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17 novembre 2022
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/09611
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-1
ARRÊT AU FOND
DU 17 NOVEMBRE 2022
N° 2022/ 330
N° RG 19/09611 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BENZ2
[G] [X]
C/
SAS SOCIETE PROVENCALE IMMOBILIER (SOPRI)
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Laurence SMER-GEOFFROY
Me Sébastien BADIE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 23 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/07184.
APPELANT
Monsieur [G] [X]
né le 19 Août 1968 à [Localité 1], de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Laurence SMER-GEOFFROY, avocat au barreau de MARSEILLE, assistée de Me Jean-Marie LEGER, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
SAS SOCIETE PROVENCALE IMMOBILIER (SOPRI), dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Maïlys LEROUX, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 03 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Pierre CALLOCH, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Pierre CALLOCH, Président
Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère
Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022,
Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Le 31 janvier 2014, monsieur [G] [X] a réalisé à la demande de la société de promotion immobilière SOCIÉTÉ PROVENCALE IMMOBILIÈRE SOPRI, ci après société SOPRI, un reportage photographique aux chalets de CHABERTON à [Localité 5] appartenant, les photographies étant destinées à un usage promotionnel sur son site internet et dans des brochures spécialisées.
La société SOPRI a réglé la facture concernant ce travail.
Estimant que la société SOPRI avait utilisé sur deux sites internet lui appartenant et dans une annonce publicitaire publiée dans le magazine MAISONS COTE SUD des clichés concernant le même ensemble immobilier mais par lui réalisés en juin et novembre 2014 pour la société BAYROU, monsieur [X] a fait assigner la société SOPRI devant le tribunal de grande instance de MARSEILLE par acte en date du 6 juin 2017 en contrefaçon de droits d’auteur et subsidiairement en parasitisme.
Suivant jugement daté du 23 mai 2019, le tribunal a débouté monsieur [X] de ses demandes formées au titre de la contrefaçon et a condamné la société SOPRI à lui verser la somme de 960 € en réparation du préjudice subi du fait des actes de parasitisme, outre 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, et à cesser l’utilisation de deux photographies PM 1916 et PM 1950 sous astreinte de 500 € par infraction constatée.
Monsieur [X] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 17 juin 2019.
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction par ordonnance du 1er septembre 2022 renvoyant l’examen de l’affaire à l’audience du 3 octobre 2022.
A l’appui de son appel, suivant conclusions déposées par voie électronique le 23 août 2022, monsieur [X] soutient n’avoir eu connaissance des photographies contrefaisantes qu’en 2017 à l’occasion de la consultation du site chaletmoissiere.com. Il conclut en conséquence à la confirmation de la décision ayant rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription. Il soutient que les dix huit clichés litigieux traduisent un effort créatif par delà leur qualité technique et qu’ils sont dotés de l’originalité telle définie par la jurisprudence. Il conteste l’analyse des premiers juges ayant écarté la reproduction illicite pour certains clichés et maintient que ceux ci ont été réalisés à la demande de madame [E] pour le compte de la société BAYROU en juin et novembre 2014 et non en complément du travail effectué en janvier pour la société SOPRI. Il indique avoir chiffré ses préjudices conformément aux usages en la matière et affirme avoir nécessairement subi un préjudice moral.
Au terme de ses conclusions, monsieur [X] demande à la cour de condamner la société SOPRI à verser la somme de 21 118 € 13 en réparation de son préjudice patrimonial et 4 800 € en réparation de son préjudice moral et d’ordonner la cessation de l’utilisation de 16 clichés sous astreinte de 1 500 € par infraction constatée. Il sollicite en outre une somme de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société SOPRI, suivant conclusions déposées par voie électronique le 5 août 2022, conclut à l’infirmation de la décision en ce qu’elle a écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription, monsieur [X] ayant eu connaissance de l’utilisation des clichés litigieux dès le 14 février 2011, date à laquelle il avait déjà envoyé sur ce sujet un courriel de réclamation.
Sur le fond, la société SOPRI soutient que les 17 clichés datant de juin et novembre 2014 l’ont été dans le prolongement du contrat conclu en janvier, et qu’en toute hypothèse elle a permis l’accès aux lieux en ignorant que les clichés pouvaient être proposés à une autre partie, la société BAYROU.
Subsidiairement, la société SOPRI excipe du caractère peu probant des documents versés pour prouver l’utilisation des clichés et reprend sur ce point les arguments des premiers juges. Plus Subsidiairement, elle conteste l’originalité des clichés et plus subsidiairement encore le quantum des préjudices invoqués.
La société SOPRI conclut en conséquence à l’infirmation de la décision et demande à la cour de déclarer prescrites les demandes formées au titre des clichés PM 1916 et 1950, de débouter pour le surplus au fond monsieur [X] et de le condamner au paiement des sommes de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en première instance, puis d’appel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription
Par courrier daté du 14 février 2011, monsieur [X] a informé la société SOPRI de son désaccord concernant l’utilisation de deux clichés utilisés dans le guide des hébergements de l’office de tourisme de [Localité 6] ; monsieur [X] lui-même indique dans ses conclusions qu’il s’agit des clichés identifiables sous les références PM1916 et PM 1950 ; il est manifeste que toute action délictuelle concernant cette utilisation, que ce soit sur le fondement de la contrefaçon ou du parasitisme, était prescrite dans les cinq années ayant suivi la connaissance des faits, et donc le 14 février 2016.
Monsieur [X] affirme avoir découvert en 2017 que ces deux clichés étaient à nouveau utilisés par la société SOPRI sur son site internet chaletchamoissiere.com et il verse une capture d’écran et un constat d’huissier sur ce point ; à juste titre, les premiers juges ont constaté que les faits allégués constituaient de nouveaux actes délictuels et qu’en conséquence le courrier daté du 14 février 2011 ne pouvait constituer le point de départ du délai de prescription ; aucune obligation ne pesant sur monsieur [X] de consulter les sites internet de la société SOPRI, et celle ci ne fournissant aucun élément sur la date de mise en ligne des clichés litigieux sur son site, il sera retenu que monsieur [X] n’a pu découvrir qu’en 2017 l’existence des clichés ; la décision ayant écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription sera en conséquence écartée.
Sur le fond
En matière de contrefaçon de droits d’auteur, avant même de statuer sur l’originalité des oeuvres, il convient de statuer sur la réalité et la liceité même de leur utilisation par celui allégué être contrefacteur.
En l’espèce, monsieur [X] a signé avec la société SOPRI le 29 janvier 2014 un contrat concédant à la société SOPRI les droits d’exploitation pour un site internet et la presse papier des images captées lors d’un reportage effectué le 31 janvier 2014 dans les chalets CHABERTON ; il a ensuite effectué deux reportages sur les mêmes lieux pour la société BAYROU le 3 juin 2014 et le 5 novembre 2014.
Au vu des pièces du dossier, il est impossible de déterminer si les photographies arguées de contrefaçon ou arguées comme constitutives d’acte de parasitisme sont des photographies prises en janvier 2014, et donc pouvant être exploitées par la société SOPRI, ou des photographies prises le 3 juin et 5 novembre 2014, les dites photographies n’ayant pas date certaine ; il est en revanche incontestable d’une part que les photographies de juin et novembre n’ont pu être réalisées qu’avec l’accord de la société SOPRI, propriétaire des lieux photographiés, et d’autre part que la liste des photographies envoyées à la société BAYROU n’est pas produite.
Il résulte de ce constat que si monsieur [X] est bien l’auteur des clichés litigieux, il ne démontre nullement que leur utilisation sur ses sites par la société SOPRI a excédé les droits que celle ci tirait du contrat signé le 29 janvier 2014 ; il convient en conséquence de débouter monsieur [X] de ses demandes fondées sur la contrefaçon de droits d’auteur, sans même statuer sur l’originalité des photographies, et sur le parasitisme concernant les clichés pris en 2014.
La comparaison entre les clichés PM1916 et PM 1950 (pièce 28 et 29 [X]) et le procès verbal d’huissier daté du 8 février 2017 (pièce 32) établit que la société SOPRI a utilisé ces deux photographies sur son site, à la page concernant le programme du parc [Localité 2] ; la société SOPRI ne conteste pas la provenance de ces clichés, et ce alors qu’elle avait été alertée par monsieur [X] en 2011 de son souhait de préserver ses droits sur ces oeuvres ; c’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont considéré que l’utilisation des deux photographies constituait un acte de parasitisme.
Le préjudice patrimonial subi par monsieur [X] peut être évalué au tarif correspondant au tarif de rémunération des clichés multiplié par un coefficient de quatre correspondant à la perte de chance de pouvoir vendre les oeuvres pour de nouvelles utilisations ; la décision ayant chiffré ce préjudice à la somme de 960 € sera confirmée. En revanche, le préjudice moral invoqué par monsieur [X], qui a été en lien d’affaire avec la société SOPRI, n’apparaît pas constitué du fait de l’utilisation plus de dix ans après de deux clichés à finalité publicitaire.
La mesure d’interdiction prononcée par le tribunal était nécessaire pour préserver les droits de monsieur [X] et le jugement sera là encore confirmé.
La situation de monsieur [X], succombant en cause d’appel, justifie de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile à son encontre.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
– CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 23 mai 2019 dans l’intégralité de ses dispositions.
Y ajoutant,
– DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
– MET les dépens d’appel à la charge de monsieur [X].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT