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N° RG 21/00835 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IWIQ
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 10 NOVEMBRE 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
19/93
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE ROUEN du 25 Janvier 2021
APPELANTE :
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE [Localité 3] [Localité 5] [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Vincent BOURDON, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEE :
Société [6]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 20 Septembre 2023 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. CABRELLI, Greffier
DEBATS :
A l’audience publique du 20 septembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 10 novembre 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 10 Novembre 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par M. CABRELLI, Greffier.
* * *
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 14 avril 2003, la société [6] (la société) a engagé M. [M] [C] en qualité de régulateur.
Elle a fait parvenir à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3], [Localité 5], [Localité 4] (la caisse) une déclaration d’accident du travail survenu le 24 mars 2015, l’assuré ayant fait une crise d’angoisse à la suite d’un entretien professionnel.
Son état de santé a été déclaré consolidé au 23 juin 2017.
Par courrier du 16 mai 2018, la caisse a notifié à la société sa décision de fixer le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de M. [C] à 20%.
La société a saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité d’une contestation de ce taux.
Par application de la loi du 18 novembre 2016, le dossier a été transmis au pôle social du tribunal de grande instance de Rouen, devenu tribunal judiciaire, lequel a, par une ordonnance du 3 février 2020, désigné le docteur [W] en qualité de médecin consultant.
Par jugement du 25 janvier 2021, le tribunal a :
– déclaré bien fondé le recours de la société contre la décision de la caisse du 16 mai 2018 concernant M. [C],
– fixé, dans les rapports entre la société et la caisse, à 10 % le taux d’IPP de M. [C] suite à l’accident du travail du 24 mars 2015.
La décision a été notifiée à la caisse le 4 février 2021, cette dernière en a relevé appel le 22 février 2021.
Par conclusions remises le 1er juin 2023, soutenues oralement à l’audience, la caisse demande à la cour de :
– infirmer le jugement susvisé en ce qu’il a fixé le taux d’IPP de M. [C] à 10 % dans ses rapports avec la société,
– dire que le médecin conseil, à la date de consolidation de l’état de santé de M. [C], a fait une exacte évaluation des séquelles de l’accident du travail en fixant le taux d’IPP à hauteur de 20 %,
– confirmer ainsi ce taux de 20 % dans ses rapports avec la société.
Par conclusions remises le 9 mai 2023, soutenues oralement à l’audience, la société demande à la cour de :
– constater la péremption d’instance,
– à titre subsidiaire, confirmer le jugement entrepris,
– en tout état de cause, débouter la caisse de l’ensemble de ses demandes.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé détaillé de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l’exception de péremption de l’instance
L’article 386 du code de procédure civile, applicable depuis le 1er janvier 2019 en cause d’appel en matière de contentieux de la sécurité sociale, dispose que l’instance est périmée lorsque aucune des parties n’accomplit de diligences pendant deux ans.
En procédure orale, les parties n’ont pas d’obligation de conclure et n’ont d’autre diligence à effectuer que de demander la fixation de l’affaire à une audience.
En l’espèce, il résulte des pièces produites que l’appelante a sollicité la fixation de l’affaire en adressant au greffe de la cour, plusieurs courriers les 10 juin 2022, 19 décembre 2022 et 13 février 2023 et ce, après avoir transmis ses conclusions à la partie adverse le 19 mars 2021.
Dès lors, eu égard aux dates en présence, la caisse a, dans le délai de deux ans de son appel, interjeté le 22 février 2021, accompli les diligences ci-dessus rappelées, si bien que la péremption de l’instance ne peut lui être opposée.
Par conséquent, l’exception considérée doit être rejetée.
Sur le taux d’IPP
L’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale dispose que le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
La caisse indique que le taux d’IPP contesté a été fixé par référence à l’annexe I du code de la sécurité sociale pour l’application de l’article R. 434-32, partie 4.2.1.11 Syndromes psychiatriques, lequel comporte les précisions suivantes :
« Névroses post-traumatiques.
– Syndrome névrotique anxieux, hypochondriaque, cénesthopatique, obsessionnel, caractérisé, s’accompagnant d’un retentissement plus ou moins important sur l’activité professionnelle de l’intéressé : 20 à 40
(Ces cas névrotiques caractérisés ne doivent pas être confondus avec un syndrome post-commotionnel des traumatisés du crâne ni avec les séquelles définies au chapitre suivant) ».
La cour rappelle qu’elle n’est pas tenue par les indications portées dans ledit tableau.
Le médecin conseil a constaté la persistance d’un stress chronique, de troubles du sommeil et d’un sentiment d’injustice. Il a sollicité l’avis d’un sapiteur, le docteur [I], médecin psychiatre, qui a relevé l’absence d’état antérieur et la persistance d’un syndrome dépressif d’intensité moyenne qui justifiait un taux d’IPP de 20 %.
En revanche, après avoir relevé des antécédents médicaux (obésité morbide, sleeve le 20 novembre 2017, SAS appareillée), le fait que le salarié ait repris son activité professionnelle au même poste trois semaines après son accident et considéré qu’il existait un état antérieur qui évoluait depuis plusieurs mois ainsi qu’un état postérieur traumatique interférant, le docteur [W], médecin consultant désigné par le tribunal, a considéré que le taux d’IPP devait être réduit à 10 %, rejoignant ainsi l’avis du docteur [O], médecin conseil de l’employeur.
Toutefois, l’existence d’une relation conflictuelle professionnelle, antérieure à l’accident du travail, ne peut suffire à établir l’existence d’un état antérieur, expressément exclu par le médecin psychiatre, et alors qu’aucune pièce médicale n’en rapporte l’existence. En effet, les antécédents médicaux rappelés par le médecin consultant ne permettent aucunement d’établir une relation avec un syndrome dépressif.
Par ailleurs, il convient de rappeler que le taux d’IPP est fixé en fonction de l’état séquellaire au jour de la consolidation, peu important que soit survenu, entre celle-ci et l’accident du travail, un nouvel arrêt de travail (le 9 juin 2015), faisant suite, selon la société, à un entretien professionnel mais qui n’a pas donné lieu à une déclaration d’accident du travail pour une nouvelle lésion.
Dans ces conditions, eu égard aux séquelles imputées à l’accident du travail de M. [C] et à l’avis d’un praticien spécialiste en psychiatrie, il convient de fixer à 20 % le taux d’IPP dans les rapports entre la caisse et la société et, partant, d’infirmer la décision déférée.
La société qui succombe est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,
Rejette l’exception de péremption d’instance,
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 25 janvier 2021,
Statuant à nouveau,
Fixe à 20 % le taux d’IPP de M. [C] dans les rapports entre la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3], [Localité 5], [Localité 4] et la société [6] ;
Condamne la société [6] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE