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AFFAIRE : N° RG 22/00282
N° Portalis DBVC-V-B7G-G5PA
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT LO en date du 07 Novembre 2018 – RG n° 21500039
COUR D’APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2023
APPELANT :
Monsieur [O] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Guillaume LETERTRE, avocat au barreau de CHERBOURG
INTIMEES :
[9], venant aux droits de [11]
[Adresse 5]
[11]
[Adresse 3]
Représentées par Me Mickaël DARTOIS, avocat au barreau de CAEN, substitué par Me Marie-Odile de MILLEVILLE, avocat au barreau de ROUEN
Société [6]
[Adresse 14]
Représentée par Me Florence TOURBIN, avocat au barreau de CHERBOURG
S.A.S. [7] anciennement dénommée [13]
[Adresse 1]
Représentée par Me Jérémie PAJEOT, substitué par Me Simon MOSQUET-LEVENEUR, avocats au barreau de CAEN
Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Manche
[Adresse 12]
Représentée par M. [G], mandaté
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
DEBATS : A l’audience publique du 28 septembre 2023
GREFFIER : Mme GOULARD
ARRÊT prononcé publiquement le 09 novembre 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par M. [O] [S] d’un jugement rendu le 7 novembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Manche dans un litige l’opposant à la société [11], la société [6], la société [13], et la caisse primaire d’assurance maladie de la Manche.
FAITS ET PROCEDURE
M. [O] [S], salarié de la société [11] a été victime le 29 juin 2013 d’un accident alors qu’il effectuait une mission de surveillance sur le chantier de l’EPR de [Localité 10].
Le 1er juillet 2013, la société [11] a complété une déclaration d’accident du travail indiquant que le 29 juin 2013 à 5 heures 30, M. [S] avait subi un accident dans les circonstances suivantes ‘la jambe de la victime est passée au travers d’un espace entre deux protections de trémie’ lui occasionnant des lésions au niveau du genou droit.
Le certificat médical initial du 29 juin 2013 fait état d’une contusion du genou.
Par décision du 8 juillet 2013, la caisse primaire d’assurance maladie de la Manche (la caisse)
a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle.
L’état de santé de M. [S] a été déclaré consolidé le 19 octobre 2014 avec un taux d’incapacité permanente partielle de 5 %. Ce taux a ensuite été porté à 8 % suite à l’aggravation constatée par décision de la caisse du 10 janvier 2017.
Par requête du 21 janvier 2015, M. [S] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Manche afin de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur.
La société [6] et la société [13] ont été mises en cause aux fins d’intervention forcée.
Par jugement du 7 novembre 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Manche a :
– dit irrecevable l’exception d’incompétence de la juridiction saisie et s’est déclaré en conséquence compétent
– dit n’y avoir lieu de surseoir à statuer
– débouté M. [S] de ses demandes
– condamné M. [S] à payer à la société [11] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles
– dit n’y avoir lieu à statuer sur les appels en garantie formés contre les sociétés [13] et [6]
– rejeté les demandes de la société [11] en paiement d’une indemnité au titre des frais irrépétibles formées contre les sociétés [13] et [6]
– dit que la décision de reconnaissance de l’accident du travail de M. [S] du 8 juillet 2013 est opposable à la société [11]
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Suivant déclaration du 14 décembre 2018, M. [S] a formé appel de ce jugement.
Aux termes d’une ordonnance du 11 juin 2019, le magistrat chargé d’instruire l’affaire a ordonné à M. [S] de conclure pour le 30 octobre 2019 au plus tard.
Suivant ordonnance du 6 février 2020, le magistrat chargé d’instruire l’affaire a ordonné la radiation de l’affaire compte tenu de l’absence de conclusions déposées par M. [S].
M. [S] a sollicité la réinscription de l’affaire et déposé ses conclusions le 7 février 2022.
Aux termes de ses conclusions reçues au greffe le 26 septembre 2023 et soutenues oralement à l’audience, M. [S] demande à la cour de :
– infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel
– dire que l’accident du travail dont M. [S] a été victime le 29 juin 2013 relève de la faute inexcusable de la société [8]
en conséquence,
– ordonner avant-dire droit une mesure d’expertise judiciaire afin d’évaluer les préjudices de M. [S]
– condamner la société [8] à payer à M. [S] la somme de 5000 euros de provision à valoir sur son indemnisation définitive
– réserver la question des frais irrépétibles et dépens.
Par conclusions déposées le 27 septembre 2023 et soutenues oralement à l’audience, la société [9] venant aux droits de la société [11], demande à la cour de :
– recevoir l’intervention de la société [9]
– mettre hors de cause l'[11]
à titre principal,
– juger l’action en reconnaissance de la faute inexcusable éteinte par la péremption d’instance, aucune diligence n’ayant été accomplie du 14 décembre 2018 au 7 février 2022
à titre subsidiaire,
– confirmer la décision entreprise
– débouter M. [S] de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable
– débouter M. [S] de sa demande d’expertise
– confirmer la décision en ce qu’elle a condamné M. [S] à payer à la société [11] aux droits de la quelle vient la société [9], la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance
à titre infiniment subsidiaire,
– se déclarer compétente sur l’appel en garantie contre des sociétés tierces
– condamner in solidum les sociétés [13] et [6] à garantir la société [9] de toute condamnation
– infirmer la décision en ce qu’elle a condamné la société [11] à payer la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles, tant à la société [13] qu’à la société [6]
y ajoutant,
– condamner M. [S] à payer une indemnité de 3000 euros au titre des frais irrépétibles à la société [9]
– condamner la société [13] à payer une indemnité de 3000 euros au titre des frais irrépétibles à la société [9]
– condamner la société [6] à payer une indemnité de 3000 euros au titre des frais irrépétibles à la société [9]
– laisser la charge des dépens d’appel à M. [S].
Selon conclusions du 1er juin 2023 déposées et soutenues oralement à l’audience, la société [7] autrefois dénommée [13] demande à la cour de :
à titre principal,
– constater la péremption d’instance
– constater l’extinction de l’instance
à titre subsidiaire,
– infirmer le jugement en ce qu’il a dit irrecevable l’exception d’incompétence de la juridiction saisie et s’est déclaré compétent
statuant à nouveau,
– se déclarer matériellement incompétent pour statuer dans le cadre de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable, sur le bien fondé du recours en garantie formulé par la société [8] contre la société [7]
– après avoir constaté que la société [7] n’entend pas renoncer à son double degré de juridiction, renvoyer la société [8] à mieux se pourvoir devant le tribunal judiciaire de la Manche
en tout état de cause,
– débouter la société [8] de toutes ses demandes dirigées à l’encontre de la société [7]
– condamner M. [S] à verser à la société [7] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner M. [S] aux dépens.
Par conclusions reçues au greffe le 26 septembre 2023 et soutenues oralement à l’audience, la société [6] demande à la cour de :
si par extraordinaire la péremption d’instance ne devait pas être constatée , il est demandé à la cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence de la juridiction saisie
statuant à nouveau,
– se déclarer matériellement incompétent pour statuer sur le recours en garantie introduit à l’encontre de la société [6] au profit du tribunal judiciaire de Cherbourg
à titre subsidiaire,
– constater que la responsabilité de la société [6] dans l’accident survenu le 29 juin 2013 n’est nullement rapportée
en conséquence,
– débouter la société [11] de sa demande de garantie
– débouter la société [11] de ses demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société [11] à payer à la société [6] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner la société [11] à verser à la société [6] la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner M. [S] aux dépens.
Selon conclusions du 20 juin 2023 soutenues oralement à l’audience, la caisse demande à la cour de :
in limine litis,
– constater que la caisse s’en remet à la sagesse de la cour sur la question de la péremption d’instance
au fond,
à titre principal,
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions
à titre subsidiaire en cas d’infirmation du jugement,
– constater que la caisse s’en rapporte à la sagesse de la cour sur le principe de la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur
si la faute inexcusable est reconnue,
– dire que la majoration de capital sera avancée par la caisse
– débouter M. [S] de sa demande de provision
– donner acte à la caisse qu’elle s’en remet à la sagesse de la cour sur l’opportunité et la mission à donner à l’expert
– donner acte à la caisse qu’elle sera tenue de faire l’avance des frais d’expertise, mais qu’elle pourra en récupérer le montant auprès de l’employeur en cas de condamnation de celui-ci en faute inexcusable
– dire que la décision de la caisse de prise en charge de l’accident dont a été victime M. [S] est opposable à son employeur, la société [11]
– faire droit à l’action récursoire de la caisse
– dire que dans le cadre de son action récursoire, la caisse récupérera l’intégralité des sommes, dont elle est tenue de faire l’avance, auprès de l’employeur dont la faute inexcusable sera reconnue
– délivrer le présent arrêt revêtu de la formule exécutoire.
Pour l’exposé complet des prétentions et des moyens des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures.
MOTIFS DE LA DECISION
– Sur la péremption
En l’espèce, les sociétés intimées soutiennent que l’instance d’appel est périmée aux motifs que suivant ordonnance du 11 juin 2019, le magistrat chargé d’instruire l’affaire a mis à la charge de M. [S] d’avoir à conclure pour le 30 octobre 2019 et que ce n’est que le 7 février 2022 qu’il a déposé ses conclusions.
L’article 386 du code de procédure civile dispose que l’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.
C’est à tort que M. [S] indique que ces dispositions ne sont pas applicables à son appel au motif que la déclaration d’appel date du 14 décembre 2018.
En effet, l’article 17 III du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 prévoit que l’abrogation de l’article R 142-22 du code de la sécurité sociale qui prévoyait un régime de péremption dérogatoire aux dispositions de l’article 386, s’applique aux instances en cours.
En principe le point de départ du délai de péremption est fixé au jour de la saisine de la juridiction.
En appel, il est fixé au jour de la déclaration d’appel, en l’espèce, le 14 décembre 2018.
Dans les procédures orales, les parties n’ont pas d’autres diligences à accomplir que de demander la fixation de l’affaire.
Cependant, le fait d’imposer à une partie, de solliciter la fixation de l’affaire dans le but d’interrompre le délai de péremption constitue une charge procédurale excessive de nature à la priver de son droit d’accès au juge au sens de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
En conséquence, lorsque les actes de convocation incombent au greffe, le point de départ du délai est fixé au jour où ces diligences sont accomplies.
En effet, la péremption d’instance n’est pas acquise dès lors que la partie à laquelle on l’oppose ne disposait d’aucun moyen pour faire progresser la procédure.
En l’espèce, le magistrat chargé de l’instruction de l’affaire a rendu une ordonnance le 11 juin 2019 mettant à la charge de M. [S] de ‘déposer ses écritures d’appelant et pièces avec bordereau .. pour le 30 octobre 2019’.
Par ordonnance du 6 février 2020 notifiée par messagerie électronique à l’avocat de M. [S] le 7 février 2020, l’affaire a été radiée au motif que ce dernier n’avait toujours pas conclu à la date du 5 février 2020.
Il est constant que M. [S] a finalement déposé ses conclusions le 7 février 2022.
M. [S] affirme que l’ordonnance du 11 juin 2019 ne lui a jamais été notifiée par acte extra judiciaire ou lettre recommandée avec accusé de réception.
Les sociétés intimées ne fournissent aucune précision sur les conditions dans lesquelles l’ordonnance du 11 juin 2019 a été portée à la connaissance des parties.
Il n’est pourtant pas contesté que le non respect de cette ordonnance a servi de fondement à l’ordonnance de radiation du 6 février 2020, ce qui laisse penser que l’ordonnance du 11 juin 2019 a bien été portée à la connaissance des parties.
Il est de droit constant que le juge peut toujours inviter les parties à fournir des éléments de nature à l’éclairer conformément à l’article 10 du code de procédure civile.
En conséquence, il convient d’ordonner la réouverture des débats à l’audience du 7 décembre 2023 à 9 heures afin que les sociétés intimées fournissent les éléments relatifs aux conditions dans lesquelles l’ordonnance du 11 juin 2019 a été portée à la connaissance de M. [S] ou de son avocat.
Les dépens et frais irrépétibles seront réservés.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Ordonne la réouverture des débats à l’audience du jeudi 7 décembre 2023 à 9 heures, Cour d’appel de Caen, Place Gambetta, Salle Malesherbes – 3ème étage ;
Invite les sociétés intimées à fournir les éléments permettant de déterminer les conditions dans lesquelles l’ordonnance du 11 juin 2019 a été portée à la connaissance de M. [S] ou de son avocat ;
Réserve les dépens et frais irrépétibles ;
Dit que la notification de la présente décision vaut convocation à l’audience susvisée.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX