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Parts sociales : décision du 24 janvier 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 23/03878

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Parts sociales : décision du 24 janvier 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 23/03878

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 24 JANVIER 2024

PRUD’HOMMES

N° RG 23/03878 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NMXR

S.A.S.U. SASU WAVERIDING SOLUTION

c/

Monsieur [M] [R]-[D]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 20 juillet 2023 (R.G. n°2023-7727) par le Conseil de Prud’hommes – Formation de Référé BORDEAUX, suivant déclaration d’appel du 10 août 2023,

APPELANTE :

S.A.S.U. SASU WAVERIDING SOLUTION agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 4] – [Localité 2]

représentée par Me Hedwige MURE substituant Me Thibault LAFORCADE de l’AARPI GLM AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [M] [R]-[D]

né le 07 Avril 1982 de nationalité française, demeurant [Adresse 1] – [Localité 3]

représenté et assisté de Me Thomas BAZALGETTE de la SARL AHBL AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 décembre 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bénédicte Lamarque, conseiller chargé d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [M] [R]-[D], né en 1982, a été engagé en qualité d’agent administratif financier technico-commercial, statut agent de maîtrise, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 2 janvier 2018, puis, à compter du 1er septembre 2019, à temps plein, en qualité de directeur administratif et financier par la SASU Waveriding Solution.

Cette société a pour activité le développement technique, la création et la commercialisation d’une vague artificielle de surf sur les plans d’eau.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils.

Il a été mis fin au contrat de travail de M. [R]-[D] dans le cadre d’une rupture conventionnelle signée le 10 novembre 2022 et homologuée le 14 décembre 2022, avec effet à la date du 16 décembre 2022.

Par lettre recommandée en date dui 8 février 2023, M. [R]-[D] a mis en demeure la société de lui régler certaines sommes restant dues, selon lui, au titre de la rupture du contrat de travail.

Le 20 avril 2023, M. [R]-[D] a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Bordeaux, en vue d’obtenir le paiement, au titre des sommes liées à la rupture du contrat de travail lui restant dues, de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, du remboursement de frais engagés et d’une indemnité pour résistance abusive.

Par ordonnance rendue le 20 juillet 2023, le conseil a :

– ordonné à la société Waveriding Solution de payer à M. [R]-[D] les sommes de :

* 7.869,10 euros au titre de l’indemnité de rupture conventionnelle,

* 1.433, 62 euros au titre des remboursements de frais,

* 21.059, 48 euros au titre de l’indemnité de clause de non-concurrence,

* 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté les autres demandes de M. [R]-[D],

– rejeté les demandes de la société Waveriding Solution,

– condamné la société Waveriding Solution aux dépens et frais éventuels d’exécution,

– rappelé que l’ordonnance de référé est exécutoire de droit à titre provisoire.

Par déclaration du 10 août 2023, la société Waveriding Solution a relevé appel de cette décision notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 24 juillet.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 8 septembre 2023, la société Waveriding Solution demande à la cour :

– d’infirmer l’ordonnance de référé en ce qu’elle l’a :

* condamnée à verser à M. [R]-[D] les sommes suivantes :

– 7.869,10 euros au titre de l’indemnité de rupture conventionnelle,

– 1.433,62 euros au titre des remboursements de frais,

– 21.059,48 euros au titre de l’indemnité de clause de non-concurrence,

– 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– aux dépens et frais éventuels d’exécution,

* déboutée de ses demandes,

– de confirmer l’ordonnance de référé en ce qu’elle a :

* rejeté les autres demandes de M. [R]-[D] et notamment celle relative à la résistance abusive,

Statuant à nouveau, de :

A titre principal,

– constater l’absence d’urgence de la situation de M. [R]-[D] et sa contestation sérieuse afin de le débouter de ses demandes relatives à l’indemnité de non-concurrence et l’inviter à mieux se pourvoir,

– débouter M. [R]-[D] de sa demande d’indemnité pour résistance abusive en application de l’article R. 1452-2 du code du travail,

A titre subsidiaire,

– constater l’application de la clause de non-concurrence sur 12 mois et non 24 mois,

– prononcer un échelonnement de paiement de la somme de 21.402,48 euros au titre de l’indemnité de non-concurrence,

En tout état de cause,

– prononcer un échelonnement de paiement de la somme de 1.402,42 euros au titre du remboursement des frais professionnels,

– prononcer un échelonnement de paiement de la somme de 7.869,10 euros au titre de l’indemnité de rupture conventionnelle,

– condamner M. [R]-[D] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [R]-[D] au paiement des dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 6 octobre 2023, M. [R]-[D] demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes et de :

– juger que la société Waveriding Solution lui est redevable des sommes de :

* 7.869,10 euros au titre des indemnités de fin de contrat,

* 1.433,62 euros au titre du remboursement des frais professionnels,

* 21.059,48 euros au titre de l’indemnité de non-concurrence,

– juger que les demandes de délais de grâce présentées par la société Waveriding Solution sont irrecevables, s’agissant des sommes dues au titre des frais professionnels et de l’indemnité de non-concurrence, et infondées en tout état de cause pour toutes les demandes,

En conséquence,

– confirmer l’ordonnance de référé du 20 juillet 2023 en ce qu’elle a condamné la société Waveriding Solution à lui payer les sommes de :

* 7.869,10 euros au titre de l’indemnité de rupture, sauf à rectifier l’erreur matérielle affectant la mention en lettres de la condamnation,

* 1.433,62 euros au titre des remboursements de frais,

* 21.059,48 euros au titre de l’indemnité de clause de non-concurrence,

* les dépens et frais d’exécution,

– confirmer l’ordonnance de référé du 20 juillet 2023 en ce qu’elle a rejeté toutes les demandes de la société Waveriding Solution,

– réformer l’ordonnance de référé du 20 juillet 2023 en ce qu’elle l’a débouté de sa demande au titre de la résistance abusive de la société Waveriding Solution,

Et statuant à nouveau pour le surplus,

– condamner la société Waveriding Solution à lui payer la somme de 7.869,10 euros au titre de l’indemnité de rupture,

– condamner la société Waveriding Solution à lui payer la somme de 10.000 euros pour résistance abusive,

– condamner la société Waveriding Solution à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens d’instance et frais d’exécution,

– débouter la société Waveriding Solution de toutes ses demandes.

Par ordonnance et avis du 22 septembre 2023, l’affaire a été fixée à bref délai à l’audience du 12 décembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la compétence du juge des référés

Selon l’article R. 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

L’article R. 1455-6 du même code ajoute que la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

De plus, en vertu de l’article R. 1455-7 du code du travail, dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, il n’est pas soutenu que, suite à la rupture conventionnelle du contrat de M. [R]-[D] ayant pris effet au 16 décembre 2022, certaines sommes lui restent dues au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail. L’obligation de verser ces sommes, quels qu’en soient leurs modes de calcul, n’est pas en elle-même contestable.

En conséquence, les demandes de l’intimé relèvent des pouvoirs conférés à la formation de référé du conseil de prud’hommes.

Sur la demande de remboursement des frais

M. [R]-[D] sollicite le versement de la somme de 1.433,62 euros au titre du remboursement de ses frais professionnels sur les mois d’octobre et novembre 2022. Il produit un tableau récapitulatif, les factures correspondantes et un courriel de l’employeur en date du 21 décembre 2022 lui donnant son accord sur le paiement des notes de frais.

La société, qui n’a eu connaissance des factures justificatives qu’au cours de la procédure, a versé au salarié la somme de 1.402,02 euros au titre de ses frais professionnels mais s’oppose à tout paiement des frais kilométriques qui ne sont pas, selon elle, justifiés. Elle conteste avoir donné son accord sur le montant des frais demandés dans le courriel sus-mentionné.

***

L’article 11-2 de la convention collective nationale applicable en l’espèce prévoit que ‘les déplacements hors du lieu de travail habituel (chez un client, sur un site de l’entreprise’) nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l’occasion d’une charge financière supplémentaire ou d’une réduction de la rémunération.

Les frais de déplacement sont remboursés de manière à couvrir les frais de transport, d’hébergement et de restauration.

Sous réserve de l’application du premier paragraphe du présent article, les frais de déplacement peuvent faire l’objet d’un forfait défini préalablement au départ, par accord d’entreprise, décision unilatérale de l’employeur, usage, ou accord individuel entre l’employeur et le salarié.’

Le contrat de travail de M. [R]-[D] précisait en son article 7 que les frais engagés par le salarié sont pris en charge par la société ‘sur présentation d’une note de frais accompagnée des documents justificatifs’.

Il résulte des pièces produites par le salarié, notamment les tickets de stationnement et la référence de l’indemnité kilométrique, que M. [R]-[D] a bien engagé la dépense d’une somme de 1.444,62 euros au titre des frais professionnels sur les mois de novembre et décembre 2022, somme que la société sera condamnée à lui rembourser, l’ensemble des justificatifs étant versé.

L’ordonnance déférée sera confirmée de ce chef.

Sur les demandes en paiement de M. [R]-[D]

Sur la clause de non-concurrence

La société soulève à titre principal l’existence d’une contestation sérieuse quant à la rédaction de la clause de non-concurrence, se reportant à la rédaction de celle-ci qui comporte une erreur matérielle en ce qu’est mentionnée une durée de douze mois en toutes lettres mais avec la précision du chiffre ’24” entre parenthèses. A l’appui de cette erreur, elle soutient que la période de 12 mois est bien l’usage au sein de la société et prétend que c’est le salarié lui-même qui a rédigé le contrat de travail.

En tout état de cause, la société soutient qu’une simple erreur matérielle ne peut constituer un droit acquis pour le salarié.

Subsidiairement, la société confirme ne pas avoir levé la clause de non-concurrence dans les 15 jours qui ont suivi la prise d’effets de la rupture conventionnelle, n’ayant pu le faire en l’absence du contrat de travail de M. [R]-[D] dont le comptable ne disposait pas, le salarié ne l’ayant pas déposé sur le serveur de l’entreprise.

Elle reconnaît donc être débitrice de la somme de 11.339,72 euros au titre de l’indemnité due entre le 16 décembre 2022 et le 30 juin 2023 et au paiement mensuel de la somme de 1.619,96 euros du 1er juillet au 15 décembre 2023, soit la somme totale de 21.059,48 euros.

M. [R]-[D], dans le cadre de sa demande de condamnation provisionnelle en référé, limite celle-ci à une durée de 12 mois de salaire.

***

La clause de non-concurrence figurant à l’article 14 du contrat de travail liant les parties est ainsi rédigée :

‘« […]

après son départ effectif de la Société, le Salarié s’engage expressément :

– à ne pas travailler, en qualité de salarié ou de non-salarié, pour une société ayant une activité concurrente à celle de la Société. Il s’engage, en outre, à ne pas créer le même type de société pour son propre compte et à ne pas participer directement ou indirectement à une telle société ;

– à ne pas, directement ou indirectement, entrer en relation d’affaires, sous quelque forme que ce soit avec les clients ou prospects ou co-contractants auprès desquels il aura été en contact dans les douze (12) mois précédant la notification de la rupture de son Contrat de travail.

Les interdictions visées ci-dessus sont applicables pendant une durée de douze (24)
mois à compter du départ effectif du salarié de la Société et couvrent la France, ainsi
que la société Wavegarden en Espagne notamment.
Il est expressément entendu entre les Parties, quelle que soit la Partie à l’origine de la rupture et quelle qu’en soit la cause, que la Société se réserve la possibilité de réduire
la durée ou de dispenser le Salarié de cette clause de non-concurrence et/ou de cette
obligation de non sollicitation de clientèle, sous réserve d’en informer ce dernier, par
lettre recommandée avec accusé de réception au plus tard dans les quinze (15) jours
calendaires qui suivent la notification de la rupture ou, en cas de démission du Salarié, dans les quinze (15) jours calendaires qui suivent la réception par la Société de la lettre de démission et au plus tard au moment du départ effectif du Salarié de la Société.

En contrepartie de ces engagements de non-concurrence et de non sollicitation de clientèle, le Salarié percevra, après la cessation effective du présent Contrat et pendant toute la durée de ses obligations, une indemnité mensuelle brute égale à 35% de son salaire mensuel brut moyen, calculé sur la base de la rémunération brute perçue au cours des douze (12) derniers mois précédant la notification de la rupture du présent Contrat ou la date de signature de l’accord de rupture conventionnelle.

[…] ».

En l’absence de contestation sérieuse sur l’obligation pour la société, qui n’a pas délié le salarié de la clause dans les 15 jours suivant la rupture du contrat, de verser la contrepartie financière de la clause de non-concurrence égale au montant du salaire servant d’assiette au calcul de l’indemnité et dans la mesure où la demande est limitée dans la présente procédure à 12 mois, il convient de confirmer la première décision qui a condamné la société à verser la somme de 21.059,48 euros à ce titre.

Il n’y a pas lieu en revanche de ‘constater l’application de la clause de non-concurrence sur 12 mois et non 24 mois’, l’appréciation de la portée de la clause contractuelle se heurtant à une contestation sérieuse.

Sur le paiement des indemnités de rupture

La société ne conteste pas devoir la somme de 7.869,10 euros à M. [R]-[D] au titre de l’indemnité de fin de contrat, tel que cela résulte du solde de tout compte du 21 décembre 2022, sur lequel elle a mentionné qu’elle verserait le solde en plusieurs échéances, soit au 31 janvier 2023 puis au 28 février 2023.

M. [R]-[D] sollicite la rectification de l’ordonnance qui a condamné la société à verser ce montant en chiffres mais a indiqué par erreur en toutes lettres la somme de ‘mille huit cent soixante neuf euros et dix centimes’.

L’ordonnance sera confirmée sur le montant alloué en chiffres et rectifiée sur l’erreur matérielle portant sur la retranscription en toutes lettres de ce même montant, la société reconnaissant devoir cette somme.

Sur la demande de délais de paiement

La société sollicite des délais de paiement compte-tenu de son absence de trésorerie, dans la mesure où elle est en phase de lancement, et rappelle que M. [R]-[D] est détenteur de parts dans la société.

Elle produit un extrait de son compte de résultat et indique être dans l’attente du versement du crédit impôt recherche qu’elle perçoit chaque année qui devrait lui permettre de bénéficier de suffisamment de trésorerie pour payer les sommes dues.

Elle justifie également du salaire que se verse le président d’un montant de 504 euros nets et produit un relevé de compte bancaire faisant apparaître une situation débitrice de près de 40.000 euros.

S’agissant des levées de fonds importantes que M. [R]-[D] évoque, la société conteste la somme de 22M€ indiquée, exposant qu’au mois de juin 2023, elle était toujours en recherche de financements et ajoute qu’en tout état de cause, les fonds seront réinvestis notamment au titre des frais généraux, recherche et développement.

M. [R]-[D] s’oppose à l’échéancier sollicité dès la remise du solde de tout compte qu’il a refusé de signer, celui-ci n’ayant fait l’objet d’aucune discussion préalable à la signature de la convention de rupture.

Il soutient que les frais professionnels et l’indemnité de la clause de non-concurrence ont une nature salariale empêchant l’attribution de délais de grâce.

Il conteste l’existence d’une situation financière de la société rendant impossible le paiement de la créance, celle-ci ne versant pas son bilan qui aurait fait apparaître son actif et son passif, ni son compte de résultat qui aurait permis de connaître le chiffre d’affaires et les charges de l’année. S’agissant de l’extrait de compte bancaire versé par l’appelante, il indique que rien ne permet d’affirmer que la société n’a pas d’autres comptes bancaires.

M. [R]-[D] soutient également que si la société n’avait plus d’actif disponible permettant l’apurement de son passif exigible, elle aurait dû se déclarer en état de cessation des paiements dans un délai de 45 jours.

Il conteste enfin être détenteur de parts sociales, indiquant disposer uniquement de bons de souscriptions acquis pour un montant de 25.000 euros lui donnant la possibilité de devenir actionnaire si certaines conditions se réalisent.

En réponse à la société qui indique que M. [R] [D] aurait une activité de consultant en art oratoire et verse à ce sujet copie de son profil Linkedin, il justifie qu’au 23 juin 2023, il était pris en charge par Pôle Emploi, percevant l’allocation de retour à l’emploi. Il indique développer une activité d’auto-entrepreneur et avoir deux enfants en garde alternée mais ne produit aucune pièce actualisée en ce sens en procédure d’appel.

***

L’article 1343-5 du code civil dispose que ‘le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment.’

Les créances salariales ne peuvent faire l’objet de délais de paiement.

L’indemnité de non-concurrence qui a la nature d’une indemnité compensatrice de salaire en est donc exclue.

En revanche, les frais professionnels, qui ne sont pas intégrés dans la rémunération ni soumis au même régime social et fiscal que les avantages en nature, ainsi que l’indemnité de licenciement, peuvent faire l’objet de délais de paiement.

Il appartient au juge de fixer les dates auxquelles le débiteur devra se libérer.

L’extrait du compte de résultat produit par l’appelante, tronqué en grande partie, ne permet pas de retenir l’absence de chiffre d’affaires ni de facturation et le résultat fiscal que la société présente après imputation des déficits de 28.558 euros correspond à l’exercice clos en 2021. De même, si l’état de son compte bancaire fait apparaître en juin 2023 un déficit de près de 40.000 euros, la société n’a pas réactualisé ses pièces justificatives dans le cadre de la procédure en appel.

La société avait déjà établi un échéancier auprès de M. [R]-[D] en décembre 2022, en lui proposant de régler le solde de l’indemnité de rupture en janvier et février 2023.

Elle n’a procédé à aucun versement même partiel depuis janvier 2023 alors qu’elle s’y était engagée dans le solde de tout compte en date du 21 décembre 2022, s’étant de fait octroyée elle-même une année de délais de paiement et ne peut être considérée comme de bonne foi outre que ni son compte de résultat, ni son bilan précédent, pas plus qu’une attestation bancaire de l’ensemble des comptes dont elle serait détentrice actualisée ne sont versés aux débats.

Dès lors la demande en délais de paiement sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

M. [R]-[D] sollicite la condamnation de la société à lui verser des dommages et intérêts en raison de sa résistance abusive, somme qu’il porte à 10.000 euros en appel.

La société s’y oppose en ce que cette demande ne figurait pas dans la requête initiale du salarié devant le conseil de prud’hommes. Subsidiairement elle conteste tout abus dans les demandes de délais de paiement qu’elle formule.

***

Aux termes des dispositions de l’article 70 du code de procédure civile applicable au litige, compte tenu de la date de l’introduction de l’instance prud’homale, les demandes additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

La société ne produit pas la requête initiale de M. [R]-[D] ayant saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes permettant à la cour de vérifier que cette demande était additionnelle comme formée pour la première fois dans les dernières conclusions soutenues en première instance par le salarié.

M. [R]-[D], intimé, formule cette demande devant la cour d’appel au titre de son appel incident. Cette demande est donc recevable.

*

Le droit d’une partie de contester en justice les demandes portées pas son adversaire ne dégénère en abus qu’en cas de faute caractérisée par l’intention de nuire de son auteur, sa mauvaise foi ou sa légèreté blâmable, qui ne résultent pas du seul caractère fondé des demandes de l’autre partie.

La société, qui invoque sa situation financière sans sérieusement contester les sommes dues au titre de la clause de non-concurrence à hauteur de 12 mois et le solde de l’indemnité conventionnelle de rupture, n’a pas fait preuve de résistance abusive outre que M. [R]- [D] ne justifie pas d’un autre préjudice que celui qui sera réparé par la condamnation de la société au versement des sommes dues et des intérêts de retard afférents.

M. [R]-[D] sera donc débouté de cette demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société, partie perdante à l’instance et en son recours, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement à M. [R]-[D] de la somme complémentaire de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme l’ordonnance du conseil de prud’hommes déféré sauf à préciser que les sommes allouées à M. [R]-[D] ont le caractère de provision,

Rectifie l’erreur matérielle figurant au dispositif de l’ordonnance par laquelle la société Waveriding Solution est condamnée à verser à M. [R]-[D] la somme de 7.869,10 euros (soit en lettres la somme de ‘sept mille huit cent soixante neuf euros et dix centimes’) au titre du solde de l’indemnité conventionnelle de rupture,

Y ajoutant,

Condamne la société Waveriding Solution aux dépens ainsi qu’à payer à M. [R]-[D] la somme complémentaire de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de la procédure d’appel.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

 


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