Ordre des licenciements : 5 mai 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-13.160

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Ordre des licenciements : 5 mai 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-13.160
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5 mai 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-13.160

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mai 2017

Rejet

M. X…, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 745 F-D

Pourvoi n° K 16-13.160

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Yvon Y…, domicilié […]                                                                    ,

contre l’arrêt rendu le 15 janvier 2016 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (18e chambre), dans le litige l’opposant à la société d’exploitation des sources de Signes, dont le siège est […]                                       ,

défenderesse à la cassation ;

La société d’exploitation des sources de Signes a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 21 mars 2017, où étaient présents : M. X…, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Z…, conseiller rapporteur, M. Déglise, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z…, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. Y…, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société d’exploitation des sources de Signes, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 janvier 2016), que M. Y… a été engagé par la société d’exploitation des sources de Signes en qualité de responsable de production ; qu’il a été licencié pour motif économique le 23 février 2012 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de dire qu’il avait la qualification de cadre dirigeant et de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaires pour jours de repos non pris et congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1°/ qu’il résulte de l’article L. 3111-2 du code du travail que sont considérés comme cadres dirigeants les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ; que ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l’entreprise ; qu’à cet égard, M. Y… avait fait valoir que la réalité du pouvoir de direction n’était pas assurée en interne par les salariés de la société d’exploitation des sources de Signes (SESS), dont lui-même, mais par le directeur général et les différents directeurs des services supports des sociétés SEMON et SEMO groupe et qu’il avait pour mission de faire fonctionner techniquement le site de production et de gérer le personnel technique, suivant les consignes provenant du siège social ; qu’en omettant d’examiner ce point, comme elle y était pourtant invitée, la cour d’appel a privé sa décision au base légale au regard de l’article susvisé ;

2°/ qu’en énonçant que M. Y… représentait la direction auprès des institutions représentatives du personnel, des administrations, et en général de tous les tiers, définissant les ressources techniques et humaines nécessaires à l’exploitation et élaborant le plan d’investissement du site, la cour d’appel a statué par des motifs impropres à caractériser la participation de M. Y… à la direction de l’entreprise, violant ainsi l’article L. 3111-2 du code du travail ;

3°/ que pour juger de l’application ou non des critères cumulatifs caractérisant le statut de cadre dirigeant, le juge doit vérifier précisément les conditions réelles d’emploi du salarié concerné, peu important le cadre contractuel ou conventionnel ou la mention des bulletins de paie ; qu’en se référant à la fiche de poste de M. Y…, la cour d’appel a méconnu son office, en violation de l’article L. 3111-2 du code du travail ;

4°/ que M. Y… avait soutenu que la fiche de fonctions de directeur d’exploitation dont se prévalait la SESS n’avait jamais été portée à sa connaissance durant la relation contractuelle, qu’elle n’était pas signée et portait une date postérieure à l’attribution du poste, de sorte qu’elle ne pouvait pas entrer dans le champ contractuel ; qu’en omettant d’examiner ce point, comme elle y était pourtant invitée, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

5°/ qu’en retenant que M. Y… n’établissait ne pas s’être vu refuser des jours de RTT quand le seul fait de n’en avoir pas bénéficié suffisait à justifier la demande, la cour d’appel a ajouté aux articles L. 3121-24 et suivants du code du travail, et partant les a violés ;

6°/ que l’employeur, se bornant à soutenir que M. Y… ne pouvait y prétendre, ce dont il résultait qu’il ne pouvait les obtenir, la cour d’appel a modifié les termes du litige et violé l’article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à un moyen que ses constatations rendaient inopérant, a constaté que le salarié, dont la fiche de poste précisait qu’il était chargé d’élaborer, de proposer et de mettre en place la stratégie industrielle, percevait le salaire le plus élevé de l’entreprise, représentait la direction auprès des institutions représentatives du personnel, des administrations et en général de tous les tiers sous la seule autorité du président de la société, définissant les ressources techniques et humaines nécessaires à l’exploitation et élaborant le plan d’investissement du site, a, sans modifier l’objet du litige, fait ressortir qu’il participait à la direction de l’entreprise ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de dire que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ qu’il résulte de l’article L. 1233-3 du code du travail que les difficultés économiques s’apprécient au niveau de l’entreprise dans son ensemble ; que si l’entreprise appartient à un groupe, les difficultés s’apprécient au regard du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient ; qu’aux termes de la lettre de licenciement, que la cour d’appel a annexée à sa décision, la solidité financière du groupe SEMO auquel appartenait la société SESS reposait essentiellement sur l’activité d’embouteillage de la société SEMO, qui devait atteindre un résultat positif en 2011 de 600-800 K€ net ; que s’il a connu une baisse sensible par rapport à l’année 2010, le résultat était encore largement bénéficiaire en 2011 ; qu’en jugeant pourtant que la situation de la société SESS nécessitait la prise de mesures significatives afin d’endiguer ses difficultés économiques et de pallier aux (sic) conséquences de la perte du marché Casino, dont la suppression du poste de directeur d’exploitation occupé par M. Y…, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

2°/ que M. Y… avait fait valoir que le résultat courant avant impôt du secteur d’activité de l’embouteillage au sein du groupe pour 2011 était de 743 767 euros et que le chiffre d’affaires avait progressé de près de 2 millions d’euros entre 2010 et 2011 ; qu’en s’abstenant d’examiner ce point, pourtant déterminant pour l’issue du litige, chiffre d’affaires du groupe, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

3°/ que si le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement s’apprécie à la date de la rupture du contrat de travail et qu’il en résulte que le juge prud’homal doit se placer à la date du licenciement pour motif économique pour apprécier le bien-fondé de celui-ci, il peut être tenu compte d’éléments postérieurs pour cette appréciation ; qu’à cet égard, M. Y… avait mis en avant l’acquisition de nouveaux marchés (le groupe Auchan, Leader Price et la reprise de Casino) contribuant à la bonne santé financière du groupe, lequel perdait et gagnait régulièrement des marchés ; qu’en se bornant à examiner la situation économique de la société SESS et du groupe SEMO entre 2010 et 2011, sans examiner les années 2012 (année du licenciement) et 2013, ce qui aurait permis de déterminer si la baisse d’activité invoquée était passagère ou durable, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

4°/ qu’il résulte de l’article L. 1233-4 du code du travail que le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés ; que ne satisfait pas à son obligation de reclassement l’employeur qui effectue des embauches concomitamment au licenciement, peu de temps avant ou peu de temps après ; qu’à cet égard, M. Y… avait fait valoir que, durant le préavis de M. Y…, la société SEMO avait recruté un responsable de groupe le 27 avril 2012 et que la société Aqua Pyrénées avait recruté un assistant administratif des ventes ; qu’en jugeant que l’employeur avait parfaitement respecté son obligation de reclassement, en ce que les embauches réalisées par les sociétés du groupes étaient antérieures ou postérieures à l’engagement de la procédure de licenciement, la cour d’appel a tiré des conséquences erronées de ses propres constatations et, partant, a violé les articles L. 1222-1 et L. 1233-4 du code du travail ;

5°/ qu’il résulte de l’article L. 1233-4 du code du travail que les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites, précises et personnalisées ; que si l’employeur est en droit de proposer un même poste à plusieurs salariés, dès lors qu’il est adapté à la situation de chacun, il ne peut se limiter à proposer en termes identiques les postes disponibles en son sein à des salariés exerçant des fonctions différentes et jouissant d’ancienneté différentes ; qu’à cet égard, M. Y… avait souligné qu’il avait reçu, le 17 janvier 2012, une lettre identique à celle adressée le même jour à M. A…, second salarié visé par la procédure de licenciement, dont le profil était différent du sien ; qu’en se dispensant d’examiner ce point, comme elle y était pourtant invitée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail ;

6°/ que, pour remplir son obligation de recherche de reclassement, l’employeur est tenu de fournir aux sociétés qu’il interroge des renseignements suffisants sur le poste occupé par le salarié, son statut et sa rémunération ainsi que ses compétences ; que M. Y… soutenait que la lettre circulaire ne contenait aucun renseignement sur les salariés concernés ; qu’en affirmant que la lettre adressée par l’employeur aux autres sociétés du groupe était accompagnée d’une fiche de poste détaillée, permettant à ces sociétés de faire une réponse précise et argumentée, quand cette fiche, jointe aux demandes, n’était pas relative au poste occupé par le salarié dont le reclassement était recherché mais au poste proposé sur les caractéristiques duquel il était demandé de la renseigner, et en ne recherchant pas, en conséquence, si la recherche de reclassement n’avait pas été incomplète faute de renseignements utiles, la cour d’appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail ;

 


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