Parts sociales : décision du 30 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lyon RG n° 22/00949

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Parts sociales : décision du 30 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lyon RG n° 22/00949
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TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 9 cab 09 F

N° RG 22/00949 – N° Portalis DB2H-W-B7F-WH6I

Notifiée le :

Expédition et copie à :
la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES – 1102
la SELARL VITAL-DURAND ET ASSOCIES – 1574

ORDONNANCE

Le 30 Janvier 2024

ENTRE :

DEMANDERESSE

Madame [U], [V] [Y]
née le 20 Avril 1965 à PARIS (75012), demeurant Les terrasses Basse Gondeau – 97232 LE LAMENTIN – MARTINIQUE

représentée par Maître Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
et Maître Franck LOPEZ avocat plaidant au barreau de PARIS

ET :

DEFENDERESSE

S.E.L.A.R.L. BCM, administrateurs judiciaires,
dont le siège social est sis 40 rue de Bonnel – 69003 LYON

représentée par Maître Jacques VITAL-DURAND de la SELARL VITAL-DURAND ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON
et par maître Yves-Marie LE CORFF avocat plaidant au barreau de PARIS

EXPOSE DU LITIGE

La SCI 2GC était une société dont les parts étaient également réparties entre Monsieur [Z] [K], Monsieur [I] [N] et Madame [U] [Y].

Suivant assemblée du 05 novembre 2016, la dissolution anticipée et la mise en liquidation amiable de la société a été prononcée.
La société d’administrateurs judiciaires BCM, en la personne de Maître [O] [T] [J], a été nommée aux fonctions de liquidateur conventionnel.

Suivant assemblée du 16 octobre 2017, les comptes de la SCI 2GC pour les exercices 2014, 2015 et 2016, ont été approuvés, Madame [Y] ayant voté contre cette résolution.

La clôture des opérations de liquidation a été décidée par une assemblée du 09 juillet 2018, en dépit de l’opposition de Madame [Y].

Le 31 octobre 2018, les comptes de clôture de la liquidation ont été déposés par le liquidateur au greffe du tribunal mixte de commerce de FORT DE FRANCE.

Par acte d’huissier, délivré le 21 janvier 2022, Madame [U] [Y] a fait assigner la BCM devant le tribunal judiciaire de LYON.

Au terme de son acte introductif d’instance, elle sollicitait principalement, au visa des articles 1850 et 1231-1 du code civil, la condamnation de la SERL d’Administrateurs judiciaires BCM à lui payer la somme de 36 957,95 euros à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts de droit à compter de l’assignation et capitalisation des intérêts échus depuis plus d’une année.

Au terme de conclusions d’incident, notifiées par RPVA le 22 juin 2023, la SELARL BCM, Administrateurs judiciaires, sollicite au visa des articles 122 du code de procédure civile, 1240, 1241 et 1843-5 du code civil, de :

Rejeter comme irrecevables les demandes de Madame [U] [Y] pour défaut de qualité à agir,Condamner Madame [U] [Y] à verser à la SELARL BCM la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,Condamner Madame [U] [Y] aux entiers dépens.
Elle rappelle que Madame [Y] réclame, à titre de préjudice, sa prétendue quote-part en qualité d’associé sur la somme qui aurait dû être encaissée par la SCI et qui aurait dû constituer un boni de liquidation. Selon elle, elle ne sollicite donc que sa quote-part du préjudice social, ne justifiant d’aucun préjudice personnel distinct.
Elle considère que ses demandes ne sont recevables ni sur le fondement de l’article 1843-5 du code civil, ni sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, dès lors qu’elle ne justifie d’aucun préjudice strictement personnel, ne faisant état que d’un préjudice qui n’est que le corollaire du préjudice social.
Elle en déduit que son action est irrecevable pour défaut de qualité à agir.

Madame [U] [Y], dans ses conclusions d’incident transmises par voie électronique le 02 mai 2023, demande, sur le fondement des articles 1850 et 1231-1 du code civil, mais également subsidiairement des articles 1240 et 1241 du code civil, de :

Débouter la SERL d’Administrateurs Judiciaires BCM de son incident,La condamner au paiement de la somme de 1500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,Condamner la SERL d’Administrateurs Judiciaires BCM aux dépens de l’incident.
Elle soutient que la responsabilité du gérant est déterminée par les dispositions de l’article 1850 du code civil, une responsabilité identique étant encourue par le liquidateur conventionnel de la société.
Elle souligne que si la défenderesse a soulevé l’irrecevabilité de ses demandes sur le fondement du texte précité, elle a néanmoins invoqué à titre subsidiaire la responsabilité de la société BCM sur le fondement des articles 1240 et suivants du code civil, dans ses conclusions au fond.
Elle considère que la carence de la société BCM est la cause de la privation d’une partie de ses droits, ayant conduit à son préjudice personnel.

A l’audience du 07 décembre 2023, les parties ont maintenu leurs prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 30 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’action de Madame [U] [Y]

D’une part, il ressort des dispositions de l’article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
En application de l’article 789 6° du code de procédure civile, le juge de la mise en état, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, est jusqu’à son dessaisissement seul compétent à l’exclusion de toute autre formation de jugement pour statuer sur les fins de non-recevoir.

D’autre part, l’article 1843-5 du code civil prévoit que, outre l’action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l’action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société ; en cas de condamnation, les dommages-intérêts sont alloués à la société.

L’article 1240 du même code rappelle que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’espèce, il ressort des dernières conclusions au fond transmises par Madame [Y] le 02 mai 2023, que celle-ci sollicite l’indemnisation de son préjudice, à titre principal sur le fondement de l’article 1850 du code civil, à titre subsidiaire en application des articles 1240 et 1241 du code civil.

Or, comme le souligne la défenderesse, l’action ut singuli visée par l’article 1843-5 du code civil n’est autorisée qu’à l’encontre des gérants, une telle action à l’encontre du liquidateur étant dès lors irrecevable.

En outre, s’agissant des demandes formées sur le fondement de l’article 1240 du code civil, elles ne sont recevables qu’à la condition que l’associé justifie d’un préjudice personnel réparable, affectant directement son patrimoine, sans impliquer en même temps une atteinte au patrimoine social ou un appauvrissement de ce dernier.

A ce titre, le boni de liquidation peut être défini comme ce qui reste après le désintéressement complet des créanciers sociaux et le remboursement des apports au moyen des sommes provenant de la vente des différents éléments du patrimoine de la société. Il se présente donc comme un enrichissement du patrimoine social.

Or, la requérante soutient elle-même dans ses écritures au fond que « Madame [Y] étant propriétaire du tiers des parts sociales, le tiers de cette somme aurait dû lui revenir dans le cadre de la liquidation conventionnelle étant observé qu’il résulte de l’assemblée du 09 Juillet 2018 que l’ensemble des dettes sociales avaient été payées de sorte que cette somme de 110.873,85 euros- correspondant selon elle à des loyers qui auraient dû être encaissés- aurait constitué un boni de liquidation net pour les associés. Madame [Y] aurait donc dû bénéficier du tiers de ce boni de liquidation. »

Dès lors, force est de constater que le préjudice allégué par Madame [Y] ne se distingue pas de celui qui atteindrait la société tout entière, dont il n’est en réalité que le corollaire.

Par conséquent, l’action de Madame [Y] sera déclarée irrecevable.

Sur les mesures accessoires

Aux termes de l’article 790 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées en application de l’article 700.

Madame [U] [Y], partie succombant, sera condamnée à supporter les entiers dépens de la procédure.

L’équité motive de condamner Madame [U] [Y] à verser à la SELARL BCM la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Lise-Marie MILLIERE, Juge de la Mise en État du cabinet 09F, assistée de Danièle TIXIER Greffier,

STATUANT publiquement, par décision contradictoire et susceptible d’appel,

DECLARONS Madame [U] [Y] irrecevable en son action,

CONDAMNONS Madame [U] [Y] à supporter les entiers dépens de la procédure,

CONDAMNONS Madame [U] [Y] à verser à la SELARL BCM la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Et la présente ordonnance a été signée par le Juge de la Mise en État et le Greffier

LA GREFFIERE LA JUGE DE LA MISE EN ETAT

 


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