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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Chambre civile 1-1
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 63B
DU 23 JANVIER 2024
N° RG 21/07117
N° Portalis DBV3-V-B7F-U3SY
AFFAIRE :
S.A.S. BOYER
C/
Société ALLIANZ IARD
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Novembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 19/02868
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
-Me Mélina PEDROLETTI,
-Me [R] [D],
-l’AARPI DROITFIL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S. BOYER
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
N° SIRET : 323 049 403
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 4]
représentée par Me Mélina PEDROLETTI, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 – N° du dossier 25592
Me Jean-Baptiste DURIEZ substituant Me Georges BENELLI, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : A0433
APPELANTE
****************
Société ALLIANZ IARD
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 542 110 291
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 8]
S.E.L.A.R.L. POIRIEUX MANTIONE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 521 570 101
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentées par Me Laurent HAY, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : C0916
S.C.P. BAUFUME SOURBE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 434 06 3 7 07
[Adresse 3]
[Localité 6]/FRANCE
S.A. COMPAGNIE MMA IARD
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 440 04 8 8 82
[Adresse 2]
[Localité 7]
Société COMPAGNIE MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège
N° SIRET : 775 65 2 1 26
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentées par Me Claude DUVERNOY de l’AARPI DROITFIL, avocat – barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 49
INTIMÉES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Novembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale CARIOU, Conseiller chargée du rapport et Madame Sixtine DU CREST, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseiller,
Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,
***********************
FAITS ET PROCÉDURE
Le 23 mars 2007, la communauté de communes dite ‘[Localité 11] communauté’ et la société Sophora Fit ont signé un compromis de vente par lequel la première s’engageait à vendre à la seconde un terrain à bâtir dans la zone artisanale de Matussière situé sur le territoire de la commune de [Localité 11] (63), avec faculté de substitution au profit de l’acquéreur.
Cette transaction, qui s’insérait dans le cadre de la création d’une zone commerciale, a été conclue sous plusieurs conditions suspensives, dont l’obtention par l’acquéreur de l’autorisation définitive de la Commission Départementale d’Equipement Commercial (CDAC) d’implanter un ensemble immobilier à usage commercial.
Par acte authentique des 9 et 16 décembre 2008, M. [H] a acquis de la société Boyer, au prix de 140 000 euros, des parts sociales de la société de Matussière, laquelle devait se substituer à la société Sophora Fit et acquérir le terrain objet du compromis.
Par jugement du 29 avril 2009, confirmé par un arrêt de la cour d’appel de Riom du 29 octobre 2009, le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand a constaté la défaillance des conditions attachées au compromis et en a prononcé la caducité.
M. [H] a obtenu, par jugement rendu le 14 octobre 2014 par le tribunal de grande instance de Saint Etienne, la nullité de l’acte de cession des parts sociales de la société de Matussière pour dol et la restitution du prix d’acquisition par la société Boyer.
Le 3 novembre 2014, la Selarl Ferret-Poirieux-Mantione, conseil de la société Boyer, a mandaté la SCP Baufume et Sourbé pour interjeter appel de cette décision.
Cependant, les conclusions récapitulatives qui ont été notifiées ne comportant aucune prétention autre que la réformation du jugement et l’allocation de sommes au titre de la procédure abusive et des frais irrépétibles, la cour d’appel de Lyon a, par arrêt du 7 juin 2016, confirmé le jugement querellé. Par arrêt du 16 novembre 2017, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Boyer.
Par actes d’huissier de justice des 20, 21 et 22 mars 2019, la société Boyer a fait assigner la Selarl Ferret-Poirieux-Mantione (devenue la Selarl Poirieux-Mantione), la SCP Baufume et Sourbé et son assureur la société Allianz Iard, devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de voir engager leur responsabilité civile professionnelle et d’obtenir réparation du préjudice subi.
Par acte du 20 avril 2020, la société Boyer a fait assigner en intervention forcée les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, assureurs de la SCP Baufume et Sourbé. Les instances ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 21 septembre 2020.
Par un jugement contradictoire rendu le 4 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
– Rejeté la fin de non-recevoir opposée par la société Allianz Iard,
– Rejeté l’intégralité des demandes de la société Boyer,
– Constaté que les appels en garantie sont privés d’objet,
– Rejeté les demandes des parties au titre des frais irrépétibles,
– Condamné la société Boyer à supporter les entiers dépens de l’instance qui seront recouvrés directement par Me [R] [D] et Me Claude Duvernoy, chacun pour la part lui revenant, conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
– Dit n’ y avoir lieu à l’exécution provisoire du jugement,
La société Boyer a interjeté appel de ce jugement le 30 novembre 2021 à l’encontre de la société Allianz Iard, la SCP Baufume et Sourbé, la SA MMA Iard, la SA MMA Iard Assurances Mutuelles, la SELARL Poirieux Mantione.
Par une ordonnance rendue le 16 juin 2022, le magistrat de la mise en état de la cour d’appel de Versailles a :
Vu l’article 909 du code de procédure civile,
Vu la demande d’observations écrites en date du 30 mai 2022,
Vu les observations écrites déposées le 14 juin 2022
– Déclaré irrecevables toutes conclusions que pourraient déposer la société Baufume et [E] et les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles postérieurement au 25 mai 2022,
Par dernières conclusions notifiées le 17 juin 2022, la société Boyer demande à la cour de :
Vu l’article 1231-1 du code civil,
Vu les articles 411 et 412 du code de procédure civile,
Vu l’ancien article 1116 du code civil
Vu l’article L.124-3 du code des Assurances
– La déclarer recevable et bien fondée en son appel,
– Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nanterre en date du 4 novembre 2021 en ce qu’il a :
*Rejeté l’intégralité de ses demandes,
*Constaté que les appels en garantie sont privés d’objet.
*Rejeté la demande de la SA Boyer au titre des frais irrépétibles.
*Condamné la SA Boyer à supporter les entiers dépens de l’instance.
Et, statuant à nouveau, de :
– Condamner in solidum la SELARL Poirieux Mantione, la SCP Baufume et Sourbé, la Compagnie Allianz, la société MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement de la somme de 140 000 euros au titre de la réparation de son préjudice résultant de la perte de chance d’infirmation en appel du jugement du tribunal de grande instance de Saint Etienne du 14 octobre 2014,
– Condamner in solidum la SELARL Poirieux Mantione, la SCP Baufume et Sourbé, la Compagnie Allianz, la société MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement de la somme de 39 087,20 euros au titre de la réparation de son préjudice résultant des frais d’exécution, d’avocats et de justice exposés dans la procédure l’opposant à M.[H],
– Ordonner que ces sommes soient assorties des intérêts au taux légal à compter l’assignation,
– Ordonner que les intérêts dus pour plus d’une année entière soient capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil jusqu’à parfait paiement effectué en application de la décision à intervenir,
– Rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions de la SELARL Poirieux Mantione, de la SCP Baufume et Sourbé, de la Compagnie Allianz, de la société MMA Iard et de la société MMA Iard Assurances Mutuelles,
– Condamner in solidum la SELARL Poirieux Mantione, la SCP Baufume et Sourbé, la Compagnie Allianz, la société MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Mélina Pedroletti conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Par dernières conclusions notifiées le 7 juillet 2022, la SELARL Poirieux-Mantione et la société Allianz Iard demandent à la cour de :
– Dire la société Boyer mal fondée en son appel, ses demandes fins et écritures,
– L’en Débouter,
– Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté la société Boyer de toutes des demandes et l’a condamnée aux dépens de première instance,
– Déclarer irrecevable et mal fondée la société Boyer en ses demandes à l’égard des concluantes en l’absence de faute imputable à la SELARL Poirieux Mantione à l’origine de l’arrêt d’appel confirmatif,
– L’en Débouter,
Subsidiairement,
– Déclarer mal fondée la société Boyer en ses demandes à l’égard des concluantes en l’absence de lien de causalité entre la faute alléguée et les préjudices invoqués,
– L’en Débouter,
Très subsidiairement,
– Déclarer mal fondée la société Boyer en ses demandes tant en leur principe qu’en leur quantum, au regard des préjudices invoqués,
– L’en Débouter,
– Déclarer l’appelante irrecevable et mal fondée en sa demande de remboursement de frais et honoraires acquittés par elle auprès de la SELARL Poirieux Mantione,
Et en conséquence,
– L’en Débouter,
Infiniment subsidiairement,
– Condamner la SCP Baufume et Sourbé et ses assureurs la société Compagnie MMA Iard et la société Compagnie MMA Iard Assurances Mutuelles à relever et garantir les concluantes de toute condamnation pouvant intervenir à leur égard,
En tout état de cause,
– Dire que la société Allianz Iard ne peut être tenue qu’à garantir la SELARL Poirieux Mantione des condamnations susceptibles d’intervenir à l’encontre de celle-ci, à raison des fautes qui lui seraient propres, à l’exclusion de celles concernant les éventuelles restitution de frais et honoraires versées à son assurée par l’appelante,
– Et rejeter la demande de condamnation in solidum de la société Allianz Iard et de la SELARL Poirieux Mantione, avec la SCP Baufume et Sourbé et les assureurs de cette dernière,
– Condamner tout succombant à payer à chacune des concluantes une somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner tout succombant aux entiers dépens de l’instance, qui pourront être recouvrés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, directement par Me Laurent Hay, avocat.
La SCP Baufume Sourbé, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ont notifié des conclusions le 27 mai 2022. Celles-ci sont toutefois irrecevables conformément à l’ordonnance rendue par le magistrat de la mise en état rendue le 16 juin 2022.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 5 octobre 2023.
SUR CE, LA COUR,
Sur les limites de l’appel
Le jugement n’est pas querellé en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Allianz. Cette disposition est désormais irrévocable.
Sur les responsabilités
La Selarl Poirieux-Mantione a été désignée par la société Boyer en tant qu’avocat plaidant pour assurer sa défense devant le tribunal de grande instance de St Etienne, puis devant la cour d’appel de Lyon.
La SCP Baufume et Sourbé a été mandatée pour postuler devant la cour d’appel.
Pour retenir une faute à l’encontre de la Selarl Poirieux-Mantione, le tribunal a tout d’abord souligné que le mandataire (la Selarl Poirieux-Mantione) devait répondre à l’égard de son mandant (la société Boyer) de celui qu’il s’était substitué (la SCP Baufume et Sourbé) et rappelé que le mandant peut agir directement contre celui que son mandataire s’est substitué.
Ensuite, il a estimé que l’erreur qualifiée de matérielle par les parties, ayant consisté à omettre, dans le dispositif des conclusions d’appelant, la demande de rejet des prétentions de M. [H], caractérisait pour l’avocat plaidant, un manquement au devoir d’efficacité de l’acte qu’il a rédigé.
Pour retenir la responsabilité de la SCP Baufume et Sourbé, le tribunal a pareillement retenu un manquement au devoir d’efficacité car, rémunérée à cette fin, elle était tenue de vérifier que l’acte qu’elle transmettait était apte à remplir sa fonction et à atteindre le but recherché par son mandant.
Moyens des parties
La SELARL Poirieux-Mantione soutient que dans le cas où, par suite d’une erreur matérielle, le dispositif des conclusions ne mentionne pas la demande de rejet des prétentions adverses, la jurisprudence retient la responsabilité exclusive du postulant chargé de veiller à la régularité et l’efficacité des actes qu’il délivre.
Elle affirme que son erreur de pure forme aurait dû être relevée par son postulant par une vigilance normale, d’autant plus qu’en sa qualité d’ancien avouée, la SCP Baufume et Sourbe était spécialiste de la procédure d’appel.
Elle ajoute que c’est le postulant seul qui est investi du pouvoir d’accomplir les actes de procédure et que dans le cas d’espèce, seule sa responsabilité peut être recherchée.
La société Boyer conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité tant de son avocat plaidant que de son avocat postulant.
Appréciation de la cour
S’agissant de la faute commise par la Selarl Poirieux-Mantione, c’est à bon droit que le tribunal a rappelé qu’investie d’un mandat ad litem, elle était tenue d’un devoir de diligence et d’efficacité de ses actes, en l’espèce de ses conclusions. Etant l’auteur des conclusions irrégulières, elle ne peut rejeter l’entière responsabilité de l’inefficacité de celles-ci sur son postulant.
C’est donc à bon droit, par des motifs exacts que la cour adopte au surplus, que le tribunal a considéré que la Selarl Poirieux-Mantione avait commis un manquement de nature à engager sa responsabilité à l’égard de la société Boyer, sous réserve que les autres éléments constitutifs de la responsabilité soient constitués.
C’est également par des motifs exacts que la cour adopte, que le tribunal a pu retenir un manquement de la part de la SCP Baufume et Sourbé.
En effet, il lui incombait d’exercer un contrôle de régularité des écritures au regard des règles exigeantes de la procédure d’appel.
L’avocat postulant, qui n’est pas une simple boîte aux lettres, mais garant du respect des règles du code de procédure civile, aurait dû relever cet oubli flagrant, à défaut de quoi son intervention est inefficace.
Il aurait dû d’autant plus veiller à la régularité des conclusions récapitulatives que seules ces dernières lient la cour.
Les deux fautes ont concouru au rejet des conclusions de la société Boyer et à la perte d’une chance de voir le jugement infirmé.
Par conséquent, les deux parties, et leurs assureurs respectifs, sont redevables envers la société Boyer, la victime, des conséquences de cette perte de chance.
La question du partage des responsabilité entre avocat plaidant et avocat postulant et des éventuels appels en garantie ne seront examinés que s’il y a matière pour la cour à trancher ce débat, donc si la cour fait droit aux demandes d’indemnisation présentées par la société Boyer, étant rappelé que le tribunal les a rejetées en raison de l’absence d’un lien de causalité entre les manquements contractuels et les préjudices allégués.
Sur les préjudices et le lien de causalité
Pour débouter la société Boyer de ses demandes, le tribunal a estimé que les chances de réformation du jugement, qui avait retenu l’existence d’un dol pour annuler la cession des parts sociales, étaient nulles compte tenu de la dissimulation en conscience par la demanderesse d’une information déterminante du consentement de M. [H].
Moyens des parties
La société Boyer soutient que ses chances d’obtenir une réformation du jugement étaient certaines. Elle affirme en effet d’une part que M. Boyer, au jour de la cession, était parfaitement informé de ce que la commission départementale n’avait pas donné son autorisation au projet, qui n’était pas pour autant abandonné, d’autre part de l’intention du Président de la Communauté de Communes de [Localité 11] de se prévaloir de la caducité de la vente du terrain. Il conteste donc que son consentement ait été vicié.
La SELARL Poirieux Mantione affirme de son côté que M. [H] avait été tenu dans l’ignorance du refus de la CADAC et de l’engagement d’une procédure judiciaire pour faire constater la caducité du compromis.
Appréciation de la cour
Les manquements retenus à l’encontre de la Selarl Poirieux-Mantione et de la SCP Baufume et Sourbé ont fait perdre une chance à la société Boyer de voir la cour examiner de nouveau le litige et infirmer le jugement entrepris.
Il convient donc de rechercher quelles étaient les chances de la société Boyer de voir infirmer l’annulation de la cession de parts sociales si les conclusions n’avaient pas été déclarées irrecevables.
Ainsi que l’a exposé le tribunal, il est nécessaire de reconstituer fictivement le procès en appel en analysant le consentement de M. [H] lors de la cession de parts litigieuse.
Or, c’est par des motifs complets et pertinents, adoptés par la cour, que le tribunal a considéré que la dissimulation consciente à M. [H] du refus de la communauté de communes du projet de construction, refus définitif intervenu le 29 octobre 2007, a vicié le consentement de M. [H]. Ce refus, qui rendait caduc le compromis de vente du 23 mars 2007, dont devait bénéficier la société de Matussière, était déterminant du consentement de M. [H].
En effet, le seul intérêt pour ce dernier d’acquérir des parts de la société de Matussière résidait dans l’acquisition du terrain et la réalisation d’une centre commercial d’ampleur.
Il sera ajouté qu’il importe peu qu’à la date de la cession litigieuse, il demeurait possible, selon les seules affirmations de la société Boyer, que le projet de construction aboutisse, dès lors que c’est la dissimulation volontaire d’une information déterminante qui est en jeu et qui a vicié le consentement de M. [H].
Contrairement à ce que soutient la société Boyer, l’acte d’apporteur d’affaires qu’elle a signé avec M. [H] le même jour que la cession des parts sociales, n’informe nullement ce dernier du refus du projet par la CADAC.
En effet, il était mentionné dans cet acte parallèle à l’acte de cession des parts sociales, que ‘Bien que l’autorisation de la CDAC ne soit pas obtenue à ce jour, la SARL de Matussière a fait connaître au vendeur son intention d’acquérir le terrain suivant le phasage prévu dans cette promesse’ (souligné par la cour) alors qu’en réalité la CADAC avait explicitement refusé dès la fin de l’année 2007 le projet d’implantation du centre commercial, refus au demeurant non contesté dans les délais par la société de Matussière.
Cependant, le fait que certaines conditions n’aient pas été réalisées au jour de la cession, dont l’autorisation de la CADAC, comme l’indiquait l’acte d’apporteur d’affaires, ne permettait pas à M. [H] de deviner qu’en réalité cette autorisation avait été refusée.
La non obtention d’une autorisation n’équivaut pas à un refus.
Il n’est pas plus démontré qu’il ait été informé de l’engagement d’une procédure en vue de faire constater la caducité du compromis, mettant un point final au projet.
Contrairement à ce que soutient la société Boyer, il est importe peu que le Président de la Communauté de Communes ait pu fait part à M. [W], notaire de la société Boyer et de M.[H], de son intention de dénoncer le compromis.
L’obligation d’information loyale pèse en effet avant-tout sur le cocontractant, donc la société Boyer, et non sur le notaire chargé de recevoir la transaction. Elle ne peut donc pas tenter de s’affranchir d’un défaut d’information envers son co-contractant au motif que M. [H] aurait pu être informé par le notaire des intentions deu Président de la communauté de communes, ce qui au demeurant n’est pas démontré.
Enfin, il sera ajouté que le comportement de M. [H] postérieurement à la cession des parts importe peu, la validité du consentement s’appréciant au jour de la transaction. Ainsi, le fait que M. [H] ait pu, après avoir acquis les parts litigieuses, conserver un espoir que le projet aboutisse tant que le compromis de vente n’était pas anéanti, n’est pas de nature à remédier au vice qui a affecté son consentement au moment de la cession intervenue en décembre 2008.
Le jugement sera par conséquent confirmé en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires
Le sens du présent arrêt commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
La société Boyer devra supporter les dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés directement en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle sera condamnée à verser à la Selarl Poirieux-Mantione et son assureur la somme globale de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La demande présentée sur ce fondement par la société Boyer sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Boyer aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés directement en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Boyer à payer à Selarl Poirieux-Mantione et la société Allianz la somme globale de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,