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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT SUR DEFERE
DU 31 MARS 2023
N°2023/129
Rôle N° RG 22/17402 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKRUZ
S.A.S. EVERE
C/
[R] [L]
Copie exécutoire délivrée
le :
31 MARS 2023
à :
Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
Me Paul-Victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance n°: M101/2022 rendue par la chambre 4-2 de la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE en date du 16 Décembre 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 19/12819.
APPELANTE
S.A.S. EVERE, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Madame [R] [L], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Paul-Victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Février 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
Madame Emmanuelle CASINI, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023.
Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SAS EVERE a interjeté appel, par déclaration d’appel du 3 août 2019, à l’encontre du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Martigues le 4 juillet 2019 qui a dit que Madame [L] avait été victime de harcèlement et que le licenciement de Madame [L] était sans cause réelle et sérieuse, a condamné la SAS EVERE à payer à Madame [L] les sommes de 22.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement sans cause réelle et sérieuse, 4.488 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 448,80 € à titre d’incidence congés payés sur préavis et 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a rappelé l’exécution provisoire de droit, a rejeté l’exécution provisoire facultative en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile, a débouté Madame [L] de toutes ses autres demandes, a débouté la SAS EVERE de sa demande reconventionnelle et a condamné la SAS EVERE aux entiers dépens.
La SAS EVERE a notifié par RPVA ses conclusions d’appelante les 31 octobre 2019 et 19 mars 2020.
Madame [L] a notifié par RPVA ses conclusions d’intimée les 19 décembre 2019 et 11 mai 2020.
Madame [L] a saisi le conseiller de la mise en état par conclusions d’incident du 28 juillet 2022, aux fins de voir constater la péremption d’instance au motif qu’un délai de deux ans s’était écoulé depuis le 11 mai 2020, date de notification de ses conclusions d’intimée, sans qu’aucune diligence n’ait été accomplie par les parties.
L’affaire a été débattue à l’audience d’incident du 7 novembre 2022.
Par ordonnance d’incident du 16 décembre 2022, le magistrat de la mise en état de la chambre 4-2 a constaté la péremption de l’instance d’appel et, par voie de conséquence, son extinction et a condamné la SAS EVERE aux dépens.
Sur déféré formé par la SAS EVERE à l’encontre de l’ordonnance d’incident, l’affaire a été fixée à l’audience collégiale de la chambre 4-1 du 13 février 2023, à 9 heures.
La SAS EVERE demande à la cour de :
Réformer l’ordonnance rendue le 16 décembre 2022 par le conseiller de la mise en état de la chambre 4.2 de la cour de céans en ce qu’elle a constaté la péremption de l’instance d’appel et et condamné la SAS EVERE aux dépens.
Statuant à nouveau :
Dire et juger que la péremption d’instance n’est pas acquise.
Débouter Madame [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Fixer et renvoyer l’affaire devant la cour aux fins de statuer sur le fond du litige.
La SAS EVERE conclut que le conseiller de la mise en état n’a pas pris en considération l’argumentation qui lui était soumise à savoir l’incapacité structurelle dans laquelle se trouve l’autorité judiciaire d’assurer la fixation et le jugement des affaires dans un délai raisonnable et l’existence de longues périodes de stagnation, sans explication, qui sont pourtant indéniablement contraires au droit fondamental reconnu par l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il apparaît que les parties ont parfaitement honoré les obligations mises à leur charge par les dispositions du code de procédure civile et ont ainsi véritablement conduit l’instance. Il revenait au magistrat chargé de la mise en état d’examiner l’affaire aux fins de fixer une date pour les plaidoiries, les parties étant, à ce stade, dessaisies de toute maîtrise de la procédure. Le dépôt de nouvelles conclusions dans le seul but de faire obstacle à la péremption n’aurait pas été de nature à faire progresser l’affaire, pas plus qu’une demande de fixation. Le strict respect, par les parties, des dispositions de l’article 908 du code de procédure civile est révélateur de leur volonté de voir aboutir le jugement du litige les opposant et l’accomplissement de démarches inutiles serait superfétatoire et infructueux.
En l’espèce, l’affaire était en l’état d’être jugée depuis le 11 mai 2020, date des dernières conclusions notifiées par l’intimée. Or, le conseiller de la mise en état n’a pas fixé l’affaire plus de deux ans plus tard, et ce contrairement aux exigences de l’article 912 du code de procédure civile qui lui imposent d’examiner l’affaire dans les quinze jours suivant l’expiration des délais dont disposent les parties pour conclure.
Il serait véritablement excessif de soumettre l’appelante à un formalisme immodéré dans le seul but de faire obstacle à la péremption, notamment en lui imposant d’accomplir des diligences que la loi elle-même ne met pas expressément à sa charge et prononcer la péremption de l’instance, alors que toutes les parties ont accompli toutes leurs diligences, lui porterait incontestablement préjudice puisqu’elle se voit privée de son droit d’exercer un recours à l’encontre d’un jugement qui lui est défavorable.
Madame [L] demande à la cour, aux termes de ses conclusions en défense sur déféré notifiées par voie électronique le 1er février 2023, au visa de l’article 386 du code de procédure civile, de :
Confirmer l’ordonnance du 16 décembre 2022.
Constater la péremption de la présente instance.
Condamner la SAS EVERE à verser à Madame [L] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamner la SAS EVERE aux dépens.
Madame [L] conclut que le dernier acte de procédure effectué par la SAS EVERE est en date du 19 mars 2020 et, quant à elle, elle a notifié ses conclusions le 11 mai 2020. Par la suite, aucun acte n’a été accompli par les parties de sorte que la péremption est acquise depuis le 11 mai 2022.
Les conseils des parties ayant été entendus en leurs observations à l’audience collégiale du 13 février 2023 à 9 heures, l’affaire a été mise en délibéré à la date du 31 mars 2022.
SUR CE :
L’article 386 du code de procédure civile dispose que « l’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligence pendant deux ans ».
Il n’est pas discuté, en l’espèce, que la SAS EVERE n’a accompli aucune diligence dans les deux ans qui ont suivi les conclusions de la partie intimée du 11 mai 2020. Il en est de même pour Madame [L].
L’appelante soutient à tort que les parties sont ‘dessaisies’ de la maîtrise de la procédure à l’expiration des délais pour conclure alors que, lorsque le conseiller de la mise en état, au terme des échanges de conclusions, n’a, en application de l’article 912 du code de procédure civile, ni fixé les dates de clôture de l’instruction et des plaidoiries, ni établi un calendrier des échanges, les parties qui, en application de l’article 2 du même code, conduisent l’instance, doivent accomplir des diligences pour faire avancer l’affaire ou obtenir une fixation de la date des débats. Ces diligences ne peuvent être qualifiées d’ ‘inutiles’, de ‘superfétatoires’ ou d”excessives’ et au contraire, la demande de la partie appelante adressée au conseiller de la mise en état ou au président de la formation de jugement en vue de la fixation de l’affaire pour être plaidée, manifestant ainsi son intérêt à l’avancement du dossier, interrompt le délai de péremption de l’instance.
Cette exigence n’est pas remise en cause par l’encombrement éventuel du rôle qui n’a pas en soi pour effet de paralyser toute diligence des parties pour obtenir l’avancement de la procédure.
A défaut, le constat de la péremption de l’instance, qui tire les conséquences de l’absence de diligences des parties pendant deux années en vue de voir aboutir le jugement de l’affaire et qui poursuit un but légitime de bonne administration de la justice et de sécurité juridique afin que cette instance s’achève dans un délai raisonnable, ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à un procès équitable dans un délai raisonnable, principe posé par l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme.
En conséquence, il convient de confirmer l’ordonnance déférée qui a prononcé la péremption de l’instance d’appel, laquelle était acquise le 11 mai 2022.
Enfin, l’équité n’impose pas qu’il soit fait application, au cas d’espèce, des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud’homale,
Confirme l’ordonnance d’incident du 16 décembre 2022,
Y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de déféré,
Condamne la SAS EVERE aux dépens du déféré.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Ghislaine POIRINE faisant fonction