Péremption d’instance : 27 avril 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00778

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Péremption d’instance : 27 avril 2023 Cour d’appel de Dijon RG n° 21/00778
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MB/LL

[P] [C] épouse [Y]

C/

SCP DOCTEUR VETERINAIRE [U]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 27 AVRIL 2023

N° RG 21/00778 – N° Portalis DBVF-V-B7F-FW7O

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 30 avril 2021,

rendue par le tribunal judiciaire de Dijon – RG : 11-17/190

APPELANTE :

Madame [P] [C] épouse [Y]

née le 16 Décembre 1945 à SAINT ANTOINE DU ROCHER (37)

domiciliée :

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Sophie APPAIX, membre de la SCP ARGON- POLETTE-NOURANI-APPAIX AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 4

INTIMÉE :

SCP DOCTEUR VETERINAIRE [U], prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés de droit au siège :

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Mohamed EL MAHI, membre de la SCP CHAUMONT – CHATTELEYN-ALLAM-EL MAHI, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 1

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 février 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, Président,

Michèle BRUGERE, Conseiller, ayant fait le rapport sur désignation du Président,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 27 Avril 2023,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Viviane CAULLIREAU-FOREL, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans le cadre de son activité d’éleveur de bovins, Mme [Y] a confié le suivi de ses animaux au docteur vétérinaire [J], puis à la SCP Docteurs Vétérinaires [J] – [U] devenue la SCP Docteur Vétérinaire [U] (SCP DVV).

La SCP DVV expose avoir réalisé entre le 31 juillet 2013 et le 4 juin 2015, de nombreuses interventions pour soigner les animaux de Mme [Y], restées impayées à hauteur de 5 640,40 euros.

Après avoir adressé à Mme [Y] le 26 septembre 2015 une mise en demeure de payer, restée vaine malgré l’engagement pris par cette dernière de solder sa dette par courrier du 29 décembre 2015, la SCP DVV l’a fait citer par acte d’huissier du 9 mars 2016 devant le juge des référés du tribunal d’instance de Dijon en paiement des sommes suivantes :

– 5 640,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2015,

– 840 euros au titre de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement

– 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 27 février 2017, le juge des référés retenant les contestations de Mme [Y] a renvoyé l’affaire au fond.

Par jugement avant dire droit du 11 septembre 2017, le tribunal d’instance de Dijon a ordonné une expertise judiciaire confiée, après plusieurs remplacement d’experts, à Mme [M] [D], expert comptable, laquelle a déposé son rapport le 25 août 2020.

S’appuyant sur les conclusions de cet expert, la SCP DVV a maintenu ses demandes principales en y ajoutant une demande de 2 000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et en portant le montant de la somme sollicitée au titre de l’article 700 du code de procédure civile à 2 500 euros.

La SCP DVV a sollicité en outre la condamnation de Mme [Y] au paiement des dépens en ce compris les frais d’expertise.

Mme [Y] a conclu à titre principal à l’irrecevabilité des demandes présentées par la SCP DVV pour cause de péremption d’instance.

A titre subsidiaire, elle a sollicité la condamnation de la SCP DVV à lui verser la somme de 2 349,76 euros perçue indûment ainsi que 1 000 euros en réparation de son préjudice moral.

A titre infiniment subsidiaire, elle a conclu au rejet des demandes présentées au titre de l’indemnité forfaitaire et des dommages intérêts, et demandé que les frais d’expertise soient partagés par moitié.

En tout état de cause, elle a sollicité la condamnation de la SCP DVV au paiement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par jugement du 30 avril 2021, le tribunal judiciaire de Dijon a :

– rejeté la demande de constat de péremption d’instance,

– déclaré recevables les demandes présentées par la SCP DVV,

– rejeté les demandes présentées par Mme [Y] au titre de la restitution de l’indû et des dommages-intérêts,

– condamné Mme [Y] à payer à la SCP DVV les sommes suivantes :

. 5 640,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2015,

. 840 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement,

. 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

. 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [Y] aux dépens comprenant les honoraires de l’expert judiciaire,

– rappelé que la décision était exécutoire de droit par provision.

Par déclaration du 9 juin 2021, Mme [Y] a relevé appel de cette décision

Par ses conclusions transmises par voie électronique le 8 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des moyens au soutien des prétentions, Mme [Y] demande à la cour :

– de la recevoir en son appel et de l’y déclarer bien fondée,

– de réformer en toutes ses dispositions ledit jugement,

‘ in limine litis à titre principal,

– de réformer en toutes ses dispositions ledit jugement

statuant à nouveau,

– de constater la péremption d’instance et en conséquence de dire que l’instance est éteinte,

– de débouter la SCP DVV de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions qui sont irrecevables, et de la condamner à lui payer 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant les frais d’expertise.

‘ à titre subsidiaire, au visa des articles 1353 et 1342-10 alinéa 2 du code civil,

– de débouter la SCP DVV de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions,

– de dire qu’elle a perçu indûment une somme de 2 349,76 euros,

– de la condamner à lui payer cette somme avec intérêts de retard au taux légal, outre 1 000 euros en réparation de son préjudice moral en raison du caractère abusif de la procédure engagée, 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens comprenant les frais d’expertise.

‘ à titre infiniment subsidiaire, de débouter la SCP DVV, de sa demande en paiement d’une indemnité de recouvrement, ainsi que de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

‘ en tout état de cause, de condamner la SCP DVV à lui payer 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant les frais d’expertise,

‘ à titre très très subsidiaire, sur les frais d’expertise, de les mettre pour moitié à la charge de la SCP DVV

Par ses conclusions transmises par voie électronique le 8 décembre 2021, la SCP DVV demande à la cour, au visa des articles 1103,1104,1193,1231-1, 1342-10 et 1353 du code civil, de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ;

. rejeté la demande de constat de péremption d’instance,

. déclaré recevables ses demandes,

. rejeté les demandes présentées par Mme [Y] au titre de la restitution de l’indû et des dommages-intérêts,

. condamné Mme [Y] à lui payer la somme de 5 640,40 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2015, outre 840 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement, 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

. condamné Mme [Y] aux dépens comprenant les honoraires de l’expert judiciaire,

– réformer ledit jugement en ce qu’il a limité à 500 euros la condamnation de Mme [Y] au paiement de dommages-intérêts,

Statuant à nouveau,

– fixer à 2 000 euros la somme due par Mme [Y] à titre de dommages-intérêts et en conséquence, la condamner à lui payer cette somme.

– en toutes hypothèses, condamner Mme [Y] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel, outre les dépens de première instance et d’appel, comprenant les honoraires de l’expert.

Par une ordonnance du 15 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état saisi sur incident par la SCP DVV, a ordonné l’exécution provisoire du jugement dont appel, condamné Mme [Y] aux dépens de l’incident, et débouté cette dernière de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.

SUR CE

Sur la péremption d’instance

Mme [Y] critique le jugement en ce qu’il a retenu pour écarter la péremption d’instance, que l’expertise ayant été ordonnée par jugement avant-dire droit du 11 décembre 2017 et le rapport ayant été déposé le 23 novembre 2020, ‘il ne saurait être sérieusement contesté qu’une mesure d’instruction ordonnée par le juge suspend le délai de péremption jusqu’à ce que l’expertise soit rendue’.

Elle soutient au contraire que le jugement qui a ordonné l’expertise, n’a pas sursis à statuer, ni ordonné la suspension de l’instance pour un temps ou jusqu’à la survenance d’un événement déterminé et que le délai de préemption a commencé à courir le 12 décembre 2017 pour expirer le 19 décembre 2019, sans que pendant cette période la SCP DVV n’accomplisse la moindre diligence aux fins d’obtenir la suspension de l’instance dans les conditions de l’article 392 du code de procédure civile, le dépôt de ses conclusions le 23 novembre 2020 intervenant alors que l’instance était périmée.

La SCP DVV prétend au contraire que l’historique du litige tel que repris par l’expert dans son rapport en pages 3 à 5 suffit à établir la réalité des diligences entreprises par les parties en vue de la progression de l’affaire et que la péremption d’instance n’est pas acquise.

Lorsque le juge ordonne une mesure d’instruction, le délai de péremption n’est pas interrompu le temps de la réalisation de la mesure. Pour que le délai soit interrompu, le juge doit en même temps prononcer un sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport de l’expert.

En l’espèce, le jugement avant-dire droit en date du 11 décembre 2017 par lequel le tribunal d’instance de Dijon a ordonné l’expertise judiciaire n’a pas sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise, de sorte que le délai de péremption, a continué à courir pendant le délai d’exécution de la mesure d’expertise.

Il convient de relever au travers des pièces produites, que Maître [F], avocat de la SCP DVV a saisi l’expert par courriel du 11 mars 2019 en lui communiquant l’ordonnance qui la désigne en remplacement de M. [W], ses pièces 1 à 95, et la justification du versement de la consignation ; que l’expert a accepté sa mission le 18 mars 2019 ; que Maître [F] l’a relancée par mail du 24 mai 2019 pour obtenir une date de convocation à une réunion d’ouverture, lui a communiqué de nouvelles pièces par courriel du 28 mai 2019, puis adressé une nouvelle relance le 9 décembre 2019, Maître [S], avocate de Mme [Y] ayant entre temps par courriel du 7 juin 2019 adressé ses conclusions et pièces à l’expert ; que les parties se sont positionnées sur le pré rapport d’expertise, par courriels des 12 mars 2020 et 20 mai 2020, avant dépôt du rapport d’expertise le 25 août 2020.

Il ressort suffisamment de ces éléments, la preuve que les diligences effectuées par chaque partie pour faire progresser la mesure d’expertise, ont eu pour effet d’interrompre le délai de péremption de deux ans régulièrement et que la péremption de l’instance n’était pas acquise au 23 novembre 2020, date à laquelle la SCP DVV a conclu.

Par conséquent, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de Mme [Y] tendant au constat de la péremption de l’instance.

Sur la critique du rapport d’expertise

Mme [Y] critique les conclusions du rapport d’expertise en faisant valoir :

– que l’expert a établi son rapport en faisant l’économie de l’examen du relevé de compte client de Mme [Y] dans la comptabilité de la SCP DVV qui n’a jamais été produit, et en reprenant dans son tableau 2 les imputations opérées par cette dernière, sans pouvoir vérifier si elles étaient justifiées et alors que les versements ne correspondaient pas aux factures émises.

– qu’il n’entrait pas dans la mission confiée à l’expert de se prononcer sur l’imputation des versements telle qu’elle a été effectuée par la SCP DVV.

L’expert avait pour mission :

– de se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission

– de fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les sommes effectivement réglées par Mme [Y] à la SCP DVV et le cas échéant les sommes restant dues.

Sur le premier point, la cour relève que l’expert a répondu aux dires du conseil de Mme [Y] en indiquant que malgré l’absence de communication par la SCP DVV du relevé de compte client de Mme [Y], les pièces produites lui permettaient de répondre à la mission fixée par le juge, étant souligné que Mme [Y] n’a pas saisi la cour d’une demande de production de cette pièce.

Sur le second point, la cour observe qu’aucune disposition ne sanctionne de nullité l’inobservation des obligations imposées à l’expert par les dispositions de l’article 238 du code de procédure civile et si celui-ci a pris effectivement position sur l’imputation des versements effectués par Mme [Y], cela ne lie pas la cour.

Sur la créance de la SCP DVV

Pour s’opposer au paiement des sommes réclamées par la SCP DVV, Mme [Y] soutient tout d’abord que son courrier du 29 décembre 2015 ne vaut pas reconnaissance de dette, puisqu’il ne renvoie à aucune facture précise, ni montant dû précis, et signe uniquement son engagement de régler en 2015 les factures de 2013 qui resteraient dues.

Elle relève que la relance du 3 novembre 2015 adressée par la SCP DVV se rapporte aux 21 factures, objet de l’assignation en référé, (pièces 1 à 22) correspondant à la relance du 3 novembre 2015 mais que la SCP DVV a produit aux débats une pièce 23 comportant 20 autres factures émises pour les années 2013 à 2015, non visées dans la relance, ce dont elle déduit que le cabinet vétérinaire les considérait comme réglées.

Elle constate que cette pièce 23 se rapporte aux facturations suivantes :

– 620,32 euros pour l’année 2013,

– 671,22 euros pour l’année 2014,

– 1 344,23 euros pour l’année 2015

Mme [Y] soutient que si l’on retient les 41 factures, le décompte des sommes facturées s’établit comme suit :

– total dû en 2013 : 1 422,27 euros somme sur laquelle elle a réglé 3 721,18 euros,

– total dû en 2014 : 3 050,99 euros somme sur laquelle elle a réglé 2 188,58 euros,

– total dû en 2015 : 3 802,91 euros somme sur laquelle elle a réglé 4 716,17 euros,

la confrontation de ces sommes avec les justificatifs de ses paiements, faisant apparaître un trop perçu par la SCP DVV de 2 349,76 euros,

Elle ajoute que devant le juge des référés la SCP DVV a produit 56 nouvelles factures, qui soit font doublon avec d’autres déjà produites, soit sont nouvelles et ne sont pas visées dans l’assignation en référé, soit enfin sont émises pour la période allant de 2011 à juillet 2013 à l’en-tête de la SCP DVV alors qu’elles concernent manifestement des prestations effectuées par le docteur [J] avant son association avec le docteur [U] lequel a crée son cabinet en 2014.

Elle en déduit qu’il s’agit de fausses factures émises par la SCP DVV.

Elle conteste par conséquent, le fait que la SCP DVV ait imputé ses paiements sur ces factures antérieures au début de son exercice, à hauteur des sommes suivantes :

– 2 773,95 euros pour 2013 (factures datant de 2010 et 2011),

– 1 013,59 euros pour 2014 (facture de 2011 et 2012),

– 3 000,00 euros pour 2015 (factures antérieures à juillet 2013)

soit un total de 6 787,54 euros.

Elle prétend que la SCP DVV ne peut justifier ces imputations par la cession des parts détenues par le Docteur [J] dans la SCP Docteurs Vétérinaires [J] – [U] à la SCP Docteur Vétérinaire [U], alors que les deux entités sont distinctes.

Elle affirme que ces imputations sont d’autant plus injustifiées que le Docteur [J] a attesté avoir encaissé en 2013 et 2014 plusieurs règlements pour un montant total de 2 860,85 euros correspondant à des acomptes sur les sommes dues à son cabinet concernant les années 2010 et 2011, donc antérieures à son association avec le Docteur [U] dans la SCP [J] – [U], et ne lui a pas réclamé d’autres sommes.

Elle conclut que ses paiements imputés à tort sur les années antérieures à l’activité de la SCP DVV, excèdent le montant de la somme qui lui est réclamée laquelle ne serait pas due, s’ils avaient été imputés sur les factures émises par la SCP DVV.

* * * *

De son côté, la SCP DVV maintient sa demande en paiement du solde de 21 factures émises entre le 31 juillet 2013 et le 2 novembre 2015 pour un montant de 5 640,40 euros, se décomposant comme suit :

– année 2013 : 801,95 euros,

– année 2014 : 2 379,77 euros,

– année 2015 : 2 458,68 euros.

Elle indique avoir ventilé les différents paiements effectués par Mme [Y] en reprenant ses propres chiffres, entre les factures sans que cela permette de solder la totalité des factures émises pour chaque année de référence. Dans la mesure où Mme [Y] payait avec retard ses factures, elle indique avoir imputé ses paiements sur les factures les plus anciennes, conformément à l’article 1342-10 du code civil, et à son souhait tel qu’elle l’a exprimé dans sa reconnaissance de dette, du 29 décembre 2015.

Ainsi, la SCP DVV expose que :

– en 2013, Mme [Y] a réglé 3 721,18 euros, laissant un solde restant dû de 452,52 euros au titre de la facture n°967 du 31 juillet 2011,

– en 2014, Mme [Y] a réglé une somme de 2 188,58 euros, faisant apparaître, un solde dû de 443,91 euros au titre de la facture n°229 du 31 janvier 2013 partiellement réglée à la suite de l’imputation de 160 euros, payés par chèque du 7 août 2014,

– en 2015, Mme [Y] a réglé une somme de 4 761,17 euros, somme qui a été imputée sur les factures émises au cours de cette année et à concurrence de 3 000 euros pour apurer les factures émise entre le 28 février 2013 et le 31 juillet 2013, soit au total 10 625,93 euros.

La SCP DVV maintient que les chèques établis par Mme [Y] à l’exception du chèque du 28 février 2014 de 58,87 euros et du chèque du 14 avril 2014 de 287,90 euros dont l’affectation n’est pas justifiée, ont permis de solder d’autres factures que celles visées dans l’assignation.

La SCP DVV fait en outre valoir que les factures produites en cours de procédure, qui selon Mme [Y] font double emploi, ne font l’objet d’aucune demande en paiement et que leur montant est différent pour chaque facture de celui figurant sur les factures dont il est sollicité le règlement.

La SCP DVV relève par ailleurs s’agissant des factures émises pour les années 2011 à juillet 2013, que le docteur [J] lui a cédé l’intégralité de ses parts, suivant PV de l’AGE du 6 janvier 2014, et que c’est ainsi que la dénomination de la SCP [J] – [U] a été modifiée pour devenir la SCP DVV.

Elle considère que ce changement de dénomination sociale n’a aucune incidence sur le règlement des factures, dès lors que la SCP qui encaisse les recettes les reverse à l’associé concerné en fonction des parts qu’il détient et souligne le fait que la SCP [J] – [U] et la SCP DVV sont une seule et même personne morale comme en atteste le numéro SIREN unique qui lui est attribué.

La SCP DVV prétend que Mme [Y] a fait une lecture erronée de l’attestation du docteur [J], ce dernier ayant uniquement entendu préciser que les règlements qu’il a reçus concernent une période antérieure à son association avec le docteur [U] et correspondent à des factures distinctes de celle dont le paiement est réclamé.

La SCP DVV ajoute que le changement d’entête de certaines factures par rapport aux factures originelles datant de 2011 et 2012, (non visées dans la demande en paiement) s’explique par leur réédition à partir d’un logiciel comptable qui n’a pas repris l’ancienne dénomination sociale et que le débat porte uniquement dans le cadre de la procédure sur 3 factures émises en 2013 (pièce 20, 21 et 22) pour un montant restant dû de 801,95 euros, qu’elle a été contrainte techniquement d’éditer avec sa nouvelle entête étant dans l’impossibilité de récupérer les factures originelles conservées par l’administration fiscale.

* * * *

Il convient de rappeler à titre liminaire que :

– le cabinet vétérinaire du Docteur [J] a été crée le 1er janvier 1981,

– le Docteur [U] a commencé son activité le 6 octobre 2011 et s’est associé à la même date avec le Docteur [J] pour créer la SCP [J] – [U] qui a été immatriculée au registre du commerce le 10 novembre 2011,

– le 6 janvier 2014 le Docteur [J] a cédé ses parts sociales et d’industries au Docteur [U] suivant procès-verbal de l’assemblée générale extraoridinaire du même jour,

– la société SCP [J] – [U] a changé de nom pour devenir la SCP DVV en conservant le même numéro de siren,

– M. [J] a cessé son activité le 6 janvier 2015.

– Sur les factures, objets de la demande en paiement

L’expert indique dans ses conclusions que la réclamation porte sur les factures reprises dans le tableau 1° figurant en annexe de son rapport, et qu’elle correspond bien aux 21 factures émises entre le 31 juillet 2013 et le 31 juillet 2015, toutes établies à l’entête de la SCP DVV pour un montant de 5 640,40 euros.

Le contrôle opéré par l’expert, à partir des dates, numéros de factures, éléments facturés et montant permet d’écarter l’hypothèse d’une réclamation reposant sur un doublon de factures.

Par ailleurs, au regard de l’attestation fournie par la société Vetocom, société de maintenance informatique, l’argument de Mme [Y] tenant à la fausseté des factures émises entre 2011 et juillet 2013 à l’entête de la SCP DVV doit également être écarté.

– Sur les paiements effectués par Mme [Y]

L’expert liste dans le tableau 2° en annexe du rapport d’expertise les paiements allégués par Mme [Y] pour la somme de 10 625,93 euros.

Toutefois, après vérifications, et recherches auprès des parties, il indique que sur cette liste qui recense la copie des talons de chèque avec ou sans ordre, produits par Mme [Y], un versement de 55,87 euros a été débité du compte de cette dernière, sans que l’on puisse affirmer qu’il a été affecté à la SCP DVV. Par conséquent, le montant des sommes versées par Mme [Y] en paiement des prestations effectuées pour le suivi de ses animaux doit être ramené à 10 570,06 euros.

– Sur l’imputation des sommes versées par Mme [Y]

En page 9 du rapport, l’expert constate que tous les versements ont été imputés par la SCP DVV, sur des factures différentes de celles qui figurent sur la liste des factures impayées, objet de la demande en paiement, à l’exception de deux versements imputés sur les factures n°1512 du 31 juillet 2013 à concurrence de 598,71 euros et n°360 du 28 février 2014 à concurrence de 41.60 euros.

Selon l’analyse de l’expert, non contestée sur ce point, sur l’ensemble des paiements justifiés par Mme [Y], 2 880,02 euros ont été imputés sur les factures du cabinet [J] émises du 28 janvier 2010 au 31 juillet 2011, et le surplus de la somme soit 7 690,04 euros a été ventilé entre les factures émises postérieurement en contrepartie des prestations fournies par la SCP [J]-[U], puis la SCP DVV.

La somme actualisée à 10 570,06 euros a donc été créditée par la SCP DVV sur les dettes les plus anciennes.

Cette imputation sur les dettes les plus anciennes est conforme à l’article 1342-10 du code civil, ainsi qu’à l’esprit et à la lettre du courrier daté du 29 décembre 2015 adressé par Mme [Y] à son conseil, alors qu’elle était informée à cette date des sommes réclamées par la SCP DVV au travers de la relance du 3 novembre et de la mise en demeure du 17 décembre 2015, libellé comme suit : ‘Pour faire suite à la conversation que vous avez eu avec mon mari. Je vous confirme avoir pris des dispositions avec notre banque, qui devraient être mise en place en janvier. Monsieur [U] a également été contacté par mon mari et ont déterminés le mode de règlement des factures en janvier – règlement des factures les plus anciennes année 2013 et ensuite prélèvements mensuel du solde sur mon compte banquaire’

Il convient de déduire de ce document d’une part, que Mme [Y] a reconnu fin 2015 qu’elle n’était pas à jour du paiement de la totalité des factures émises à compter du 31 juillet 2013 et d’autre part que l’imputation de ses règlements sur les factures les plus anciennes correspondait à son souhait.

En tout état de cause, Mme [Y] ne démontre aucunement avoir donné des indications contraires avant l’engagement de la procédure et d’ailleurs les talons de chèques et chèques produits ne comportent aucune référence de factures.

Le principe de l’imputation des versements sur les dettes les plus anciennes est ainsi justifié.

Mme [Y] critique par ailleurs l’imputation des versements en ce qu’elle a été effectuée sur les factures antérieures au début d’exercice en janvier 2014 de la SCP DVV, dont elle évalue le montant à 6 787,54 euros et notamment sur des factures prétendûment impayées du cabinet vétérinaire [J].

L’intimée fait valoir à juste titre que cette imputation est régulière en ce qu’elle concerne les factures émises par la SCP [J] – [U], à compter de son début d’activité en octobre 2011, puis par la SCP DVV, dans la mesure où la cession des parts sociales et d’industrie du docteur [J] au docteur [U], n’a pas entraîné de modification de la personnalité morale, structure juridique qui a conservé le même numéro de siren et a seulement changé de dénomination.

S’agissant de l’imputation des versements sur les factures émises par le cabinet [J] avant son association avec le cocteur [U] en octobre 2011, il est annexé au rapport d’expertise, la liste ‘des clients dûs’ dressé le 22 novembre 2011 par le groupe ETC expert comptable sur laquelle Mme [Y] apparaît pour un montant débiteur de 4 496,10 euros, correspondant à des factures émises entre le 1er décembre 2008 et le 31 juillet 2011. A partir de ce document, l’expert a identifié dans le tableau n°5 de son rapport les factures émises entre 2010 et le 31 juillet 2011 dont le montant s’élève à 2 642,69 euros, pour des versements évalués à 2 880,82 euros.

Or, la SCP DVV ne verse pas aux débats les statuts de la société [J] – [U], et n’objective par aucune pièce, l’apport des créances clients du cabinet vétérinaire [J] à la SCP [J] – [U] nouvellement créée en octobre 2011, de sorte que la SCP DVV ne justifie pas d’un droit à se substituer au docteur [J] pour recouvrer le montant de ses créances et imputer les versements effectués par Mme [Y] sans accord de cette dernière sur celles-ci et ce d’autant plus qu’elle soutient sans être contredite qu’elle n’a jamais reçu de mises en demeure de payer de la part du cabinet vétérinaire [J].

Par conséquent, la somme de 2 880,82 euros doit être réintégrée au crédit du compte de Mme [Y] et venir en déduction des sommes réclamées, de sorte que le montant de la créance de la SCP DVV étant ramené à 2 759,58 euros, le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté Mme [Y] de sa demande en restitution d’un indu et infirmé en ce qu’il l’a condamnée au paiement de la somme de 5 640,40 euros.

Mme [Y] est condamnée à payer la somme de 2 759,58 euros à la SCP DVV avec intérêt au taux légal à compter du 26 septembre 2015.

Sur l’indemnité forfaitaire

A titre subsidiaire, Mme [Y] s’oppose au paiement de cette indemnité, sollicitée sur le fondement de l’article L 441-6 du code de commerce à défaut de mention de cet article sur les factures.

La SCP DVV s’estime fondée à solliciter le paiement de cette indemnité en application de l’article L 441-6 du code de commerce, qui dispose que tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l’égard du créancier d’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement dont le montant est fixée par décret.

Conformément aux dispositions de l’article L 441-6 du code du commerce, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date.

Les factures dont il est réclamé le paiement ne mentionnent ni l’indemnité forfaitaire, ni son montant fixé par l’article D 411-5 du code de commerce à 40 euros, de sorte que cette réclamation ne peut qu’être rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages intérêts de la SCP DVV

La SCP DVV sollicite la confirmation sur le principe de la décision, mais l’infirmation sur le montant et demande le paiement d’une somme de 2 000 euros.

Mme [Y] s’y oppose, en s’estimant légitime à contester la créance alléguée par la SCP DVV, qui même après les opérations d’expertise n’est pas justifiée.

La résistance opposée par Mme [Y] au paiement ne peut être qualifiée d’abusive puisque les arguments de Mme [Y] ont été partiellement accueillis, et le montant de la réclamation de la SCP DVV a été réduit à hauteur d’appel.

Cette demande est donc rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

Sur les dommages-intérêts sollicités par Mme [Y]

Elle fait valoir que sa demande d’indemnisation est justifiée dans la mesure où le contentieux engagé par le cabinet vétérinaire a constitué un obstacle à la réalisation des opérations de prophylaxie, pour la campagne 2015-2016 et que ce défaut d’assistance est susceptible de générer des sanctions administratives à son encontre.

La SCP DVV observe de son côté que Mme [Y] n’a jamais critiqué la qualité de ses interventions, qu’elle a reconnu devoir payer les factures de l’année 2013, et développe un argumentaire qui signe sa mauvaise foi, en refusant de produire sa comptabilité, en lui reprochant de ne pas avoir procéder aux opérations de prophylaxie sur ses animaux, alors que l’existence du contentieux, justifiait parfaitement son positionnement, et alors qu’elle s’est tournée vers un autre cabinet vétérinaire pour faire réaliser ces opérations.

Elle ajoute que sa comptabilité est irréprochable et verse aux débats le contrôle fiscal dont elle vient de faire l’objet.

Le contentieux qui oppose les parties légitimait le refus de la SCP DVV de procéder aux opérations de prophylaxie, et n’a pas empêché Mme [Y] de se tourner vers un autre cabinet vétérinaire pour faire procéder à ses opérations, étant relevé qu’elle ne justifie pas que ce changement de vétérinaire lui a été préjudiciable. En conséquence sa demande doit être rejetée, et le jugement confirmé de ce chef.

Sur les frais de procès

Les parties succombant l’une et l’autre en certaines de leurs demandes, il convient de faire masse des dépens de première instance, des dépens d’appel et des frais d’expertise et de condamner les parties à les supporter à hauteur de 50 % chacune.

Dans les circonstances particulières de l’espèce, l’équité conduit la cour à laisser à la charge des parties les frais non compris dans les dépens qu’elles ont respectivement exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement dont appel en ce qu’il a :

– rejeté la demande en constat de la péremption d’instance et déclaré recevables les demandes de la SCP Docteur Vétérinaire [U],

– débouté Mme [P] [Y] de ses demandes en restitution d’un paiement indû et en paiement de dommages-intérêts,

L’infirme en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Condamne Mme [P] [Y] à payer à la SCP Docteur Vétérinaire [U] la somme de 2 759,58 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2015,

Déboute la SCP Docteur Vétérinaire [U] de toutes ses autres demandes en paiement,

Fait masse des dépens de première instance, des dépens d’appel et des frais d’expertise et condamne chacune des parties à les prendre en charge à hauteur de moitié,

Dit n’y avoir lieu à aucune application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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