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Condamnation pour diffamation
Le maire adjoint de Nice, avait obtenu du tribunal correctionnel, la condamnation pour diffamation du président de la société Les éditions du Seuil, et un auteur journaliste en raison du passage suivant d’un ouvrage publié par le premier et signé du second (« Les revenants ») : « Tout au long de son mandat, X a pu aisément infuser en profondeur, en toute impunité, et recruter à Nice, plus d’une centaine de Jihadistes. Au point d’en faire aujourd’hui la ville la plus touchée en France par le phénomène. ».
Primauté de la liberté d’expression
Cette condamnation vient d’être censurée par la Cour de cassation. La liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans le cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires.
Si le propos incriminé imputait bien à un responsable politique d’avoir été volontairement inactif, voire complaisant, à l’égard d’un activiste islamiste qu’il aurait laissé, en toute connaissance de cause, développer son oeuvre de propagande et de recrutement à l’égard de jeunes gens influençables, les propos en cause étaient une transcription des tenus par un tiers.
De plus, le journaliste avait effectué, sur un sujet d’intérêt général, une enquête pouvant être qualifiée de sérieuse. Même en l’absence de prudence et de mesure dans l’expression critiquée, ces propos n’excédaient pas les limites admissibles de la liberté d’expression.
Obligations du journaliste
A noter que le journaliste qui reçoit ces propos et les publie n’est pas dispensé d’effectuer des vérifications sérieuses pour s’assurer que ces propos reflètent la réalité des faits ni de prendre de la distance avec ce qui, en eux, pourrait lui apparaître comme discutable et d’attirer à cet égard l’attention du lecteur.
Légitime information du public
Par ailleurs, il ne pouvait être exigé du journaliste qu’il prenne ses distances à l’égard des propos qu’il rapportait, dès lors que la diffusion de ces propos, rendue possible par une enquête sérieuse qui garantissait qu’elle participait d’un débat d’intérêt général portant, en l’espèce, sur la passivité alléguée de certains responsables publics face à des processus d’endoctrinement engendrant la radicalisation, contribuait à la légitime information du public.
La cour d’appel ne pouvait, dans ces conditions, reprocher au journaliste un prétendu manque de prudence ni l’éventuelle insuffisance de la base factuelle des seuls propos tenus par le tiers.