M. et Mme [L] avaient déjà saisi le tribunal des demandes d’expertise et d’indemnisation et que la demande de rétablissement d’une électricité conforme sous astreinte était un complément à la demande de remise sous astreinte de l’attestation ‘Consuel’, la cour d’appel, avait dénaturé les termes clairs et précis des conclusions et avait donc dénaturé l’écrit qui lui était soumis.
Par déclaration du 2 avril 2021, M. et Mme [L] ont saisi la cour d’appel d’Angers sur renvoi de la cour de cassation en suite de l’arrêt rendu le 14 janvier 2021, intimant la SAS Fédrigo et l’assureur.
Suivant arrêt mixte du 31 mai 2022, la cour d’appel de céans a :
– déclaré irrecevables les demandes suivantes formées par les assurés :
condamner l’entreprise (…) en tant que de besoin à transmettre l’attestation de conformité valable,
condamner l’assureur à les garantir de toute condamnation éventuelle sur le fondement de travaux de remise en état de leur immeuble d’habitation, au titre du contrat d’assurance souscrit et subsidiairement en vertu de son manquement à son devoir de conseil et d’information,
dans tous les cas, enjoindre à l’assureur de produire tous les justificatifs de règlement et chiffrages des postes de préjudice garantis au titre du contrat couvrant le sinistre incendie, en ce y compris les dépenses de loyer,
condamner l’assureur à les indemniser de leur entier préjudice résultant de la destruction de leur immeuble et à payer à ce titre toute somme qui serait due, par impossible, à l’entreprise, et notamment la somme de 7.549,10 euros en principal, outre intérêts,
constater que l’assureur ne démontre pas leur avoir payé l’intégralité des indemnisations mobilières chiffrées par l’expert à hauteur de 22.637,38 euros en valeur à neuf,
constater que l’assureur a manqué à son devoir d’information et de conseil,
condamner l’assureur à payer la somme de 38.554,27 euros TTC sauf à parfaire au titre des réparations mobilières avec intérêts légaux ;
– déclaré irrecevables les demandes en réparation pour résistance abusive et au titre des dépens relatifs à la procédure antérieure formées par l’entreprise,
Avant dire doit sur les plus amples demandes,
– commis M. [D] [Z] [G], expert inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Orléans, avec pour mission de :
entendre les parties et tout sachant,
se faire communiquer tous documents utiles,
visiter les lieux,
vérifier l’existence de désordres et autres problèmes électriques au sein des seules pièces ayant fait l’objet des travaux d’électricité de l’entreprise et les décrire,
dire si ces désordres sont imputables aux travaux d’électricité de l’entreprise et si ces derniers ont été réalisés conformément aux règles de l’art,
rechercher la date d’apparition de ces désordres, préciser s’ils étaient apparents, ou non, à la réception des travaux de l’entreprise et spécifier leurs conséquences exactes,
donner son avis sur leurs causes en fournissant tous les éléments permettant de déterminer les responsabilités encourues et les préjudices subis,
déterminer le coût des travaux nécessaires pour reprendre les éventuels désordres et non conformités,
donner son avis sur les préjudices subis par les propriétaires,
faire toutes observations
(…)
– rejeté la demande de provision,
– renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 22 mars 2023 par renvoi de l’article 905 à 778 du Code de procédure civile,
– réservé les plus amples demandes des parties ainsi que les dépens.
L’expert a accepté la mission le 19 juin 2022 et, après versement de la consignation et convocation des parties à une première réunion, a saisi le conseiller chargé du contrôle de l’expertise le 23 septembre 2022 d’une difficulté liée à la vente de l’immeuble l’été précédent et à l’opposition des acquéreurs à la visite des lieux programmée le 3 octobre 2022, qui a donc été annulée.
En effet suivant acte authentique du 8 juillet 2022, les appelants ont cédé le bien objet de la présente procédure. Dans ces conditions et aux termes d’une ordonnance du 21 juin 2023, le conseiller chargé du contrôle des expertises a constaté que la mesure ordonnée le 31 mai 2022 par la cour ne pouvait plus être utilement menée, même au bénéfice d’une limitation de la mission de l’expert à un examen des pièces produites, le professionnel désigné ayant par ailleurs été invité à faire retour de sa mission et à faire taxer ses frais et honoraires.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 22 mai 2024 et l’audience de plaidoiries fixée au 27 de ce même mois.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 20 mai 2024, M. et Mme [L] demandent à la présente juridiction de :
Vu les articles 1412 et suivants du Code de procédure civile,
Vu l’article 1135 du code civil et 1147 anciens du Code civil,
Vu l’article 1792 et suivant du Code civil,
– les recevoir en leur appel les y déclarer bien fondés et y faisant droit,
– infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau,
– constater que leur appel n’est pas dépourvu d’objet,
– condamner la SAS Fedrigo à leur payer la somme de 2.500 euros au titre du préjudice causé par les défaillances électriques,
– condamner les ACM et la SAS Fedrigo à leur payer la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts en leurs qualités de représentants légaux de leur fille mineure ayant fait une chute du fait de l’absence d’éclairage dans les escaliers,
– débouter la SAS Fedrigo de toute ses demandes à leur encontre outre de son appel incident comme irrecevable en tous cas mal fondé,
– débouter la SAS Fedrigo de sa demande tendant à leur condamnation à lui payer la somme de 4.000 euros à titre de dommage et intérêts, pour résistance abusive,
– débouter la SAS Fedrigo de sa demande du chef de l’article 700 Code de procédure civile, et des dépens,
– débouter les ACM de toutes leurs demandes outre de celles du chef de l’article 700 Code de procédure civile, et des dépens,
– rejeter toute demande contraire comme non recevable en tous cas non fondée,
– débouter les ACM de leur demande du chef de l’article 700 Code de procédure civile,
– condamner la SAS Fedrigo à leur payer de la somme de 4.500 euros au titre de l’article 700 Code de procédure civile,
– condamner la SAS Fedrigo aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 Code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 7 mai 2024, la SAS Fedrigo Entreprise Générale de Bâtiment demande à la présente juridiction de :
Vu les articles 1134, 1147 et 1315 du Code civil (anciens),
– la recevoir en ses conclusions ainsi qu’en ses demandes et les déclarer parfaitement fondées,
– infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :
– fait masse des dépens,
– dit qu’ils seront supportés par moitié entre elle et M. et Mme [L],
– condamné chacune des parties à sa part des dépens,
– la confirmer pour le surplus et tout état de cause,
– déclarer les époux [L] irrecevables, à tout le moins sans objet, et mal fondés en leur appel et leurs demandes et les en débouter,
– débouter M. [X] [L] et Mme [R] [Y] épouse [L] de leur opposition et de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
– condamner solidairement M. [X] [L] et Mme [R] [Y] épouse [L] à lui verser la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
– condamner in solidum M. [X] [L] et Mme [R] [Y] épouse [L], ou tout succombant, à lui verser la somme de 4.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner les mêmes avec la même solidarité aux entiers dépens en ce compris les dépens de la première instance, ceux de la procédure d’injonction de payer, ceux de la première procédure en appel, et ceux de la présente procédure, en accordant à Me Bourillon, le droit prévu à l’article 699 du Code de procédure civile,
– débouter toutes autres parties de toutes demandes qui pourraient être formulées comme étant non recevables et en tout cas non fondées.
Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 17 mai 2024, les ACM demandent à la présente juridiction de :
– confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté les époux [L] et la société Fedrigo de l’ensemble de leurs demandes formulées à leur encontre,
– condamner la (les) partie(s) succombant à leur payer une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 Code de procédure civile,
– condamner la (les) partie(s) succombant aux dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.
Sur le préjudice subi du fait de l’absence d’électricité :
Aux termes de leurs dernières écritures les appelants soutiennent que l’entreprise de bâtiment ‘ne s’est pas acquittée de ses obligations contractuelles’ et qu’il ‘est constant que depuis les travaux (d’électricité) effectués par la SAS (…) sous l’égide de l’expert mandaté par la compagnie d’assurances, l’électricité ne fonctionne pas [à leur] domicile (cf rapport d’expertise d’évaluation des travaux avec un poste spécifique à l’électricité à reprendre par la SAS)’. Cette non conformité ne pouvait être considérée, par le premier juge, comme couverte par le procès-verbal de réception, dès lors que cette formalité a été réalisée ‘sans que l’électricité ne soit branchée et dans un immeuble non occupé’. Ils précisent au soutien de leurs prétentions que ‘le fonctionnement électrique de l’immeuble constitue un ensemble indissociable’ de sorte que sa contradictrice ne peut tirer argument du fait que ses travaux n’aient porté que sur partie de l’immeuble. Ils demandent donc à la présente juridiction de constater que les travaux réalisés ne sont pas conformes et partant de condamner cette société à rétablir une électricité conforme. Ils en déduisent également que les demandes en paiement formées par la SAS ne sont pas fondées dès lors ‘qu’elle n’a pas effectué la totalité des travaux prescrits par l’expert en n’effectuant pas les travaux d’électricité pour lesquels elle a été mandatée’. Ils affirment que si les sommes sollicitées devaient être considérées comme correspondant à des travaux devisés et facturés, leur cocontractante n’a pas exécuté ses obligations. Ainsi elle a abusivement retenu l’attestation dite consuel, les privant de fait d’électricité dans partie de leur logement, ce qui a causé la chute de leur fille dans les escaliers. Au dernier état de leurs écritures, les appelants indiquent ‘qu’au vu de l’arrêt rendu le 31 mai 2022, [ils] renoncent à [la] demande’ en rétablissement de l’électricité conforme sous astreinte.
Cependant ils observent qu’ils ont nécessairement subi un préjudice de jouissance et que si l’expertise n’a pu être réalisée, alors même qu’ils avaient consigné les fonds sollicités, c’est en raison du refus opposé par leurs acquéreurs ‘de consentir à la réalisation des opérations’. Ils indiquent donc que la cession de leur bien ‘ne saurait avoir pour effet de rendre leurs demandes irrecevables et/ou de faire douter de leur intérêt à agir’. Ils soulignent communiquer le dossier diagnostics qu’ils ont fait dresser dans le cadre de la vente immobilière qui établit que l’installation électrique intérieure ‘comporte bien des anomalies avérées’ se ‘rapportant à l’existence de matériels électriques présentant des risques de contacts directs avec des éléments sous tension (protection mécanique des conducteurs) d’une part et se rapportant à des matériels électriques vétustes, inadaptés à l’usage, d’autre part’. Ainsi ils soutiennent que l’installation électrique a été dysfonctionnelle en diverses pièces de l’immeuble ‘cette défaillance [incombant] tant à la SAS, chargée des travaux que des ACM en ce qu’ils ont mandaté un expert pour s’assurer de la bonne exécution des travaux’ qui les a contraint a prendre possession des lieux. Dans ces conditions et au regard ‘de la chute de leur fille dans les escaliers en raison de l’absence d’électricité’, ils concluent à la condamnation de leurs contradicteurs au paiement d’une somme de 2.500 euros ‘au titre du préjudice que leur a causé l’absence d’électricité au quotidien’ outre 4.000 euros es qualités de représentants légaux de leur fille.
Aux termes de ses dernières écritures, la SAS indique qu’en suite de la décision de la Cour de cassation, il est désormais acquis que le procès-verbal de réception a été dressé sans réserve, qu’aucune défaillance n’a été évoquée avant l’introduction de l’instance en paiement pas plus qu’il n’était démontré l’existence d’une défaillance intervenue après le 25 février 2015 de nature à priver les appelants d’électricité pendant une longue période. Elle en déduit que l’absence de désordre doit être considérée comme un point définitivement tranché seule l’existence de non-conformité pourrait éventuellement faire l’objet de débats. La société intimée rappelle que son intervention s’est limitée au premier étage de l’immeuble le reste de l’installation électrique n’ayant pas été atteint par l’incendie et demeurant en l’état (datant des années 80).
Sur le fond des demandes indemnitaires, la société de construction observe que ses contradicteurs ne précisent aucunement le fondement de leurs prétentions et ne produisent aucun ‘élément objectif, du lieu et des circonstances de [la] chute’ invoquée. Elle considère donc que l’engagement de sa responsabilité n’est pas démontré pas plus que ne sont justifiés les montants réclamés. L’intimée observe que les appelants n’ont pas engagé de travaux d’électricité en suite de ceux objets de la présente procédure et ont même pu céder leur bien en réalisant une plus value et sans même mentionner à l’acte le présent sinistre et les travaux qui l’ont suivi. Elle conclut donc au rejet de ces demandes.
Aux termes de ses dernières écritures, l’assureur intimé rappelle avoir versé une somme totale de 73.705,06 euros, indemnisant ainsi la totalité des dommages au bâtiment vétusté déduite outre 17.919,63 euros au titre des dommages mobiliers. Elle observe que la cour d’appel d’Orléans a valablement ‘retenu que le litige concernant les travaux et leur paiement est installé exclusivement entre les époux [L] et la société Fédrigo, puisque les devis et les factures ont été établis entre ces deux seules parties et, qu’à ce titre il n’y a pas lieu à garantie par les ACM au profit des époux [L]’. L’assureur conclut donc à la confirmation ‘de la décision entreprise en ce qu’elle a débouté les époux [L] et la société Fédrigo de leurs demandes formulées à [leur] encontre’.
Sur ce :
En l’espèce au vu des pièces d’ores et déjà communiquées par les parties, la présente juridiction a considéré que :
– les expertises réalisées à l’initiative de l’assureur constataient des désordres ainsi que la nécessité d’entreprendre des travaux, et cela au cours du mois de mai 2014 en suite de l’incendie,
– les factures produites établissaient l’existence en mars 2015 d’une alimentation électrique de l’immeuble malgré le fait que la formulation d’un courrier de la SAS pourrait laisser entendre que la remise du courant ne pourrait être antérieure à la remise du consuel,
– qu’il n’était justifié d’aucune plainte de la part des maîtres de l’ouvrage quant à des dysfonctionnements de l’installation antérieurement à la demande en paiement outre que ceux-ci ne produisaient aucune attestation de tiers ayant pu constater de telles problématiques,
– les procès-verbaux de constat étaient insuffisants à démontrer que les éventuelles difficultés relevées étaient en lien avec les travaux de la SAS qui au surplus n’avaient porté que sur partie des premier et second étages de l’immeuble et cela alors même qu’un procès-verbal de réception avait été dressé le 25 février 2015 sans faire état de réserve (sans que les pressions de l’expert ne soient établies).
De l’ensemble il a été conclu qu »il apparaît que l’entreprise Fédrigo a été chargée de la réfection d’une partie de l’électricité de l’immeuble incendié, l’expert intervenu soulignant à ce titre que les propriétaires n’avaient pas antérieurement entrepris de travaux d’électricité. Or et contrairement aux affirmations de Mme et M. [L], leur contradicteur ne peut être tenu des désordres, non conformités ou autres dysfonctionnements affectant l’installation électrique d’origine sur laquelle il n’est pas intervenu.
Par ailleurs, les travaux litigieux ont été réceptionnés sans réserve le 25 février 2015, par les propriétaires assistés d’un technicien.
Il résulte de l’ensemble que les propriétaires de l’immeuble établissent qu’au jour du second procès-verbal de constat, des dysfonctionnements électriques existaient et pouvaient affecter des pièces concernées par les travaux d’électricité de l’entreprise de bâtiment. Cependant l’origine de ces difficultés n’est aucunement déterminée dès lors que l’entreprise générale de bâtiment n’est pas intervenue sur l’ensemble de l’installation, de sorte qu’il convient d’ordonner une mesure d’expertise portant exclusivement sur les travaux d’électricité réalisés par la société Fédrigo aux fins de déterminer si les problématiques évoquées et les éventuels dysfonctionnements mentionnés par les propriétaires d’une part existent et d’autre part sont en lien avec l’installation électrique nouvellement entreprise ou trouvent leur origine dans une cause externe à ces travaux. Dans l’attente l’ensemble des plus amples prétentions des parties doit donc être réservé et, faute d’élément établissant l’existence d’un lien entre les travaux réalisés et les désordres et préjudices invoqués, la demande en provision doit être rejetée’.
Au soutien de leurs prétentions, les appelants produisent désormais, copie de la facturation du branchement provisoire dont a bénéficié leur immeuble jusqu’au mois de janvier 2015.
Cependant, cette situation était d’ores et déjà établie antérieurement, puisque la SAS produisait justification de la persistance de ce branchement jusqu’au mois de mars de la même année.
Ils communiquent également les diagnostics techniques réalisés dans le cadre de la vente de leur immeuble. La partie ‘état de l’installation intérieure d’électricité’ précise que :
– l’installation de l’immeuble date de 1976,
– ‘l’installation intérieure d’électricité comporte une ou des anomalies’.
Celles-ci sont ainsi présentées :
– ‘matériels électriques présentant des risques de contacts directs avec des éléments sous tension – protection mécanique des conducteurs’ :
– ‘l’enveloppe d’au moins un matériel est manquante ou détériorée
– au moins un conducteur nu et/ou au moins une partie accessible est alimenté sous une tension supérieure à 25V a.c. ou supérieure ou égale 60V d.c. ou est alimenté par une source autre que TBTS
– l’installation électrique comporte au moins une connexion avec une partie active nue sous tension accessible,
– au moins un conducteur isolé n’est pas placé sur toute sa longueur dans un conduit, une goulotte ou une plinthe ou une huisserie, en matière isolante ou métallique, jusqu’à sa pénétration dans le matériel électrique qu’il alimente’,
– ‘matériels électriques vétustes, inadaptés à l’usage’ : ‘l’installation comporte au moins un matériel électrique vétuste. Remarques : Présence de matériel électrique vétuste (douilles, interrupteurs, socles de prise…) ; faire intervenir un électricien qualifié afin de remplacer les matériels électriques vétustes’.
Ce diagnostic précise enfin au titre des remarques complémentaires sur les ‘socles de prise de courant, dispositif à courant différentiel résiduel à haute sensibilité’ que :
– ‘une partie seulement de l’installation électrique est protégée par au moins un dispositif différentiel à haute sensibilité = 30mA,
– au moins un socle de prise de courant n’est pas de type à obturateur ; Faire intervenir un électricien qualifié afin de remplacer les socles de prises non équipés d’obturateur par des socles de prises à obturateur,
– l’ensemble des socles de prise de courant possède un puits de 15 mm’.
Enfin cet état précise que le ‘dispositif de protection différentiel à l’origine de l’installation – Prise de terre’ n’a pu être vérifié.
De l’ensemble, il résulte que l’installation électrique de l’immeuble ayant appartenu aux appelants présente des problématiques électriques pouvant le cas échéant constituer un danger pour les personnes et les biens.
Au demeurant cette situation a, à tout le moins, participé de l’incendie objet de la présente procédure.
Cependant, à l’image des éléments d’ores et déjà communiqués en 2022 qui ne permettaient pas d’établir l’existence d’un lien entre les travaux réalisés en suite du sinistre et les difficultés électriques invoquées, le diagnostic dernièrement produit ne permet pas même de déterminer les pièces dans lesquelles les difficultés retenues ont été constatées et cela alors même qu’il est établi que les travaux de la SAS n’ont porté que sur partie de l’immeuble litigieux.
Dans ces conditions, les appelants ne démontrent aucunement que les préjudices qu’ils invoquent soient en lien avec les travaux réalisés en suite de l’incendie.
La décision de première instance doit donc être confirmée en ce qu’elle a rejeté les prétentions indemnitaires formées à titre reconventionnel par les époux [L] ainsi que les demandes formées par ceux-ci à l’encontre de l’assureur de la SAS et il sera ajouté à cette décision le rejet des demandes d’indemnisation complémentaires formées par les appelants postérieurement au jugement.
Sur la demande en réparation pour résistance abusive :
Aux termes de ses dernières écritures, la SAS se borne à indiquer que ‘les époux [L], ou tout succombant, seront également condamnés au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de la procédure abusive’.
Cependant, elle se borne à solliciter l’allocation d’une somme de 4.000 euros sans même énoncer quelle serait la nature du dommage dont elle sollicite ainsi la réparation.
Cette demande doit donc être rejetée.
Sur les demandes accessoires :
Les appelants qui succombent doivent être condamnés aux dépens.
Cependant, s’agissant des demandes formées par la SAS au titre des frais antérieurs, il doit être souligné que la cour d’appel d’Orléans a confirmé la décision de première instance en ses dispositions relatives aux frais de la procédure. Par ailleurs, la cour de Cassation n’a aucunement censuré ces prévisions de la décision d’appel, de sorte que la présente juridiction n’est aucunement saisie des dispositions du jugement du tribunal d’instance ayant statué sur les dépens.
Enfin, l’équité commande de condamner les appelants au paiement à l’assureur de la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et de rejeter les plus amples demandes formées à ce titre.