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ARRÊT DU
20 Octobre 2023
N° 1317/23
N° RG 22/01189 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UN3O
MLBR/CH
Jugement du
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VALENCIENNES
en date du
10 Décembre 2019
(RG 18/00359 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 20 Octobre 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
– Prud’Hommes-
APPELANT :
M. [E] [F]
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Me Corinne PHILIPPE, avocat au barreau de VALENCIENNES
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/010106 du 12/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉES :
Société SARL ADP en liqidation judiciaire
M. [B] [N], es qualité mandataire ad’hoc de la SARL ADP
[Adresse 1]
[Localité 8]
représenté par Me Vincent SPEDER, avocat au barreau de VALENCIENNES, substitué par Me Dorothee FIEVET, avocat au barreau de VALENCIENNES
S.A.R.L. VILIGENCIA PROTECTION PRIVEE en liquidation judiciaire
[Adresse 2]
[Localité 9]
Me [G] [R] es qualité mandataire ad’hoc de la SARL VILIGENCIA PROTECTION PRIVEE,
signification des conclusions de réinscription par l’appelant le 05 août 2022 à personne habilitée
signif ccls récapitulatives le 21.02.23 à personne habilitée.
[Adresse 10]
[Localité 9]
n’ayant pas constitué avocat
Association CGEA DE [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Thibaut CRASNAULT, avocat au barreau de VALENCIENNES
Association CGEA DE [Localité 3]
[Adresse 11]
[Localité 3]
représentée par Me Thibaut CRASNAULT, avocat au barreau de VALENCIENNES
DÉBATS : à l’audience publique du 12 Septembre 2023
Tenue par Marie LE BRAS
magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Cindy LEPERRE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Marie LE BRAS
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Patrick SENDRAL
: CONSEILLER
Virginie CLAVERT
: CONSEILLER
ARRÊT : Réputé contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 20 Octobre 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 29 août 2023
EXPOSE DU LITIGE
Le 20 mai 2005, M. [E] [F] a été engagé par la Agence de Protection (la société ADP) en qualité d’agent d’exploitation dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel.
La convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité est applicable à la relation de travail.
Suite à des difficultés financières, la société ADP a été placée en redressement judiciaire par un jugement du 21 septembre 2009 convertie en liquidation judiciaire par jugement du 6 septembre 2010, Me [N] étant désigné comme liquidateur judiciaire.
A compter du 15 mars 2010, le contrat de travail de M. [F] a été transféré à la SARL Viligencia Protection Privée à la suite de la cession à cette dernière des actifs de la société ADP.
Le contrat de travail de M. [F] a pris fin à la suite du placement de la société Viligencia Protection Privée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Perpignan le 1er décembre 2010, Maître [H] étant désigné comme liquidateur judiciaire.
Par requête du 29 septembre 2011, M. [F] a saisi le conseil de prud’hommes de Valenciennes afin d’obtenir principalement un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires non rémunérées ainsi que le règlement de primes de panier.
En cours de procédure, la liquidation judiciaire de la société Viligencia Protection Privée a été clôturée le 27 juin 2012 pour insuffisance d’actif. Me [R] a par la suite été désigné le 19 septembre 2017 sur requête de M. [F] en qualité de mandataire ad hoc.
L’affaire a fait l’objet d’une première radiation le 8 octobre 2013 puis, après rétablissement le 14 novembre 2015, d’une nouvelle radiation le 13 novembre 2018 avant d’être rétablie à la demande de M. [F] le 28 novembre 2018.
Par jugement réputé contradictoire du 10 décembre 2019, le conseil de prud’hommes de Valenciennes a :
– constaté la péremption d’instance,
– déclaré les demandes de M. [F] irrecevables au titre de la péremption d’instance,
– débouté le CGEA de [Localité 6] et le CGEA de [Localité 3] de leur demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [F] aux dépens.
Par déclaration d’appel du 13 janvier 2020, M. [F] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.
Par arrêt rendu sur déféré le 19 février 2021, la cour a infirmé l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 7 juillet 2020 ayant constaté la caducité de l’appel de M. [F].
A la suite de la clôture de la procédure de liquidation de la SARL ADP pour insuffisance d’actif et sur requête de M. [F], Maître [N] a été désigné mandataire ad hoc par ordonnance en date du 19 janvier 2023 du président du tribunal de commerce de Valenciennes.
Dans ses dernières conclusions déposées le 14 août 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens et des prétentions, M. [F] demande à la cour de :
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
– juger qu’aucune péremption n’est intervenue dans le dossier,
– le recevoir en ses demandes,
– les dire non prescrites et bien fondées,
En conséquence,
à titre principal,
– fixer ses créances dans la liquidation judiciaire de la société ADP aux sommes suivantes :
*1 322,21 euros au titre du rappel d’heures complémentaires et supplémentaires non comptabilisées sur la période du 29 septembre 2006 au 29 septembre 2011, outre 132,22 euros au titre des congés payés y afférents,
*6 934,20 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé,
*12 553,51 euros au titre de la majoration de salaire pour heures complémentaires/supplémentaires outre 1 255,35 euros au titre des congés payés y afférents,
* 456 euros au titre du rappel de primes de panier,
* 5 000 euros titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier et moral subi,
– juger l’arrêt à intervenir opposable au CGEA de [Localité 6] ainsi qu’à Me [N] en qualité de mandataire ad hoc de la société ADP,
à titre subsidiaire,
-fixer ses créances dans la procédure collective de la société Vigilencia protection privée aux sommes suivantes :
*1 322,21 euros au titre du rappel d’heures complémentaires et supplémentaires non comptabilisées sur la période du 29 septembre 2006 au 29 septembre 2011, outre 132,22 euros au titre des congés payés y afférents,
*6 934,20 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé,
*12 553,51 euros au titre de la majoration de salaire pour heures complémentaires/supplémentaires outre 1 255,35 euros au titre des congés payés y afférents,
* 456 euros au titre du rappel de primes de panier,
*5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier et moral subi,
-juger l’arrêt à intervenir opposable au CGEA de [Localité 3] ainsi qu’à Me [R] ès qualité de mandataire ad hoc de la société Vigilencia Protection Privée,
A titre infiniment subsidiaire,
– fixer ces mêmes créances dans les procédures collectives des sociétés ADP et Vigilencia Protection Privée,
– juger l’arrêt à intervenir opposable au CGEA de [Localité 6] et au CGEA de [Localité 3] ainsi qu’à Me [N] en qualité de mandataire ad hoc de la société ADP et à Me [R] en qualité de mandataire ad hoc de la société Vigilencia Protection Privée,
En tout état de cause,
– condamner la société ADP, prise en la personne de son liquidateur, et Me [R] ès qualité, in solidum à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux dépens d’appel avec recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, et de première instance.
Dans ses dernières conclusions déposées le 6 février 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et des moyens, les CGEA de [Localité 6] et de [Localité 3] demandent à la cour de :
– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Valenciennes le 10 décembre 2019
Sur les demandes,
In limine litis,
– constater la péremption d’instance et constater en conséquence l’extinction de l’instance,
– déclarer par voie de conséquence son action forclose,
– déclarer irrecevable puisque prescrite les demandes de rappel de salaires de M. [F] formulées dans sa nouvelle instance prud’homale du 14 novembre 2015,
– débouter M. [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Subsidiairement,
– déclarer irrecevables comme prescrites les demandes de M. [F] pour la période antérieure au 19 septembre 2006,
– déclarer irrecevable puisque prescrite la demande de M. [F] au titre du travail dissimulé,
– débouter M. [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En toute hypothèse,
– condamner M. [F] au paiement de la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– le condamner au paiement des entiers frais et dépens de l’instance,
Sur la garantie,
– dire et juger que s’il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,
– dire et juger qu’en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l’article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L.3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en ‘uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie,
– vu les articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, dire et juger qu’en tout état de cause la garantie de l’AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié confondues, l’un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d’assurance chômage mentionnés à ces articles,
– statuer ce que de droit quant aux frais d’instance sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.
Dans ses dernières conclusions déposées le 17 juillet 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et des moyens, Me [N], ès qualités, demande à la cour de :
– confirmer le jugement,
à titre subsidiaire,
– juger irrecevables les demandes formulées au titre des rappels de salaires correspondant aux périodes antérieures au mois de septembre 2006,
– débouter M. [F] de l’intégralité de ses demandes,
En tout état de cause
– condamner M. [F] à payer à Me [N], es qualités, la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Me [R], en sa qualité de mandataire ad hoc de la SARL Viligencia Protection Privée, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 16 juin 2022 par acte remis à personne habilitée n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 août 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque l’intimé ne comparaît pas, ce qui est le cas en l’espèce de Maître [R], il est néanmoins statué sur le fond. La cour ne fait toutefois droit aux demandes et aux moyens de l’appelant que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés.
-sur la péremption de l’instance :
M. [F] fait grief aux premiers juges d’avoir constaté la péremption de l’instance. Il fait valoir en s’appuyant sur les règles spécifiques de péremption applicables aux procédures prud’homales et définies par l’ancien article R. 1452-8 du code du travail que d’une part, le délai de 2 ans qui n’a selon lui commencé à courir que le 14 novembre 2013, date de la notification de l’ordonnance de radiation du 8 octobre 2013, n’était pas expiré au jour de ses conclusions aux fins de réinscription de l’affaire déposées le 14 novembre 2015, et que d’autre part, les diligences mises à sa charge avaient été accomplies avant même la radiation, les défendeurs ayant d’ailleurs également conclu avant cette date.
Il ajoute qu’en application de l’article 370 du code de procédure civile, l’instance a en tout état de cause été interrompue, et le délai de péremption également, par la clôture de la liquidation judiciaire de la société Viligencia Protection Privée le 27 juin 2012 et ce jusqu’à la désignation d’un mandataire ad hoc le 19 septembre 2017.
En réponse, les intimés mettent en avant le fait que l’ordonnance de radiation du 8 octobre 2013 a conditionné la réinscription de l’affaire à la justification par le demandeur à l’instance, de la communication de ses pièces et moyens à la partie adverse, ce que M. [F] ne démontre pas avoir accompli à l’égard de l’ensemble des parties.
Sur ce,
L’article 386 du code de procédure civile dispose que l’instance est périmée lorsqu’aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.
En matière prud’homale, selon l’article R. 1452-8 du code du travail dans sa version en vigueur jusqu’au 1er août 2016 et applicable à l’espèce, l’instance n’est périmée que lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.
Pour interrompre la péremption, les parties doivent ainsi s’acquitter de l’ensemble des diligences mises à leur charge par l’ordonnance de radiation, sachant que la remise au rôle n’implique pas elle-même que les diligences prescrites par l’ordonnance de radiation ont été accomplies.
Conformément à l’article 370 du code de procédure civile, l’instance a en l’espèce effectivement été interrompue au jour de la notification aux parties en janvier 2013 de l’information relative à la clôture de la liquidation judiciaire de la société Viligencia Protection Privée pour insuffisance d’actif, compte-tenu de la perte de capacité de celle-ci à ester seule en justice, un mandataire ad hoc devant être désigné pour la représenter. Toutefois, seule la société soumise à la procédure collective peut se prévaloir d’une telle interruption.
Il résulte des termes du jugement non contredits par M. [F] qu’à la suite de l’avis fait au greffe par son conseil le 15 janvier 2013 de son intention de solliciter la désignation du mandataire ad hoc, l’affaire a fait l’objet de plusieurs renvois à cet effet avant de faire l’objet d’une radiation par ordonnance du 8 octobre 2013 du fait selon les propres dires de M. [F] du défaut de désignation dudit mandataire ad hoc.
Dans son ordonnance de radiation dont M. [F] dit avoir reçu notification le 14 novembre 2013, le conseil de prud’hommes dispose que «l’affaire ne pourra être réinscrite au rôle des affaires en cours que sur justification par le demandeur à l’instance de la communication de ses pièces et moyens à la partie adverse», après avoir relevé que les parties sollicitaient la radiation afin de leur permettre de faire procéder à la désignation d’un mandataire ad hoc et que l’affaire n’était pas en état d’être jugée.
Il résulte de la combinaison des articles 376, 377, 381, 383 et 392 du code de procédure civile que la radiation intervenue pour défaut de diligence pendant le cours de l’interruption de l’instance, fait à nouveau courir le délai de péremption à compter de sa notification, à charge pour les parties d’accomplir les diligences mises à leur charge par la décision de radiation.
Or, force est de constater en l’espèce que M. [F] ne produit aucune pièce de nature à démontrer que conformément aux prescriptions de l’ordonnance de radiation, il a communiqué ses pièces et argumentations à l’ensemble des défendeurs avant l’expiration du délai de péremption dont le terme est survenu le 14 novembre 2015.
S’il peut en effet se déduire des conclusions de Maître [N], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ADP, déposées le 23 octobre 2012, en vue d’une audience devant la juridiction prud’homale, que M. [F] lui avait communiqué ses pièces avant même l’ordonnance de radiation, celui-ci ne justifie pas des démarches accomplies à l’égard des autres défendeurs pour leur transmettre ses pièces et écritures, surtout concernant le mandataire ad hoc devant représenter la société Viligencia, pour lequel d’ailleurs il ne justifie pas non plus des diligences opérées avant le 14 novembre 2015 en vue de sa désignation, celle-ci n’étant intervenue que le 19 septembre 2017 sans que M. [F] ne précise à quelle date il a saisi le président du tribunal de commerce à cet effet.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a constaté la péremption de l’instance.
-sur les demandes accessoires :
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.
M. [F] devra également supporter les dépens d’appel et sera débouté de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande également de débouter Maître [N], ès qualités, et les AGS de leur demande respective sur ce même fondement.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire,
CONFIRME le jugement entrepris en date du 10 décembre 2019 en toutes ses dispositions ;
DEBOUTE les parties de leur demande respective sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
DIT que M. [E] [F] supportera les dépens d’appel.
LE GREFFIER
Annie LESIEUR
LE PRESIDENT
Marie LE BRAS