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08/02/2024
ARRÊT N°24/75
N° RG 22/01779 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OY2Q
SC – MCC
Décision déférée du 19 Avril 2022 – TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’ALBI – 21/01625
S. MARCOU
[E] [N]
C/
[P] [U]
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 2
***
ARRÊT DU HUIT FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANT
Monsieur [E] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Emmanuelle DESSART de la SCP SCP DESSART, avocat au barreau de TOULOUSE
Assisté de Me Patrick LAGASSE DE LA SCP LAGASSE-GOUZY, avocat au barreau d’ALBI
INTIMÉE
Madame [P] [U]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Luc RIMAILLOT de la SELARL ALARY FEMENIA RIMAILLOT, avocat au barreau D’ALBI
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant, C. DUCHAC, Présidente et MC. CALVET, Conseiller, chargés du rapport, Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. DUCHAC, présidente
V. CHARLES-MEUNIER, conseiller
M.C. CALVET, conseiller
Greffier, lors des débats : C. CENAC
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement,par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
– signé par C. DUCHAC, présidente, et par M. TACHON, greffier de chambre.
EXPOSE DU LITIGE :
Après avoir acquis en indivision une parcelle sise à [Localité 7] (Tarn) au cours de l’année 2008, M. [E] [N] et Mme [P] [U] y ont fait construire une maison individuelle à ossature bois dans laquelle ils ont vécu ensemble.
A la suite d’un dégât des eaux survenu le 6 novembre 2009 et d’une expertise judiciaire, M. [N] et Mme [U] ont engagé une action en responsabilité relativement à des désordres ayant affecté l’immeuble à l’encontre d’intervenants à la construction et à leurs assureurs respectifs qui a donné lieu à plusieurs décisions.
Le couple s’est séparé au mois de mai 2017.
Suivant acte notarié du 13 avril 2018, il a été procédé au partage de l’indivision conventionnelle existant entre M. [N] et Mme [U]. Le bien immobilier sis à [Localité 7], estimé à la valeur de 450.000 euros, a été attribué à M. [N], à charge pour ce dernier de régler le solde des prêts immobiliers souscrits auprès du [6] s’élevant à 250.170 euros et de payer une soulte de 99.915 euros à Mme [U].
Suivant acte notarié distinct du même jour, Mme [U] a cédé les 50 parts sociales qu’elle détenait dans la société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) [9] à M. [N].
Par un arrêt du 2 mai 2019, la cour d’appel de Bordeaux statuant sur renvoi de cassation, a confirmé le jugement prononcé le 3 mars 2015 par le tribunal de grande instance d’Albi en ce qu’il a condamné la S.A.R.L. [8] à payer diverses sommes au titre de sa responsabilité décennale engagée, avec la précision que ladite société devra intégralement prendre en charge le paiement à Mme [U] et M. [N], ensemble, des sommes mises à sa charge, outre les frais irrépétibles et les dépens.
Un protocole transactionnel a été signé le 22 octobre 2019 entre la S.A.R.L. [8] d’une part, M. [N] et Mme [U] d’autre part, aux termes duquel la société s’est engagée à leur payer la somme forfaitaire de 45.000 euros en exécution de l’arrêt de cour d’appel de Bordeaux du 2 mai 2019.
La somme réglée par la S.A.R.L. [8] a été consignée sur le compte Carpa de l’avocat commun de M. [N] et Mme [U] au mois d’août 2020. M. [N], par l’intermédiaire de son nouvel avocat, s’est opposé à la libération de la moitié des fonds au profit de Mme [U].
Par acte d’huissier du 8 novembre 2021, Mme [P] [U] a assigné M. [E] [N] en paiement de la somme de 22.500 euros correspondant à la moitié de l’indemnité transactionnelle versée sur le fondement des articles 1101 et suivants et 1341 du code civil.
Par jugement contradictoire du 19 avril 2022, le tribunal judiciaire d’Albi a :
– dit n’y avoir lieu à révocation de l’ordonnance de clôture en date du 9 février 2022 ;
– déclaré irrecevables les conclusions et pièces de M. [E] [N] postérieures à cette date, à savoir ses conclusions notifiées par RPVA le 22 février 2022 et pièces n° 3, 4 et 5 du bordereau ;
– dit que la moitié de l’indemnité transactionnelle de 45.000 euros revient à Mme [P] [U] ;
– ordonné en conséquence la libération de la somme de 22.500 euros détenue sur le compte Carpa de Maître [M], avocate à Castres, au profit de Mme [P] [U] ;
– condamné M. [N] à payer à Mme [U] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [N] aux dépens de l’instance ;
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Par déclaration électronique du 9 mai 2022, M. [N] a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a :
– dit que la moitié de l’indemnité transactionnelle de 45.000 euros revient à Mme [U] ;
– ordonné en conséquence la libération de la somme de 22.500 euros détenue sur le compte Carpa de Maître [M], avocate à Castres, au profit de Mme [U] ;
– condamné M. [N] à payer à Mme [U], la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [N] aux dépens de l’instance.
Dans ses dernières conclusions d’appelant notifiées le 9 novembre 2023, M. [N] demande à la cour de :
Vu les articles précités,
– rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées ;
– déclarer recevable l’appel formé par M. [N] à l’encontre du jugement rendu le 19 avril 2022 par le tribunal judiciaire d’Albi ;
– infirmer le jugement rendu le 19 avril 2022 par le tribunal judiciaire d’Albi ;
Statuant à nouveau,
– juger que M. [N] a financé seul le coût des travaux de reprise des désordres affectant l’immeuble ;
– juger que Mme [U] n’a pas participé au paiement des travaux de reprise des désordres affectant l’immeuble ;
– juger que l’indemnité transactionnelle, d’un montant de 45.000 euros, devait permettre le financement des travaux de reprise et la remise en état du bien immobilier ;
– juger que l’indemnité transactionnelle, d’un montant de 45.000 euros, doit suivre le sort de la propriété de l’immeuble ;
– juger que M. [N] est seul créancier de la somme transactionnelle de 45.000 euros ;
– juger que le montant de l’indemnité transactionnelle, soit 45.000 euros, doit être attribué en totalité à M. [N] ;
En conséquence,
– condamner Mme [U] à payer à M. [N] la somme de 22.500 euros en remboursement du montant indûment perçu par elle au titre de l’indemnité transactionnelle ;
– condamner Mme [U] à payer à M. [N] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– la condamner aux entiers dépens de l’instance.
Dans ses dernières conclusions d’intimé notifiées le 26 octobre 2022, Mme [U] demande à la cour de :
Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’albi le 19 avril 2022,
Vu les articles 1101 et suivants et 1341 du code civil,
Vu les articles 908 et 954 du code de procédure civile,
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Albi du 19 avril 2022 (RG n°21/01625) en toutes ses dispositions ;
– condamner M. [N] à payer à Mme [U] la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 13 novembre 2023 et l’audience de plaidoiries fixée le 28 novembre 2023 à 14 heures.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION :
Mme [U] a engagé son action en paiement à l’encontre de M. [N] sur le fondement des articles 1101 et suivants et 1341 du code civil.
Les parties s’opposent sur l’indemnité versée par la société [8] en vertu du protocole d’accord du 22 octobre 2019, M. [N] revendiquant la totalité de cette indemnité alors que Mme [U] revendique la moitié de cette indemnité correspondant à sa quote-part.
Le premier juge a jugé que la moitié de l’indemnité transactionnelle de 45.000 euros revenait à Mme [U], soit la somme de 22.500 euros, s’agissant d’une créance indivise des anciens concubins contre la société [8] ayant exécuté les travaux litigieux résultant du protocole d’accord du 22 octobre 2019, en l’absence de créance établie de M. [N] contre son ancienne concubine.
Au soutien de son appel, M. [N] expose que l’indemnité versée en vertu du protocole transactionnel doit lui revenir intégralement au motif qu’il a acquis l’entière propriété de l’immeuble en 2018, avec pour corollaire la prise en charge des réparations, de sorte que l’indemnité destinée à réparer les désordres et malfaçons l’affectant doit suivre le sort de la propriété dudit immeuble.
L’appelant soutient en outre que les travaux de reprise des désordres ont été financés par un prêt bancaire contracté par la société [9] constituée le 18 mars 2013, dont il indique qu’elle a été créée par le couple pour exploiter les panneaux photovoltaïques installés sur l’immeuble, et qu’il est désormais seul associé de la personne morale qui rembourse ce prêt, après la cession de ses parts par Mme [U] suivant acte notarié du 13 avril 2018.
L’appelant soutient enfin que la soulte due à Mme [U] dans le cadre du partage de l’indivision en 2018 a été sous-évaluée dans la mesure où il n’a pas été tenu compte des désordres affectant l’immeuble lors de son estimation et où le financement des travaux de reprise de la toiture s’est opéré par le biais d’un prêt contracté par la société [9] dont il est désormais le seul associé.
Le protocole transactionnel a été conclu entre les anciens concubins et la S.A.R.L. [8] à la suite de l’arrêt prononcé par la cour d’appel de Bordeaux le 2 mai 2019.
La cour d’appel de Bordeaux, qui a statué après cassation de l’arrêt du 14 novembre 2016 de la cour d’appel de Toulouse, a confirmé le jugement prononcé le 3 mars 2015 par le tribunal de grande instance d’Albi en ce qu’il a jugé que la responsabilité décennale de la S.A.R.L. [8] était engagée et l’a condamnée à payer diverses sommes au titre des travaux de reprise, des frais de maîtrise d’oeuvre, des mesures conservatoires et du préjudice de jouissance, avec la précision que ladite société devra intégralement prendre en charge le paiement à Mme [U] et M. [N], ‘ensemble’, des sommes mises à sa charge.
Ainsi que le reconnaît M. [N] dans ses écritures, le protocole d’accord a été conclu en exécution de cet arrêt, étant précisé qu’il stipule que ‘La SARL [8] s’engage à verser la somme forfaitaire de 45.000,00€ en exécution de l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux en date du 02 mai 2019″ et que cette somme doit être versée à M. [N] et Mme [U] dans les quinze jours de la signature du protocole.
Ledit protocole rappelle qu’en vertu de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux, la société [8] est tenue de prendre en charge l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre et énonce qu’il est destiné d’une part à mettre un terme définitif au litige opposant la société [8] aux consorts [N] et [U], ces derniers s’engageant à renoncer à toutes formes d’exécution forcée pour recouvrer des sommes en sus de ‘l’indemnité forfaitaire’ ainsi qu’à toute autre action en paiement à son encontre, d’autre part à réparer les ‘préjudices de toute nature’ que M. [N] et Mme [U] ‘auraient pu subir et pourraient invoquer’ concernant les travaux effectués par la société [8].
Ce protocole traduit la volonté des parties de transiger sur l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux par des concessions réciproques et selon des stipulations claires, précises et non équivoques, la somme devant être versée par la société [8] aux consorts [N] [U] étant moindre que les sommes allouées en vertu des condamnations prononcées par la cour d’appel de Bordeaux, ces derniers s’engageant en contrepartie à ne pas intenter une nouvelle action en justice à raison des travaux réalisés par ladite société, de sorte que l’indemnité convenue s’analyse en une indemnité transactionnelle recouvrant les ‘préjudices de toute nature’ subis par les deux maîtres d’ouvrage.
Il en ressort que M. [N] et Mme [U] ont poursuivi de concert la procédure judiciaire et ont obtenu une condamnation de la société [8] à leur payer ‘ensemble’ diverses sommes en réparation de leurs préjudices de toute nature et ont tous deux été parties au protocole d’accord leur octroyant une indemnité transactionnelle qui constitue une créance indivise, alors même que M. [N] était devenu le seul propriétaire de l’immeuble indivis en 2018.
En effet, aux termes de l’acte authentique de partage de l’indivision ayant existé entre M. [N] et Mme [U] reçu par Maître [G], notaire à [Localité 5] (Tarn), le 13 avril 2018, rappelant que ces derniers ont acquis en indivision à concurrence de la moitié chacun le 12 mars 2008 le terrain à bâtir sur lequel ils ont fait édifier leur maison d’habitation à [Localité 7], ledit bien a été attribué à M. [N], à charge pour ce dernier de régler le solde des prêts immobiliers souscrits auprès du [6] et de payer une soulte à Mme [U].
Ainsi que l’a relevé à juste titre le premier juge, il n’est pas fait état du litige relatif à la construction, ni de comptes présents ou à venir concernant la prise en charge des travaux de reprise des désordres alors que d’une part, l’arrêt de la cour d’appel de Toulouse sur l’appel du jugement du tribunal de grande instance d’Albi du 3 mars 2015 était intervenue le 14 novembre 2016, d’autre part les anciens concubins admettaient aux termes de leurs écritures respectives que les travaux de reprise des désordres étaient réalisés en 2013, reconnaissance réitérée en appel.
De plus, l’appelant n’établit pas par la production de l’avenant au contrat de crédit souscrit par la société [9] le 14 novembre 2019, lequel stipule que les fonds prêtés sont destinés à financer une installation solaire photovoltaïque, que le crédit initial aurait été affecté au financement des travaux de reprise, crédit dont au demeurant il n’a pas fait état au moment du partage.
La cour relève que l’appelant invoque en réalité une créance, née en 2013, de la société [9] à l’encontre des deux concubins alors propriétaires de l’immeuble en indivision sans que cette société ne soit partie à la présente procédure et sans qualité pour le faire puisqu’il agit à titre personnel et non pour le compte de ladite société.
Par ailleurs, Mme [U] se prévaut des conclusions de M. [N] dans le cadre d’une instance les ayant opposés devant le juge aux affaires familiales en 2019 qu’elle verse aux débats, dans lesquelles il indiquait que Mme [U] devait recevoir la moitié de l’indemnité transactionnelle versée en exécution du protocole d’accord du 22 octobre 2019, pour conclure que cette déclaration constitue un aveu judiciaire.
M. [N] ne répond pas sur ce point.
Si l’aveu fait au cours d’une instance précédente, même opposant les mêmes parties, n’a pas le caractère d’un aveu judiciaire et n’en produit pas les effets, il résulte des autres éléments qui précèdent et à défaut d’établir un accord exprès sur la répartition des fonds que M. [N] ne démontre pas qu’il pourrait prétendre à plus de la moitié de l’indemnité transactionnelle, créance indivise qui doit revenir aux anciens concubins pour moitié chacun.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a dit que la moitié de l’indemnité transactionnelle de 45.000 euros revient à Mme [U] et ordonné la libération de la somme de 22.500 euros détenue sur le compte Carpa de Maître [M], avocate à Castres, au profit de Mme [U].
Sur les dépens
Les condamnations de M. [N] à payer à Mme [U] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés et à supporter les dépens de première instance seront confirmées.
M. [N], qui succombe en son appel, sera condamné aux dépens d’appel.
En considération de l’équité, l’appelant, partie perdante, sera condamné à payer à l’intimée la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré ;
Y ajoutant,
Condamne M. [E] [N] à payer à Mme [P] [U] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [E] [N] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,
M. TACHON C. DUCHAC