ARRET N°277
CL/KP
N° RG 20/01540 – N° Portalis DBV5-V-B7E-GBL6
S.A.R.L. L’ILE AUX MARAIS
C/
SARL TRANSAC PMEexerçant sous l’enseigne PROJET COMMERCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 20 JUIN 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01540 – N° Portalis DBV5-V-B7E-GBL6
Décision déférée à la Cour : jugement du 05 juin 2020 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.
APPELANTE :
S.A.R.L. L’ILE AUX MARAIS
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 4]
[Localité 3]
Ayant pour avocat plaidant Me Vincent LAGRAVE de la SCP LAGRAVE – JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
INTIMEE :
SARL TRANSAC PMEexerçant sous l’enseigne PROJET COMMERCE, representée par son représentant légal domicilié ès qualité au siège social sis.
[Adresse 1]
[Localité 2]
Ayant pour avocat postulant Me Henri-Noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Gaëlle ROUX-NOEL de la SELARL SCHMITT ROUX-NOEL ANDURAND-GLAUDET, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 24 Avril 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Le 10 février 2017, Monsieur [R] [B], se portant fort et solidaire pour toute personne morale ou physique qui se substituerait, et agissant en qualité d’acquéreur éventuel, a donné à la société à responsabilité limitée Transac Pme un mandat non exclusif de recherche en vue de l’achat d’un fonds de commerce de brasserie/restaurant.
Le 17 février 2017, la société par action simplifiée Bpa-Bha Compagnie (la société Bpa-Bha) a confié à la société Transac Pme un mandat non exclusif n° 9620, concernant la vente d’un fonds de commerce de bar, brasserie, restaurant, traiteur et glacier dénommé ‘le Bistro De Béné’, exploité dans la commune d'[Localité 5], au prix net vendeur de 275 000 euros, correspondant à la valeur des immobilisations corporelles et incorporelles figurant au bilan de l’entreprise, hors stock ; les honoraires d’intermédiaire à la charge de l’acquéreur étant fixés à la somme de 27 000 euros hors taxes (ht).
La société Bpa-Bha Compagnie avait été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de La Rochelle en date du 31 janvier 2017, la Scp Delphine Raymond étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.
Par ailleurs, selon ordonnance en date du 28 juin 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de La Rochelle avait constaté la résiliation de plein droit du bail commercial à la date du 11 mars 2016, en suspendant toutefois les effets de la clause résolutoire et en condamnant la société Bpa-Bha à payer une indemnité provisionnelle de 19 463,55 euros dans un délai de 4 mois à compter de la signification de la décision.
Ce délai n’avait pas été respecté.
Selon acte en date du 24 février 2017, préparé et rédigé par la société Transac Pme, la société à responsabilité limitée L’Ile aux Marais, représentée par ces co-gérants Monsieur [R] [B] et Madame [D] [E] (les époux [B]), a formulé, sous diverses conditions suspensives, une offre d’achat du fonds de commerce ‘Le Bistrot de Béné’pour une somme de 250 000 euros net vendeur, hors frais et honoraires.
Le 24 février 2017, les époux [B] ont en outre signé une reconnaissance des honoraires et se sont engagés à payer à la société Transac Pme la somme de 12 500 euros ht soit 15 000 euros ttc à titre d’honoraires de négociation au jour de la levée de la dernière des conditions suspensives.
Le 2 mars 2017, Monsieur [J] [X] et Madame [S] [N], agissant en qualité de représentants légaux de la société Bpa-Bha, ont accepté l’offre d’achat.
Le 11 mars 2017, et en exécution de cet accord, un compromis de cession de fonds de commerce a été signé entre la société Bpa-Bha et la société L’Ile aux Marais, hors la présence du mandataire judiciaire, et sans autorisation préalable du juge-missaire, au prix de 250 000 euros se décomposant comme suit :
– 199 655 euros pour les éléments incorporels du fonds (enseigne, nom commercial, clientèle, achalandage et droit au bail) ;
– 50 345 euros pour le mobilier, les agencements et le matériel.
Les parties ont convenu de diverses conditions suspensives, qui devaient être réalisées à la date du 30 avril 2017 au plus tard, et notamment :
– l’obtention d’un prêt par l’acheteur ;
– l’autorisation de la cession par le tribunal de commerce de La Rochelle.
Le 17 avril 2017, les époux [B] ont déposé devant le tribunal de commerce de La Rochelle une offre de reprise du fonds de commerce de la société Bpa-Bha, rédigée par la société Transac Pme, ensuite complétée le 18 mai 2017 par le cabinet d’avocat Acteo.
Par jugement en date du 23 mai 2017, le tribunal de commerce de La Rochelle a :
– autorisé la cession des éléments corporels et incorporels du fonds de commerce au profit de la société l’Ile aux Marais, au prix de 250 000 euros, ventilé comme suit :
– 101 000 euros au titre des éléments incorporels ;
– 101 000 euros pour les éléments corporels ;
– 5000 euros pour le stock ;
– désigné la Scp Delphine Raymond en qualité de mandataire liquidateur;
– donné acte à Madame [N] (propriétaire des murs) de son accord sur l’indemnité transactionnelle de 60 000 euros en contrepartie de sa renonciation à se prévaloir de la résiliation du bail, somme qui serait versée par le liquidateur le jour de la cession, en sus des loyers et charges dues.
Par acte sous seing privé en date du 3 avril 2018, intervenu hors la présence de la société Transac Pme, la société Bpa-Bha et la société L’Ile aux Marais ont convenu de la vente du fonds de commerce.
Le 28 septembre 2018, le conseil de la société Transac Pme a adressé à la société l’Ile aux Marais une mise en demeure de payer la somme de 15 000 euros à titre d’indemnité compensatrice; celle-ci est toutefois demeurée infructueuse.
Le 27 février 2019, la société Transac a fait assigner la société l’île aux Marais devant le tribunal de commerce de La Rochelle en paiement de la somme de 15 000 euros ttc à titre de dommages-intérêts.
En dernier lieu, la société Transac a demandé :
– à être juge recevable et bien fondée en ses demandes ;
– de débouter la société l’Ile aux Marais de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
– de condamner la société l’Ile aux Marais à lui payer la somme de 15 000 euros au titre du paiement de la clause pénale liant les parties, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 28 septembre 2018, outre 3000 euros au titre des frais irrépétibles.
En dernier lieu, la société l’Ile aux Marais a demandé de :
– débouter la société Transac de l’ensemble de ses demandes ;
reconventionnellement,
– condamner la société Transac à lui payer les sommes de 4000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 4000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
Par jugement en date du 5 juin 2020, le tribunal de commerce de La Rochelle a :
– dit la société Transac recevable et partiellement bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
– débouté la société l’Ile aux Marais de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
– condamné la société l’Ile aux Marais à payer à la société Transac la somme de 15 000 euros au titre du paiement de la clause pénale liant les parties avec intérêt à compter de la mise en demeure du 28 septembre 2018.
Le 17 août 2020, la société l’Ile aux Marais a relevé appel de ce jugement en intimant la société Transac.
Par arrêt avant dire droit en date du 2 novembre 2021, la cour de céans a:
– ordonné la réouverture des débats et la révocation de l’ordonnance de clôture;
– invité les parties à conclure sur la recevabilité de l’action en paiement engagée par la société Transac à l’encontre de la société l’Ile aux Marais sur le fondement de la clause pénale stipulée au mandat non-exclusif de recherche n° 9609 du 10 février 2017, dès lors que celui-ci n’avait été signé que par Monsieur [R] [B], mandant ;
– ordonné le renvoi de l’affaire devant le conseiller de la mise en état, pour conclusions des parties sur ce moyen soulevé d’office en cours de délibéré.
Le 24 mars 2023, la société l’Ile aux Marais a demandé de réformer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée à payer à la somme de 15 000 euros avec intérêts à compter du 28 septembre 2018 et à une indemnité de 2000 euros au titre des frais irrépétibles, et statuant à nouveau, de :
A titre principal,
– déclarer irrecevable l’action en paiement de la société Transac à son encontre ;
A titre subsidiaire,
– débouter la société Transac de l’ensemble de ses demandes ;
Reconventionnellement,
– condamner la société Transac à lui payer la somme de 4000 euros de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 4000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
Le 22 mars 2023, la société Transac a demandé de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré en ce qu’il :
– l’a dite et jugée recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
– débouté la société L’Ile aux Marais de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
– l’a condamnée à payer à la société Transac la somme de 15 000 euros au titre du paiement de la clause pénale liant les parties avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 28 septembre 2018 ;
– l’a condamnée à verser à la société Transac la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Y ajoutant,
– condamner la société L’Ile aux Marais à lui payer la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions des parties déposées aux dates susdites pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
Le 27 mars 2023, a été ordonnée la clôture de l’instruction de l’affaire.
MOTIVATION:
Sur la recevabilité :
Selon l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Selon l’article 32 du même code, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.
Selon l’article 1204 du Code civil,
On peut se porter fort en promettant le fait d’un tiers.
Le promettant est libéré de toute obligation si le tiers accomplit le fait promis. Dans le cas contraire, il peut être condamné à des dommages et intérêts.
Lorsque le porte-fort aura pour objet la ratification d’un engagement, celui-ci est rétroactivement validé à la date à laquelle le porte-fort a été souscrit.
La personne pour qui l’on s’est porté fort est un tiers à l’acte conclu sans son consentement, et elle n’est obligée par un tel acte qu’autant qu’elle accepte de tenir l’engagement (Cass. com., 25 janvier 1994, n°91-21.582).
Selon l’article 1330 du code civil,
La novation ne se présume pas; la volonté de l’opérer doit résulter clairement de l’acte.
La volonté de nover doit être non équivoque et résulter clairement des faits et actes intervenus entre les parties.
Le mandat de recherche non exclusif n°9609 en date du 10 février 2017 a été passé entre Monsieur [R] [B], en sa qualité de mandant, et la société Transac, en sa qualité de mandataire, le premier confiant à la seconde un mandat non exclusif de rechercher pour son compte un fonds de commerce de brasserie restaurant à l’achat, pour une durée irrévocable de 3 mois, qui passé ce délai, se poursuivrait pour une durée de 12 mois sauf révocation par l’une ou l’autre des parties moyennant un préavis de 15 jours par lettre recommandée avec accusé de réception.
Il y est précisé que Monsieur [R] [B] se porte fort et solidaire, pour tous ascendants, descendants ou alliés ainsi que pour toutes personnes morales ou physiques qui se substitueraient ou auxquelles s’associeraient, même minoritairement, et agissant en qualité d’acquéreur éventuel, dûment habilité à signer ce mandat et prêt à en justifier.
Ce mandat prévoit que la rémunération du mandataire serait fixée en vertu d’un barème par tranche précisé à l’acte.
Ce contrat de mandat avait prévu une clause pénale ainsi rédigée :
De convention expresse et à titre de condition essentielle sans laquelle le mandataire n’aurait pas accepté la présente mission, le mandant s’interdit de traiter personnellement par l’intermédiaire d’un tiers (agence, avocat, mandataire judiciaire ou tout autre intermédiaire)
sur une affaire qui lui aurait été présentée par le mandataire pendant la durée du mandat, et pendant une durée d’un an après l’expiration ou la résiliation du mandat.
Le mandataire adressera au mandant à la fin du mandat la liste des dossiers qui lui auront été présentés par le mandataire pendant la durée du mandat. En cas de non-respect de ses obligations, le mandant s’engage expressément à verser au mandataire, en vertu des articles 1142 et 1152 du Code civil, et à titre de dommages-intérêts, une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue, en réparation du préjudice.
En observant que la société l’Ile aux Marais, représentée par ses cogérants les époux [B], qu’elle avait mis en contact avec la société Bpa-Bha, avait conclu avec cette dernière la vente de son fonds de commerce à hauteur de 250 000 euros, sans avoir été elle-même associée à cette vente et sans que sa propre rémunération lui fût versée, la société Transac a demandé la condamnation de la société l’Ile aux Marais à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de la clause pénale insérée au mandat de recherche non exclusif du 10 février 2017.
L’appelante précise bien ne pas solliciter le paiement des honoraires, ce que la loi du 2 janvier 1970 lui interdit, mais fonder sa demande exclusivement sur la clause pénale insérée au mandat de recherche.
Mais la société l’Ile aux Marais lui oppose l’irrecevabilité d’une telle prétention, faute d’intérêt à agir, en ce que seul Monsieur [B] se trouve engagé contractuellement par le mandat de recherche, et alors qu’il n’a à aucun moment souscrit un engagement pour autrui y compris une personne morale dans laquelle il serait intéressé.
Cependant, la société Transac réplique que la société l’Ile aux Marais doit être considérée comme ayant acquis l’objet du contrat initial, qui lui a été tacitement transféré par Monsieur [B], et encore avec son propre consentement: elle ajoute en effet que le mandat de recherche litigieux reste le support nécessaire de tous les échanges contractuels postérieurs.
Elle entend ainsi en voir déduire la recevabilité de sa prétention dirigée ainsi à l’encontre de la société l’Ile aux Marais.
L’appelante a produit l’offre d’achat sous conditions suspensive du fonds de commerce de la société Bpa-Bha, rédigée à sa propre en-tête (de la société Transac) émise le 24 février 2017 par la société l’Ile aux Marais, prise en la personne de monsieur [R] [B] et de Madame [D] [E] son épouse, en leur qualité de cogérants de la société l’Ile aux Marais, pour un prix de 250 000 euros, ainsi que le formulaire d’acceptation du vendeur en date du 2 mars 2017.
Il ressort de l’offre d’achat que l’acquéreur s’engage au paiement des honoraires de l’agence.
Mais le document intitulé ‘reconnaissance des honoraires en date du 24 février 2017″, portant certes sur l’acquisition du fonds de commerce de la société Bpa-Bha, n’est signé que par les seuls époux [B], sans qu’il y soit précisé qu’ils agissaient en qualité de cogérants de la société l’Ile aux Marais.
Par avenant au mandat de vente n°9620 du 17 février 2017, la société Bpa-Bha consent à un nouveau prix de 250 000 euros nets vendeur, avec rémunération du mandataire de 15 000 euros ttc.
Certes, le compromis de cession de fonds de commerce sous conditions suspensive, passé le 11 mars 2017 entre la société Bpa-Bha et la société l’Ile aux Marais (article 17 – Négociations) précise que :
– le cessionnaire (la société l’Ile aux Marais) reconnaît que la présente promesse était consentie grâce à l’intervention de la société Transac, et en conséquence, s’engage à verser à cette dernière, le jour de la signature de l’acte définitif de vente, le montant de la commission qui lui était due suivant mandat de vente n°9620 signé le 17 février 2017 mandat de recherche n°9609 signé le 10 février 2017 et reconnaissance d’honoraires du 24 février 2017, soit la somme de 12 500 euros hors taxes, soit 15 000 euros ttc ;
– en cas de défaillance de l’une ou l’autre des parties pour quelque cause que ce soit, malgré la réalisation des conditions suspensives, la somme de 12 500 euros ht resterait due à la société Transac du fait de l’accomplissement de sa mission, à la charge de la partie défaillante.
Des seules mentions de ce compromis, et nonobstant la mention du mandat de recherche, il peut seulement se déduire que la société l’Ile aux Marais ne s’engage qu’à verser la rémunération de l’agent immobilier, tel que résultant de son offre.
Mais l’acte sous seing privé du 3 avril 2018, de vente de fonds de commerce dans le cadre d’un plan de cession en liquidation judiciaire, passé entre la société Bpa-Bha, représentée par son mandataire liquidateur, et la société l’Ile aux Marais, ne vient pas faire état de l’intermédiation de la société Transac dans la transaction, ni de son droit à commission.
Et dès le 20 juillet 2018, la société Transac, dans son mail adressé à Madame [B], a pris acte que le conseil adverse avait indiqué à ses clients que la commission de l’agent immobilier n’était pas due, et a demandé à son interlocutrice de confirmer à son conseil sa propre intervention comme intermédiaire dans la transaction, aux fins de voir insérer sa clause de négociation à l’acte de vente, et de le convoquer à la signature de celle-ci, afin qu’il puisse produire sa facture conformément à la reconnaissance d’honoraires du 24 février 2017.
Aucun de ces éléments, portant essentiellement sur les suites de l’offre de vente faite par la société l’Ile aux Marais, ne permet de considérer que la société l’Ile aux Marais aurait pris la suite de Monsieur [B] en sa qualité de mandant partie au mandat de recherche litigieux.
La circonstance que le mandat de recherche initial soit à l’origine de tous les actes ultérieurs n’est pas de nature à infléchir cette analyse.
Bien au contraire, et spécifiquement s’agissant de cette offre d’achat du 24 février 2017, il sera observé l’équivoque tenant à ce que l’offre de vente est formée au nom de la société l’Ile aux Marais, tandis que la reconnaissance des honoraires n’est faite que par les époux [B] pris en leur nom personnel.
Or, ces actes, équivoques, ont été établis à l’entête et par l’entremise de la société Transac, qui, pour ce qui la concerne, ne peut venir se prévaloir d’aucune acceptation.
Et cet équivoque se poursuit par les actes ultérieurs, l’acte sous seing privé du 11 mars 2017 évoquant l’entremise de l’agence immobilière et son droit à rémunération, tandis que l’acte du 3 avril 2018 ayant le même objet se trouve taisant sur le sujet, alors que dès le mois de juillet 2017, l’agent immobilier avait déploré que ses interlocuteurs lui dénient désormais tout droit à commission.
Cette équivoque, touchant tant le principe que l’identité du débiteur du paiement de la commission de l’agent immobilier, s’étendra de plus fort au mandat de recherche.
Ainsi, il n’existe aucune démonstration de la volonté claire et non équivoque de la société l’Ile aux Marais de reprendre en qualité de mandant le mandat de recherche souscrit par le seul Monsieur [B] avec la société Transac.
Enfin, la société Transac a délivré le 2 février 2022 une assignation devant le tribunal judiciaire de la Rochelle à Monsieur [B], pour réclamer directement à celui-ci le paiement de la clause pénale insérée au mandat de recherche : il s’en déduira de plus fort l’absence d’acceptation, par la société Transac, de la novation alléguée de débiteur qu’elle soutient désormais.
Il en sera déduit que la société l’Ile aux Marais n’a pas repris les engagements de Monsieur [B], qui est le seul à pouvoir en répondre.
Il ressort de ces éléments que la demande en paiement au titre de la clause pénale insérée dans le mandat de recherche liant Monsieur [B] et la société Transac, dirigée par celle-ci contre la société l’Ile aux Marais est irrecevable: le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur l’abus de procédure :
Seule l’intention dolosive ou malicieuse, ou l’erreur grossière équivalente au dol, fait dégénérer en abus le droit d’ester en justice.
En l’espèce, l’erreur de la société Transac quant à l’existence de son droit, aussi importante soit-elle, ne caractérise pas suffisamment une telle erreur ou intention, et ce d’autant plus qu’elle a triomphé en première instance.
La société l’Ile aux Marais sera déboutée de sa demande indemnitaire pour procédure abusive, et le jugement sera confirmé de ce chef.
* * * * * *
Il y aura lieu de rappeler que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société l’Ile aux Marais aux dépens de première instance et à payer à la société l’Ile aux Marais la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, en la déboutant de sa demande au même titre.
La société Transac sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles des deux instances,
La société Transac sera condamnée aux entiers dépens des deux instances et à payer à la société l’Ile aux Marais la somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société à responsabilité limitée L’Ile aux Marais de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Confirme le jugement déféré de ce seul chef ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Déclare irrecevable la demande de la société à responsabilité limitée Transac Pme à l’encontre de la société à responsabilité limitée L’Ile aux Marais ;
Rappelle que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;
Déboute la demande de la société à responsabilité limitée Transac Pme de sa demande au titre des frais des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
Condamne la société à responsabilité limitée Transac Pme aux entiers dépens de première instance et d’appel et à payer à la société à responsabilité limitée L’Ile aux Marais la somme de 4000 euros des frais irrépétibles de première instance et d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,