Particulier employeur : décision du 3 février 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 19-17.377

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Particulier employeur : décision du 3 février 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 19-17.377
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SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Rejet non spécialement motivé

M. CATHALA, président

Décision n° 10144 F

Pourvoi n° F 19-17.377

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme J…
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 décembre 2019

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

M. G… D…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° F 19-17.377 contre l’arrêt rendu le 4 avril 2019 par la cour d’appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. F… J…, domicilié […] ,

2°/ à Mme P… J…, domiciliée […] ,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. D…, de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. et Mme J…, après débats en l’audience publique du 10 décembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article L. 431-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. D… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. D… et le condamne à payer à M. et Mme J… la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour M. D….

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné M. G… D… à payer à M. F… J… et Mme P… J… la somme brute de 45.175,62 euros, outre celle de 4.517,56 euros au titre des congés payés afférents, sous déduction pour chacun d’eux de la somme mensuelle de 71 euros sur le salaire net, au titre de l’avantage en nature pour le logement de fonction, d’AVOIR ordonné à M. G… D… de remettre à M. F… J… et Mme P… J… chacun les bulletins de paie pour la période de mai 2009 à janvier 2014 avec déduction du salaire net de l’avantage en nature mensuel de 71 euros, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi, et d’AVOIR ordonné à M. G… D… de régulariser le paiement des cotisations sociales dues aux organismes sociaux auxquels M. et Mme. J… devaient être affiliés ;

AUX MOTIFS QU’ « en l’espèce, il résulte du contrat de gardiennage que M. et Mme J… se sont vu attribuer un logement de fonction situé dans la propriété de M. D… en échange des services de gardiennage suivants : présence et surveillance de la propriété sauf une journée de congé hebdomadaire et congés annuels, service des poubelles, participation à l’entretien de la piscine, nourriture et soins des animaux en cas d’absence des propriétaires, ouverture et fermeture des volets du château quand celui-ci est inoccupé, les absences devant leur être communiquées. Ainsi, il ressort de ce contrat de travail, dont l’existence a été définitivement retenue tant pour M. J… que pour Mme J…, que leur activité principale consistait en une présence et une surveillance de la propriété. A l’appui de leur demande de rappel de salaires basée sur un horaire mensuel de 174 heures correspondant à un temps plein tel que défini par la convention collective applicable, M. et Mme J… produisent des attestations de leurs proches, enfants et amis, aux termes desquelles ceux-ci expliquent qu’ils ne pouvaient partir en week end ou assister à des soirées puisqu’ils ne pouvaient quitter la propriété que durant leurs congés annuels et le dimanche. Par ailleurs, M. T…, employé au moment des faits en qualité de jardinier, explique que lorsque les propriétaires étaient là, une simple présence leur était demandée mais qu’elle était obligatoire et que M. et Mme J… ne pouvaient donc s’absenter la journée sans avoir eu l’accord préalable de M. D…. Il précise que pendant les périodes d’absence de M. et Mme D…, pour lesquelles M. et Mme J… produisent un calendrier, M. J… devait effectuer l’entretien de la piscine, l’ouverture et la fermeture des volets, le nourrissage des animaux, le relevé du courrier et l’accueil des agents EDF, facteur ou entreprises intervenant sur la propriété. Leur fils, I…, précise quant à lui que, durant ces périodes, ils devaient même être de garde sept jours sur sept. Ils versent également aux débats un certain nombre d’échanges de mails avec M. D… aux termes desquels il apparaît qu’au-delà d’ouvrir, fermer les volets, nourrir les animaux, M. J… s’occupait des problèmes de chaudière, d’alarme, de relevé de courriers et assurait en conséquence les rendez-vous avec les entreprises qui devaient intervenir, ce qui conforte l’attestation de M. T…. En réponse, l’employeur produit le chronométrage effectué par un huissier de justice des tâches confiées à M. J…, durant ses absences, à savoir ouverture et fermeture des volets, sortie des poubelles et nourrissage des animaux représentant environ 1h30 par semaine. Il produit également des attestations d’une employée et de proches, enfants et amis, aux termes desquelles ceux-ci indiquent avoir très souvent vu M. et Mme J… sortir et rentrer dans la propriété avec leur véhicule. Ils précisent également que l’entretien de la piscine était réservé à la famille et n’était jamais confié à M. J…. Enfin, il fournit des comptes-rendus médicaux et des relevés de carte bleu pour contester ses absences sur certaines des périodes indiquées par les salariés et, un de ses enfants, Q…, explique qu’il était présent sur la propriété de mai 2011 à mi juillet 2012 et que les gardiens n’avaient donc rien à faire de particulier sur cette période. Cette dernière attestation est manifestement à relativiser au regard des échanges de mails entre M. D… et M. J… sur la période de novembre 2011 à janvier 2012 qui permettent de relever que ce dernier devait assurer un certain nombre de tâches que le fils de M. D… n’assurait pas. Surtout, il est produit un calendrier de mars 2012 sur lequel, et cela n’est pas contesté, M. D… a répondu par écrit à une demande de M. et Mme J… : « récupération des dimanches par des congés (16), comme prévu, l’alternance des week end complets ne nous intéresse pas ». Aussi, et sans remettre en cause les attestations relatives aux allers et venues fréquents des époux J…, lesquels pouvaient ne concerner que l’un ou l’autre des époux ou encore avoir été autorisés préalablement comme l’explique M. T…, cette réponse de M. D… permet de s’assurer que leur mission de présence et de surveillance, même en période de présence de M. et Mme D…, était réelle et contraignante, contrairement à ce qu’évoquent leurs proches. Ainsi, au regard des pièces versées par chacune des parties, s’il est incontestable que le temps de travail effectif de M. et Mme J… était relativement limité, il résulte néanmoins tant du contrat de travail que des pièces produites par les époux J… que leur fonction principale consistait à assurer, par leur présence continue, la surveillance de la propriété et ce, six jours sur sept. Or, selon l’article 15 de la convention nationale des salariés du particulier employeur, dans le cas où le salarié reste à la disposition de l’employeur sans travail effectif, les heures au-delà de 40 heures et dans la limite de 4 heures par semaine, seront rémunérées au taux plein du niveau de la classification. Il résulte de cet article que le salarié engagé à des fonctions pour lesquelles il reste à la disposition de l’employeur, sans travail effectif, ce qui correspond aux modalités de travail de M. et Mme J…, doit être payé comme s’il s’agissait d’un temps de travail effectif mais ne peut recevoir rémunération des heures effectuées au-delà de 40 heures que dans la limite de 4 heures par semaine et sans majoration pour heure supplémentaire. En l’espèce, et alors que M. et Mme J… étaient liés par ce même contrat de travail, qu’un seul des deux pouvait assurer cette présence et qu’il est justifié par l’employeur qu’ils pouvaient quitter le château de manière fréquente dès lors qu’un des deux étaient présents, il y a lieu de dire qu’ils réalisaient chacun 87 heures par mois, le temps de travail effectif tel que calculé par M. D… étant compris dans cet horaire. Par ailleurs, aux termes de l’article 21 de la convention collective applicable, sauf accord particulier mentionné dans le contrat de travail, l’évaluation du logement est déterminée selon les termes de l’article 20 a, paragraphe 5. Si l’évaluation du logement fixée lors de la négociation paritaire de la branche, soit 71 euros, est une évaluation minimum, il résulte néanmoins de l’article 21 de la convention collective que pour retenir une évaluation supérieure, il est nécessaire qu’il y ait un accord particulier mentionné dans le contrat de travail, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Il convient donc de condamner M. D… à payer à chacun des époux J… la somme de 45 175,62 euros à titre de rappel de salaires, outre 4 517,56 euros au titre des congés payés afférents, sous déduction pour chacun des époux de la somme mensuelle de 71 euros représentant l’avantage en nature relatif au logement du salaire net perçu » ;

1. ALORS QUE constitue du temps de travail effectif, donnant lieu à paiement du salaire, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu’en revanche, constitue une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise ; que concernant des salariés engagés pour assurer des fonctions de surveillance et de gardiennage, logés dans un domicile mis à disposition par l’employeur, la seule circonstance qu’ils soient tenus, pendant certaines périodes, de rester à leur domicile, n’est pas suffisante pour déduire que ces périodes constituent du temps de travail effectif ; qu’ainsi, lorsqu’il est saisi d’une contestation portant sur les périodes durant lesquelles de tels salariés sont tenus de rester à leur domicile, le juge doit distinguer dans sa décision lesquelles des heures litigieuses constituent du temps de travail effectif, et lesquelles constituent des astreintes ; qu’en l’espèce, pour condamner M. D… à des rappels de salaires calculés sur une base de 87 heures mensuelles pour chacun des époux J…, la cour d’appel retient une appréciation globale du nombre d’heures durant lesquelles ils étaient tenus de rester à leur domicile, sans caractériser celles de ces heures durant lesquelles ils étaient à la disposition de l’employeur sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ce qui constituait du temps de travail effectif, et celles durant lesquelles ils n’étaient tout au plus que d’astreinte ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-5 et L. 3171-4 du code du travail, ensemble la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999 ;

2. ALORS QUE constitue du temps de travail effectif, donnant lieu à paiement du salaire, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu’en revanche, constitue une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise ; que concernant un salarié engagé pour assurer des fonctions de surveillance et de gardiennage, logé dans un domicile mis à disposition par l’employeur, les périodes durant lesquelles ce salarié est tenu de rester à son domicile ne constitue du temps de travail effectif que s’il est établi que le salarié n’est pas en mesure, durant ces heures, de vaquer à ses occupations personnelles ; qu’en l’espèce, pour retenir que le temps passé à leur domicile par chacun des époux J… constituait du temps de travail effectif à raison de 87 heures par mois, la cour d’appel n’a pas recherché, comme cela le lui était demandé, si ces derniers supportaient effectivement des sujétions particulières caractérisant l’impossibilité pour eux de vaquer librement à des occupations personnelles durant les heures litigieuses, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du code du travail, ensemble la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999 ;

3. ALORS QUE M. D… faisait valoir en toute hypothèse dans ses conclusions d’appel que la maison d’habitation mise à la disposition des époux J… avait une valeur locative de 1.000 € par mois, dont le montant devait être déduit des rappels de salaire accordés aux époux (conclusions p. 15) ; qu’à l’appui de ce moyen, il a produit l’attestation délivrée par une agence immobilière évaluant la valeur locative du bien à ce montant de 1.000 € par mois (pièce d’appel n° 1) ; qu’en retenant au contraire une évaluation minimale de cette valeur locative à seulement 71 €, sans s’expliquer sur cette pièce déterminante régulièrement versée aux débats, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

 


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