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5 avril 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
20/00895
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
————————–
ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023
PRUD’HOMMES
F N° RG 20/00895 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LO4E
Madame [F] [K]
c/
Association GIRONDE TOURISME anciennement AGENCE DE DEVELOPPEMENT TOURISTIQUE DE LA GIRONDE
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 janvier 2020 (R.G. n°F 16/02442) par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de BORDEAUX, Section Encadrement , suivant déclaration d’appel du 18 février 2020,
APPELANTE :
Madame [F] [K]
née le 11 Décembre 1964 à [Localité 3] de nationalité FrançaiseProfession : Sans profession, demeurant [Adresse 1]
assistée et repésentée par Me Laëtitia SCHOUARTZ de la SELARL SCHOUARTZ AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
Association Gironde Tourisme anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]
N° SIRET : 781 843 750
assistée et représentée par Me Clarisse MAROT loco Me Frédéric GODARD-AUGUSTE de la SELAS DS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 février 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Tronche , Conseiller, chargé d’instruire l’affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sylvie Tronche, conseillère
Madame Bénédicte Lamarque, conseillère
Greffier lors des débats : Florence Chanvrit
Greffier lors du prononcé : A.-Marie Lacour-Rivière,
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Madame [F] [K], née en 1964, a été engagée en qualité d’assistante de chargé de mission à la communication par l’Association Gironde Tourisme anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 23 juin 1992 .
Par avenant du 1er mars 2004, Mme [K] a été nommée, à compter du 20 juin 2003, au poste de chargée des relations avec la presse.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des organismes de tourisme.
A partir du 28 janvier 2008, Mme [K] a été placée en arrêt de travail pour maladie d’origine non professionnelle jusqu’à la fin de la relation contractuelle.
Au mois de janvier 2011, Mme [K] a été classée en invalidité catégorie 2.
Dans le courant de l’année 2015, les salariés ainsi que les représentants du personnel ont été invités à se prononcer sur une réorganisation de l’association en raison de sa situation économique.
Une nouvelle organisation a été envisagée, structurée en pôles emportant la suppression de deux postes, dont celui de chargé de relations presse. Les délégués du personnel se sont déclarés favorables à ce projet de licenciement.
Par lettre datée du 6 avril 2016, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 18 avril 2016 au cours duquel un contrat de sécurisation professionnelle lui a été remis, qu’elle a accepté, la relation de travail prenant fin au 9 mai 2016.
Mme [K] a sollicité de l’Association que lui soient communiqués les critères d’ordre de licenciement.
Par courrier du 3 mai 2016, l’Association lui a répondu que dès lors qu’elle occupait un poste unique au sein de l’Agence, il n’y avait pas vocation à appliquer les critères d’ordre.
Contestant les conditions de la rupture et soutenant qu’il doit être constaté à titre principal, que l’Association Gironde Tourisme n’a pas respecté les critères d’ordre du licenciement et à titre subsidiaire, que son licenciement est abusif outre le paiement de dommages et intérêts, Mme [K] a saisi le 27 septembre 2016 le conseil de prud’hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu en formation de départage le 23 janvier 2020, l’a :
– déboutée de l’intégralité de ses demandes,
– condamnée à payer à l’Association Agence de Développement Touristique de la Gironde la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamnée aux dépens de l’instance.
Par déclaration du 18 février 2020, Mme [K] a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 janvier 2023, Mme [K] demande à la cour de dire recevable et bien-fondé son appel interjeté à l’encontre du jugement déféré, d’ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour des plaidoiries, de réformer le jugement et de :
A titre principal,
– dire que l’Association Gironde Tourisme, anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde n’a pas respecté l’ordre des licenciements,
– condamner l’Association Gironde Tourisme, anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde à lui verser la somme de 107.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de mise en place des critères d’ordre,
A titre subsidiaire,
– dire qu’elle a fait l’objet d’un licenciement abusif,
– condamner l’Association Gironde Tourisme, anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde à lui verser les sommes suivantes :
* 107.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
* 9.872,88 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
* 987,28 euros au titre des congés payés sur préavis,
En tout état de cause,
– condamner l’Association Gironde Tourisme, anciennement Agence de Développement Touristique de la Gironde à lui verser les sommes suivantes:
* 15.060,20 euros représentant le solde de l’indemnité de licenciement,
* 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile:,
– la condamner aux dépens et frais éventuels d’exécution.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 janvier 2023, l’Association Gironde Tourisme demande à la cour de’confirmer la décision entreprise, et à titre reconventionnel, de condamner Mme [K] à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
A l’audience tenue le 14 février 2023, avant le déroulement des débats, à la demande de Mme [K] et avec l’accord de la partie adverse, l’ordonnance de clôture rendue le 19 janvier 2023 a été révoquée et la procédure a été de nouveau clôturée avant l’ouverture des débats.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande à titre principal portant sur le non-respect des critères d’ordre de licenciement
Après avoir rappelé les dispositions légales en la matière, Mme [K], considérant ne pas avoir été la seule dans sa catégorie professionnelle, soutient que l’employeur n’a pas mis en eouvre les critères de l’ordre de licenciement .
Elle évoque la situation de Mme [P], recrutée à compter de 2010 pour la remplacer pendant son congé maladie et qui, à compter de son licenciement, a occupé son poste d’attachée de presse avant de quitter l’association en juillet 2016 en l’absence de régularisation de sa situation.
Elle prétend que si leurs intitulés de postes étaient différents, en revanche elles réalisaient les mêmes missions.
La salariée produit à cet effet un extrait du rapport d’activité de l’employeur en 2016 faisant état du départ de l’attachée de presse en juillet 2016, son profil Linkedin ainsi que celui de Mme [P], dont elle déduit qu’elles avaient occupé le même poste et avaient eu les mêmes responsabilités, et trois articles de presse de mai 2015 et janvier 2016 dans lesquels Mme [P] apparaît en qualité de chargée des relations avec la presse.
Mme [K] considère qu’eu égard à son âge, ses qualités professionnelles et son ancienneté de près de vingt quatre années, le non-respect par l’employeur des critères d’ordre qui auraient dû lui être favorables, Mme [P] et elle-même relevant de la même catégorie professionnelle, lui a causé un préjudice qu’elle évalue à hauteur de la somme de 107.000 euros.
L’employeur réplique que le poste de Mme [K] était unique de sorte qu’il n’y avait pas lieu à respecter un quelconque ordre des licenciements, Mme [K] occupant le poste de chargé de relations presse, statut cadre, tandis que Mme [P] occupait celui d’assistante de communication presse, statut agent de maîtrise.
Il fait valoir que Mme [K] avait en charge la conception de la stratégie communication presse alors que Mme [P] assistait le service Pôle promotion de l’association. Il tire de la différence de statuts des deux salariées et de leur différence de salaires, l’absence de similitude des postes occupés, déniant tout caractère probant aux profils Linkedin produits par la seule salariée.
***
L’article L.1233-5 du code du travail, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, dispose que: «’lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.
Ces critères prennent notamment en compte :
1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article’».
L’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements constitue pour le salarié une illégalité qui entraîne pour celui-ci un préjudice dont il peut solliciter réparation.
Mme [K] occupait jusqu’au 1er mars 2004 le poste d’assistante, statut agent de maîtrise, avant d’être promue chargée des relations presse, statut cadre, tel que cela ressort des dispositions contractuelles ainsi que de ses bulletins de salaire. Au dernier état de la relation, selon la fiche de poste annexée à son contrat, elle avait pour attributions : «’la conception stratégie communication presse, participation aux réunions de direction, liaison avec les médias nationaux et régionaux…l’organisation et l’accueil de voyages presse, la rédaction de dossiers, de communiqués de presse, articles, éditos, les conseils et l’assistance aux partenaires avec échange de services, l’organisation de conférences et d’événements..’» ; il est précisé qu’elle devait «’ rendre compte du respect des objectifs et de la gestion des moyens au directeur’» et «’ recevoir des comptes de la mise en oeuvre des objectifs et de la gestion des moyens de l’assistante’».
A l’examen de ses bulletins de salaire produits à la procédure, Mme [P] était employée en qualité d’assistante communication presse et autres médias, statut agent de maîtrise, soit sur un emploi différent relevant d’une autre catégorie professionnelle.
Ainsi que le souligne à juste titre l’employeur, ces éléments probants ne peuvent être combattus par les extraits d’articles de presse aux termes desquels Mme [P] apparaît comme «’travaillant depuis plus de 2 ans aux relations presse traditionnelles’» ou’ «’au service presse France du comité départemental du tourisme de la Gironde’» ou apparaissant comme le «’contact presse de l’agence de développement touristique de la Gironde’» ou encore «’en charge des relations presse’» car de par leur généralité, ils sont insuffisants à rendre compte de la réalité de ses fonctions.
De la même façon, le profil Linkedin de Mme [P] produit par la salariée, dont le contenu n’est corroboré par aucun autre élément de la procédure, est dépourvu de valeur probante.
A défaut d’autres éléments, il n’est pas démontré que Mme [P], classée dans la catégorie professionnelle d’agent de maîtrise, exerçait des fonctions de même nature que celles dévolues à Mme [K], qui avait le statut de cadre.
Par voie de conséquence, seule à exercer sa fonction dans sa catégorie professionnelle au sein de l’association, Mme [K] sera déboutée de sa demande au titre du non- respect des critères de l’ordre de licenciement et la décision des premiers juges sera confirmée de ce chef.
Sur la demande à titre subsidiaire portant sur le bien fondé du licenciement pour motif économique
Mme [K] invoque l’absence de difficultés économiques car son contrat de travail ayant été suspendu à compter de 2011 pour cause de maladie, son poste ne pouvait constituer une charge pour l’employeur et sa suppression ne pouvait donc permettre de réaliser des économies.
Elle considère que les difficultés économiques invoquées par l’employeur sont inexistantes. Elle ajoute que son poste n’a pas été supprimé puisque se seraient succédées pour la remplacer, Mme [P] jusqu’en juillet 2016, puis Mme [T]. Elle prétend que ce poste est stratégique et que le Pôle communication-promotion n’a jamais été dissous ni redistribué et déplore le versement partiel du registre du personnel qui ne porte que sur la période comprise entre 2010 et 2015. Elle affirme que son poste est occupé par Mme [Z] depuis le 2 janvier 2019.
Elle souligne qu’elle n’a été destinataire d’aucune proposition de reclassement et que l’employeur n’a pas loyalement respecté son obligation de reclassement dans la mesure où, placée en invalidité de deuxième catégorie, elle aurait dû bénéficier d’une visite de reprise avant la procédure de licenciement pour motif économique afin de prendre en compte, au titre du reclassement, les éventuelles préconisations du médecin du travail.
Selon elle, le non-respect de cette formalité prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.
L’employeur répond que les difficultés économiques étaient continues depuis 2011 et que les subventions du conseil départemental, seules ressources de l’association, ont été insuffisantes à ralentir le déficit accumulé pour atteindre en 2014 la somme de 400.000 euros, ces éléments étant confirmés par les conclusions du rapport de la chambre régionale des comptes de la Nouvelle Aquitaine aux termes duquel le résultat net avait diminué de 129,07 % entre 2012 et 2015 et la trésorerie de 30,51 %.
Il ajoute qu’après deux années déficitaires, il a dû agir sur la masse salariale ce qui a conduit à la procédure de licenciement économique de deux salariés début 2016 dès que les comptes 2015 ont été connus.
Cette situation était confirmée par le conseil départemental qui avait établi une synthèse annuelle des comptes financiers en relevant que la réduction des dépenses consacrées aux actions et aux frais de structure était insuffisante pour assurer l’équilibre financier et que des mesures portant notamment sur une réduction des charges du personnel devaient être mises en oeuvre.
L’employeur considère que l’argument selon lequel le poste de Mme [K] ne pouvait représenter une charge eu égard à son arrêt maladie, est indifférent au regard de la nécessaire réorganisation pour la sauvegarde de l’activité de l’association.
Il affirme que le poste de Mme [K] et le Pôle supports communication dont il relevait ont été supprimés, les autres Pôles de l’association ayant désormais en charge l’accueil presse en ce qui les concerne.
Il produit le registre du personnel pour démontrer qu’aucune embauche n’a eu lieu avant mai 2017 et fait valoir que c’est seulement trois ans et demi après le licenciement de Mme [K], qu’une nouvelle salariée a été engagée en qualité d’attachée de presse.
Il considère avoir rempli son obligation de recherche de reclassement et produit les réponses négatives à ses demandes.
Selon lui, contrairement aux affirmations de la salariée, il ne peut lui être reproché de ne pas lui avoir fait passer une visite de reprise au moment du licenciement dans la mesure où la salariée a vu son arrêt de travail régulièrement renouvelé, ne s’est pas rendue à la visite médicale prévue et n’avait pas fait de demande pour reprendre son travail.
***
Aux termes de l’article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.
Le motif économique est ainsi libellé dans la lettre du 18 avril 2016
« (…) Malheureusement et comme vous le savez, l’agence était confrontée à des difficultés économiques importantes qui ne lui ont pas permis de mettre en oeuvre les actions pour lesquelles elle a été subventionnée. L’attention du CONSEIL DEPARTEMENTAL a été attirée à plusieurs reprises et des demandes de subventions complémentaires ont été réalisées sans que toutefois le CONSEIL DEPARTEMENTAL n’y satisfasse intégralement.
Cela a contraint l’ADT 33 à réduire au cours des dernières années ses effectifs, puisque vous avez pu constater qu’un grand nombre de départs (retraite…) au cours des dernières années, n’ont pas été remplacés. L’effectif en équivalent temps plein a ainsi déjà été réduit de près de 15 %.
Malgré cela l’AGENCE DE DEVELOPPEMENT TOURISTIQUE DE LA GIRONDE a cumulé au cours des 2 dernières années d’exercice plus de 400.000,00 euros de déficit. L’exercice clos au 31 décembre 2015, qui confirme un 2ème exercice déficitaire, est certes déficitaire dans une proportion moindre que 2014, mais cela n’est dû qu’au versement d’une subvention complémentaire du CONSEIL DEPARTEMENTAL, mais aussi et principalement à la non réalisation des actions pour lesquelles l’agence s’est engagée et a été financée.
Cette situation ne peut perdurer, car elle confirme que structurellement, malgré les efforts de non remplacement des salariés partants, l’AGENCE n’est pas en mesure d’assurer les missions pour lesquelles elle est mandatée, sauf à creuser un déficit, alors même que nous ne vivons que de fonds publics et que notre financeur principal ne peut accepter que nous laissions perdurer un fonctionnement structurellement déficitaire.
C’est la raison pour laquelle, afin de sauvegarder notre activité, nous envisageons la suppression et le licenciement de 2 postes de travail, dont le vôtre (…)’».
Les éléments de la procédure et notamment l’analyse des comptes réalisée par le conseil départemental du 18 mai 2015, les comptes annuels de 2014 établis par un expert comptable le 10 mars 2015, le rapport de gestion comptable 2015 et le rapport de la chambre régionale des comptes pour la période de 2012 à 2015 confirment la diminution du résultat net de 129,07 % entre 2012 et 2015 et de la trésorerie de 30,51 %.
Ainsi, le résultat net pour l’année 2014 s’établissait à – 359 046 euros et malgré la maîtrise de ses frais de structure et la diminution des dépenses de ses actions – pourtant le coeur de son activité -, l’activité de l’association est restée déficitaire en 2015 alors qu’il n’a pas été fait droit à toutes ses demandes de subventions supplémentaires.
En mai 2015, le conseil départemental faisait le constat de la quasi-absence de recettes propres et de sa dépendance vis-à-vis de lui à hauteur de 97% de ses ressources.
Il suggérait, au regard de ces difficultés économiques et après avoir tenté en vain d’atteindre l’équilibre financier, de mettre en oeuvre des mesures portant notamment sur la réduction des charges de personnel afin : «’d’équilibrer les comptes et éviter tout risque de défaillance…’».
C’est la raison pour laquelle l’association a été contrainte d’agir sur la masse salariale en 2016 en supprimant notamment le poste de Mme [K].
Par ailleurs, même si la salariée était placée en arrêt de travail pour maladie, elle avait vocation à reprendre son emploi et sa rémunération aurait à nouveau impacté la masse salariale de l’association.
Malgré les contestations de Mme [K], les difficultés économiques ainsi décrites ayant présidé à son licenciement étaient donc réelles et persistantes ainsi que le souligne à juste titre l’employeur.
S’agissant de la suppression du poste de Mme [K], il est établi que contrairement à ce que cette dernière soutient, Mme [P] ne l’a pas remplacée avant son départ en juillet 2016 et il est démontré que Mme [T], étudiante en master 2 loisirs tourisme, a effectué au sein de l’agence, un stage de fin d’étude de 6 mois en 2017, près d’un an après le licenciement de Mme [K].
En outre, l’organigramme produit par l’employeur démontre que les tâches correspondantes au poste de Mme [K] ont ensuite été réparties entre les différents pôles de l’agence, chacun d’entre eux s’occupant des relations presse dans son domaine respectif : l’employeur produit en ce sens divers courriels des responsables des pôles assurant l’accueil de différents médias (pièces 28 à 38).
Il est par ailleurs établi que Mme [Z] a été engagée en qualité d’attachée de presse à compter du 2 janvier 2019, soit plus de deux ans après le licenciement de la salariée.
L’examen du registre du personnel permet de constater qu’aucun recrutement n’est intervenu après octobre 2015 et M. [R], directeur général de l’association, atteste qu’aucun recrutement n’a eu lieu avant le 9 mai 2017.
Dès lors l’argument de Mme [K] ne saurait prospérer.
*
Même s’il est justifié par une cause économique avérée, le licenciement d’un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l’employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement.
L’article L.1233-4 du code du travail, dans sa version applicable au litige, précise que le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie.
Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
Ainsi, il appartient à l’employeur de justifier, par des éléments objectifs, des recherches qu’il a effectuées en ce sens et de l’impossibilité dans laquelle il s’est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure.
En l’espèce, l’association justifie des recherches de reclassement qu’elle a effectuées par de nombreux courriers et courriels datés des 30 mars et 4 avril 2016 et des réponses négatives qu’elle a reçues.
Contrairement à ce que prétend Mme [K], l’employeur a été destinataire de son arrêt de travail de prolongation du 21 décembre 2015 jusqu’au 31 mars 2016, de nouveau prolongé le 22 mars 2016 jusqu’au 30 juin 2016, de sorte que le contrat de travail se trouvait suspendu sans que la salariée ne démontre que l’employeur avait connaissance de sa situation d’invalidité.
Elle ne peut en outre se prévaloir d’une absence de visite de reprise en ce que l’employeur justifie lui avoir adressé, avant de recevoir la prolongation du 22 mars 2016, une convocation à une visite médicale de reprise organisée le 1er avril 2016 à laquelle elle ne s’est pas rendue.
Par voie de conséquence, l’employeur a respecté son obligation de reclassement de sorte que le licenciement de Mme [K] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Dès lors Mme [K] sera déboutée de l’intégralité de ses demandes à ce titre et la décision de première instance sera confirmée de ce chef.
Sur le solde de l’indemnité de licenciement
Arguant d’une ancienneté de 23 ans et 7 mois telle que figurant sur son bulletin de salaire et se fondant sur l’article 13-2 de la convention collective applicable prévoyant le doublement de l’indemnité pour les salariés âgés de plus de 50 ans comptant au moins 20 ans dans l’entreprise, Mme [K] sollicite l’allocation d’une somme de 15.060,20 euros à ce titre, ce que conteste l’employeur en faisant valoir les périodes de suspension du contrat de travail de la salariée placée en arrêt de travail pour maladie non professionnelle à compter de juin 2008.
Si l’article 13 de la convention collective nationale du tourisme prévoit en effet le doublement de l’indemnité de licenciement pour les salariés de plus de 50 ans dont le licenciement intervient après 20 ans d’ancienneté dans l’entreprise, il n’en demeure pas moins qu’en application des dispositions de l’article L.1234-8 du code du travail, ainsi que les premiers juges l’ont justement rappelé, les périodes d’arrêt de travail pour maladie ordinaire qui emportent suspension du contrat de travail, n’entrent pas en compte pour la détermination de la durée de l’ancienneté de sorte que Mme [K], engagée à compter de 1992, qui a vu son contrat de travail suspendu pour maladie non professionnelle à compter de juin 2008 ne peut prétendre au doublement de son indemnité car elle ne totalisait pas 20 ans d’ancienneté, peu importe la mention erronée qui figure uniquement sur son dernier bulletin de salaire.
La demande de Mme [K] à ce titre sera rejetée et la décision de première instance, confirmée.
Sur les autres demandes
Mme [K], partie perdante à l’instance et en son recours, sera condamnée aux dépens ainsi qu’à verser à l’association la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Mme [K] aux dépens ainsi qu’à verser à l’association Agence de Développement Touristique de la Gironde la somme de 1.000 euros sur le fondement
de l’article 700 du code de procédure civile.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire