Your cart is currently empty!
09 MAI 2023
Arrêt n°
CHR/SB/NS
Dossier N° RG 21/01191 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FTMP
[B] [S]
/
S.A. ONET SERVICE
jugement au fond, origine conseil de prud’hommes – formation paritaire de clermont-ferrand, décision attaquée en date du 27 avril 2021, enregistrée sous le n° f20/00030
Arrêt rendu ce NEUF MAI DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Sophie NOIR, Conseiller
Mme Karine VALLEE, Conseiller
En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
M. [B] [S]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Vanessa BONNARD, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET :
S.A. ONET SERVICE (ANCIENNEMENT SOCIETE SAFEN), prise en son établissement de CLERMONT-FERRAND, [Adresse 6].
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Anaïs MASDUPUY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
Monsieur RUIN, Président et Mme NOIR, Conseiller après avoir entendu Mr RUIN Président en son rapport à l’audience publique du 13 mars 2023, tenue par ces deux magistrats, sans qu’ils ne s’y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré aprés avoir informé les parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [B] [S], né le 11 février 1958, a été embauché à compter du 12 juin 2014 par la SA SAFEN, en qualité d’agent de service, suivant contrat de travail à durée déterminée pour la période du 12 juin 2014 au 31 juillet 2014, à temps complet. Le motif mentionné du recours au contrat à durée déterminée est un accroissement temporaire d’activité due à la commande suivante : ‘TS MICHELIN campagne annuelle de lavage de la vitrerie du site de [Localité 5]’. Un second contrat de travail à durée déterminée a été signé par les parties, pour la période du 1er août 2014 au 31 décembre 2014, pour un emploi d’agent de service à temps complet. Le motif mentionné du recours au contrat à durée déterminée est un accroissement temporaire d’activité due à la commande suivante : ‘vitrerie Conseil Général’. La convention collective nationale applicable à la relation contractuelle est celle des entreprises de la propreté.
Le dernier contrat de travail à durée déterminée étant arrivé à son terme contractuel (31 décembre 2014), la société SAFEN a établi en janvier 2015 les documents de fin de contrat de travail concernant Monsieur [B] [S].
Le 27 juin 2016, Monsieur [S] a saisi le conseil des prud’hommes de CLERMONT-FERRAND aux fins notamment de voir juger qu’il a été victime de discrimination à l’embauche et condamner la société SAFEN à lui payer des dommages-intérêts.
L’audience devant le bureau de conciliation et d’orientation a d’abord été fixée au 6 octobre 2016 (convocation du défendeur employeur en date du 30 juin 2016).
Le 16 mai 2017, à l’issue d’une audience tenue le même jour par le bureau de jugement, à laquelle les parties étaient régulièrement représentées par leurs avocats, le conseil des prud’hommes de CLERMONT-FERRAND a rendu une décision de radiation.
Par conclusions déposées au greffe du conseil de prud’hommes le 23 mai 2017, Monsieur [S] a demandé la réinscription de l’affaire au rôle, ce qu’a fait la juridiction prud’homale.
Les parties ont été convoquées devant le bureau de jugement à l’audience du 6 février 2018. Vu l’accord des parties sur ce point à l’audience, le bureau de jugement a ordonné le retrait du rôle de l’affaire.
Par conclusions déposées au greffe du conseil de prud’hommes le 6 février 2020, Monsieur [S] a demandé la réinscription de l’affaire au rôle, ce qu’a fait la juridiction prud’homale.
La SA ONET LOGISTIQUE a conclu devant le conseil de prud’hommes comme anciennement ou venant aux droits de la société SAFEN.
Par jugement contradictoire rendu le 27 avril 2021 (audience du 26 janvier 2021), le conseil des prud’hommes de CLERMONT-FERRAND a :
– dit et jugé irrecevables les demandes de Monsieur [B] [S] sur le fondement des dispositions de l’article 386 du Code de procédure civile ;
– débouté les parties de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Le 29 mai 2021, Monsieur [B] [S] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à personne le 29 avril 2021.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 18 novembre 2021 par la société ONET LOGISTIQUE,
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 février 2023 par Monsieur [B] [S],
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 13 février 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Monsieur [B] [S] demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le conseil des prud’hommes le 27 avril 2021 en ce qu’il a déclaré ses demandes irrecevables ;
– dire et juger ses demandes recevables ;
– l’accueillir en sa demande ;
– constater la présence d’une discrimination à l’embauche faite à son encontre ;
– condamner la société ONET LOGISTIQUE à lui payer et porter les sommes suivantes :
– 4.500 euros en réparation du préjudice financier subi ;
– 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
– condamner la société ONET LOGISTIQUE à lui porter et payer la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Monsieur [B] [S] soutient qu’au regard des dispositions légales et jurisprudentielles, la péremption d’instance n’est pas acquise en l’espèce.
S’agissant de la discrimination à l’embauche dont il considère être victime, Monsieur [S] soutient qu’au regard de l’engagement oral de son responsable de transformer son contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, de son ancienneté importante et de sa connaissance du métier, la société SAFEN aurait dû lui attribuer le poste de laveur de vitres en contrat de travail à durée indéterminée.
Dans ses dernières écritures, la société ONET LOGISTIQUE demande à la cour de :
In limine litis et à titre principal,
– confirmer la décision du conseil des prud’hommes de Clermont-Ferrand du 27 avril 2021 en ce qu’il a jugé irrecevables les demandes de Monsieur [B] [S] sur le fondement des dispositions de l’article 386 du Code de procédure civile ;
En conséquence,
– constater la péremption d’instance ;
A titre subsidiaire,
– dire et juger que Monsieur [S] ne rapporte pas la preuve d’une discrimination ;
En conséquence,
– débouter Monsieur [S] de la totalité de ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire,
– dire et juger que Monsieur [S] ne justifie pas de son préjudice ;
– débouter Monsieur [S] de la totalité de ses demandes ;
En tout état de cause,
– condamner Monsieur [S] à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
S’agissant à titre principal de la péremption d’instance, l’intimée affirme, quand bien même les dispositions du décret du 20 mai 2016 n’étaient pas applicables à la date de la requête initiale, que dans sa décision de radiation en date du 16 mai 2017, le conseil des prud’hommes de CLERMONT-FERRAND avait expressément constater le défaut de diligences accomplies par Monsieur [S], en l’absence de transmission de ses pièces et notes, et mettait à sa charge l’accomplissement de telles diligences pour la réinscription de son affaire. Or, alors que l’affaire a fait l’objet d’une première réinscription en mai 2017 puis d’une seconde en février 2020, l’intimée indique n’avoir reçu aucune écriture ou pièces de la part de Monsieur [S] dans un délai de deux ans à compter du 16 mai 2017, et même avant février 2020,, de sorte que la péremption doit être constatée.
A titre subsidiaire, la société ONET LOGISTIQUE relève que Monsieur [S] ne fait état d’aucun motif particulier de discrimination et n’apporte aucune élément pour corroborer ses dires, l’appelant se basant uniquement sur une annonce Pôle Emploi créée par la société SAFEN.
A titre infiniment subsidiaire, s’agissant de la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [S], l’intimée considère qu’il n’apporte aucunement la preuve d’un quelconque préjudice de sorte qu’il devra en être débouté.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
À l’audience du 13 mars 2023 de la chambre sociale de la cour d’appel de Riom, les avocats des parties ont plaidé et, à cette occasion, l’avocat de l’intimée a indiqué oralement que la société venant désormais aux droits de la société SAFEN comme ancien employeur de Monsieur [B] [S] est la société ONET PROPRETE ET SERVICES et non la société ONET LOGISTIQUE. Bien que la procédure soit écrite, l’avocat de Monsieur [B] [S] a indiqué ne pas s’opposer à ce qu’il en soit donné acte à l’intimée dans le présent arrêt.
– Sur la péremption –
Pour juger que l’instance était périmée, le conseil de prud’hommes de CLERMONT-FERRAND a relevé que Monsieur [B] [S] avait deux ans à compter de la décision de radiation du 16 mai 2017 pour transmettre ses pièces et conclusions à la société ONET LOGISTIQUE et que Monsieur [B] [S] ne justifiait pas avoir accompli ces diligences à la date du 16 mai 2019.
Aux termes de l’article 381 du code de procédure civile : ‘La radiation sanctionne dans les conditions de la loi le défaut de diligence des parties. Elle emporte suppression de l’affaire du rang des affaires en cours. Elle est notifiée par lettre simple aux parties ainsi qu’à leurs représentants. Cette notification précise le défaut de diligence sanctionné.’.
Aux termes de l’article 383 du code de procédure civile : ‘La radiation et le retrait du rôle sont des mesures d’administration judiciaire. A moins que la péremption de l’instance ne soit acquise, l’affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci ou, en cas de retrait du rôle, à la demande de l’une des parties.’.
Aux termes de l’article 386 du code de procédure civile : ‘L’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.’.
Aux termes de l’article 387 du code de procédure civile : ‘La péremption peut être demandée par l’une quelconque des parties. Elle peut être opposée par voie d’exception à la partie qui accomplit un acte après l’expiration du délai de péremption.’.
Aux termes de l’ancien article 388 du code de procédure civile (avant l’application du décret 2017-892 du 6 mai 2017) : ‘La péremption doit, à peine d’irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit. Elle ne peut être relevée d’office par le juge.’.
Aux termes de l’article 389 du code de procédure civile : ‘La péremption n’éteint pas l’action ; elle emporte seulement extinction de l’instance sans qu’on puisse jamais opposer aucun des actes de la procédure périmée ou s’en prévaloir.’.
Aux termes de l’article 390 du code de procédure civile : ‘La péremption en cause d’appel ou d’opposition confère au jugement la force de la chose jugée, même s’il n’a pas été notifié.’.
Aux termes de l’article R. 1452-8 du code du travail (abrogé par le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 et donc applicable aux seules instances introduites devant le conseil de prud’hommes avant le 1er août 2016) : ‘En matière prud’homale, l’instance n’est périmée que lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.’
La Cour de cassation a dit qu’il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l’article R. 1452-8 du code du travail, aux termes desquelles en matière prud’homale, l’instance n’est périmée que lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction, demeurent applicables aux instances d’appel dès lors que le conseil de prud’hommes a été saisi avant le 1er août 2016.
Selon l’article R. 1452-8 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, en matière prud’homale, l’instance n’est périmée que lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
Si les parties ont sollicité un retrait du rôle en vertu de l’article 382 du code de procédure civile, le délai de péremption court à compter de la date où le retrait a été ordonné et non antérieurement.
Une décision de radiation, simple mesure d’administration judiciaire n’ayant pour conséquence que le retrait de l’affaire du rang des affaires en cours et laissant persister l’instance, laquelle peut être reprise ultérieurement, ne met expressément à la charge des parties aucune diligence. Une décision de radiation ne peut faire courir le délai de péremption que si elle met expressément des diligences à la charge des parties. Lorsque l’ordonnance de radiation ne subordonne pas le rétablissement de l’affaire au rôle à l’accomplissement de diligences, le délai de péremption ne court pas.
Le principe selon lequel seules les mentions du dispositif d’une décision judiciaire constituent des mesures exécutoires s’imposant aux parties, alors que les motifs ne peuvent revêtir cette autorité, est applicable aux décisions de radiation. Il s’ensuit que les diligences à accomplir, au sens de l’ancien article R. 1452-8 du code du travail, doivent figurer dans le dispositif de la décision de radiation. Si celle-ci se borne à ne faire état de diligences à accomplir pour permettre le rétablissement de l’affaire au rôle que dans ses motifs, alors que le dispositif se limite à ordonner la radiation sans prescrire expressément aucune diligence, la décision ne met pas de diligences expresses à la charge des parties et le délai de péremption ne peut courir.
En l’espèce, la décision de radiation du conseil de prud’hommes de CLERMONT-FERRAND en date du 16 mai 2017, signée par le président et le greffier, est ainsi libellée :
‘Le conseil de prud’hommes constate le défaut de diligence du demandeur à l’audience de ce jour ; son dossier n’étant pas en état d’être plaidé, alors qu’il s’était engagé à transmettre ses pièces et notes avant le 15 janvier 2017.
Ordonne en conséquence la radiation de l’affaire et son retrait du rang des affaires en cours.
Dit qu’en application des dispositions de l’article 383 du code de procédure civile, l’affaire ne sera rétablie que sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation, c’est-à-dire lorsqu’elle sera en état d’être jugée.’
Il échet de constater, à titre liminaire, que la décision de radiation ne présente pas un dispositif distinct des motifs.
En considérant même que la partie ‘Ordonne en conséquence la radiation de l’affaire et son retrait du rang des affaires en cours. Dit qu’en application des dispositions de l’article 383 du code de procédure civile, l’affaire ne sera rétablie que sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation, c’est-à-dire lorsqu’elle sera en état d’être jugée’ constituerait un dispositif, celui-ci ne met pas expressément des diligences précises à la charge des parties, en tout cas avec la seule mention ‘l’affaire ne sera rétablie que sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation’.
Même si, dans ses motifs, la décision indique que ‘le conseil de prud’hommes constate le défaut de diligence du demandeur à l’audience de ce jour ; son dossier n’étant pas en état d’être plaidé, alors qu’il s’était engagé à transmettre ses pièces et notes avant le 15 janvier 2017″, ces mentions ne permettent nullement de déterminer les diligences expressément mises à la charge des parties par la juridiction prud’homale.
En outre, dans le cadre du jugement déféré, le conseil de prud’hommes a mentionné que Monsieur [B] [S] n’avait pas transmis dans le délai de deux ans ses pièces et conclusions à la société ONET LOGISTIQUE. La diligence consistant à transmettre ses écritures et pièces au défendeur ne figure pas expressément dans les motifs comme dans le dispositif de la décision de radiation.
La cour constate que sur conclusions déposées au greffe du conseil de prud’hommes le 23 mai 2017 par Monsieur [S], le conseil de prud’hommes a accepté de réinscrire l’affaire au rôle, ce dont il résulte que la juridiction prud’homale n’exigeait pas alors une transmission préalable au défendeur des écritures et pièces du demandeur au titre des diligences expressément mises à la charge de Monsieur [S] par la décision de radiation du 16 mai 2017.
Enfin, les parties ont nécessairement sollicité conjointement la décision de retrait du rôle de l’affaire intervenue à l’audience du 6 février 2018.
En tout état de cause, vu les principes et observations susvisés, le délai de péremption n’a pas couru à compter du 16 mai 2017.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit l’instance périmée et les demandes de Monsieur [S] irrecevables.
Il y a donc lieu de statuer sur les demandes au fond des parties.
– Sur les demandes au fond –
En application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.
En l’espèce, Monsieur [B] [S] demande à la cour de ‘constater la présence d’une discrimination à l’embauche’ faite à son encontre et de condamner la société ONET LOGISTIQUE à lui payer et porter les sommes de 4.500 euros en réparation du préjudice financier subi et de 5.000 euros en réparation du préjudice moral subi.
Toujours en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, les conclusions d’appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
En l’espèce, Monsieur [B] [S] expose que la société SAFEN a, les 15 septembre 2014 et 16 décembre 2014, diffusé un appel à candidature pour un poste de laveur de vitres en contrat de travail à durée indéterminée, emploi finalement pourvu mais sans que ce contrat de travail à durée indéterminée ne lui soit proposé, alors qu’il donnait satisfaction à son employeur dans le cadre de l’exécution du contrat de travail à durée déterminée et disposait d’une grande compétence en la matière. Il ajoute que son responsable lui avait promis une poursuite de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2015.
La cour constate que pour fonder ses demandes de dommages-intérêts, Monsieur [B] [S] invoque les notions de discrimination à l’embauche et de rupture de promesse de contrat de travail.
– Sur la discrimination à l’embauche –
Aux termes des dispositions de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d’un mandat électif, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de sa qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte etc.
Aux termes des dispositions de l’article L. 1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
S’agissant de la charge de la preuve d’une discrimination en matière civile, celle-ci est partagée et répartie sur le salarié et l’employeur puisqu’il appartient au salarié qui s’estime victime d’une discrimination de soumettre au juge les éléments de fait, obtenus loyalement, laissant supposer l’existence d’une discrimination, directe ou indirecte, et il incombe ensuite à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le salarié qui veut obtenir des documents détenus par l’employeur pour établir qu’il est victime d’une discrimination doit en faire la demande au juge (par exemple en référé).
Le salarié qui s’estime victime d’une discrimination doit nécessairement invoquer un des motifs de discrimination illicite.
La discrimination est directe quand, pour l’un de ces motifs, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable. La discrimination est indirecte lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique, neutre en apparence, est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour certaines personnes par rapport à d’autres, sauf à être objectivement justifié par un but légitime et des moyens nécessaires et appropriés. Autrement dit, la discrimination n’est pas nécessairement volontaire et intentionnelle.
En l’espèce, Monsieur [B] [S], qui dénonce une discrimination à l’embauche sans autre précision, cite les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail mais également une différence de traitement, en rappelant lui-même que ‘le salarié qui s’estime victime de discrimination doit nécessairement invoquer un des motifs de discrimination illicites’, tout en s’abstenant de préciser dans ses écritures le moindre motif illicite mentionné dans l’article L. 1132-1 du code du travail.
En outre, Monsieur [B] [S] ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte le concernant.
Monsieur [B] [S] se dit compétent et expérimenté comme laveur de vitres mais ne produit qu’un simple CV établi par ses soins en ce sens.
Monsieur [B] [S] produit pour le surplus deux prétendues annonces d’offre de recrutement de la société SAFEN, en pratique seulement deux feuilles imprimées (‘impression bureau métier’ le 31 décembre 2014 à 10 heures / ‘utilisateur [M] [T]’) dont l’origine reste à déterminer, tout comme la nature de la diffusion de telles annonces (peut-être Pôle Emploi [Localité 4] OUEST).
La première feuille correspondrait à une offre de la société SAFEN avec un rappel du profil au 12 mars 2014, pour une présentation de candidature du 2 juin 2014, pour un emploi de laveur/laveur de carreaux à [Localité 4] en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet. Cette offre, intervenue avant l’embauche de Monsieur [B] [S] le 12 juin 2014 en contrat de travail à durée déterminée, ne mentionne ni n’est adressée particulièrement à Monsieur [B] [S].
La seconde feuille correspondrait à une offre d’un emploi de laveur de vitres à [Localité 4] en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet. Ce document ne mentionne ni la société SAFEN ni Monsieur [B] [S].
Monsieur [B] [S] ne justifie pas que la société SAFEN aurait effectivement recruté un salarié en contrat de travail à durée indéterminée sur un poste d’ouvrier laveur de vitres à l’époque considérée.
Monsieur [B] [S] n’a pas sollicité que la société SAFEN et/ou la société ONET communique le moindre document dans le cadre du présent litiges.
Monsieur [B] [S] ne conteste pas le recours aux contrats de travail à durée déterminée pour sa période d’emploi au sein de la société SAFEN du 12 juin au 31 décembre 2014.
Monsieur [B] [S] sera débouté de toutes ses demandes en matière de discrimination.
– Sur la promesse d’embauche –
Tout recrutement est généralement précédé d’un certain nombre d’échanges. Le recruteur définit un poste soumis à l’embauche, et généralement le lieu d’exécution du travail ainsi que la rémunération prévue. Les candidats répondent pour postuler à cet emploi. Des entretiens ont lieu, au cours desquels les interlocuteurs entrent de plus en plus dans les détails. Mais, à partir d’un certain moment, ce qui n’était que des pourparlers n’engageant pas les interlocuteurs change de nature pour devenir une offre de contrat de travail ou une promesse unilatérale de contrat de travail. Il faut donc se situer en cas de litige : stade des pourparlers ou offre de contrat de travail ou promesse unilatérale de contrat de travail.
S’agissant des pourparlers, l’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres et doivent satisfaire aux exigences de la bonne foi. L’employeur n’est tenu à aucune obligation lorsque les promesses et les projets envisagés sont restés au stade des hypothèses et la rupture de simples pourparlers ne peut, sauf abus, entraîner le versement de dommages-intérêts.
L’offre de contrat de travail est l’acte par lequel l’employeur propose un engagement précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation. L’offre d’embauche requiert donc la réunion de deux éléments. Elle doit, d’une part, contenir les éléments essentiels du contrat de travail que sont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction. D’autre part, l’offre d’embauche doit exprimer la volonté de l’employeur de s’engager selon les termes convenus en cas d’acceptation.
La promesse unilatérale de contrat de travail (ou promesse d’embauche) est l’acte par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. La promesse unilatérale de contrat de travail est un véritable contrat par lequel l’employeur, le promettant, accorde au bénéficiaire le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. Dans l’hypothèse d’une promesse unilatérale, le candidat reçoit un véritable contrat de travail par lequel l’employeur s’engage à le recruter et pour la formation duquel ne manque que le consentement du candidat.
En l’espèce, Monsieur [B] [S] affirme que ‘son responsable’ lui avait indiqué que son contrat de travail à durée déterminée serait transformé à l’issue en contrat de travail à durée indéterminée, sans produire le moindre élément objectif d’appréciation en ce sens.
La cour ne trouve nulle trace d’un indice quant à une offre de contrat de travail à durée indéterminée ou une promesse de contrat de travail à durée indéterminée, pas même trace de pourparlers sur un contrat à durée indéterminée, entre la société SAFEN et Monsieur [B] [S].
Monsieur [B] [S] sera débouté de toutes ses demandes de dommages-intérêts à l’encontre de la société ONET venant aux droits de la société SAFEN.
– Sur les dépens et frais irrépétibles –
Le jugement sera confirmé en ses dispositions sur les dépens et frais irrépétibles de première instance.
Monsieur [B] [S] sera condamné aux dépens d’appel. Il n’y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en l’espèce.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
– Donne acte à l’intimée que la société venant désormais aux droits de la société SAFEN, comme ancien employeur de Monsieur [B] [S], est la société ONET PROPRETE ET SERVICES et non la société ONET LOGISTIQUE ;
– Infirme le jugement en ce que le conseil de prud’hommes a dit l’instance périmée et les demandes de Monsieur [B] [S] irrecevables ;
– Statuant à nouveau, déboute Monsieur [B] [S] de toutes ses demandes ;
– Confirme le jugement en ses dispositions sur les dépens et frais irrépétibles ;
Y ajoutant,
– Condamne Monsieur [B] [S] aux dépens d’appel ;
– Déboute l’intimée de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier, Le Président,
S. BOUDRY C. RUIN