Parasitisme publicitaire : affaire l’Oréal 
Parasitisme publicitaire : affaire l’Oréal 
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Certains plans publicitaires relèvent du fond commun de la publicité et en tant que tels, ne peuvent faire l’objet d’une appropriation. 

Société Phocéenne c/ L’Oréal

La société Phocéenne a poursuivi en vain la société l’Oréal qui aurait repris dans son film de publicité de la Provençale Bio sept éléments se trouvant dans deux films publicitaires du Petit Olivier, l’un sur un soin du corps à l’huile d’olive, l’autre sur un soin du visage à l’huile d’argan, diffusés à la télévision, dont la diffusion télévisuelle a cessé à compter de 2014 mais qui sont toujours présents sur les réseaux sociaux.

Contexte de l’affaire 

La société La Phocéenne de Cosmétique (Phocéenne), créée en 1996, est une PME qui produit et distribue des produits cosmétiques naturels, sous la marque ‘Le Petit Olivier’, depuis 2003.

La société L’Oréal a lancé en octobre 2018 une nouvelle marque de produits cosmétiques bio dénommée ‘La Provençale Bio’.

Estimant que la communication télévisuelle de ‘La Provençale Bio’ reprenait de nombreux éléments de deux campagnes de publicités des produits ‘Le Petit Olivier’ diffusées entre 2011 et 2014, la société Phocéenne a, par lettre RAR en date du 11 décembre 2018, mis en demeure la société L’Oréal, en vain, de cesser la diffusion de la publicité litigieuse.

C’est dans ce contexte que par acte du 6 mai 2019 la société Phocéenne a fait assigner la société L’Oréal devant le tribunal de commerce de Paris sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme.

Reprises non fautives 

Les reprises incriminées au titre du risque de confusion fautif à savoir un olivier au milieu d’une oliveraie dans le premier plan, une jeune femme châtain clair vêtue de blanc avec les cheveux mi-longs ondulés en plan serré au milieu des oliviers, puis un plan sur la main de la femme attrapant une branche d’olivier, puis un plan serré sur le visage de la jeune femme assise se touchant le visage, sont pour l’essentiel des éléments banals d’une communication publicitaire centrée sur la composition à base d’huile d’olive de produits cosmétiques, montrant en conséquence des oliviers, la cueillette des olives, les bienfaits en terme de douceur sur le visage et une image de la douceur de vivre dans le soleil du sud représentée notamment par une balancelle ou un hamac, ainsi que cela résulte notamment du spot Palmolive diffusé en 1984.

Le fait de terminer le film publicitaire par un visuel des produits est également banal, tout comme le choix d’un fond clair, permettant de les mettre en valeur, la présence de l’ombre de feuilles d’oliviers étant à peine perceptible et en tout état de cause traitée différemment dans leur forme et leur nombre dans les films en cause; que ces images ne sont en outre pas les seules du film publicitaire incriminé qui comprend notamment plusieurs plans sur le pressage des olives, l’huile qui en est obtenue, sa richesse en polyphénols antioxydants mise en exergue dans un plan goutte à goutte lui conférant le caractère d’un liquide précieux, ces éléments marquants étant totalement étrangers aux films de la Phocéenne.

La société Phocéenne reproche aussi à la société L’Oréal d’avoir diffusé deux films centrés sur l’oléiculteur et le moulinier reprenant le concept de mettre en avant le moulinier, qui est celui qui extrait l’huile des olives dans son moulin à huile. Ce grief n’est cependant pas fondé, la société L’Oréal étant libre de présenter les étapes de fabrication d’un des composants de ces produits, à savoir l’huile d’olive, comme le font de nombreux acteurs du secteur cosmétique tels que l’Occitane, Body Shop ou Welleda, et les éléments prétendument communs à savoir un champ d’oliviers, le visuel du professionnel sur un fond d’oliviers, l’inscription de son nom et de sa profession, ainsi que les images de cueillette d’olives et de paniers remplis d’olives, étant banals pour communiquer sur les récoltes d’olives en Provence à partir desquelles sont produites l’huile d’olive utilisée dans les produits cosmétiques La Provençale Bio, de sorte qu’aucun risque de confusion fautif n’est davantage constitué.

Risque de confusion non avéré 

Le risque de confusion est d’autant moins avéré, que les films publicitaires de la société Phocéenne remontent à plus de quatre ans avant celle du spot incriminé, la société Phocéenne ne démontrant aucune notoriété particulière de ces spots et ne contestant pas avoir choisi depuis 2016 d’autres axes de communication, les films qu’elle invoque au soutien de la présente instance étant certes toujours présents sur les réseaux sociaux, mais avec un nombre de vues tout à fait réduit pour un produit de grande consommation à savoir moins de 3 000 pour les publicités, et moins de 300 pour la vidéo présentant le moulinier.

Enfin, les articles d’un journaliste ou les commentaires des internautes, opérant des rapprochements entre les films en cause, pour en souligner les ressemblances, ne peuvent fonder la démonstration d’un risque de confusion fautif susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale.

La preuve d’une faute de la société L’Oréal constitutive d’un risque de confusion déloyal n’est pas rapportée.

Liberté du commerce

Le principe est celui de la liberté du commerce, et ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale que des comportements fautifs en violation des usages loyaux du commerce.

Le seul fait de commercialiser des produits identiques ou similaires à ceux, qui ne font pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, distribués par un concurrent relève de la liberté du commerce et n’est pas fautif, dès lors que cela n’est pas accompagné de manoeuvres déloyales constitutives d’une faute telle que la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.

L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou mois servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée.

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