Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 22 FEVRIER 2024
N°2024/26
Rôle N° RG 20/08279 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BGG4V
S.A.R.L. CONTROLE TECHNIQUE DU FIUM’ORBU
C/
S.C.O.P. S.A. A3S
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Jérome DE MONTBEL
Me Cyril VILLATTE DE PEUFEILHOUX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 21 Juillet 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 2019F00551 et l’ordonnance rectificative d’erreur matérielle du 24 juillet 2020.
APPELANTE
S.A.R.L. CONTROLE TECHNIQUE DU FIUM’ORBU, prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Jérome DE MONTBEL de la SCP BOLLET & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
Société Coopérative A3S, prise en la personne de son représentant légal en exercicedont le siège est sis [Adresse 1]
représentée par Me Cyril VILLATTE DE PEUFEILHOUX, avocat au barreau de MARSEILLE, et assistée de Me Véronique GUBLER, avocat au barreau de PARIS plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Décembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Février 2024..
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Février 2024.
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
La société Contrôle Technique du Fium’Orbu exploite un centre de contrôle technique de véhicules automobiles à Prunelli Di Fiumorbo (20243).
Le 7 février 2013, elle a sollicité son admission en qualité d’associé coopérateur auprès de la société A3S, ce qui a été validé par le conseil d’administration le 6 avril 2013.
Cette société est une société coopérative artisanale à forme anonyme et capital variable ayant pour objet la réalisation de toutes opérations et la prestation de tous services susceptibles de contribuer directement ou indirectement au développement de l’activité de ses associés relevant du secteur du contrôle technique automobile.
Le 28 octobre 2013, le centre de contrôle technique de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu a obtenu l’agrément préfectoral.
Les 7 et 8 juin 2018, la COFRAC, organisme chargé de vérifier la conformité de l’activité d’un centre de contrôle technique, a réalisé un audit des systèmes de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu. Des non-conformités ont été relevées, que la société impute à la Coopérative A3S.
Par courrier en date du 19 juillet 2018, la société Contrôle Technique du Fium’Orbu a résilié la convention de sociétariat, reprochant à la Coopérative ces manquements contractuels.
En réponse, la Coopérative a sollicité une indemnité compensatrice forfaitaire.
Par courrier du 27 juillet 2018, la société Contrôle Technique du Fium’Orbu a confirmé sa décision de résilier la convention de sociétariat.
Par courrier du 30 octobre 2018, la Coopérative A3S a mis en demeure la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de lui régler la somme de 2500 euros HT correspondant à l’indemnité de résiliation.
Par acte du 8 avril 2019, la Coopérative A3S a assigné la société Contrôle Technique du Fium’Orbu devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins d’entendre :
– constater le retrait anticipé de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de la Coopérative A3S, sans respect de son préavis, en violation des dispositions statutaires et contractuelles ;
– condamner la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à payer à la Coopérative A3S la somme de 2500 euros au titre de l’indemnité pour non-respect de l’engagement statutaire, majoré des intérêts légaux à compter du 30 octobre 2018 ;
– débouter la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
À titre subsidiaire, si le tribunal faisait droit au remboursement de capital social sollicité par la société Contrôle Technique du Fium’Orbu :
– ordonner la compensation entre l’indemnité de résiliation et le remboursement de parts sociales assorties de la réserve pour suppléments ou parts, diminué de la somme de 9,58 euros par part sociale correspondant aux pertes de 2018 ;
En tout état de cause :
– condamner la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à payer à la Coopérative A3S la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens ;
-Ordonner l’exécution provisoire du jugement.
Par jugement en date du 21 juillet 2020, le tribunal de commerce de Marseille a :
– condamné la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à payer à la société A3S la somme de 2500 euros au titre de l’indemnité pour non-respect de l’engagement statutaire avec intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2018 ;
– condamné reconventionnellement la société A3S à payer à la société Contrôle Technique du Fium’Orbu la somme de 400 euros en remboursement des parts sociales souscrites par cette société dans le capital de la société A3S, avec intérêts au taux légal capitalisé à compter du 19 juillet 2018 ;
– ordonné la compensation judiciaire à due concurrence entre les sommes ressortant des condamnations ci-dessus prononcées au titre de l’indemnité pour non-respect de l’engagement statutaire, outre intérêts et au titre du remboursement des parts sociales ;
– ordonné à la société A3S de procéder au paiement immédiat à la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de la quote-part de la réserve statutaire prévue à l’article 42 alinéa 3 des statuts;
– débouté la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;
– condamné la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à payer à la société A3S la somme de 2500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Contrôle Technique du Fium’Orbu aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance ;
– ordonné pour le tout, l’exécution provisoire ;
– rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.
Le tribunal a considéré que :
-Sur les manquements de la Coopérative :
– la COFRAC aurait émis 6 rapports et seuls 2 sont portés à la connaissance du tribunal, ce qui laisse présumer que 4 rapports sur 6 n’auraient pas de liens avec A3S ; ces deux rapports ne font pas l’objet de points critiques et relèvent des points mineurs, ce qui ne suffit pas à démontrer que la société A3S aurait manqué à ses obligations contractuelles.
-Sur l’application des règles définies par les statuts et le règlement intérieur :
– lors de la signature du bulletin d’adhésion et de la convention de sociétariat le 7 février 2013, la société défenderesse s’était engagée par à respecter les statuts et le règlement intérieur, dont il résulte notamment que l’associé s’engage pour une période de deux ans renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation moyennant un préavis de 6 mois ; le règlement intérieur sur lequel s’appuie la société A3S a été approuvé en assemblée générale le 30 juillet 2016 et est opposable à tous les associés coopérateurs,
– l’article L231-5 du code de commerce invoqué par la défenderesse n’est pas applicable dès lors que la relation entre une société coopérative et ses associés-coopérateur est régie par les lois qui ont structuré l’activité coopérative,
– la société Contrôle Technique du Fium’Orbu a cessé toutes relations commerciales avec A3S à compter du 27 juillet 2018 et n’apporte aucun élément de preuve justifiant de sa part le respect du préavis de 6 mois prévu par les statuts et le règlement qu’elle s’était engagée à respecter.
-Sur l’assimilation de la clause d’indemnité à une clause pénale :
– l’article 5 alinéa 4 du règlement intérieur définit comme base d’indemnité compensatrice forfaitaire la dernière année d’achat de liasse de contrôle. A3S retient comme dernière année de plein exercice l’année 2017 au cours de laquelle les relations entre les parties ont généré un chiffre d’affaires de 2500 euros,
– les relations entre une coopérative et un coopérateur dépassent les relations commerciales traditionnelles. Le départ de tout associé est un affaiblissement réel de la structure, créant un préjudice notable pour la Coopérative. Par ailleurs, la société n’apporte aucun élément permettant de démontrer le caractère disproportionné de la clause.
-Sur les demandes reconventionnelles de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu :
– Sur le rachat des parts sociales : il ressort des textes régissant la Coopérative que dès que l’associé-coopérateur partant paye l’indemnité prévue par les statuts, la cohérence de l’enchaînement des actes prévus par les textes de gouvernance de la société A3S rend logique et nécessaire le remboursement des parts sociales de l’adhérent sortant.
– la Coopérative ne produit aucun élément pour justifier une décision de l’assemblée générale sur l’imputation des pertes de l’exercice 2018 sur la valeur des parts sociales. En conséquence, la Coopérative doit rembourser à la société ses parts sociales à la valeur nominale.
– Il y a lieu d’ordonner la compensation judiciaire à due concurrence, entre les sommes ressortant des condamnations prononcées ci-dessus au titre de l’indemnité pour non-respect de l’engagement statutaire, outre intérêts et au titre du remboursement des parts sociales, outre intérêts.
– Sur la fraction de réserve prévue à l’article 42 des statuts :
– aucun élément n’est donné dans les pièces du dossier pour valoriser les sommes dues par la Coopérative A3S à la société au titre de l’application de l’article 42 des statuts relatif à la ristourne coopérative. La Coopérative doit verser à la société le montant de la quote-part de la réserve statutaire prévue.
– Sur la demande de dommages-intérêts diligentée par Contrôle Technique du Fium’Orbu: – la société Contrôle Technique du Fium’Orbu ne démontre pas avoir fait auprès de A3S la moindre demande d’accompagnement pour la conversion des fichiers compris dans son système en données utilisables par un autre logiciel. En conséquence, la société A3S n’a pas pu refuser de restituer les fichiers clients de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu.
Par ordonnance en date du 24 juillet 2020, le président du tribunal de commerce de Marseille a rectifié une erreur matérielle relative au barreau de l’avocat plaidant dans les intérêts de la société A3S.
Par acte du 27 août 2020, la société Contrôle Technique du Fium’Orbu a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille et de l’ordonnance rectificative en ce que le tribunal a :
– jugé que la société Contrôle Technique du Fium’Orbu n’avait pas respecté le délai de préavis;
– l’a condamnée au paiement de l’indemnité de 2500 euros pour non-respect de l’engagement coopératif, outre intérêts ;
– l’a déboutée de sa demande subsidiaire de réduction de l’indemnité précitée à 1 euro ;
– l’a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts et de celles au titre de l’article 700 et des dépens ;
– l’a condamnée au paiement de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions déposées et notifiées le 9 août 2023, la société Contrôle Technique du Fium’Orbu demande à la cour de :
– déclarer recevable et bien fondé l’appel formé par la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille le 21 juillet 2020 ;
En conséquence,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
– a rejeté la demande de résiliation de la convention, formulée par la société Contrôle Technique du Fium’Orbu et considéré qu’elle n’avait pas respecté le délai de préavis ;
– l’a condamnée au paiement de l’indemnité de 2500 euros pour non-respect de l’engagement coopératif, outre intérêts ;
– l’a déboutée de sa demande subsidiaire de réduction de l’indemnité précitée à 1 euro ;
– l’a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts et de celles au titre de l’article 700 et des dépens ;
– l’a condamnée au paiement de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Et statuant à nouveau sur ces chefs de demande,
– dire, juger et constater que la société Coopérative A3S est mal fondée en ses fins, moyens et conclusions ; l’en débouter ;
– Subsidiairement, prononcer la résolution de la convention de sociétariat aux torts exclusifs de la société Coopérative A3S en raison des manquements commis ;
– débouter en conséquence la société Coopérative A3S de l’intégralité de ses demandes ;
– Plus subsidiairement encore, dire, juger et constater que l’article 5.1 du règlement intérieur est une clause pénale dont le montant est manifestement excessif ;
En conséquence :
– réduire le montant de l’indemnité réclamée par la société Coopérative A3S à la somme symbolique de 1 euro ;
– la débouter pour le surplus de sa demande au titre de cette indemnité,
– condamner la société Coopérative A3S à payer à la Société Contrôle Technique du Fium’Orbu la somme de 5000 euros, à titre de dommages et intérêts, plus intérêts légaux à compter du jour du prononcé de l’arrêt à intervenir,
-La condamner au paiement d’une indemnité de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel,
-Confirmer pour le surplus le jugement entrepris.
Par conclusions déposées et notifiées le 22 septembre 2023, la Coopérative A3S demande à la cour de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 21 juillet 2020 ;
Y ajoutant :
– dire et juger que la Coopérative A3S a réglé entre les mains de la société Contrôle Technique du Fium’Orbu, la ristourne qui lui était due au titre de l’exercice 2017 pour un montant de 659,32 euros ;
– constater l’extinction de la créance de ristourne due par la Coopérative A3S à la société Contrôle Technique du Fium’Orbu ;
– débouter la société Contrôle Technique du Fium’Orbu de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– condamner la société Contrôle Technique du Fium’Orbu à payer à la Coopérative A3S la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Contrôle Technique du Fium’Orbu aux entiers dépens d’appel.
Par ordonnance en date du 21 novembre 2023, l’instruction a été clôturée.
MOTIFS :
Les dispositions du jugement entrepris ayant :
– condamné la société A3S Coopérative à payer à la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu la somme de 400 euros en remboursement des parts sociales, avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 19 juillet 2018,
– ordonné à la société Coopérative A3S de procéder au paiement immédiat à la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu de la quote-part de la réserve statutaire prévue à l’article 42 alinéa 3 des statuts,
ne font l’objet, en cause d’appel, d’aucune discussion par les parties, la société intimée justifiant d’ailleurs avoir procédé au règlement des sommes qui lui incombaient à ce titre.
Elles seront, en conséquence, purement et simplement confirmées.
Sur les demandes relatives à la résiliation de la convention liant les parties
La société Contrôle Technique du Fium’ Orbu fait grief, en premier lieu, au tribunal d’avoir rejeté sa demande de résolution de la convention de sociétariat aux torts de la société Coopérative A3S en raison des manquements commis par cette dernière.
Elle s’appuie sur les dispositions de l’article 1184 civil du code ancien qui disposent que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’ne demander la résolution avec dommages et intérêts.
Il appartient à l’appelante de démontrer les manquements de la Coopérative à ses obligations contractuelles et il revient à la cour d’apprécier si les manquements déplorés par l’ appelante sont suffisamment graves pour entraîner la résolution de l’engagement coopératif.
Dans son courrier du 19 juillet 2018 aux termes duquel la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu informe la Coopérative son intention de cesser toute relation, elle indique que la COFRAC aurait émis 6 fiches d’évaluation de son centre de contrôle technique réalisés les 7 et 8 juin 2018 pointant des manquements de la société Coopérative A3S.
Comme l’a relevé le tribunal, sur les six rapports émis par cet organisme, seuls deux sont produits au dossier lesquels s’ils relèvent des insuffisances, ne font pas l’objet de points critiques, les seuls points mis en avant pouvant être qualifiés de mineurs. Ces deux seuls éléments produits par le sociétaire sur une relation de cinq ans, sont insuffisants pour caractériser un manquement suffisamment grave justifiant le prononcé de la résolution du contrat aux torts de la Coopérative.
Dans ses conclusions en cause d’appel, la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu déplore également des problèmes récurrents portant sur un aspect essentiel de son activité ( logiciel défectueux, panne à répétition, absence de réponse, refus de procéder à des dépannages informatiques….). Elle ne communique cependant aucune pièce au soutien de cette affirmation, étant précisé que dans son courrier de résiliation du 19 juillet 2018 et celui du 9 août 2018 en vertu duquel elle maintient sa position, il n’est aucunement question d’autres manquements que ceux résultant des deux rapports de la COFRAC.
Le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu de ce chef de demande sera, en conséquence, confirmé.
Sur la demande d’indemnité de la société Coopérative A3S
Il est constant, en l’espèce, que la société A3S est une société coopérative artisanale à forme anonyme et capital variable et a pour objet la réalisation de toutes opérations et la prestation de tous services susceptibles de contribuer directement ou indirectement au développement de l’activité de ses associés relevant du secteur du contrôle technique automobile.
L’article 1 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 définit une société coopérative comme une société constituée par plusieurs personnes volontairement en vue de satisfaire à leurs besoins économiques ou sociaux par leur effort commun et la mise en place des moyens nécessaires.
En vertu de l’article 7 du même texte, les statuts des coopératives déterminent notamment le siège de la société, son mode d’administration, en particulier les décisions réservées à l’assemblée générale, les pouvoirs des administrateurs ou gérants, les modalités du contrôle exercé sur ses opérations au nom des associés, les formes à observer en cas de modification des statuts ou de dissolution. Ils fixent les conditions d’adhésion, le cas échéant d’agrément, de retrait, de radiation et d’exclusion des associés, l’étendue et les modalités de la responsabilité qui incombe à chacun d’eux dans les engagements de la coopérative. Les coopératives constituées sous forme de sociétés à capital variable régies par les articles L. 231-1 et suivants du code de commerce ne sont pas tenues de fixer dans leurs statuts le montant maximal que peut atteindre leur capital.
En outre, en vertu de l’article 1 alinéa 4 de la loi du 20 juillet 1983 applicable au présent litige, relatif aux sociétés coopératives artisanales, par la souscription ou l’acquisition d’une part sociale, l’associé s’engage à participer aux activités de la société coopérative ; les statuts peuvent déterminer le nombre de parts à souscrire ou à acquérir par chaque associé en fonction de son engagement d’activité.
L’article 14 des statuts de la société Coopérative A3S stipule que ‘ Par son admission, le sociétaire s’engage en activité avec la coopérative pour le ou les centres de contrôle qu’il exploite pour une période minimale dont la prise d’effet, la durée, les conditions de renouvellement et de dénonciation, ainsi que ses obligations sont fixées par le règlement intérieur rappelé dans la convention de secrétariat’.
L’article 15 intitulé ‘ Démission-Exclusion-Requalification’ est ainsi libellé: ‘ Tout associé a le droit de se retirer de la coopérative à l’issue de sa période minimale d’engagement en activité en respectant un délai de préavis de 6 mois; la décision de retrait doit être notifiée à la coopérative par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. En cas de non respect du délai de préavis, l’associé est redevable d’une pénalité à titre d’indemnité fixée par le règlement intérieur et figurant dans la convention de secrétariat (….)’
Par ailleurs l’article 29 énonce que ‘ Un règlement intérieur complète et précise les dispositions des présents statuts. Ses dispositions ont la même force obligatoire que les statuts. Le règlement intérieur général est mis en ligne sur le site de la Coopérative et ses mises à jour par le conseil d’administration font l’objet d’information et d’explication par e-mail auprès de chaque associé( …) Les modifications sont adoptées par l’assemblée générale extraordinaire (…)’
Il ressort de l’article 4-2 du règlement intérieur de la société Coopérative A3S du 30 juillet 2016 ( pièce n° 3) que ‘ Par son adhésion, chaque associé s’oblige à participer aux activités de la coopérative et à cet effet s’engage pour une durée de deux ans renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec avis de réception moyennant un délai de préavis de six mois à (….)
– respecter et appliquer sans réserve les dispositions établies dans les documents en vigueur de la coopérative, notamment les statuts, le règlement intérieur, le cahier des charges portant réglementation du contrôle technique, procédures des systèmes de qualité et la convention d’achat réseau (…)’
L’article 5-1 prévoit que ‘ Tout associé peut se retirer de la coopérative dans les conditions spécifiées par les dispositions de l’article 15 des statuts qui fixent également le cas où tout associé peut-être radié’ et stipule que ‘ Dans l’hypothèse où le centre de contrôle met fin à son adhésion sans respecter le délai de préavis, le sociétaire doit s’acquitter d’une indemnité compensatrice équivalente à la somme de la dernière année d’achats de liasses de contrôle’.
Il est établi que 7 février 2013, la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu a sollicité son admission en qualité d’associé coopérateur auprès de la société A3S.
La société appelante a alors signé une déclaration sur l’honneur à l’admission dans la Coopérative confirmant solliciter ‘ l’admission dans la ‘Coopérative Nationale des Entreprises de l’Inspection Technique des Véhicules’ conformément aux statuts et règlement de la Coopérative dont j’atteste avoir pris connaissance (…)’ déclarant s’engager à ‘ prendre connaissance, respecter, appliquer, sans réserve, toutes les dispositions établies dans les documents en vigueur établis par la Coopérative A3S, notamment statuts, règlement intérieur général, convention de sociétariat, cahier des charges ainsi que les décisions collectives prises en assemblées générales de la coopérative qui les modifieraient’.
Elle a en outre conclu le 7 février 2013 une convention de sociétariat dont l’article 11-2 relatif à la durée énonce que ‘Elle est conclue pour une durée deux ans à dater de l’agrément préfectoral du contre de contrôle rattaché à la Coopérative A3S, et est renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception par l’une ou l’autre des parties moyennant le respect d’un délai de préavis de six mois. Sauf décision contraire de l’assemblée générale des sociétaires, la convention tacitement reconduite comporte les mêmes clauses et conditions que la précédente’ .
Il résulte ainsi de ces éléments que la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu , en adhérant à la Coopérative, était tenue de se conformer aux dispositions des statuts, du règlement intérieur lors de son admission et des règlements ultérieurs adoptées par les assemblées générales extraordinaires ainsi de la convention de sociétariat.
Or, le règlement intérieur du 30 juillet 2016 utilisé comme référence par la société intimée a été approuvé en assemblée générale de la Coopérative le 30 juillet 2016 et est dès lors opposable à tous les associés-coopérateurs, de sorte que la société appelante ne peut utilement soutenir que l’article 5-1 dudit document fixant les modalités de calcul de l’indemnité de résiliation ne lui est pas opposable et ce peu importe que ni les statuts et ni la convention de sociétariat ne mentionnent le montant des indemnités en cas de départ anticipé.
En outre, l’article 4-2 de ce même règlement qui stipule que ‘ Par son adhésion, chaque associé s’oblige à participer aux activités de la coopérative et à cet effet s’engage pour une durée de deux ans renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec avis de réception moyennant un délai de préavis de six mois’ lui est également opposable.
Dans ces conditions, les modifications du règlement intérieur régulièrement approuvées en assemblée générales en 2016 sont bien applicables à tout sociétaire, dont la société appelante.
En l’occurrence, la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu obtenu l’agrément préfectoral pour son centre de contrôle technique poids lourds (PL) le 28 octobre 2013.
Conformément, aux statuts et au règlement intérieur susvisés, l’engament coopératif de la société appelante s’est donc renouvelé, à défaut de dénonciation dans les délais sus-énoncés, 3 fois et la dernière fois le 28 octobre 2017.
Celle-ci a adressé un courrier de démission le 19 juillet 2018 qui ne pouvait cependant prendre effet, au regard des dispositions qui précèdent, qu’à l’issue du renouvellement de la convention à savoir le 27 octobre 2019, ce qu’au demeurant l’appelante reconnaît puisqu’elle indique dans ce courrier qu’elle sera libérée de ses engagements à compter de cette date.
Or, il ressort des pièces produites que la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu a cessé toute relation avec la société A3S à compter du mois de juillet 2018, sans respecter le délai de préavis de six mois qui lui avait était imparti et qu’elle avait pourtant accepté.
En effet, c’est en vain que cette dernière prétend qu’il n’est aucunement fait obligation à l’adhérant de notifier son préavis six mois avant l’échéance, une telle allégation étant contraire aux dispositions de l’article 11-2 de la convention de sociétariat qu’elle a dûment régularisée et qui indique que ‘ Elle ( la convention) est conclue pour une durée deux ans à dater de l’agrément préfectoral du contre de contrôle rattaché à la Coopérative A3S, et est renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception par l’une ou l’autre des parties moyennant le respect d’un délai de préavis de six mois. Sauf décision contraire de l’assemblée générale des sociétaires, la convention tacitement reconduite comporte les mêmes clauses et conditions que la précédente’.
Comme le rappelle à juste titre la société intimée, la relation entre une société coopérative et ses associés est régie par les lois qui ont structuré l’activité coopérative ainsi que les statuts de chaque coopérative, le droit coopératif pouvant ainsi déroger par des dispositions spéciales au droit commun des contrats. Il s’ensuit que le renouvellement du contrat ne donne pas naissance à un nouveau contrat à durée indéterminée mais à un nouveau contrat à durée déterminée qui ne peut être résilié à tout moment mais uniquement à chaque échéance et moyennant le respect d’un préavis de six mois.
La société Contrôle Technique du Fium’ Orbu n’a donc pas respecté les modalités de retrait de la société coopérative.
Elle reproche à la partie adverse un manque de loyauté tenant à l’absence de tentative de conciliation de la part de la société A3S, alors qu’une telle absence est tout autant à noter de la part de la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu qui s’est contentée de notifier à son partenaire sa décision de quitter la coopérative. De surcroît, un tel motif n’est pas de nature à justifier une résiliation de la convention aux torts exclusifs de l’intimée et à exonérer la partie appelante de son obligation de respecter le délai de préavis de six mois tel que prévu par la convention les liant.
La société appelante dénonce enfin une rupture d’égalité entre les sociétaires, faisant valoir que la politique de la Coopérative, décidée en 2014, respectait jusqu’à présent la liberté de retrait des sociétaires, auquel il n’était réclamé aucune pénalité de sortie.
Elle se fonde notamment sur un courriel de M. [H], fondateur et ancien directeur de la société intimé mais qui n’engage que lui ainsi des courriers recommandés adressés par le conseil de la société A3S en 2016 concernant trois sociétaires qui ont fait l’objet d’une procédure d’exclusion, laquelle n’obéit pas aux mêmes règles que celle du retrait anticipé.
En tout état de cause, la société A3S est parfaitement fondée à appliquer les dispositions résultant de ses statuts, de son règlement intérieur et de la convention de sociétariat.
Dans ces conditions, l’appelante ayant unilatéralement cessé ses relations avec la Coopérative dès le mois juillet 2018, sans respecter le délai de préavis de six mois, l’article 5-1 du règlement intérieur lui est applicable.
Conformément à cet article, elle doit s’acquitter d’une indemnité compensatrice forfaitaire équivalente à la somme de la dernière année d’achat de liasses de contrôle, l’année de référence complète à prendre en compte étant l’année 2017.
Au regard des pièces produites, cette indemnité d’élève à la somme de 2500 euros.
A titre subsidiaire, la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu demande à la cour de réduire le montant de cette indemnité à la somme de 1 euro, au motif qu’il s’agit d’une clause pénale qui présente un caractère manifestement excessif au regard notamment du comportement de la Coopérative et de l’absence de préjudice réel subi par cette dernière.
En vertu de l’article 1152 alinéa 2 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Le caractère excessif de la clause doit d’apprécier au regard du préjudice réellement subi par la société A3S.
Il est constant que celle-ci a été privée du versement d’une partie des recettes qu’elle escomptait jusqu’à la date d’échéance biennale du contrat, à savoir le 27 octobre 2019, alors que la société appelante a unilatéralement quitté le réseau à compter du mois de juillet 2018.
En effet, aux termes tant des statuts que de la convention de sociétariat, le sociétaire s’engage à utiliser les produits et prestations de service mis en oeuvre par la Coopérative et à payer sans tarder les factures émises par celle-ci relatives aux produits et services fournis par celle-ci.
La société A3S justifie avoir subi un préjudice conséquent consécutivement au départ d’un certain nombre de sociétaires au cours des exercices 2017 et 2018, alors que précisément elle avait fait le choix d’un investissement accru notamment en matériel informatique, qu’il résulte des comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2018 qu’elle a dégagé une perte d’exploitation de 128353 euros contre un bénéfice de 483000 euros l’année précédente et que son résultat définitif est de -193657 euros contre 484300 euros au 31 décembre 2017.
En outre, en sa qualité de professionnel averti, la société appelante n’apporte aucun élément permettant de démontrer que le montant de la clause est disproportionné par rapport aux pratiques du secteur d’activité concerné, la société A3S établissant que certains réseaux concurrents ont des durées d’affiliation et des montant bien supérieurs.
En considération de ces différents éléments, il convient d’appliquer strictement la sanction prévue pour le non respect de la période d’engagement et de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu à payer à la société Coopérative A3S la somme de 2500 euros au titre de l’indemnité de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2018, date de la mise en demeure.
Sur la demande relative à la restitution de la base de données :
Il résulte du règlement intérieur de la Coopérative A3S et de la convention de sociétariat liant les parties que la coopérative fournit aux associés des prestations informatiques, facturées dans l’achat des liasses de contrôle VL ou PL et qui comprennent notamment la mise à disposition du logiciel de contrôle technique, pour la durée du rattachement du sociétaire à la coopérative.
Le protocole d’assistance et de maintenance informatique soumis par la coopérative aux sociétaires précise en son article 2 que le logiciel ‘Logisystème II’ pour le contrôle technique des véhicules légers et le logiciel ‘Orion-PL’ pour le contrôle technique des véhicules lourds sont la propriété de la Coopérative A3S, qui accorde à chaque sociétaire une licence personnelle d’utilisation, durant toute la période de son rattachement à la coopérative, et procède elle-même à l’installation du logiciel sur du matériel référencé ou autorisé par elle.
L’article 2.1.4 mentionne que ‘lorsque l’installation de contrôle n’est plus rattachée à la Coopérative A3S, cela entraîne ipso facto l’interdiction d’utiliser ses logiciels et entraîne le retrait de la licence et la récupération immédiate des logiciels et de ses éléments pour les cas suivants : (…) démission du sociétaire ou exclusion de ce dernier (…).’
L’article 2.2 stipule que dans un tel cas, le sociétaire doit, au plus tard à 17h le jour de fin de rattachement à la Coopérative A3S, donner accès au service informatique A3S par télémaintenance aux micro-ordinateurs pour permettre la désinstallation des logiciels.
Il ressort des explications des parties concordantes sur ce point que pour chaque contrôle technique, les données relatives au client, au véhicule contrôlé et aux opérations de contrôle sont saisies et traitées au moyen du logiciel mis à disposition par la Coopérative A3S et qu’en cas de désinstallation ou de blocage du logiciel, le sociétaire ne peut plus accéder à ces données s’il n’a, au préalable, fait réaliser la procédure d’export de la base de donnée vers un format Excel.
Il appartient en conséquence à l’exploitant du centre de contrôle technique qui résilie la convention de sociétariat de prendre attache avec le service informatique de A3S avant la date d’effet de la résiliation pour organiser les opérations de désinstallation après export des données lui appartenant.
L’appelante prétend que malgré ses démarches amiables, la Coopérative A3S qui avait désactivé le logiciel à la suite de son départ du réseau, n’est jamais intervenue pour lui rétablir l’accès à sa base de donnée. Elle sollicite l’allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle prétend subir du fait de cette inertie.
Elle ne justifie cependant d’aucune demande d’intervention ou réclamation adressée à la Coopérative A3S pendant toute l’année ayant suivi son départ du réseau, concernant l’extraction de sa base de donnée.
Ce n’est que devant le tribunal de commerce par conclusions du 3 septembre 2019, en réponse à l’action intentée par la société Coopérative A3S en paiement de l’indemnité de résiliation, que la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu a prétendu être privée de l’accès à ses données, pour déclarer ensuite qu’elle avait dû faire appel à un prestataire extérieur, dont l’intervention ne lui avait pas été facturée, à titre commercial.
C’est en conséquence à juste titre que les premiers juges ont débouté la société Contrôle Technique du Fium’Orbu qui ne justifie ni d’un manquement de la société Coopérative A3S, ni d’un préjudice, l’ont déboutée de sa demande en dommages et intérêts.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Partie succombante, la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité pour frais irrépétibles d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu à payer à la société Coopérative A3S la somme de 3000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Contrôle Technique du Fium’ Orbu aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT