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N° RG 23/00571 – N° Portalis DBV2-V-B7H-JJKM
COUR D’APPEL DE ROUEN
CH. CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET DU 19 OCTOBRE 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
22/01513
Ordonnance du juge de la mise en etat d’Evreux du 30 janvier 2023
APPELANT :
Monsieur [J] [I]
né le 18 Juin 1971 à [Localité 2]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté et assisté par Me Sébastien FERIAL, avocat au barreau de l’EURE
INTIMEES :
Société AREAS DOMMAGES
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Jamellah BALI de la SCP BALI COURQUIN JOLLY PICARD, avocat au barreau de l’EURE et assistée de Me Benoit FALTE, avocat au barreau de PARIS, plaidant.
Société AREAS VIE
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Jamellah BALI de la SCP BALI COURQUIN JOLLY PICARD, avocat au barreau de l’EURE et assistée de Me Benoit FALTE, avocat au barreau de PARIS, plaidant.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 07 juin 2023 sans opposition des avocats devant M. URBANO, conseiller, rapporteur.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Mme FOUCHER-GROS, présidente
M. URBANO, conseiller
Mme MENARD-GOGIBU, conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame DUPONT, greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 07 juin 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 octobre 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 19 octobre 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Mme FOUCHER-GROS, présidente et par Mme RIFFAULT, greffière lors de la mise à disposition.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [I] a été l’agent général d’assurances de la société AREAS Dommages et de la société AREAS Vie à compter du 19 décembre 2012 dans certaines communes de l’Oise.
Il a présenté sa démission le 4 février 2017 avec effet au 31 juillet suivant.
La société AREAS Dommages et la société AREAS Vie se sont prévalues d’un inventaire comptable établi les 27 et 28 juillet 2017 pour lui réclamer un solde débiteur de 187 056,86 euros qui a été contesté par M. [I].
Des saisies conservatoires ont été autorisées notamment sur les comptes bancaires de M. [I] ouverts au Crédit Agricole et à la Caisse d’Epargne et elles ont été pratiquées le 6 novembre 2017.
Par ailleurs, la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie ont fait assigner M. [I] en paiement de la somme de 189 628,07 euros le 28 novembre 2017 devant le tribunal de grande instance d’Evreux.
Les saisies conservatoires ont été levées par jugement du juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Evreux du 27 mars 2018 au motif que la « commission des traités et des primes », organe de conciliation contractuellement prévu, n’avait pas été préalablement saisie et ce jugement a été confirmé par arrêt de cette cour du 26 septembre 2019.
Le 27 avril 2020, l’affaire pendante au fond devant le tribunal de grande instance d’Evreux a été radiée pour défaut de conclusions des demandeurs et la péremption d’instance a été constatée par ordonnance du juge de la mise en état du 27 juin 2022.
Par acte d’huissier du 22 avril 2022, la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie ont fait assigner M. [I] en paiement de la somme de 195 054,63 euros devant le tribunal judiciaire d’Evreux au titre du même solde débiteur.
Affirmant que la procédure de médiation et de conciliation obligatoire prévue contractuellement n’avait pas été régulièrement suivie par les demandeurs, M. [I] a saisi le juge de la mise en état d’un incident tendant à déclarer nulle la décision rendue le 27 novembre 2019 par l’organe de médiation et de conciliation, subsidiairement, à la déclarer inopposable, et, en toute hypothèse, à déclarer irrecevable les demandes formées par la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie.
Par ordonnance du 30 janvier 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Evreux a :
– rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [J] [I] ainsi que sa demande tendant à voir déclarer inopposable la décision de la commission de Traités et de Primes du 27 novembre 2019,
– déclaré recevable l’action formée par la sociétés Areas Dommages et la société Areas Vie à l’encontre de Monsieur [I],
– condamné Monsieur [I] à payer à la société Areas Dommages et Areas Vie la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Monsieur [I] aux dépens de l’incident dont distraction au profit de Maître Bali avocat conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
– ordonné le renvoi de l’affaire à l’audience de mise en état du 13 mars 2023 à 13h30 et invité Maître Ferial à conclure sur le fond.
Monsieur [J] [I] interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 14 février 2023.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 juin 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Vu les conclusions du 4 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Monsieur [J] [I] qui demande à la cour de :
– infirmer l’ordonnance rendue le 30 janvier 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’elle a :
– rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [I],
– rejeté la demande de Monsieur [I] tendant à voir déclarer inopposable la décision de la commission de Traités et de Primes du 27 novembre 2019,
– déclaré recevable l’action formée par la société Areas Dommages et la société Areas Vie à l’encontre de Monsieur [I],
– condamné Monsieur [I] à payer la société Areas Dommages et la société Areas Vie la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Monsieur [I] aux dépens de l’incident,
Statuant à nouveau,
– accueillir la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [I]
– prononcer l’irrecevabilité de l’action introduite devant le tribunal judiciaire d’Evreux, suivant assignation du 26 avril 2022 délivrée à la requête des sociétés Areas Dommages et Areas Vie à l’encontre de Monsieur [I],
– condamner solidairement les compagnies Areas Dommages et Areas Vie à payer à Monsieur [I] une indemnité 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner sous le même bénéfice de la solidarité les compagnies Areas Dommages et Areas Vie aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Vu les conclusions du 3 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la société Areas Dommages et la société Areas Vie qui demandent à la cour de :
– confirmer l’ordonnance rendue le 30 janvier 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’elle a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [I], rejeté la demande de Monsieur [I] tendant à voir déclarer inopposable la décision de la commission de Traités et de Primes du 27 novembre 2019, déclaré recevable l’action formée par la Société Areas Dommages et la Société Areas Vie à l’encontre de Monsieur [I], condamné Monsieur [I] à payer la Société Areas Dommages et la Société Areas Vie la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et enfin condamné Monsieur [I] aux dépens de première instance de l’incident et en conséquence,
– débouter Monsieur [J] [I] de sa fin de non-recevoir tendant à voir dire nulle et de nul effet ou subsidiairement inopposable la décision rendue par la Commission des Traités et des Primes du 27 novembre 2019,
– débouter Monsieur [J] [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions tendant notamment à voir dire irrecevables les demandes des Compagnies Areas Dommages et Areas Vie formées à son encontre, à savoir la demande de condamnation au paiement de 195 054,63 euros correspondant au solde débiteur du compte de fin de gestion de l’agence générale Areas tenue par Monsieur [J] [I] jusqu’au 31 juillet 2017,
– condamner Monsieur [J] [I] à payer aux compagnies Areas Dommages et Areas Vie la somme supplémentaire de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en complément de la somme de 600 euros déjà allouée à ce titre en première instance ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés par Maître Jamellah Bali Avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Moyens des parties :
M. [I] soutient que :
– la clause contractuelle prévoyant une procédure de conciliation obligatoire constitue une fin de non-recevoir insusceptible de régularisation en cours d’instance ;
– la première procédure diligentée par la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie devant le tribunal de grande instance d’Evreux a été sciemment délaissée par ces dernières dès lors que la procédure de conciliation n’avait pas été mise en ‘uvre ;
– la procédure devant le juge de l’exécution a été déclarée irrecevable pour le même motif ;
– les documents contractuels entre la société AREAS Dommages, la société AREAS Vie et M. [I] comportent un préalable obligatoire qui est la saisine de la commission des traités et des primes qui doit arbitrer paritairement le litige avant la saisine d’une quelconque juridiction ;
– quand bien même la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie auraient saisi la commission des traités et des primes par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 novembre 2019, celle-ci s’est réunie le 27 novembre suivant, soit moins de 8 jours après et s’est bornée à rendre un avis sans avoir ni convoqué ni entendu les parties de sorte que la procédure de conciliation ou de médiation n’a pas été mise en ‘uvre ;
– l’absence de caractère contradictoire de l’avis rendu par la commission des traités et des primes le rend inopposable à M. [I] ;
– par ailleurs, cette commission n’a pas été composée conformément aux accords contractuels liant les parties, le nombre de membres n’ayant pas été respecté et l’un d’eux, M. [W], ayant inexactement fait état de la qualité de président du syndicat des agents généraux.
La société AREAS Dommages et la société AREAS Vie soutiennent que :
– l’inventaire comptable réalisé par les deux assureurs a permis de démontrer un déficit imputable à M. [I] qui a conservé les fonds remis par les assurés et ne les a pas adressés aux deux assureurs ;
– les assureurs ont pu également déterminer que M. [I] avait conclu un contrat avec une société d’assurance concurrente alors qu’il était toujours leur agent général ;
– l’ensemble de ces faits est de nature à priver M. [I] de son indemnité ;
– la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie ont saisi la commission des traités et des primes par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 novembre 2019 puis ont diligenté la procédure devant le tribunal judiciaire le 26 avril 2022 de sorte que les dispositions contractuelles ont été respectées ;
– le conseil de M. [I] a été informé de la saisine le même jour, soit le 19 novembre 2019, le courrier de saisine mentionnant une date de réunion au 27 novembre suivant ;
– M. [I] n’a pas sollicité le report de la commission des traités et des primes, n’a fait valoir aucun argument et ne lui a adressé aucune pièce ;
– il n’a pas plus réagi lorsque la décision de la commission des traités et des primes lui a été communiquée ;
– la commission des traités et des primes qui s’est réunie le 27 novembre 2019 était composée paritairement et les allégations de M. [I] sur l’irrégularité de sa composition ne sont pas justifiées.
Réponse de la cour :
L’article 122 du code de procédure civile dispose que : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »
Le non-respect d’une clause contractuelle prévoyant une médiation ou une conciliation obligatoire avant toute saisine d’une juridiction constitue une fin de non-recevoir.
Par actes du 19 décembre 2012, le directeur général de la société AREAS Dommages et celui de la société AREAS Vie ont désigné M. [I] en qualité d’agent général exerçant ses fonctions dans certaines communes de l’Oise et ces actes visent expressément des conditions générales du traité d’agent général et des accords contractuels entre la direction de la société et le syndicat des agents généraux du 17 mars 2005 dont M. [I] a reconnu avoir pris connaissance et avoir reçu un exemplaire.
Ces accords contractuels prévoient en leur article 20 : « Arbitrage et médiation : Les litiges qui pourraient survenir dans le cadre de l’application des présents accords seront arbitrés paritairement dans le cadre de la Commission des Traités et des Primes avant toute éventuelle saisine des juridictions.
Il est rappelé que cette Commission est composée de 5 membres de la Direction de la Société dont le Directeur Général qui la préside et de 5 membres du Syndicat des Agents Généraux dont le Président, les autres membres, présents ou représentés, étant désignés par son bureau. »
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 novembre 2019, les deux sociétés AREAS ont saisi la commission des traités et des primes du litige les opposant à M. [I] en observant que la réunion la plus proche était fixée au 27 novembre 2019.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du même jour, les sociétés AREAS ont adressé au conseil actuel de M. [I] la copie du courrier envoyé à la commission des traités et des primes.
La commission des traités et des primes s’est réunie le 27 novembre 2019 composée, pour AREAS de M. [L], directeur général, de Mme [H], directrice générale adjointe, de M. [E], directeur commercial et de M. [Z], directeur distribution et, pour les agents généraux, de M. [W], président, M. [C], syndic, M. [R], secrétaire général et M. [B], trésorier. La commission a rendu une décision défavorable à M. [I].
Ainsi que l’a pertinemment estimé le premier juge :
– le litige portant sur des sommes réclamées par les assureurs au titre du déficit imputé à M. [I] et qu’ils entendent compenser partiellement ou totalement avec l’indemnité réclamée par M. [I], le préalable obligatoire de conciliation ou de médiation tel que prévu par les accords du 17 mars 2005 devait être respecté par la société AREAS Dommages et la société AREAS Vie ;
– il a effectivement été procédé à la saisine préalable de la commission des traités et des primes le 19 novembre 2019 alors que le tribunal judiciaire n’a été saisi que le 22 avril 2022 ;
– M. [I] a été régulièrement informé par les assureurs de la saisine de la commission des traités et des primes et de la date de sa réunion fixée au 27 novembre 2019 ;
– l’absence de M. [I] à cette réunion ne peut être imputée à une défaillance des sociétés AREAS et M. [I] ne justifie pas avoir demandé le report pour une cause quelconque ;
– la parité de la commission des traités et des primes prévue par les accords contractuels a été respectée ;
– aucune preuve n’est rapportée par M. [I] que M. [W] n’est pas le président du syndicat des agents généraux.
La cour constate en outre que :
– M. [I] n’a adressé aucune pièce à la commission des traités et des primes avant sa réunion du 27 novembre 2019 ;
– la décision du 27 novembre 2019 n’a jamais fait l’objet d’une quelconque observation de la part de M. [I] avant la saisine du tribunal judiciaire,
– les accords contractuels du 17 mars 2005 n’ont pas fixé la composition de la commission des traités et des primes mais se sont bornés à la rappeler de sorte qu’ils n’ont aucun caractère constitutif et que leur méconnaissance sur ce point ne saurait être soulevée par M. [I] dès lors que la règle de la parité a été respectée,
– rien ne permet d’affirmer que les sociétés AREAS ont pu avoir un quelconque rôle, déterminant ou pas, dans la procédure suivie par la commission des traités et des primes,
– enfin, au stade de l’appel, M. [I] ne produit aucune pièce permettant de déterminer que des membres composant ladite commission représentant le syndicat des agents généraux auraient inexactement siégé lors de la réunion du 27 novembre 2019.
Il s’ensuit que l’action diligentée par la société AREAS Dommages et par la société AREAS Vie ne se heurte pas à la fin de non-recevoir soulevée par M. [I].
L’ordonnance entreprise sera dès lors confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Confirme l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d’Evreux du 30 janvier 2023 ;
Y ajoutant :
Condamne M. [I] aux dépens avec droit de recouvrement direct accordé à Me Bali ;
Condamne M. [I] à payer à la société AREAS Dommages et à la société AREAS Vie la somme unique de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,