Parts sociales : décision du 16 mai 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/05280

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Parts sociales : décision du 16 mai 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/05280
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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 16 MAI 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 21/05280 – N° Portalis DBVK-V-B7F-PEBL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 20 JUILLET 2021

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN

N° RG 2020J00248

APPELANTE :

S.A. BANQUE POPULAIRE DU SUD, Société Anonyme Coopérative de Banque Populaire à capital variable, régie par les articles L.512-2 et suivants du Code Monétaire et Financier et l’ensemble des textes relatifs aux Banques Populaires et aux établissements de crédits, immatriculée au RCS de PERPIGNAN sous le Numéro B 554 200 808, et pour elle son représentant légal, domicilié es-qualité audit siège social

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Céline PIRET, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substituant Me Harald KNOEPFFLER de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIME :

Monsieur [E] [J]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté par Me Emilie CAVALIERE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

Ordonnance de clôture du 21 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 MARS 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseillère

M. Thibault GRAFFIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey VALERO

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère faisant fonction de président en remplacement de Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre régulièrement empêché, et par Mme Audrey VALERO, Greffière.

FAITS, PROCEDURE – PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

La SAS Emdy Restauration, immatriculée le 23 novembre 2016, a pour activité l’exploitation d’un fonds de commerce de débit de boissons, café, restauration rapide, organisation de réceptions, situé [Adresse 3].

Elle a ouvert dans les livres de la SA Banque populaire du Sud un compte professionnel n°[XXXXXXXXXX01].

Par acte sous seing privé en date du 16 décembre 2016, la Banque populaire du sud lui a consenti un premier prêt professionnel à hauteur de la somme de 375 000 euros sur 84 mois avec un taux de 1,84 % et des mensualités de 4 902 euros.

Monsieur [E] [J], président de la société Emdy Restauration, s’est porté caution solidaire des sommes pouvant être dues au titre de ce prêt à hauteur de 150 000 euros par acte sous seing privé du même jour pour une durée de 108 mois.

Il s’est également porté caution solidaire « tous engagements » par acte sous seing privé en date du 14 janvier 2017, pour un montant de 91 000 euros et une durée de 60 mois et par acte sous seing privé en date du 27 janvier 2017, pour un montant de 19 500 euros et une durée de 60 mois.

Par acte sous seing privé en date du 5 juillet 2017, la Banque populaire du sud a accordé un second prêt à la société Emdy Restauration d’un montant de 70000 euros sur 84 mois avec un taux de 1,84 % et des mensualités de 911,31 euros.

Par acte du même jour, Monsieur [J] s’est engagé en qualité de caution solidaire au titre de ce prêt à hauteur de la somme de 14 000 euros pour une durée de 84 mois.

Par jugement rendu par le tribunal de commerce de Perpignan en date du 5 février 2020, la société Emdy Restauration a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL MJSA était désignée en qualité de liquidateur. Elle a été radiée le 28 juillet 2021 suite au jugement de ce tribunal en date du 28 juillet 2021 prononçant la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.

La Banque populaire du sud a déclaré ses créances le 16 mars 2020 et mis en demeure Monsieur [J] d’honorer ses engagements par lettre recommandée du même jour (avis de réception signé le 19 mars 2020).

Saisi par acte d’huissier en date du 21 octobre 2020, le tribunal de commerce de Perpignan a, par jugement du 20 juillet 2021 :

« – vu les dispositions de l’article 332-1 du code de la consommation,

– dit que les engagements de caution en date du 16.12.2016 dans la limite de 150 000 euros, du 14.01.2017 dans la limite de 91 000 euros, du 27 01.2017 dans la limite de 19 500 euros, du 5 .07.2017 dans la limite de 14 000 euros, étaient disproportionnés à ses biens et revenus au moment de leurs conclusions et que la Banque Populaire du Sud ne pouvait s’en prévaloir,

– dit que le patrimoine que Monsieur [E] [J] ne lui permet pas de faire face à ses obligations au moment où les engagements de caution sont appelés, – débouté la Banque Populaire du Sud de ses demandes,

– l’a condamnée au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens. »

Par déclaration reçue le 23 août 2021, la Banque populaire du sud a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Elle demande, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 3 février 2023, de :

« – Vu les articles 1193 et suivants, 1905 et suivants, 2288 et suivants du Code Civil, (‘),

– réformer et infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– débouter Monsieur [E] [J] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner Monsieur [E] [J] à lui verser, en vertu de ses engagements de caution omnibus cumulatifs des 14.01.2017 et 27.01.2017 et dans la limite de 110 500 euros :

* 348 669,27 euros, outre intérêts au taux contractuel de 1,84% à compter du 09.11.2021 au titre du prêt 08702184 de 375 000 euros du 16.12.2016 en vertu de son engagement de caution cumulatif du 16.12.2016 et dans la limite additionnelle de 150 000 euros,

* 56 723,89 euros, outre intérêts au taux contractuel de 1,84% à compter du 09.11.2021 au titre du prêt 08713661 de 70 000 euros du 20.07.2017 en vertu de son engagement de caution cumulatif du 05.07.2017 et dans la limite additionnelle de 14 000 euros,

* 830,48 euros, outre intérêts au taux contractuel de 13,10% à compter du 09.11.2021 au titre du solde débiteur du compte [XXXXXXXXXX01],

– condamner Monsieur [E] [J] à lui verser 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– condamner Monsieur [E] [J] aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction (‘) conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile,

– condamner toujours sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, le requis à lui rembourser toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge en application des dispositions du décret n° 2001-212 du 08 mars 2001, modifiant le décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des Huissiers de Justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du droit proportionnel de recouvrement ou d’encaissement mis à la charge des créanciers.»

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

– la caution dissimule des éléments patrimoniaux ; lorsqu’il s’est engagé, il était porteur de parts de la société liquidée, sur le nombre et la valeur desquelles il est taisant,

– il détenait également des parts dans une société [J], exploitant un restaurant à [Localité 8], qu’il dissimule pareillement,

– il ne produit que les bilans de 2014, 2015 et 2016 de la société [J], qui font apparaître un accroissement de la rentabilité et ne produit pas le bilan 2017, année de la souscription des engagements de caution,

– il reconnaît être propriétaire d’un immeuble pour avoir souscrit en 2011 un crédit immobilier sans indiquer la nature et la valeur de ce patrimoine immobilier au jour de ses engagements, ni justifier que ledit crédit ne concernerait qu’un appartement ne lui appartenant pas,

– il est une caution avertie,

– la seule sanction est désormais la non-opposabilité de l’acte de caution et ne peut plus fonder un manquement susceptible de donner lieu à une indemnisation,

– la déconfiture de la société n’est intervenue que quatre ans après l’octroi du prêt principal,

– elle a respecté son obligation d’information, Monsieur [J] ne l’a nullement informée de l’absence de réception de la lettre d’information contrairement aux dispositions contractuelles,

– à défaut la caution a été informée par lettre recommandée du 16 mars 2020, puis par l’assignation du 21 octobre 2020, puis par les présentes écritures ; la déchéance étant alors limitée entre le 1er avril 2017 et le 16 mars 2020,

– aucune échéance n’était impayée lors de la déclaration de créance, le compte ayant une position débitrice autorisée.

Formant appel incident, Monsieur [J] sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 15 février 2023 :

« -Vu les dispositions des articles 1103, 1104, 1231-1 et suivants, 1343-5 et 2288 et suivants du Code Civil, vu les dispositions des articles L.331-1 et suivants du Code de la Consommation,

– A titre principal, confirmer la décision rendue (‘),

– Débouter la Banque populaire du sud de l’intégralité de ses demandes (…),

– Juger que la Banque populaire du sud n’apparaît pas fondée à se prévaloir de l’intégralité des engagements de caution souscrits (‘),

– Juger que la Banque populaire du sud a manqué à son obligation de prudence en lui ayant fait souscrire 4 engagements de caution manifestement disproportionnés à ses biens et revenus,

– Juger que sa situation financière ne lui permet pas de faire face à son obligation de remboursement,

– En conséquence, le libérer de tous ses engagements de caution,

– A titre subsidiaire, et seulement dans le cas d’une éventuelle condamnation (‘)

– Juger que la Banque populaire du sud a commis une faute et a failli à son obligation de conseil et de mise en garde à son égard, la condamner en conséquence à lui payer la somme de 179 633,31 euros à titre de dommages-intérêts,

– Le cas échéant, ordonner la compensation entre les sommes pouvant être mises à sa charge et celles résultant des dommages-intérêts,

– Déchoir la Banque populaire du sud de sa demande au titre des intérêts faute d’information de la caution,

– Déchoir la Banque populaire du sud du droit aux pénalités et intérêts de retard échus entre la date du premier incident de paiement non régularisé et de la première information conforme reçue par ses soins aux cautions,

– En toute hypothèse, condamner la Banque populaire du sud aux entiers dépens et à 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile. »

Il expose en substance que :

– aucune déclaration de patrimoine n’a été effectuée au moment des engagements de caution, qui représentent un engagement total de 274 500 euros,

– il verse aux débats ses avis d’imposition pour les années 2016 à 2022, qui laissent apparaître un revenu fiscal de référence non imposable de l’ordre de 887 euros par mois, et au vu de ses charges, une capacité résiduelle d’endettement, voire négative,

– il a souscrit les quatre engagements de caution en décembre 2016, janvier et juillet 2017, l’exercice clos au 31 décembre 2017 de la SAS [J] est sans incidence, les exercices clos en 2015 et 2016 montrent de larges pertes(-57438 euros) et un bénéfice limité (21 442 euros),

– il n’a jamais été propriétaire d’un bien immobilier, il supportait depuis 2011 un prêt immobilier pour des travaux concernant un bien appartenant à son ex- épouse (prêt de 22 000 euros échéance en 2024) et depuis 2017 un prêt de trésorerie personnelle,

– la société Emdy Restauration était lourdement endettée au regard des prêts accordés et a été placée en liquidation judiciaire,

– sa situation financière n’a pas évolué,

– la banque n’a pas apprécié sa capacité de remboursement alors que le montant global des prêts, soit 445 000 euros, était inadapté aux capacités financières de la société,

– la banque n’a pas respecté son obligation d’information annuelle, ni celle relative au premier incident de paiement.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 21 février 2023.

MOTIFS de la DÉCISION :

1- sur la disproportion

L’article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, applicable à la cause, prévoit qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution, qui invoque la disproportion, de fournir les éléments permettant de l’apprécier.

En l’absence de fiche de patrimoine, sollicitée par la banque, la caution est libre de démontrer quelle était sa situation financière réelle lors de son engagement.

La proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie et doit être appréciée à la date de la conclusion du contrat ainsi qu’à la date à laquelle elle est appelée, en tenant compte du montant de l’engagement, des biens et revenus et de l’endettement de la caution.

M. [J] s’est engagé en qualité de caution solidaire en décembre 2016 à hauteur de 150 000 euros (pour le prêt de 375 000 euros) et par actes « tous engagements » de janvier 2017, pour un montant de 91 000 euros et 19 500 euros et en juillet 2017 à hauteur de 14 000 euros (pour un prêt de 70 000 euros).

Il justifie de ses revenus, à l’appui de ses déclarations de revenus pour l’année 2016 : 22 519 euros, soit 1 798 euros par mois et l’année 2017 : 19 976 euros, soit 1 664 euros par mois.

Il justifie également que lors de la clôture de l’exercice le 31 décembre 2015, la société [J] avait des capitaux propres négatifs (- 37 588 euros) avec une perte de 150 euros et qu’au 31 décembre 2016, les capitaux propres étaient encore négatifs (- 16 146 euros) avec un bénéfice de 21 442 euros, les résultats lors de la clôture au 31 décembre de l’année 2017 étant postérieurs aux engagements, en sorte que la valorisation des parts sociales de cette société, à la date de ses engagements, était manifestement faible.

Il justifie être divorcé et verser des pensions alimentaires à hauteur de 3 200 euros par an pour deux enfants.

Il justifie que le prêt immobilier souscrit en 2011 pour 159 mois était un prêt commun, d’un montant de 22 000 euros (97 euros par mois), qu’il a conservé après le divorce sans attribution d’un immeuble et avoir souscrit un prêt personnel en mars 2017 pour 5 ans à hauteur de 13 000 euros (238,42 euros par mois).

Toutefois, s’il n’est pas contesté que la société Emdy restauration, immatriculée en novembre 2016, était endettée depuis le début de son activité, M. [J] ne verse aux débats aucun élément concernant cette société, ni le nombre de parts dont il était titulaire, ni les documents comptables de celle-ci alors que la liquidation judiciaire n’a été ouverte qu’en février 2020, soit plus de trois années plus tard, ni même le rapport établi par le liquidateur judiciaire.

Il en résulte que la valorisation des parts sociales de cette société, dont disposait M. [J] lors de ses engagements, ne peut être fixée, et retenue comme étant réduite à néant, ce dernier le soutenant sans le démontrer.

Ainsi, en l’absence de tout élément sur la valeur des parts sociales, qu’il détenait dans le capital social de la société Emdy Restauration lors de ses engagements de caution en décembre 2016, janvier et juillet 2017, M. [J] ne démontre pas que ceux-ci étaient manifestement disproportionnés à ses revenus, charges et patrimoine à cette date.

En conséquence, la Banque populaire du sud peut se prévaloir de ces actes de cautionnement, sans qu’il y ait lieu d’examiner un retour à meilleure fortune au jour où la caution a été appelée.

Le jugement sera donc infirmé.

2 ‘ sur le devoir de mise en garde

La banque est tenue d’un devoir de mise en garde à l’égard d’une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté aux capacités financières de la caution et qu’il existe un risque d’endettement né de l’octroi du prêt garanti, lequel résulte de l’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur.

En présence d’une caution avertie, la banque n’est tenue à un devoir de mise en garde qu’à la condition qu’elle ait détenu des informations sur les revenus de la caution, son patrimoine et ses capacités de remboursement raisonnablement prévisibles en l’état du succès escompté de l’opération financée ou de la société cautionnée, que la caution aurait elle-même ignorées.

Si Monsieur [J], âgé de 41 ans lors du premier engagement litigieux, ne conteste pas qu’il était gérant de deux sociétés dans le même domaine d’activités, cette expérience professionnelle, est, en l’absence de tout autre élément, relatif, notamment à sa formation et à une pratique antérieure en matière d’opérations financières, même s’il ne s’agissait pas, en l’espèce, d’une opération complexe, insuffisante pour le qualifier de caution avertie.

En l’espèce, comme indiqué précédemment aucune disproportion aux capacités financières de la caution n’est rapportée tandis qu’aucun élément comptable concernant la société empruntrice n’est produit et ne permet de retenir que les divers concours étaient inadaptés à ses capacités, la société Emdy restauration, n’ayant été placée en liquidation judiciaire qu’en février 2020 et les prêts souscrits en 2016 et 2017 n’étant pas exigibles lors de l’ouverture de la procédure collective.

Ainsi, aucune violation du devoir de mise en garde à la charge de la Banque populaire du sud n’est caractérisée et les demandes d’indemnisation et de compensation, formées par M. [J] ne pourront qu’être rejetées.

3- sur l’information de la caution

Les dispositions des articles L. 333-1 et L. 343-5, L.333-2 et L.343-6 du code de la consommation, ayant été abrogées à compter du 1er janvier 2022 par l’article 37 de l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, il convient de faire application des dispositions des articles 2302 et 2303 du code civil, entrées en vigueur à cette date, y compris aux cautionnements constitués antérieurement.

Selon l’article 2302 du code civil, le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu’à celle de la communication de la nouvelle information. Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette.

Le créancier professionnel est tenu, à ses frais et sous la même sanction, de rappeler à la caution personne physique le terme de son engagement ou, si le cautionnement est à durée indéterminée, sa faculté de résiliation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci peut être exercée.

Le présent article est également applicable au cautionnement souscrit par une personne morale envers un établissement de crédit ou une société de financement en garantie d’un concours financier accordée à une entreprise.

Selon l’article 2303 du même code, le créancier professionnel est tenu d’informer toute caution personne physique de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement, à peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus entre la date de cet incident et celle à laquelle elle en a été informée. Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette.

L’absence d’exigibilité des prêts avant l’ouverture de la liquidation judiciaire fait obstacle à tout défaut de respect de l’information due à la caution en cas de premier incident de paiement non régularisé, de sorte que la demande de déchéance à ce titre sera rejetée.

L’obligation d’information pesant sur la banque étant d’ordre public, la clause contractuelle relative à la constatation du fonctionnement du système d’information automatique de la banque en lieu et place de l’envoi de la lettre d’information, prévue par les textes rappelés ci-dessus, ne peut y faire échec tandis que les courriers versés aux débats par la banque ne permettent pas d’établir que ceux-ci ont été envoyés à la caution, ni la mise en demeure du 16 mars 2020, ni l’assignation du 21 octobre 2020, ni les conclusions communiquées dans la présente instance ne respectant le contenu desdites informations.

La Banque populaire du sud sera donc déchue de la totalité de son droit aux intérêts contractuels et pénalités échus pour non-respect de l’obligation d’information annuelle de la caution.

Les tableaux d’amortissements pour chaque prêt, ainsi que les décomptes, en ce compris au titre du solde du compte courant à hauteur de 676,34 euros au 12 février 2020, de chaque créance, versés aux débats, ne sont pas contestés.

Le montant restant dû pour chaque prêt, après application de la déchéance, étant bien supérieur au plafond de celui de chaque cautionnement (150 000 et 14 000 euros), celle-ci est sans effet sur les sommes principales dues au titre de ces engagements et ne s’appliquera qu’aux intérêts. Pareillement, ces sommes principales dues pour chaque prêt, après déduction des cautionnements afférents, restent supérieures au montant global des cautionnements « tous engagements » (110 500 euros), de sorte que la déchéance est également sans effet sur le montant dû à titre principal au titre de ces engagements.

En conséquence, M. [J] sera condamné à payer la somme de 150 000 euros au titre de son engagement de caution du 16 décembre 2016 garantissant le prêt de 375 000 euros, de 14 000 euros au titre de son engagement de caution du 5 juillet 2017 garantissant le prêt de 70 000 euros et de 110 500 euros au titre de ses engagements de caution omnibus des 14 et 27 janvier 2017 pour les sommes restant dues au titre de ces deux prêts et du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX01], et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, le décompte en date du 8 novembre 2021, fixant le point de départ sollicité, n’ayant aucun effet au titre de la mise en demeure.

4- sur les autres demandes

Succombant, M. [J] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel et au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 1 500 euros, sa demande sur ce fondement étant rejetée.

Enfin, le droit proportionnel, fixé par l’article A. 444-32 du code de commerce (ancien article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996) reste à la charge du créancier, sauf lorsque la dette est due par un contrefacteur (article R. 444-55 du même code) ou un professionnel (article R. 631-4 du code de la consommation) sans qu’aucune autre dérogation ne soit prévue, la demande de la Banque populaire du sud tendant à ce qu’il soit dérogé aux dispositions régissant les charges de frais d’huissier de justice, y compris dans le cadre de l’application de l’article 700, sera donc rejetée.

 


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