Pas d’abattement SPRE pour les mauvais payeurs 
Pas d’abattement SPRE pour les mauvais payeurs 

Les mauvais payeurs de la SPRE n’ont pas le droit à l’abattement supplémentaire de 10% réservé à ceux qui installent un boîtier électronique et sont affiliés à un syndicat. Cet abattement ne bénéficie qu’au redevable à jour de ses paiements mensuels. 


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 10 JUIN 2022

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/17672 –��n° Portalis 35L7-V-B7E-CCYHY

Décision déférée à la Cour : jugement du 29 octobre 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°19/02384

APPELANTS

S.A.S. BIEROGRAMONT, anciennement LE VERDON CAFE, exerçant sous l’enseigne la bierotheque

La Bierotheque

90, chemin de Gabardie

31200 TOULOUSE

Immatriculée au rcs de Toulouse sous le numéro 538 266 412

M. [X] [U]

Né le 14 juin 1983 à Vernon (27)

De nationalité française

Demeurant 50, rue Matabiau – Hôtel Mermoz – 6ème étage – 31000 TOULOUSE

Représentés par Me Hervé REGOLI, avocat au barreau de PARIS, toque A 564

Assistés de Me Damien DE LAFORCADE plaidant pour la SELARL CLF, avocat au barreau de TOULOUSE, case 66

INTIMEE

SOCIETE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE)

Société civile, prise en la personne de ses cogérants en exercice domiciliés en cette qualité au siège social situé

27, rue de Berri

75008 PARIS

Représentée par Me Guillem QUERZOLA, avocat au barreau de PARIS, toque E 606

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 6 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Brigitte CHOKRON, Presidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Mmes Brigitte CHOKRON et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Brigitte CHOKRON , Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, en remplacement de Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, empêchée, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 29 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris qui a :

— condamné la société Biérogramont à payer à la SPRE :

—  655,09 euros TTC, au titre du solde restant dû pour l’activité soumise au barème ‘cafés et restaurants sonorisés’, pour la période expirant le 31 octobre 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2019,

—  9.407,93 euros TTC au titre du solde des sommes dues pour l’activité soumise au barème ‘discothèques et établissements similaires’, pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2018, avec intérêts au taux légal à hauteur de 5.332,90 euros à compter du 4 novembre 2014, 6.179,57 euros à compter du 15 septembre 2015, 6.837,39 euros à compter du 8 février 2016 et 8.778,83 euros à compter du 26 juillet 2017,

— ordonné la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière,

— condamné la société Biérogramont à payer à la SPRE 1.500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel,

— débouté la société Biérogramont et M.[U] de leurs demandes formées au titre des sommes dues au titre de la rémunération équitable et de leurs prétentions indemnitaires,

— débouté la SPRE de ses demandes en paiement de la rémunération équitable et en dommages-intérêts formées contre M.[U] personnellement in solidum avec la société Biérogramont,

— condamné in solidum la société Biérogramont et M.[U] à payer à la SPRE 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné in solidum la société Biérogramont et M. [U] aux dépens, lesquels pourront

être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Vu l’appel de ce jugement interjeté le 7 décembre 2020 par la société Biérogramont (SAS) et M. [U].

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 17 janvier 2022 par la société Biérogramont et M.[U], appelants, qui demandent à la cour de :

— déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d’appel la demande formulée par la SPRE visant à condamner in solidum la société Biérogramont et M.[U] à lui payer au titre de la rémunération équitable due pour l’exploitation de son établissement, la somme

supplémentaire de 9.164,44 euros pour la diffusion de musique attractive sur la période de droits allant jusqu’au 31/10/2020, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la notification des présentes conclusions valant mise en demeure, dont la capitalisation pourra intervenir conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SPRE de ses demandes en paiement de la rémunération équitable et en dommages-intérêts formées contre M. [U] personnellement in solidum avec la société Biérogramont,

— réformer le jugement entrepris sur le surplus,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

— constater que la SPRE ne démontre pas que l’établissement Biérogramont diffusait, avant 2019, de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l’activité commerciale,

Par conséquent,

— dire et juger que la qualification de discothèque ou établissement assimilé retenue par la SPRE à l’égard de la société Biérogramont jusqu’en 2019 n’est pas justifiée,

— dire et juger que les factures émises par la SPRE à l’égard de la société Biérogramont en application du barème des discothèques et établissements assimilés ne sont pas fondées,

— dire et juger que la société Biérogramont ne pourra se voir facturer une rémunération équitable qu’en tant que lieu sonorisé,

En conséquence

— débouter la SPRE du paiement de ses factures injustifiées et condamner la SPRE à rembourser le trop-perçu,

— condamner la SPRE à payer à la société Biérogramont la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

— condamner la SPRE à payer à M.[U] la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la qualification de discothèque était retenue,

— dire et juger que le calcul de la rémunération équitable, sur la base des seules recettes liées à l’activité de karaoké, aboutirait à un solde négatif de 3.904,51euros,

— condamner la SPRE à payer à la société Biérogramont la somme 3.904,51euros correspondant au trop trop versé,

Si par extraordinaire, la rémunération équitable devait être calculée sur la base des recettes globales des vendredis et samedis soirs, restauration incluse,

— dire et juger que le calcul de la rémunération équitable, sur la base des recettes globales des vendredis et samedis soir, ne pourrait conduire qu’à une facturation de la SPRE à hauteur de 4.250,16 euros,

— prendre acte de ce que la société Biérogramont ne s’opposerait pas au versement de cette somme,

En tout état de cause,

— rejeter la demande de dommages et intérêts formulée par la SPRE à l’encontre de la société Biérogramont en réparation d’un préjudice matériel,

— condamner la SPRE à payer à la société Biérogramont la somme de 15.150,63 euros hors taxe sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la SPRE aux entiers dépens en ce compris celui de l’article A 444-32 du code de commerce en cas de recours à l’exécution forcée.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 17 décembre 2021 par la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable (la SPRE), intimée et incidemment appelante, qui demande à la cour de :

— confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 29 octobre 2020 en toutes ses

dispositions, sauf en ce qu’il a :

— débouté la SPRE de sa demande de condamnation in solidum de M. [U],

— limité à la somme de 1.500 euros le montant des dommages-intérêts alloués à la SPRE en réparation de son préjudice matériel,

— déclarer la SPRE recevable et bien fondée en son appel incident, réformant le jugement de ces chefs et statuant a nouveau,

— condamner in solidum M.[U] au paiement des différentes indemnités mises à la charge de la société Biérogramont,

— condamner in solidum la société Biérogramont et M. [U] à payer à la SPRE la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel,

— condamner in solidum la société Biérogramont et M. [U] à payer à la SPRE au titre de la rémunération équitable due pour l’exploitation de son établissement la somme supplémentaire de 10. 313,44 euros pour la diffusion de musique attractive sur la période de droits allant jusqu’au 31/12/2021, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la notification des présentes conclusions valant mise en demeure, dont la capitalisation pourra intervenir conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

En tout état de cause,

— débouter la société Biérogramont et M. [U] de l’ensemble de leurs

demandes, fins et conclusions,

— condamner in solidum la société Biérogramont et M.[U] à payer à la SPRE la somme de 7.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel en application de

l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions prévues à l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture du 10 février 2022.

SUR CE, LA COUR :

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, au jugement entrepris et aux écritures précédemment visées des parties.

Il suffit de rappeler que la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable (la SPRE) perçoit et répartit par moitié entre les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes la rémunération équitable due par toute personne utilisant au sens de l’article L.214-1 du code de la propriété intellectuelle dans un lieu public sur le territoire français un phonogramme publié à des fins de commerce.

La société Biérogramont se présente comme exploitant, à Toulouse, un établissement de café-restaurant. Elle précise qu’il s’agit d’un restaurant ‘bistronomique’ proposant des repas le midi et le soir et organisant, en fin de semaine exclusivement, les vendredis et samedis, lorsque les convives le demandent, des soirées karaoké d’une durée maximale de deux heures. Elle indique déclarer à la SPRE, en tant qu’établissement diffusant de la musique et conformément à l’article L.214-1 du code de la propriété intellectuelle, ses recettes d’exploitation.

Contestant les factures émises par la SPRE au titre de la rémunération équitable et estimant ne pas avoir obtenu de celle-ci les explications demandées quant aux barèmes applicables, la société Biérogramont et son président, M. [U], lui ont fait délivrer assignation, suivant acte d’huissier de justice du 25 février 2019, devant le tribunal de grande instance (devenu tribunal judiciaire) de Paris, aux fins de voir juger que l’établissement en cause, ayant pour activité commerciale essentielle la restauration, ne relève pas du barème applicable à la catégorie des ‘discothèques et établissements assimilés’ mais de celui applicable aux ‘lieux sonorisés’ dans lesquels la diffusion de musique occupe une place accessoire. Les demandeurs ont fait valoir que l’élément attractif de l’établissement ne réside que dans son activité de café-restaurant ‘bistronomique’ distingué depuis 2015 comme ‘restaurant de maître restaurateur’, tandis que l’activité de karaoké dansant, proposée certains vendredis et samedis, quand les clients du restaurant, en fin de repas, en expriment la demande, est secondaire. Ils observent que l’établissement ne dispose d’ailleurs pas des infrastructures techniques propres aux lieux dédiés à la diffusion musicale. Ils en concluent que c’est à tort que la SPRE a considéré que l’activité de l’établissement en fin de semaine s’apparentait à celle de ‘discothèque ou établissement similaire’ dont la destination principale est de faire danser la clientèle. La SPRE a fait valoir en réplique que s’il est constant que le café-restaurant est, en semaine, un ‘lieu sonorisé’, assujetti à ce titre au barème applicable à cette catégorie d’établissements, il est établi en revanche qu’en fin de semaine, les vendredis et samedis, les soirées karaoké organisées à l’intention de la clientèle du café-restaurant sont des soirées dansantes dans le cadre desquelles la diffusion de musique ne peut être qualifiée d’accessoire. Elle souligne que ces soirées dansantes, auxquelles les clients se rendent en toute connaissance de cause, constituent, en fin de semaine, une activité essentielle de l’établissement dont la fréquentation en semaine, en l’absence d’une telle activité, est toute autre. Elle estime en conséquence que les recettes afférentes aux vendredis et samedis en soirée sont soumises au barème de rémunération équitable applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ et qu’il n’y a pas lieu, ainsi que le soutiennent subsidiairement les demandeurs, de soustraire de l’assiette de facturation les recettes provenant de l’activité de restauration.

Ces moyens et arguments des parties sont repris devant la cour tels que développés en première instance.

Ceci posé, le débat en cause d’appel est circonscrit à la rémunération équitable dont est redevable l’établissement au titre de son activité des vendredis et samedis en soirée.

Il est constant que, pour ce qui concerne son activité les autres jours de la semaine, l’établissement se classe dans la catégorie des ‘lieux sonorisés’ et relève du barème de rémunération équitable tel qu’arrêté, pour de tels lieux, par la commission prévue à l’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle dans une décision du 5 janvier 2010, publiée au Journal officiel du 23 janvier 2010 et entrée en vigueur le 1er janvier 2010, modifiée par une décision du 30 novembre 2011, publiée au Journal officiel du 7 décembre 2011 et entrée en vigueur le 1er janvier 2012.

En outre, il n’est pas discuté que la société Biérogramont était débitrice, au 31 octobre 2019, d’un solde de rémunération équitable de 655,09 euros TTC au titre de son activité de café-restaurant sonorisé. La disposition du jugement la condamnant à payer à la SPRE le montant de ce solde avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2019 n’est pas contestée par la société Biérogramont qui, sur ce chef, ne développe aucune critique dans les motifs de ses conclusions, ni ne demande dans le dispositif de ses conclusions qu’il soit statué à nouveau. Cette disposition du jugement est donc irrévocable.

La décision des premiers juges est en revanche contestée par les appelants en ce qu’elle retient que l’activité de l’établissement les vendredis et samedis en soirée relève du barème applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’.

Ainsi qu’il est rappelé par la SPRE, qui n’est pas contredite sur ce point, le barème applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ a été arrêté, dans les conditions prévues à l’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, par une décision du 30 novembre 2001, publiée au Journal officiel du 14 décembre 2001, entrée en vigueur le 1er janvier 2002, qui fixe la rémunération sur la base d’une assiette comprenant l’ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par les ventes des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes, confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d’un établissement. Le taux applicable à l’assiette est, hors abattements, de 1,65%.

Pour conclure que l’activité de l’établissement les vendredis et samedis en soirée devait être soumise au barème de rémunération équitable applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’, les premiers juges ont, en premier lieu, exactement observé que, dès le 5 janvier 2012, selon les déclarations du directeur de l’établissement, recueillies sur place par l’agent assermenté de la SPRE, ‘ des soirées karaoké (sont organisées) le vendredi de 20 heures à 2 heures et le samedi de 20 heures à 3 heures (…) Les soirées s’articulent sur la restauration puis le karaoké, et ensuite la danse s’il y a des volontaires après le karaoké qui a lieu de 22 heures 30 à 1 heure environ selon le nombre de parrticipants.’

Ils ont ensuite à juste titre relevé que le procès-verbal établi le 2 juin 2015 par la commission paritaire SPRE / SYNHORCAT retenait, concernant l’établissement de la société Biérogramont, la qualification de restaurant à ambiance dansante les vendredis et samedis en soirée car ‘une activité de karaoké et de danse est ajoutée à la restauration’. C’est vainement que la société Biérogramont et M. [U] prétendent n’avoir pu formuler leurs observations faute d’avoir participé à la réunion de la commission qui se tenait à Paris, alors qu’ils précisent, dans le même temps, ce qui est confirmé dans le procès-verbal, s’être fait représenter à cette réunion par deux membres de leur syndicat.

Les premiers juges ont souligné, avec raison, que les horaires tardifs de fermeture de l’établissement les vendredis ( 2 heures) et samedi (3 heures), qui, à une demi-heure près, ne sont pas sérieusement discutés par la société Biérogramont, correspondent à ceux pratiqués par les établissements offrant des prestations de soirées dansantes, étant en outre observé que de tels horaires ne sont pas, en toute hypothèse, ceux des cafés-restaurants qui ferment habituellement leurs portes avant minuit.

C’est encore à juste titre qu’ils relèvent que, selon l’attestation de son expert-comptable du 26 avril 2018, la société Biérogramont a exploité dans l’établissement, du 1er janvier au 31 décembre 2017, une activité de ‘restauration et bar avec animation karaoké dansant’ les vendredis et samedis en soirée. Il doit être ajouté que les attestations de l’expert-comptable des 15 juillet 2014 et 8 juillet 2015 mentionnaient, pareillement, cette même activité.

Enfin, des éléments de la procédure dont le jugement fait pertinemment état, établissent amplement que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, une communication importante est faite par l’établissement sur les soirées dansantes organisées les vendredis et samedis. Ainsi, la page d’accueil du site internet de l’établissement met en exergue l’animation dansante proposée en fin de semaine dans le cadre de la prestation de restauration : ‘Le Verdon Café, Restaurant Karaoké Dansant’, ‘Une animation karaoké accompagnera votre fin de repas, puis place à la danse avec un Dj!’ , ‘Le vendredi et le samedi pour des soirées avec animations, karaoké et soirée dansante’. La page Facebook de l’établissement fait pareillement mention de l’activité dansante au sein de l’établissement, insistant particulièrement sur cette activité, photos à l’appui montrant des convives en train de danser, pour attirer une clientèle qui n’est pas seulement désireuse de se restaurer mais aussi de chanter et danser: ‘Venez passer une soirée au Verdon Café ! Chanter et Danser!’, ‘Venez chanter et danser dans un lieu convivial!’, ‘ Si vous aimez chanter et danser dans une ambiance conviviale’, ‘Deux animations tous les vendredi et samedi soirs, karaoké pendant le repas puis dansant avec Dj jusqu’à la fermeture!!!’. Sur www.toulouscope.fr, l’établissement fait la promotion de ses ‘soirées festives en famille ou entre amis (…) Entre deux bouchées, les plus talentueux pourront s’essayer au micro pour un karaoké survolté. Rock, disco, zouk: tout y est . Enfin, avec [W] aux platines et [V] au bar, vous terminerez votre soirée tout en rythmes!’. Il ressort en outre de ces éléments de la procédure que, contrairement à ce que soutient la société Biérogramont, son établissement dispose des infrastructures ainsi que du personnel nécessaires à une animation musicale dansante : platines et Dj.

En considération de l’ensemble des observations qui précèdent, les premiers juges ont retenu à bon droit que la diffusion de phonogrammes du commerce est non pas accessoire mais essentielle en ce qu’elle est indispensable à l’activité exploitée par l’établissement en fin de semaine consistant à organiser des soirées dansantes et qu’en conséquence, l’établissement doit se voir qualifier, pour cette part de son activité, d’établissement similaire à une discothèque soumis, pour la fixation de la rémunération équitable, à l’application du barème prévu par la décision 30 novembre 2001 pour de tels établissements. C’est encore à bon droit qu’ils ont inclus dans l’assiette servant de base au calcul de la rémunération équitable l’intégralité des recettes générées par les soirées des vendredis et samedis qui sont destinées à la clientèle qui veut non seulement se restaurer mais aussi danser ou tout simplement voir danser, de sorte que, contrairement à ce que prétendent les appelants, l’activité de restauration ne saurait être regardée, lors des soirées dansantes des vendredis et samedis, comme indépendante ou ‘séparée en pratique’ de l’animation dansante, la propre communication de la société Biérogramont venant démentir, ainsi qu’il a été ci-dessus relevé, que la majorité des clients ne seraient attirés que par les prestations de ‘restaurant de maître restaurateur’. En outre, et ainsi que le souligne pertinemment la SPRE, la décision du 30 novembre 2001 applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ prévoit expressément que sont incluses dans l’assiette de calcul de la rémunération équitable ‘les recettes brutes produites par (…) la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes’, ce dont il suit qu’il n’y a pas lieu d’écarter les recettes de restauration sous le motif, invoqué par la société Biérogramont, qu’elles ‘ne sont pas produites par l’exploitation d’une piste de danse’ ou qu’elles ‘ne sont pas liées à la diffusion de phonogrammes’ alors que ces recettes sont à l’évidence générées dans le cadre de l’exploitation de soirées dansantes où sont utilisés des phonogrammes. Enfin, c’est à tort que la société Biérogramont prétend à l’application de la décision du 5 janvier 2010 en son article 2 visant les ‘bars et restaurants à ambiance musicale’ dans lesquels, à la différence des ‘lieux sonorisés’, la diffusion de musique est amplifiée et n’est pas simplement accessoire mais présente un caractère attractif. En effet, de tels établissements ne se livrent pas à des activités dansantes, de sorte que la société Biérogramont, qui exploite un établissement où sont organisées des soirées dansantes, ne saurait relever de la même catégorie.

Ceci posé, la cour constate que les appelants réitèrent en cause d’appel les contestations tenant au mode de calcul de la somme réclamée par la SPRE au titre du barème de rémunération équitable applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’.

Il n’est cependant pas contesté que la SPRE, se conformant aux dispositions de la décision du 30 novembre 2001, a réduit l’assiette de rémunération équitable d’un abattement de 12% pour les années où l’établissement a déclaré ses recettes dans les délais et de 17% sur les factures réglées par prélèvement automatique.

Les premiers juges ont à juste raison écarté l’application du forfait prévu à l’article 4 de la décision précitée dont la société Biérogramont ne peut solliciter le bénéfice dès lors qu’il ne peut être inférieur ni supérieur de plus de 10% du montant de rémunération équitable qui serait dû en application du barème proportionnel et qu’il est établi par la SPRE que pour les années 2014 à 2018, le montant résultant du forfait serait inférieur, de plus de 10%, à la rémunération équitable dûe en application du barème, abattements inclus.

Les premiers juges ont encore à juste raison écarté l’abattement supplémentaire de 10% demandé par la société Biérogramont pour avoir installé un boîtier électronique et être affiliée à un syndicat, lequel ne bénéficie qu’au redevable à jour de ses paiements mensuels. Or, ainsi que le montre la présente procédure, la société Biérogramont dont les contestations récurrentes sont anciennes et à laquelle est réclamé un solde de rémunération restant dûe sur une période remontant au 1er janvier 2012 n’est pas à jour de ses paiements mensuels et ne saurait prétendre à l’abattement supplémentaire invoqué.

Il découle des observations qui précèdent que le jugement est confirmé en ce qu’il a, par de justes motifs que la cour adopte, condamné la société Biegramont à payer à la SPRE la somme de 9.407,93 euros TTC au titre du solde des sommes dues pour l’activité soumise au barème ‘discothèques et établissements similaires’, pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2018, avec intérêts au taux légal à hauteur de 5.332,90 euros à compter du 4 novembre 2014, 6.179,57 euros à compter du 15 septembre 2015, 6.837,39 euros à compter du 8 février 2016 et 8.778,83 euros à compter du 26 juillet 2017, et débouté, en revanche, la société Biérogramont de ses demandes au titre d’un prétendu trop versé de rémunération équitable.

Le jugement a encore justement retenu un préjudice matériel pour la SPRE qui, à raison des multiples contestations de la société Biérogramont, à dû lui adresser, entre 2014 et 2018, pas moins d’une vingtaine de courriers recommandés. Les éléments de la procédure justifient de l’octroi d’une indemnité de 5.000 euros de ce chef, celle de 1.500 euros fixée par le tribunal apparaissant insuffisante à réparer l’entier préjudice subi.

La demande de la SPRE tendant à voir M. [U], président de la société Biérogramont, tenu in solidum du paiement des condamnations prononcées à l’encontre de celle-ci, sera par confirmation du jugement rejetée, la preuve n’étant pas rapportée d’une faute personnelle caractérisée qui lui serait imputable. Les éléments de la procédure ne permettent pas en effet d’établir que M. [U], quelle que soit, parfois, la véhémence des termes utilisés dans ses courriers adressés à la SPRE, se serait départi de ses responsabilités de dirigeant social en ayant commis des actes qui ne seraient pas rattachables à la défense, qui lui incombe, des intérêts de la société.

M. [U] n’est cependant pas fondé à demander réparation d’un préjudice moral dont la preuve n’est aucunement rapportée, pas plus que la société Biérogramont, dont les contestations s’avèrent mal fondées, n’est justifiée à former une telle demande. Les prétentions de ce chef sont en conséquence rejetées.

La SPRE poursuit, en cause d’appel, la condamnation in solidum de la société Biérogramont et M. [U] à lui payer au titre de la rémunération équitable due pour l’exploitation de son établissement la somme supplémentaire de 10. 313,44 euros pour la diffusion de musique attractive sur la période de droits allant jusqu’au 31/12/2021, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la notification des présentes conclusions valant mise en demeure, dont la capitalisation pourra intervenir conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil.

Elle indique que cette demande repose sur un changement d’activité de l’établissement qui lui a été notifié le 28 janvier 2019 par le conseil de la société Biérogramont aux termes d’un courrier qui précisait que ‘ l’établissement ne propose plus de soirées karaoké que quelques samedis soirs’. Elle ajoute avoir fait constater , à l’occasion de visites inopinées, le 14 juin 2019 et le 4 septembre 2019, la diffusion dans l’établissement d’une musique attractive par un Dj mais pas d’activité dansante et avoir donc informé la société Biérogramont, le 30 juin 2021, qu’elle serait désormais qualifiée de ‘bar- restaurant à ambiance musicale’ relevant de la décision du 5 janvier 2010 en son article 2.

Cependant une telle demande, certes formée au titre de la rémunération équitable, mais fondée sur une activité de l’établissement différente de celles évoquées en première instance, et sur laquelle la cour ne dispose pas d’éléments suffisants pour en apprécier le bien-fondé, tant sur le principe que sur le quantum, ne saurait être regardée comme complémentaire des demandes soumises au tribunal et doit être considérée, ainsi que le soutient la société Biérogramont, comme nouvelle en cause d’appel et par là-même irrecevable.

L’équité commande de condamner la société Biérogramont in solidum avec M. [U] à payer à la SPRE une indemnité de 7.500 euros en sus de celle qui lui a été octroyée en première instance, au titre des frais irrépétibles d’appel et de débouter les appelants de leur demande formée à ce même titre.

Le jugement doit être confirmé sur le sort des dépens de première instance en outre, succombant à l’appel les appelants en supporteront in solidum les dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions exceptée celle condamnant la société Biérogramont à payer à la SPRE la somme de 1.500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne la société Biérogramont à payer à la SPRE la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel,

Ajoutant,

Déclare irrecevable comme nouvelle en cause d’appel la demande de la SPRE tendant à la condamnation in solidum de la société Biérogramont et M. [U] à lui payer au titre de la rémunération équitable due pour l’exploitation de son établissement la somme supplémentaire de 10. 313,44 euros pour la diffusion de musique attractive sur la période de droits allant jusqu’au 31/12/2021, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la notification des présentes conclusions valant mise en demeure, dont la capitalisation pourra intervenir conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires aux motifs de l’arrêt,

Condamne la société Biérogramont in solidum avec M. [U] à payer à la SPRE une indemnité de 7.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel et déboute les appelants de leur demande formée à ce même titre,

Condamne la société Biérogramont in solidum avec M. [U] aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Conseillère, Faisant Fonction de Présidente


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