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6 octobre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-21.350
CIV. 1
NL4
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 6 octobre 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10702 F
Pourvoi n° Z 19-21.350
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 6 OCTOBRE 2021
La société Davimar, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 19-21.350 contre l’arrêt rendu le 20 juin 2019 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (chambre 3-1), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société P’tit Môme, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Distribution casino France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Bouthors, avocat de la société Davimar, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société P’tit Môme, de la SCP Richard, avocat de la société Distribution casino France, après débats en l’audience publique du 29 juin 2021 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, M. Girardet, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Davimar aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour la société Davimar.
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la société Davimar de l’intégralité de ses demandes en réparation dirigées contre la société Ptit Môme et Distribution Casino France au titre d’actes de contrefaçon, de concurrence déloyale et de parasitisme ;
aux motifs, [ ] sur l’originalité des oeuvres de l’esprit, la société Davimar invoque la protection des oeuvres de l’esprit pour trois dessins, à savoir le dessin originel d’ailes d’ange qu’elle date de 2005 (ci-après Ailes Bérénice), puis le modèle figurant sur le T-shirt Sebi puis enfin le dessin figurant sur le modèle Aneline 4 ; le jugement retient expressément dans son dispositif l’originalité des trois dessins. Il appartient à l’auteur se prévalant de droits sur une oeuvre de caractériser l’originalité de celle-ci ; force est de constater que la description utilisée par la société Davimar et reprise par le tribunal (quatrième paragraphe de la page 9 du jugement) s’applique manifestement au dessin Ailes Bérénice, notamment en ce qui concerne le haut de forme ovale, les trois rangées de petites plumes arrondies, puis les trois rangées successives de petites plumes et de grandes plumes biffant vers l’extérieur ; sur ce point, la cour estime pertinente l’appréciation des premiers juges considérant que l’assemblage des éléments ainsi décrits donne à l’ensemble une physionomie singulière traduisant des choix esthétiques, choix manifestant l’empreinte personnelle du créateur totalement distincte du fond commun constitué par les traditionnelles représentations d’ailes d’ange en architecture, en art pictural et d’après les photographies produites dans le domaine des tatouages ; c’est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré que le dessin Ailes de Bérénice constituait une oeuvre originale, et donc protégeable. / Le dessin Sebi 1 reprend la forme générale du dessin Ailes Bérénice ; il se caractérise essentiellement par la représentation réaliste de plumes d’oiseaux, de taches blanches tranchant avec le naturalisme de la représentation, et par le choix des couleurs, à dominantes bleues, roses et oranges ; là encore, l’ensemble traduit un choix esthétique manifeste, sans rapport avec les représentations traditionnelles en art pictural des ailes d’anges, qui rend le dessin original ; enfin, le dessin Aneline 4 se présente lui comme des projections de blanc, noir et orange représentant de manière abstraite la forme stylisée de deux ailes non déployées ; ce dessin ne peut au demeurant être décrit comme une déclinaison du dessin Aile Bérénice, mais bien plutôt comme une stylisation évocatrice originale ; ce dessin sera lui aussi considéré comme original ;
Que la contrefaçon d’un dessin est caractérisée par la reproduction, voire l’imitation, sans autorisation de leur auteur, des éléments permettant de considérer l’oeuvre comme originale. /En l’espèce, le dessin argué contrefaisant est le dessin figurant sur les T-shirts achetés dans les magasins [Localité 3], [Localité 1] et [Localité 2] ; ce dessin représente deux ailes séparées recouvertes d’une première couche supérieure de plumes violacées et d’une seconde couche de plumes de couleur rouge s’élargissant vers l’extérieur ; le bord supérieur des ailes figurant leur zone d’attache, est de la même couleur violette que la première rangée de plumes ; ce dessin ne reproduit ni n’imite aucun élément du dessin figurant sur le modèle Aneline 4, ni dans la forme, ni dans les couleurs, ni dans l’impression d’ensemble ; il reprend globalement la forme des paires d’ailes des dessins Ailes Bérénice et Sebi 1, mais cette forme appartient au fond commun pictural et architectural évoqué plus haut ; la comparaison avec le dessin Ailes Bérénice permet d’affirmer qu’aucun des éléments conférant à ce modèle son originalité n’est reproduit, ou même imité, notamment la forme blanche aux attaches et les quatre couches de plumes stylisées ; l’impression d’ensemble est totalement différente, le dessin Ailes Bérénice étant fait de formes stylisées et le dessin P’tit Môme jouant, lui, sur les couleurs et le naturalisme des plumes ; de même, la comparaison entre le dessin Sebi 1 et le dessin litigieux fait apparaître lui aussi un recours au fond commun représentatif d’ailes d’ange, mais ne révèle aucune reprise d’éléments faisant du dessin créé par la société Davimar une oeuvre originale, à savoir l’existence de taches blanches arbitraires, le dessin réaliste des plumes et le choix des couleurs ; c’est donc à tort que les premiers juges ont considéré que le dessin utilisé par la société P’tit Môme constituait une contrefaçon des trois modèles revendiqués par la société Davimar ; il y a lieu dès lors d’infirmer le jugement ayant déclaré les sociétés P’tit Môme et Distribution Casino France coupables du délit civil de contrefaçon de droits d’auteur ;
Que sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme, une action en concurrence déloyale peut-être engagée concurremment à une action en contrefaçon d’un droit privatif dès lors que le demandeur invoque l’existence de faits distincts des faits allégués au soutien de la demande en contrefaçon ; qu’elle peut l’être à titre subsidiaire, s’il est établi qu’un risque de confusion a été engendré par les agissements adverses. / En l’espèce, la société Davimar invoque une faute distincte des faits allégués, à savoir la volonté des intimées de profiter de sa notoriété en instaurant une confusion dans l’esprit du consommateur ; force est de constater que comme il vient d’être indiqué plus haut, le dessin utilisé par les intéressées ne reproduit aucun élément original des dessins Davimar et le consommateur ne peut en aucun cas être induit en erreur sur la provenance des produits ; la société Davimar excipe par ailleurs de l’utilisation par la société P’tit Môme d’une étiquette “Modèle déposé P’tit Môme”; elle ne justifie cependant pas en quoi cette étiquette lui causerait un préjudice personnel ; c’est dès lors de manière pertinente que les premiers juges ont rejeté la demande en concurrence déloyale ; pour les mêmes motifs factuels, ils ont à bon droit rejeté la demande formée au titre du parasitisme (arrêt p. 8 à 11) ;
et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges, sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme, dès lors qu’en plus des actes de contrefaçon, le demandeur est également victime d’actes de distincts de concurrence déloyale il peut en plus présenter des demandes distinctes au titre de la concurrence déloyale. / Il est cependant impératif que les actes en question nécessairement fautifs soient effectivement distincts des actes de contrefaçon et non la simple conséquence de ceux- ci. Le fait que le produit contrefaisant soit vendu à un prix inférieur de celui du produit original n’est que la conséquence des actes de contrefaçon. / En l’espèce, la société demanderesse ne justifie par aucune pièce probante d’actes distincts de concurrence déloyale puisqu’elle évoque à ce titre la copie de son dessin emblématique. / Quant au parasitisme qui est imputé aux sociétés défenderesses, il s’agirait, selon la société Davimar du fait que ces deux sociétés auraient tiré indûment profit de ses investissements et de sa réputation. / Il ne peut être contesté que la société P’tit Môme et par contrecoup la société Casino ont nécessairement profité de la réputation de la marque Bérénice pour réaliser la vente de produits qui, copiant un produit très en vogue, ont certainement contribué à motiver certains achats de ses clients. / Il ne saurait cependant être considéré que les deux sociétés ont sciemment cherché à se placer dans son sillage et à parasiter tous ses efforts, tant créatifs qu’en investissements matériels et humains. / En réalité, la société Davimar ne démontre pas de faits distincts de la contrefaçon, constitutifs d’un acte caractérisé de parasitisme. / En conséquence, elle sera déboutée de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme (jugement p. 12) ;
1°) alors, d’une part, qu’un dessin original protégé par le droit d’auteur au sens de l’article L.112 du code de la propriété intellectuelle autorise son propriétaire à faire sanctionner la contrefaçon portant atteinte à son droit ; que la contrefaçon s’apprécie par les ressemblances et non par les différences dans le cadre d’une comparaison motivée entre le dessin ou modèle original protégé et la pièce arguée de contrefaçon ; qu’en se bornant à affirmer que le modèle litigieux différait des dessins ou modèles protégés, sans autrement s’expliquer sur les éléments de ressemblance susceptibles de caractériser une contrefaçon punissable, ni spécifier si et en quoi le modèle litigieux produisait avec le dessin ou modèle protégé « une impression visuelle d’ensemble différente », la cour a privé son arrêt de base légale au regard du texte susvisé ;
2°) alors, d’autre part, que la concurrence déloyale, au sens de l’article 1240 du code civil, se distingue de la contrefaçon ; qu’en déduisant l’absence de concurrence déloyale du seul fait que la contrefaçon dénoncée n’était pas caractérisée, la cour, qui n’a pas recherché si les sociétés défenderesses n’avaient pas commis des fautes distinctes d’une contrefaçon, tendant notamment à tromper la clientèle sur un modèle mensongèrement présenté comme « déposé », la cour a privé son arrêt de toute base légale au regard du texte précité ;
3°) alors que, de troisième part, le parasitisme au sens de l’article 1240 du code civil, se distingue également de la contrefaçon ; qu’après avoir relevé par motifs adoptés des premiers juges que les sociétés P’tit Môme et la société Casino avaient nécessairement profité de la réputation de la marque Bérénice pour réaliser la vente du produit litigieux, la cour a refusé de tirer les conséquences nécessaires de ses propres constatations en écartant la qualification de parasitisme, motif erroné pris de l’absence de contrefaçon, violant ainsi le texte susvisé.