Péremption d’instance : 30 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/07148

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Péremption d’instance : 30 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/07148
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2023

N° 2023/291

Rôle N° RG 22/07148 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJNJZ

Fondation [4] E.H.P.A.D,

C/

[U] [D] veuve épouse [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me GADD

Me TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution de NICE en date du 09 Mai 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 22/01424.

APPELANTE

[4] E.H.P.A.D, Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Louis GADD, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Marie BOUIRAT, avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE

INTIMEE

Madame [U] [D] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 7] (Iran), demeurant [Adresse 6]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005631 du 15/07/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 16 Février 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Agnès DENJOY, Président de Chambre, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Agnès DENJOY, Président

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

Monsieur Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023,

Signé par Madame Agnès DENJOY, Président et Madame Ingrid LAVALLEE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

[H] [B], aujourd’hui décédé et son épouse Mme [U] [D] avaient pris à bail auprès de la [4] EHPAD un appartement situé à [Adresse 6], le 22 octobre 1999.

Par ordonnance de référé du 24 février 2014, la résiliation du bail a été constatée à la date du 30 septembre 2013 par application de la clause résolutoire contractuelle.

Sur appel des époux [B], cette cour, par arrêt du 25 mars 2015, a :

– condamné les époux [B] à payer à la [4] EHPAD à titre provisionnel la somme de 3 209,37 € ;

– dit que les époux [B] pourront s’acquitter de leur dette en sus du loyer courant y compris les charges dans le délai de trois mois suivant la signification de l’arrêt ;

– constaté le jeu de la clause résolutoire contenue dans le bail mais en a suspendu les effets durant les délais ainsi octroyés ;

– dit qu’en cas de règlement de la dette dans le délai fixé, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais joué ;

– dit qu’à défaut de règlement de la totalité de la somme due à l’issue du délai octroyé, la résiliation du bail sera acquise de plein droit, l’expulsion de M. et Mme [B] et celle de tous occupants de leur chef pourra être poursuivie au besoin avec le concours de la force publique et les époux [B] seront redevables à titre provisionnel d’une indemnité mensuelle d’occupation de 816,62 € jusqu’à leur départ effectif des lieux ;

– donné acte aux époux [B] de ce qu’ils engagent à compter de mars 2015 à régler eux-mêmes l’intégralité de leurs loyers y compris la part mensuelle correspondant à l’allocation de logement et ce jusqu’à la reprise par la caisse d’allocations familiales des versements directs au bailleur à concurrence de 329 € par mois ;

– condamné M. et Mme [B] a versé à la [4] EHPAD la somme de 1 000 € pour ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

– rejeté toute demande contraire ou plus ample des parties ;

– condamné M. et Mme [B] aux dépens de première instance et d’appel.

Par la suite, les époux [B] ont fait assigner le bailleur devant le tribunal d’instance de Nice le 17 novembre 2015, aux fins de voir juger sous le bénéfice de l’exécution provisoire que la clause résolutoire suspendue par la cour d’appel était réputée n’avoir jamais joué, que le bail conservait son plein et entier effet et aux fins de voir dire injustifiée la mise à leur charge d’un solde débiteur de 2 179,68 euros ; dire qu’ils sont à jour de leurs loyers et charges ; que leur compte est créditeur de 138,64 €, et condamner le bailleur à leur verser des dommages-intérêts ainsi qu’une indemnité de procédure.

Par jugement non assorti de l’exécution provisoire du 24 janvier 2017 faisant suite à cette assignation, le tribunal d’instance de Nice a :

– constaté la résiliation judiciaire du bail par application de la clause résolutoire à la date du 3 septembre 2015 ;

– débouté les époux [B] de l’ensemble de leurs demandes et ordonné leur expulsion avec le concours de la force publique et d’un serrurier, passé un délai de deux mois suivant la délivrance du commandement d’avoir à libérer les lieux ;

– condamné les époux [B] à payer au bailleur le montant de la taxe d’ordures ménagères des années 2013 et 2014 soit 474,98 € ;

– fixé l’indemnité mensuelle d’occupation à un montant égal à celui du loyer qui aurait été du si le bail s’était poursuivi ;

– condamné M. et Mme [B] au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation de 817,11 euros à compter du 3 septembre 2015 jusqu’à libération des lieux et remise des clés.

M. [B] est décédé le [Date décès 2] 2017.

L’appel relevé par Mme [D] du jugement du tribunal d’instance de Nice a donné lieu à un arrêt de radiation du 5 novembre 2019.

Puis l’affaire a été remise au rôle sous un n° RG 22-6146 le 27 avril 2022 à la suite de l’intervention à l’instance d'[C] [B], fils et ayant droit d'[H] [B].

Toutefois la [4] a déposé des conclusions d’incident aux fins de voir constater la péremption de l’instance en absence de diligence pendant une durée de deux ans.

Par ordonnance du président de la chambre chargé de la mise en état, la péremption de l’instance a été constatée.

Cette ordonnance a été confirmée sur déféré par arrêt du 1er décembre 2022.

Dans l’intervalle, Mme [D] avait saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nice par acte d’huissier signifié le 28 mars 2022 aux fins d’arrêter la procédure d’expulsion à son égard, prononcer la nullité de tout acte relatif à une opération d’expulsion et condamner la [4] à lui verser des dommages-intérêts.

Par jugement contradictoire du 9 mai 2022, le juge de l’exécution a dit que la [4] ne disposait pas d’un titre exécutoire et a prononcé l’arrêt des opérations d’expulsion de Mme veuve [B] sur le fondement de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 mars 2015, rejeté le surplus des demandes et condamné la [4] aux dépens. Cette décision a été notifiée notamment à la [4] le 13 mai 2022 et cette dernière en a relevé appel le 17 mai 2022.

PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant conclusions notifiées le 26 décembre 2022, la [4] demande à la cour d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nice le 9 mai 2022, statuant à nouveau, de :

– constater qu’elle justifie de deux titres exécutoires représentés par l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 mars 2015 ainsi que par le jugement du 24 janvier 2017 lequel est devenu définitif à la suite de la péremption de l’instance d’appel n° RG 17-3731 radiée puis réenrôlée sous le numéro RG 22-6146,

– en conséquence, prononcer l’expulsion de Mme [D] du logement situé [Adresse 6];

– la condamner à une amende civile pour procédure abusive ;

– la condamner à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts ;

– la débouter de l’ensemble de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

La Fondation estime qu’à la date du 3 septembre 2015, c’est-à-dire trois mois après la signification de l’ordonnance de référé, le loyer courant n’était pas acquitté et elle demande donc de dire que la clause résolutoire a joué.

Elle ajoute que du fait de la péremption de l’instance d’appel du jugement du tribunal d’instance de Nice du 24 janvier 2017, ce jugement est devenu définitif et exécutoire et qu’elle dispose désormais de deux titres permettant d’exécuter la décision d’expulsion objet du litige.

Elle précise que le compte locatif est débiteur au 8 avril 2022 à hauteur de 44 822,75 € et qu’aucun règlement n’est intervenu depuis le 20 avril 2018.

Elle rappelle qu’elle est une institution d’intérêt général et a le statut de fondation d’intérêt public et que la privation de ressources par la faute de Mme [D] lui porte préjudice. Elle demande 10 000 € de dommages-intérêts ainsi qu’une amende civile outre 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [U] [D] demande à la cour, suivant dernières conclusions notifiées le 8 janvier 2023, de confirmer le jugement déféré et de condamner la Fondation à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux dépens.

Mme [D] invoque le fait que la dette locative était intégralement réglée à la date du 3 septembre 2015 et que la procédure d’expulsion ne pouvait pas se poursuivre puisque le jugement au fond rendu par le tribunal d’instance le 24 janvier 2017 n’était pas assorti de l’exécution provisoire et que les époux en avaient relevé appel.

Elle considère, en ce qui concerne cette dernière procédure, que la péremption d’instance n’était pas automatique et qu’il convenait qu’une décision de justice la prononce.

Elle ajoute que la péremption d’instance ne pouvait relever de la compétence du juge de l’exécution mais de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état ainsi qu’il résulte des articles 907 et 789 du code de procédure civile.

Mme [D] reconnaît que par ordonnance du 3 août 2022, le conseiller de la mise en état a constaté “la péremption de l’appel” et a prononcé le dessaisissement de la cour et que cette ordonnance a été confirmée par la cour sur déféré, mais estime que cette décision a omis de prendre en compte le fait que M. [B] était décédé, ce qui entraînait l’interruption de l’instance.

Mme [D] précise qu’elle a présenté une demande d’aide juridictionnelle afin de former un pourvoi en cassation contre l’arrêt du 1er décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le caractère exécutoire de l’arrêt de cette cour du 26 mars 2015 sur appel de l’ordonnance de référé du 24 février 2014 :

L’arrêt du 26 mars 2015 a fixé la dette locative arrêtée au 3 février 2015 à 3 209,37 €.

L’arrêt a accordé aux époux [B] un délai de trois mois à compter de sa signification pour s’acquitter de leur dette locative outre le loyer courant et les charges.

L’arrêt a été signifié le 2 juin 2015.

Les époux [B] disposaient d’un délai de trois mois jusqu’au 3 septembre 2015 pour solder leur dette locative de 3 209,37 € outre le loyer courant et les charges ou provisions sur charges.

Même si l’agence immobilière gérant cette location pour le compte du bailleur ne s’est aucunement conformée aux prescriptions de l’arrêt, en ce qu’elle a comptabilisé au débit du compte locatif des locataires les indemnités de procédure et dépens qui n’avaient pas à y figurer, les locataires n’étaient néanmoins pas à jour des loyers en cours, charges comprises, outre l’arriéré, à la date du 3 septembre 2015, ce selon le décompte suivant :

débit : 7 mois de loyers et charges : (816,62 x 7) + ordures ménagères (238,46) + arriéré de

3 209,37 = débit de 9 164,17 euros au 3 septembre 2015

crédit : (2 951,70) + (329,00 x 7) + (486,02 x 5) + 487,62 + 257,67 = crédit de 8 430,09 euros au 3 septembre 2015.

La Fondation disposait ainsi d’un titre exécutoire lorsqu’elle a entamé la procédure d’expulsion en début d’année 2022.

Le jugement dont appel sera donc infirmé.

Il n’y a pas lieu de “donner acte” à l’appelante de ce qu’elle dispose de deux titres exécutoires.

Sur la demande de dommages-intérêts :

L’attitude dilatoire de la locataire est fautive mais l’appelante ne démontre aucunement le quantum du préjudice financier qu’elle invoque.

La demande de dommages-intérêts présentés par la bailleresse doit être rejetée.

Sur l’amende civile :

L’usage des voies de droit par la locataire ne dégénère pas en abus dans le cas d’espèce et le prononcé d’une amende civile n’est pas justifié.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que la [4] EHPAD disposait d’un titre exécutoire constitué par l’arrêt de cette cour du 26 mars 2015 lorsqu’elle a engagé la procédure d’expulsion de Mme [D] du logement locatif situé [Adresse 6] à [Localité 5] ;

Déboute Mme [U] [D] de l’intégralité de ses prétentions ;

Condamne Mme [U] [D] à payer à la [4] la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

La condamne aux dépens de première instance et d’appel ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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