Péremption d’instance : 6 avril 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/02162

·

·

Péremption d’instance : 6 avril 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/02162
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

ORDONNANCE N° 13

du : 6 avril 2023

N° RG 22/02162

N° Portalis DBVQ-V-B7G-FIQR

M. [L] [B]

C/

M. [M] [R]

Formule exécutoire + CCC

le 6 avril 2023

COUR D’APPEL DE REIMS

CONTENTIEUX DES TAXES

Recours contre honoraires avocat

ORDONNANCE DU 6 AVRIL 2023

A l’audience publique de la cour d’appel de Reims, où était présent et siégeait Madame Christel Magnard, conseiller à la cour, magistrat spécialement désigné par ordonnance de Monsieur le premier président, assistée de Madame Balestre, greffier,

a été rendue l’ordonnance suivante :

Entre :

M. [L] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS

Demandeur

Et :

M. [M] [R]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Comparant en personne

Défendeur

Régulièrement convoqués pour l’audience du 2 mars 2023 par lettres recommandées en date du 29 décembre 2022, avec demande d’avis de réception,

A ladite audience, tenue publiquement, Madame Magnard, conseiller à la cour, magistrat délégué du premier président, assisté de Madame Balestre, greffier, a entendu les parties en leurs explications, puis l’affaire a été mise en délibéré au 6 avril 2023,

Et ce jour, 6 avril 2023, a été rendue l’ordonnance suivante, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signée par Madame Magnard, conseiller à la cour, déléguée du premier président, et par Madame Balestre, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par courrier en date du 23 mars2022, M. [B], avocat, a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats de Reims afin de fixer le montant des honoraires de résultat dus par M. [M] [R], qu’il a assisté dans le cadre d’une procédure l’opposant à son employeur, l’URSSAF de Vendée, en application d’une convention d’honoraires en date du 2 juin 2009. Il réclamait un solde pour la somme de 5 000 euros HT, soit 6 000 euros TTC.

Le bâtonnier a rendu une ordonnance de prorogation de l’instruction de l’affaire le 29 juillet 2022. Il n’a toutefois pas statué dans le délai de 4 mois prévu par l’article 175 du décret du 27 novembre1991.

Par courrier du 21 décembre 2022, M [B] a saisi directement le premier président aux fins de le recevoir en sa demande de paiement des honoraires à l’endroit de M. [R] pour la somme de 6 000 euros TTC, avec intérêts à compter du 19 février 2021, date de la réclamation portée à la connaissance de l’intéressé.

Aux termes de ses dernières écritures, auxquelles il est expressément référé à l’audience, il est sollicité la condamnation de M. [R] au paiement de la somme de 6 350,84 euros au titre de l’honoraire de résultat.

M. [R], se référant à ses observations écrites, sollicite la ‘résolution du pacte de confiance que constituait la convention d’honoraires’ et réclame, par appel incident, restitution des fonds déposés dans la comptabilité du conseil.

Sur ce, le conseiller délégué,

Il est essentiel de rappeler, en préliminaire, qu’il résulte des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, que la procédure en fixation des honoraires d’avocat n’a pas pour objet d’examiner les griefs qui peuvent être faits par le client quant à la qualité ou à la bonne ou mauvaise exécution des prestations de l’avocat.

Cette question est du ressort du tribunal judiciaire lequel peut, le cas échéant, être saisi d’une action en dommages-intérêts à cette fin en cas de préjudice.

Le conseiller délégué doit seulement fixer les honoraires en considération des diligences effectivement accomplies, et sur la base des stipulations contractuelles, en écartant celles revêtant un caractère manifestement inutile.

Ainsi, les divers griefs émis par M. [R] sur la déontologie du conseil ou de prétendues fautes n’ont pas lieu d’être ici examinés (défaut de bonne foi, insincérité des écritures comptables du conseil, défaut de célérité, échec de l’argumentation d’appel, promesses fallacieuse, etc) .

I- Sur le moyen tiré du non respect de la procédure

M. [R] fait valoir une violation du principe du contradictoire ou, à tout le moins, une ‘inégalité procédurale’, en ce sens qu’il n’a pu bénéficier du double degré de juridiction, et n’a jamais été convoqué par devant le bâtonnier, mais qu’il a été directement convoqué devant la cour d’appel.

Il doit être rappelé toutefois que, par application de l’article 175 du décret du 27 novembre 1991 ‘les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé. Le bâtonnier accuse réception de la réclamation et informe l’intéressé que, faute de décision dans le délai de quatre mois, il lui appartiendra de saisir le premier président de la cour d’appel dans le délai d’un mois.’

Il n’existe aucune obligation pour le bâtonnier -qui n’est pas tenu de convoquer les parties- d’avoir à statuer dans le délai de 4 mois, ni même dans le délai prolongé, et la loi prévoit expressément, dans cette hypothèse, un recours direct devant le premier président ou son délégué.

Certes, cette procédure ne permet pas aux parties de bénéficier du double degré de juridiction, mais elle est légalement prévue, et, en tout état de cause, le conseil n’a pas non plus bénéficié du double degré de juridiction puisque, en définitive, l’affaire est évoquée pour la première fois devant la présente juridiction.

En outre, il ne peut être opposé une violation du principe du contradictoire alors même qu’aucune décision n’a été rendue, susceptible d’être affectée par une telle violation.

S’agissant de la présente procédure devant le délégué du premier président, il apparaît que chacune des parties a produit des conclusions ou mémoire détaillé, et des pièces, qui ont pu être discutées. M. [R] indique à l’audience avoir reçu, la veille de l’audience, deux pièces nouvelles dont il sollicite qu’elle soient dites irrecevables. Il ne précise pas quelles sont ces pièces, de sorte que la présente juridiction ne peut s’assurer de leur caractère nouveau au regard des multiples documents d’ores et déjà produits.

Il s’ensuit que les moyens procéduraux invoqués sont rejetés.

II- Sur la demande principale au titre des honoraires

M. [R] évoque des questions de péremption d’instance ou de prescription, sans étayer plus avant cette argumentation sur le plan juridique, mais son propos est, en substance, de s’étonner que le conseil ait attendu l’année 2021 pour réclamer un honoraire de résultat, alors qu’une précédente décision avait été rendue statuant déjà sur les honoraires dûs à M. [B] le 5 septembre 2019, qui n’avait alors rien sollicité au titre de l’honoraire de résultat.

Il pointe le fait que, dans cette décision antérieure, il était relevé que ‘le litige prud’homal s’est achevé par un arrêt rendu le 20 décembre 2017 entre les parties par la cour d’appel de Poitiers’ et que ‘la rémunération ne saurait, par ailleurs, dépendre du résultat (sauf pour la détermination de l’honoraire de résultat qui n’est pas ici en cause et qui n’a d’ailleurs pas été demandé par M. [B] bien que prévu dans la convention d’honoraire’ (cf. motifs de l’ordonnance).

Il est toutefois acquis aux débats que ce précédent contentieux n’a concerné que les honoraires de diligences.

La convention d’honoraire produite en pièce n°2, en date du 2 juin 2009, prévoit en sa page 3 :

‘b) honoraire de résultat :

L’honoraire de résultat hors taxe sera calculé dans les conditions suivantes :

– sur la base de 10% du montant de sommes qui ont été ou seront recouvrées par le client de 0 à 300 000 euros’,

– sur la base de 15 % du montant des sommes qui ont été ou seront recouvrées par le client au delà d’une somme de 300 000 euros’.

Il est constant qu’un honoraire de résultat ne peut être sollicité que lorsque la décision qui accorde les sommes auxquelles il s’applique est devenue irrévocable.

Or, en l’espèce, l’arrêt rendu par la cour de Poitiers en date du 20 décembre 2017 a fait l’objet d’un pourvoi en cassation, l’affaire ayant été renvoyée, après cassation, devant la cour de Bordeaux.

Il s’ensuit que l’honoraire de résultat ne pouvait être réclamé par le conseil avant qu’il soit définitivement statué sur les indemnités allouées.

Si M. [R] fait valoir la longueur indéniable de la procédure, il ne s’en évince pour autant aucune prescription ou péremption s’agissant de la réclamation de l’honoraire de résultat.

M. [B] a d’ailleurs écrit à son client le 9 mars 2020 qu’il ‘reste en suspens le montant de l’honoraire de résultat qui dépend de la décision qu sera rendue par la cour de cassation et éventuellement par la cour de renvoi, M. le premier président de la cour ne pouvant pas statuer sur un point dont il n’est pas saisi et ce, d’autant que cet honoraire ne peut être exigé qu’à partir du moment où une décision définitive est intervenue’.

L’honoraire de résultat se calcule au regard de l’indemnité allouée en définitive au client et peu importe à cet égard que la cour de renvoi ne se soit penchée que sur une partie du litige initial. Seule la somme à laquelle M. [R] a pu prétendre à l’issue de l’entière procédure permet de calculer l’honoraire de résultat en application de la convention d’honoraires, étant souligné que le taux de 10 % apparaît conforme aux usages en la matière.

Dans ces conditions, le montant de l’honoraire de résultat réclamé n’étant pas autrement contesté en son montant, il y a lieu de faire droit à la demande de M. [B] à hauteur de la somme TTC de 6 000 euros, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2021, date de réception du courrier recommandé du 19 février 2021 produit en pièce n°9.

III- Sur la demande en restitution de fonds

Il résulte des pièces produites que la somme de 10 000 euros dont M. [R] réclame restitution correspond à une provision versée par lui dès l’origine de la saisine du conseil, provision qui a déjà été déduite des honoraires fixés par la décision rendue le 5 septembre 2019 par le délégué du premier président.

La demande est rejetée

PAR CES MOTIFS,

– Rejette l’ensemble des moyens et prétentions de M. [M] [R],

– Fixe le solde des honoraires dus à M. [L] [B], au titre de l’honoraire de résultat, à la somme de 6 000 euros TTC,

– Condamne M. [M] [R] à payer à M. [L] [B] la somme de 6 000 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 2021,

– Rappelle que la présente procédure est sans dépens.

Le greffier Le conseiller délégué

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x