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7 octobre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-11.258
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 7 octobre 2020
Cassation
Mme BATUT, président
Arrêt n° 535 F-D
Pourvoi n° E 19-11.258
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 7 OCTOBRE 2020
1°/ La société Betec Licht AG, société de droit allemand, dont le siège est […],
2°/ M. U… D… O…, domicilié […],
ont formé le pourvoi n° E 19-11.258 contre l’arrêt rendu le 20 septembre 2018 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (2e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Comptoir électrique français, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] ,
2°/ à la société Immobilière et d’exploitation de l’hôtel Majestic, société anonyme, dont le siège est […] ,
3°/ à la société Comptoir général d’éclairage, exerçant sous le nom commercial Lucera, société anonyme, dont le siège est […] ,
4°/ à la société Grupo Lineas TC, société anonyme de droit espagnol, dont le siège est […],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Girardet, conseiller, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Betec Licht AG et de M. O…, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Comptoir électrique français et de la société Immobilière et d’exploitation de l’hôtel Majestic, après débats en l’audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Girardet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. O… et à la société Betec Licht du désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Grupo Lineas TC.
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 septembre 2018), M. O… a créé, au début des années 1980, une applique destinée à éclairer des tableaux dont il a confié l’exploitation commerciale à la société Betec Licht.
3. Ayant constaté que l’Hôtel Majestic de Cannes utilisait des appliques similaires acquises auprès de la société Comptoir électrique français (la société CEF), la société Betec Licht a fait procéder à des opérations de saisie-contrefaçon puis a assigné en contrefaçon de droits d’auteur, concurrence déloyale et parasitisme la société Hôtel Majestic immobilière d’exploitation et la société CEF. Cette dernière a appelé en intervention forcée son fournisseur, la société Comptoir général d’éclairage, qui a elle-même appelé en intervention forcée son fournisseur, la société Grupo Lineas TC. M. O… est intervenu volontairement à l’instance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La société Betec Licht et M. O… font grief à l’arrêt de déclarer infondée l’action en contrefaçon de droits d’auteur, alors « que la combinaison d’éléments connus, banals ou fonctionnels peut, en elle-même, résulter d’un effort créatif et porter l’empreinte de la personnalité de son auteur ; qu’en retenant que « M. O… et la société Betec n’établissent pas que les caractéristiques invoquées sont nettement dissociables de tout caractère fonctionnel de la création revendiquée et expriment la personnalité de leur auteur par des choix qui lui sont propres » aux motifs que « la longueur du tube liminaire » de la lampe Arcus, rebaptisée Clarus, ainsi que ses « arches en demi-courbe sans position déterminée » présentent un caractère fonctionnel et que « cette combinaison retenue entre plusieurs fonctionnalités ne traduit pas un parti pris esthétique manifestant la personnalité de son auteur, qui s’inscrit dans une tendance ancienne » sans rechercher si l’originalité de la lampe ne résultait pas non seulement de la combinaison des éléments précités mais également, comme le soutenait la société Betec Licht AG et M. O… de leur combinaison avec une source lumineuse « invisible », des « embouts de la lampe épous[a]nt harmonieusement le tube lumineux de section ronde et se prolonge[ant] par deux arches fines (de section ronde également) venant s’effacer derrière le tableau selon une demi-courbe d’angle en demi-cercle, sans se rejoindre sur un support fixe » ainsi qu’« un aspect brillant et lisse », la cour d’appel, qui n’a pas pris en compte toutes les caractéristiques dont la combinaison était invoquée pour justifier de l’originalité de la lampe, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1 et L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 111-1 et L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle :
5. Pour rejeter les demandes en réparation d’actes de contrefaçon de droits d’auteur, l’arrêt retient que la longueur du tube de la lampe ainsi que ses arches en demi-courbe sans position déterminée présentent un caractère fonctionnel et que cette combinaison choisie entre plusieurs fonctionnalités, qui s’inscrit dans une tendance ancienne, ne traduit pas un parti pris esthétique manifestant la personnalité de son auteur.
6. En se déterminant ainsi sans prendre en considération, comme il le lui incombait, l’ensemble des caractéristiques dont la combinaison était revendiquée comme fondant l’originalité de l’oeuvre, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. La société Betec Licht et M. O… font grief à l’arrêt de déclarer irrecevable l’action en concurrence déloyale et parasitisme, alors « que l’action en concurrence déloyale et parasitaire, qui est ouverte à celui qui ne peut se prévaloir d’aucun droit privatif, peut se fonder sur des faits matériellement identiques à ceux invoqués au soutien d’une action en contrefaçon rejetée, dès lors qu’il est justifié d’un comportement fautif ; qu’en retenant qu’ « à défaut de caractériser des éléments de fait distincts de ceux invoqués au titre de la contrefaçon, M. O… et la société Betec Licht AG sont irrecevables en leur action [en concurrence déloyale et en parasitisme] » quand les demandes en contrefaçon de M. O… et de la société Betec Licht AG avaient été écartées pour défaut de droits privatifs, la cour d’appel a violé l’article 1382 devenu 1240 du code civil. »