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COUR D’APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 25 JANVIER 2024
N° RG 20/01483 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LQNW
[D] [C]
c/
S.A.S CONSTRUCTION CLEMENT VIRGO
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décisions déférées à la cour : jugement rendu le 16 décembre 2019 (RG : 11-18-0981) et jugement rectificatif rendu le 03 février 2020 (RG : 20/56) par le Tribunal d’Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d’appel du 18 mars 2020
APPELANT :
[D] [C]
né le 21 Août 1953 à [Localité 4]
de nationalité Française
Profession : Comptable,
demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me David LARRAT de la SELARL H.L. CONSEILS, avocat au barreau de PERIGUEUX
INTIMÉE :
S.A.S CONSTRUCTION CLEMENT VIRGO
venant aux droits de l’EURL CONSTRUCTION VIRGO CLEMENT, immatriculée au RCS PERIGUEUX sous le n° 1193531385, en vertu d’un traité d’apport en date du 3 septembre 2019, dont le siège social est [Adresse 1] à [Localité 3] pris en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Guillaume DEGLANE de la SCP SOCIETE CIVILE PROFESSIONNELLE INTERBARREAUX LDJ-AVOCATS, avocat au barreau de PERIGUEUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 novembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Jacques BOUDY
Conseiller : Monsieur Alain DESALBRES
Conseiller : Monsieur Rémi FIGEROU
Greffier : Madame Audrey COLLIN
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant devis accepté du 26 juillet 2017, l’EIRL construction Virgo Clèment s’est vue confier des travaux de rénovation de la maison d’habitation de Monsieur [D] [C] pour un montant total de 21 402,16 euros.
Les travaux concernés par ce devis ont été facturés le 30 octobre 2017 pour un montant de 17 235,91 euros et ont été intégralement payés par M. [C].
Des travaux complémentaires non prévus dans le devis ont été effectués et ont donné lieu à une facture en date du 27 octobre 2017 d’un montant total de 12 233,24 euros. Cette facture a été partiellement payée par M. [C] à hauteur de 5929,32 euros.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 mars 2018, l’EIRL construction Virgo Clèment a demandé à M. [C] de lui régler le solde de sa facture, soit la somme de 6 303,92 euros.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 mai 2018, M. [C] a indiqué à l’EIRL construction virgo Clèment qu’il refusait de lui payer cette somme.
Par acte du 27 juin 2018, reçu au greffe le 2 juillet 2018, l’EIRL construction Virgo Clèment a saisi le tribunal d’instance de Périgueux d’une requête en injonction de payer.
Une ordonnance portant injonction de payer a été rendue le 6 septembre 2018, enjoignant de payer M. [C] à l’EIRL construction Virgo Clément la somme de 6.303,92 € au principal avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 14 juin 2018 et 51,48 € au titre des frais la requête.
L’ordonnance a été signifiée à M. [C] selon acte d’huissier en date du 27 septembre 2018.
Par acte du 3 octobre 2018, M. [C] a formé opposition au greffe du tribunal d’instance de Périgueux à l’injonction de payer rendue.
Par jugement du 16 décembre 2019, rectifiée par un jugement en date du 3 février 2020, le tribunal d’instance de Périgueux a :
– déclaré recevable l’opposition formée par M. [C] contre l’injonction de payer du 6 septembre 2018,
– dit que le présent jugement se substituait à l’ordonnance d’injonction de payer du 6 septembre 2018,
– condamné M. [C] à payer à l’EIRL construction virgo Clément une somme de 6303,92 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2018,
– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil,
– rejeté la demande de M. [C] aux fins de vois ordonner une expertise judiciaire,
– condamné M. [C] à payer à l’EIRL construction virgo Clément la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté M. [C] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [C] aux entiers dépens.
M. [C] a relevé appel de ce jugement le 18 mars 2020.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 15 juin 2020, M. [C] demande à la cour, sur le fondement des articles L111-1 et L112-1 et suivants du code de la consommation, 1217 et 1231-1, 1223 du code civil, 143 du code de procédure civile :
– de le déclarer recevable en son appel et bien fondé en ses demandes,
– de réformer le jugement dont appel en ce qu’il l’a :
-condamné à payer à l’EIRL construction Virgo Clément une somme de 6303,92 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2018,
– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil,
– rejeté sa demande aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire, et condamné à payer à l’EIRL construction virgo Clément la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,
statuant à nouveau,
à titre principal,
– de constater qu’aucun contrat n’a été valablement conclu entre les parties en l’absence de devis signé portant sur les travaux complémentaires réalisés,
– de débouter l’EIRL construction Virgo Clément de sa demande de paiement de la somme de 6457,33 euros,
à titre subsidiaire,
– d’ordonner avant dire droit, une expertise judiciaire par tel expert qu’il plaira à la cour avec la mission de se faire communiquer tous documents utiles, convoquer les parties, constater les malfaçons affectant les travaux effectués par l’entreprise Virgo Clèment, chiffrer le coût des travaux, déterminer l’imputabilité des travaux et faire les comptes entre les parties,
– de surseoir à statuer sur les autres demandes dans l’attente du rapport d’expertise,
À titre infiniment subsidiaire,
– de constater que l’entreprise Virgo Clèment a mal exécuté les prestations ayant fait l’objet de la facture,
– de diminuer le prix à la somme de 5 929,32 euros,
– de débouter l’entreprise Virgo Clèment de sa demande de paiement de la somme de 6 457,33 euros,
En tout état de cause,
– de débouter l’entreprise Virgo Clèment de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– de condamner l’entreprise Virgo Clèment au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner l’entreprise Virgo Clèment aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 11 août 2020, la SAS Construction Clément Virgo qui vient désormais aux droits de L’EURL EIRL Construction Virgo Clèment en vertu d’un traité d’apport en date du 3 septembre 2019 demande à la cour, sur le fondement des articles1100 et 1231-1 du code civil:
– de dire et juger M.[C] recevable mais mal fondé en son appel
– dire et juger que l’EIRL construction virgo Clèment est titulaire d’une créance certaine,
en conséquence,
– de confirmer le Jugement dont appel en ce qu’il a retenu le droit à créances de l’EURL Construction Virgo Clement à la somme de 6.303,92 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure adressée par voie de courrier recommandé en date du 28 mars 2018,
y ajoutant,
– de réformer le jugement,
– de Condamner M.[C] à verser à la SAS Construction Virgo Clement venant aux droits de l’EIRL Construction Virgo Clement la somme de 6.303,92 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure adressée par voie de courrier recommandé du 28 mars 2018,
– de dire que les intérêts seront capitalisés annuellement,
– de condamner M.[C] à verser à la SAS Construction Virgo Clement venant aux droits de l’EIRL Construction Virgo Clement la somme de 3.000,00 euros sur le
fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de débouter M.[C] de l’intégralité de ses demandes,
– de condamner M.[C] aux entiers dépens en ceux compris les frais éventuels d’exécution.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2023.
MOTIFS
Sur l’existence d’un contrat au titre des travaux supplémentaires
Le tribunal a jugé que les prestations supplémentaires n’étaient dues qu’autant qu’elles avaient été préalablement acceptées dans leur nature et leur prix. Or en l’espèce, il s’évinçait des échanges de courriels entre les parties que le maître d’ouvrage considérait que les travaux litigieux avaient bien été commandés et qu’il s’était engagé à régler le solde de la facture de l’artisan pour par la suite en contester le coût ; sans toutefois prouver qu’ils ne seraient pas conformes aux prix usuels pratiqués; puis leur bonne réalisation ; sans davantage démontrer l’existence de malfaçons de ceux-ci. Aussi, le premier juge a considéré que la demande en paiement était fondée.
M. [C] soutient qu’il appartient à celui qui se prétend créancier d’une obligation de rapporter la preuve du contrat. Or en l’espèce l’intimée ne démontre aucun accord sur l’acceptation du maitre de l’ouvrage sur la réalisation des travaux supplémentaires et sur le coût de ceux-ci. Il rappelle que seule une preuve écrite peut être fournie pour les contrats dépassant la somme de 1 500 €.
La SAS Construction Clément Virgo considère pour sa part que M [C] a ratifié les travaux supplémentaires qu’elle a réalisés et qui ont été réceptionnés sans contestation. L’absence de devis résulte uniquement du fait qu’il s’agit de travaux supplémentaires à ceux prévus initialement et qu’ils ont été demandés en cours de chantier par le maître de l’ouvrage. L’absence de devis n’a pas pour effet d’empêcher l’existence d’une obligation de paiement de la facture du 27 octobre 2017 par M [C], puisqu’il a reconnu en être débiteur.
***
Conformément à l’article 1104 du code civil, les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
En vertu de l’article 1153 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
L’article 1359 du code civil dispose par ailleurs que : « L’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret ( au jour des liens entre les parties cette somme s’élevait à 1500 euros) doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.
Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte juridique, même si la somme ou la valeur n’excède pas ce montant, que par un autre écrit sous signature privée ou authentique.
Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa demande.
Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce montant, porte sur le solde ou sur une partie d’une créance supérieure à ce montant. »
En l’espèce, il résulte de l’échange de courriels entre les parties qu’en cours de chantier, M. [C] a commandé à l’intimée des travaux supplémentaires.
Puis après avoir réalisé les travaux supplémentaires litigieux, la SAS Construction Clément Virgo a, le 27 octobre 2017, établi une facture d’un montant de 12 233, 24 euros TTC qu’elle a adressée au maître de l’ouvrage.
Or, l’appelant a procédé au règlement échelonné de cette facture par des règlements d’acomptes de 1729,32 euros le 3 novembre 2017, 1500 euros le 6 décembre 2017, 1500 euros le 21 décembre 2017 et 1200 euros le 26 mars 2018.
Par ailleurs, il résulte des échanges de courriels entre les parties que dans un premier temps M. [C] a fait savoir au constructeur qu’il réglerait le solde de la facture dès qu’il recevrait le paiement qu’il attendait de la vente de parts sociales.
En conséquence, M. [C] a par ses règlements et ses écrits confirmé son accord sur la nature des travaux réalisés et sur leur montant, étant précisé que ce n’est que dans un second temps, le 9 mai 2018 qu’il a entendu modifier sa position, étant précisé que ce nouveau positionnement ne saurait remettre en cause celui antérieur ayant permis d’y trouver son accord sur la nature des travaux supplémentaires réalisés et sur leur prix.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a trouvé dans les pièces versées aux débats l’accord de l’appelant sur la nature et le montant des travaux supplémentaires.
Sur la demande d’expertise judiciaire
Le tribunal a débouté M. [C] de sa demande d’expertise au motif que le constat d’huissier qu’il avait fait établir était suffisant pour statuer, et que les constations rapportées ne démontraient pas une absence des obligations contractuelles par l’entreprise alors qu’en outre les rares malfaçons alléguées ne pouvaient être attribuées à l’entreprise.
L’appelant expose que les prestations litigieuses ont été mal exécutées si bien qu’il est nécessaire d’organiser une mesure d’expertise judiciaire, laquelle permettra de faire les comptes entre les parties et de compenser leurs créances respectives.
L’intimée réplique que la demande de mesure d’expertise ne repose sur aucun motif légitime. Elle ajoute que la demande d’expertise se révélera extrêmement onéreuse en comparaison des quelques désordres évoqués par M.[C]. Elle ajoute que le prix des travaux ne doit pas être diminué alors que le maître de l’ouvrage n’a pas discuté le coût ou la bonne réalisation avant l’envoi de la première mise en demeure. En outre, il n’est produit aucun devis d’un autre entrepreneur pour les mêmes prestations qui démontrerait que le coût des travaux supplémentaires facturés serait supérieur aux prix usuels pratiqués.
***
Le constat d’huissier versé aux débats par l’appelant ne permet pas de démontrer l’existence du non-respect par l’entrepreneur du contrat constitué par son devis accepté puis par sa facture du 27 octobre 2017, facture pour laquelle la cour a d’ores et déjà jugé que le maître de l’ouvrage avait donné son accord.
En ce qui concerne les malfaçons ou l’inachèvement des travaux allégués par l’appelant, la cour constate notamment que l’huissier a constaté 549 jours, soit près de 18 mois après l’établissement de la facture des travaux sur les dires de son requérant qu’un joint, qui apparaissait neuf était au sol et qu’il serait tombé de la porte de la chambre nord, sans que l’huissier puisse confirmer cette version. L’huissier a relevé la présence dans la salle de bains d’un velux et pas de VMC, un plafond très propre dans une chambre au motif selon les dires du maître de l’ouvrage qu’il l’aurait repeint lui-même, à la suite d’une fuite en toiture, une fuite par le siphon d’un lavabo, l’absence partielle de carrelage sur tout le mur de la salle d’eau de la chambre sud, un défaut d’alignement des carreaux en partie supérieure ( qui n’apparaît pas sur ses photos), un joint d’une épaisseur irrégulière entre les carreaux ( ce qui n’a pas été photographié), des carreaux légèrement écaillés ( ce qui n’apparaît pas sur ses photos) et des débordements de peinture blanche sur les carreaux ( ce qui n’apparait pas davantage sur ses photos). En pages 14 et 15 de son rapport, l’huissier a également relevé une différence de niveau de quelques millimètres entre les carreaux à l’angle de deux murs. L’huissier a également rapporté en pages 16 et 17 de son rapport une absence de finition nette du carrelage (ce qui n’apparaît pas sur les photos) et des démarcations de peintures sur les champs des carreaux (ce qui n’apparaît pas plus sur les photos).
Il ressort d’une analyse particulièrement attentive des constatations de l’huissier de justice que les reproches de M. [C] portent sur des détails insignifiants et pour des travaux pour lesquels il n’a exigé aucune réception, ce qui lui aurait permis, conformément à la loi de faire porter toute réserve qui lui paraissait utile.
Par ailleurs l’appelant ne précise pas en quoi la société Clément Virgo n’aurait pas respecté ses engagements contractuels.
Il convient par conséquent de confirmer également de ce chef le jugement qui a débouté l’appelant de cette demande d’instruction, sans qu’il y ait lieu, en l’état du seul constat d’huissier produit par lui qui ne permet pas de démontrer la réalité de désordres ou l’absence de finition des travaux commandés et réalisés, d’ordonner des investigations complémentaires.
Sur les autres demandes
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné M. [D] [C] à payer à l’intimée la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance.
En cause d’appel, M. [C] qui succombe sera condamné à payer à l’intimée une indemnité de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. Il sera débouté de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour ;
Déboute les parties de toutes autres demandes
Y ajoutant,
Condamne M. [D] [C] à payer à la SAS Construction Clément Virgo une indemnité de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,