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16 septembre 2016
Cour d’appel de Lyon
RG n°
15/04081
AFFAIRE PRUD’HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 15/04081
[B]
C/
Association INDUSTRIE SERVICE
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON
du 10 Avril 2015
RG : F 13/03628
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2016
APPELANTE :
[V] [B]
née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Non comparante, représentée par Me Régis DURAND, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
Association INDUSTRIE SERVICE
[Adresse 2]
[Adresse 3]
[Localité 3]
Représentée par Me Laurence CATIN, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 1er Juin 2016
Présidée par Michel SORNAY, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
– Michel SORNAY, président
– Didier JOLY, conseiller
– Natacha LAVILLE, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 16 Septembre 2016 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Michel SORNAY, Président et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:
L’association INDUSTRIE SERVICE est un ESAT soumis à la loi de 1901 ayant pour mission de favoriser l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, qu’elle fait travailler dans le secteur de la mécanique générale. Elle emploie 70 travailleurs handicapés et 12 salariés valides, tous relevant des dispositions de la convention collective de la métallurgie du Rhône.
[V] [B] a été engagée en qualité d’aide comptable par l’association INDUSTRIE SERVICE par contrat de travail à durée déterminée du 16 mai au 27 juin 2000, puis par divers contrats à durée déterminée du 28 août 2000 au 31 mai 2000. Le 1er juin 2000, la relation contractuelle s’est poursuivie pour une durée indéterminée sur la base d’un temps partiel de 20 heures par semaine.
Le 23 décembre 2008, [V] [B] été promue au niveau 4, échelon 3, coefficient 285, et sa durée de travail a été portée à 35 heures par semaine.
Au dernier état de la relation contractuelle, [V] [B] percevait une rémunération brute mensuelle de 2298,73 euros.
Le 7 janvier 2013, l’association INDUSTRIE SERVICE a convoqué [V] [B] à un entretien préalable à son éventuel licenciement économique.
Au cours de cet entretien réalisé le 14 janvier 2013, [V] [B] s’est vu notifier par l’employeur le motif économique justifiant son licenciement et a reçu la documentation requise relative au contrat de sécurisation professionnelle qui lui était proposé.
Le 16 janvier 2013, [V] [B] a demandé à l’employeur de lui communiquer les critères d’ordre retenus dans le cadre du licenciement économique envisagé. Le 18 janvier 2013, l’association lui a répondu par courrier que ces critères lui seraient transmis si un licenciement devait être prononcé à son encontre.
Par courrier recommandé du 28 janvier 2013, l’employeur a notifié à [V] [B] son licenciement pour motif économique.
Le 31 janvier 2013, [V] [B] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle et son contrat de travail a ainsi été rompu à compter du 4 février 2013.
Par courrier du 4 février 2013, [V] [B] a informé son employeur qu’elle acceptait la portabilité de son régime de prévoyance de frais de santé et a réclamé pour la seconde fois que lui soient communiqués les critères d’ordre de licenciement.
Par courrier du 15 février 2013, l’association INDUSTRIE SERVICE lui a notifié les critères d’ordre appliqués.
Le 4 mars 2013, [V] [B] a obtenu de l’association INDUSTRIE SERVICE ses documents de fin de contrat, après les lui avoir réclamés à plusieurs reprises.
[V] [B] a saisi le 12 juillet 2013 le conseil de prud’hommes de Lyon afin de voir reconnaître le caractère injustifié de son licenciement et d’obtenir la condamnation de l’employeur à lui payer les sommes suivantes :
à titre principal :
’82’750 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement injustifié
‘5000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral
‘5000 € à titre de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de formation
‘3000 € à titre de dommages-intérêts pour remise tardive des documents Pôle Emploi
à titre subsidiaire :
’82’750 € à titre de dommages-intérêts correspondant la perte d’emploi
en tout état de cause :
‘ 2500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 10 avril 2015, le conseil de prud’hommes de Lyon a débouté [V] [B] de l’ensemble de ses demandes.
[V] [B] a interjeté appel de cette décision le 12 mai 2015.
***
Au terme de ses dernières conclusions, [V] [B] demande la cour d’appel de :
à titre principal :
‘dire et juger que l’association INDUSTRIE SERVICE ne rapporte pas la preuve du motif économique ;
‘dire et juger que l’association INDUSTRIE SERVICE ne rapporte pas la preuve d’une recherche de reclassement réelle et loyale ;
‘en conséquence, condamner l’association INDUSTRIE SERVICE à verser à [V] [B] la somme de 41’377,14 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
à titre subsidiaire :
‘dire et juger que l’association INDUSTRIE SERVICE ne rapporte pas la preuve du respect de ses obligations en termes d’ordre dans les licenciements ;
‘en conséquence, condamner l’association INDUSTRIE SERVICE à verser à [V] [B] la somme de 41’377,14 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect dans l’ordre dans les licenciements ;
en tout état de cause :
‘condamner l’association INDUSTRIE SERVICE à verser à [V] [B] la somme de 4597,46 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
‘condamner l’association INDUSTRIE SERVICE à verser à [V] [B] la somme de 459,74 euros au titre des congés payés afférents,
‘condamner l’association INDUSTRIE SERVICE à verser à [V] [B] la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
‘condamner la même en tous les dépens.
Pour sa part, l’association INDUSTRIE SERVICE demande par ses dernières écritures à la cour d’appel, à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner [V] [B] à lui payer la somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens.
À titre subsidiaire, elle demande à la cour la réduction à due proportion des dommages-intérêts sollicités par la salariée.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu’elles ont fait viser par le greffier lors de l’audience de plaidoiries et qu’elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n’avoir rien à y ajouter ou retrancher.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1.’Sur le motif économique du licenciement :
L’article L1233-2 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
Aux termes de l’article L 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de cette entreprise ou du secteur d’activité du groupe auquel appartient cette entreprise.
Les motifs économiques invoqués par l’employeur doivent être énoncés dans une lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige.
Il n’appartient pas au juge de contrôler le choix de l’employeur parmi les mesures à prendre pour sauvegarder la compétitivité de son entreprise.
Par contre, le juge tenu de vérifier la réalité du motif économique du licenciement doit rechercher d’une part si la suppression de poste litigieuse était consécutive à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et d’autre part si l’employeur a énoncé dans la lettre de licenciement les motifs rendant selon lui nécessaire cette suppression.
En l’espèce, la lettre de licenciement notifiée le 28 janvier 2013 à [V] [B] était ainsi motivée :
« Madame,
A la suite de notre entretien du 14 janvier dernier, nous sommes au regret de vous informer que nous sommes dans l’obligation de poursuivre notre projet de licenciement économique à votre égard.
– Comme nous vous l’avons indiqué lors de cet entretien, votre emploi est supprimé pour le motif économique suivant :
L’association INDUSTRIE SERVICE subit depuis de nombreux mois une baisse d’activité importante qui résulte principalement du contexte économique morose général auquel le secteur de la métallurgie n’échappe pas.
Ainsi, alors que le chiffre d’affaires de l’association avait atteint en 2010, 1.258.389 €, il n’était plus que de 1.065.251 € en 2011 et 850.244 € en 2012, soit une baisse de 20%.
Au cours des derniers mois de l’exercice 2012, cette baisse s’est accentuée :
CA réalisé
2011
2012
1er trimestre
269.081 €
254.043 €
2ème trimestre
277.968 €
213.537 €
3ème trimestre
228.461 €
173.548 €
4ème trimestre
289.741 €
209.116 €
Les perspectives d’activité ne permettent ni d’envisager un renversement de la tendance, ni une amélioration de notre résultat en 2013.
En effet, notre carnet de commandes au premier janvier de cette année 2013 était de 28.845€ alors qu’à la même date l’année dernière il était de 51.572€, soit une baisse de 44%.
Par ailleurs, le secteur d’activité solaire qui représentait 57% de notre chiffre d’affaires en 2010 a chuté tous les ans (voir tableau) jusqu’à la liquidation d’un de nos deux clients du secteur courant 2012, ce qui ne permet pas d’envisager un chiffre d’affaires, sur ce secteur, supérieur à 75.000€ pour 2013.
CA du solaire en 2010
717 603 €
CA du solaire en 2011
310 911 €
CA du solaire en 2012
141 492 €
CA du solaire prévisionnel en 2013
75 000 €
Aucune subvention supplémentaire qui pourrait nous permettre de compenser notre baisse de résultat commercial ne peut par ailleurs être escomptée.
Or, en tant que structure médico-sociale, il nous appartient d’équilibrer nos comptes.
Cette baisse d’activité qui malheureusement perdure, nous contraint donc, malgré les économies de charges externes mises en place depuis trois ans, à réorganiser notre association et à diminuer les charges internes. Nous sommes donc dans l’obligation de réduire le personnel afin de pouvoir faire face à la conjoncture économique.
Cette mesure est non seulement nécessaire pour sauvegarder notre compétitivité mais également pour assurer la pérennité de notre association.
Le faible volume de travail affecte notamment le service administratif de notre structure, et plus particulièrement le service comptable.
De ce fait, votre poste d’aide-comptable est supprimé.
– Concernant les possibilités de reclassement qui auraient pu exister, la situation de l’association ne permet pas d’envisager la création d’un poste nouveau ou l’aménagement d’un poste existant.
Nous avons par ailleurs pris contact avec les associations partenaires d’INDUSTRIE SERVICE. Cependant, la crise économique actuelle est mondiale et aucun poste n’est disponible.
Il n’existe donc pas de solution de reclassement.
– Nous vous avons par conséquent proposé d’adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) en vous remettant les documents fournis par Pôle Emploi. (‘). »
Il résulte des liasses fiscales des exercices 2008 à 2013 versées aux débats par l’employeur, les éléments comptables suivants :
chiffre d’affaires
résultat d’exploitation
résultat net comptable
2008
877’000 €
– 18 212 €
– 5924 €
2009
856’153 €
– 200 560 €
– 199 197 €
2010
1’258’503 €
+110 627 €
+113 234 €
2011
1’065’251 €
+83’539 €
+ 100 536 €
2012
850’244 €
– 70’944€
+ 36 441 €
2013
847’051 €
– 16’554 €
– 30 085 €
Les parties sont d’accord pour considérer que les exercices 2010 et 2011 étaient atypiques et que leurs bons résultats ne pouvaient se répéter les années suivantes.
Il résulte ainsi des pièces du dossier et du tableau ci-dessus que, quoi qu’en dise [V] [B] aujourd’hui, l’association INDUSTRIE SERVICE était bien en 2012, comme elle l’avait été précédemment 2009, confrontée à une situation économique difficile en lien direct avec une régression de ses marchés, notamment dans le domaine du solaire, qui constituait une partie très importante de l’activité de l’entreprise.
Les arguments tirés par [V] [B] de l’évolution des résultats nets financiers ne sont pas de nature à remettre en cause ce constat, l’entreprise démontrant en particulier que celui de 2012 s’expliquait notamment par des produits exceptionnels correspondant à des reprises de provisions, ainsi que par déplacements à terme, qui n’apparaissent dans le bilan qu’à la vente.
De même, l’évolution assez favorable de sa trésorerie en 2012 est directement liée à la mobilisation de placements à long terme, dont l’entreprise explique avoir transféré les fonds sur des placements plus disponibles afin de ne pas être en difficulté en cas de besoins liés à la baisse de chiffre d’affaires.
Par ailleurs, il n’apparaît pas sérieux de soutenir, comme le fait à demi mot [V] [B], que s’agissant d’une entreprise d’insertion de personnes handicapées bénéficiant de subventions qui représentent une part importante de ses ressources, les pertes de l’association INDUSTRIE SERVICE sont de nature structurelle, et qu’elles ne seraient donc pas le signe de difficultés économiques de nature à justifier des mesures de licenciement.
En effet, une telle entreprise d’insertion, si elle bénéficie de subventions, n’en est pas moins nécessairement soumise à un marché concurrentiel et à une certaine recherche de compétitivité, se doit en tout état de cause d’équilibrer le plus possible ses comptes .
Dans le contexte d’évolution très défavorable que rencontrait l’association INDUSTRIE SERVICE fin 2012, il apparaît légitime que cette entreprise ait décidé, pour sauvegarder sa compétitivité, de procéder à une réorganisation de certains de ses services, passant par une réduction de l’effectif du service administratif et comptable qu’elle considérait comme excessif au regard de la baisse d’activité.
Ainsi, la cour estime que le licenciement de [V] [B] est bien de nature économique et s’avère être bien la conséquence d’une recherche par l’employeur d’une sauvegarde de sa compétitivité dans un contexte économique difficile.
2.’Sur le respect de l’obligation de reclassement :
L’article L 12 33’4 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur au jour du licenciement, dispose que :
Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.
Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
En l’espèce, l’association INDUSTRIE SERVICE fait valoir qu’elle n’avait en son sein aucun poste de reclassement disponible à proposer à [V] [B], compte-tenu de la formation d’aide comptable de celle-ci. En effet, s’agissant d’une entreprise qui n’emploie pas plus de 12 salariés permanents, la direction de l’association avait nécessairement connaissance, tout comme [V] [B] d’ailleurs, de l’intégralité des postes alors disponibles, et ce sans avoir à effectuer de diligence particulière de recherche de reclassement, dont elle pourrait aujourd’hui rapporter une preuve tangible.
La salariée n’est donc pas fondée a reproché à son employeur une absence totale de recherche d’un poste de reclassement, et ce d’autant moins qu’il n’est pas contesté que l’association INDUSTRIE SERVICE a interrogé le 10 janvier 2013 deux associations du même secteur que le sien sur la possibilité pour elles de proposer à [V] [B] un nouvel emploi.
L’appelante soutient néanmoins, pour la première fois en cause d’appel, que l’association INDUSTRIE SERVICE aurait dû lui proposer le poste de [L] [J], qui occupait dans l’entreprise un emploi de moniteur du secteur usinage.
Ce grief n’apparaît toutefois pas sérieux dans la mesure où :
‘ce poste n’était pas vacant en janvier 2013 au jour du licenciement de [V] [B], puisque ce salarié était alors en arrêt de travail depuis le mois d’octobre 2012 et qu’il n’a finalement été licencié pour absence prolongée perturbant le bon fonctionnement de l’entreprise que le 5 juin 2013, soit près de 5 mois après [V] [B] .
‘ À supposer même qu’il ait pu être envisagé de proposer ce poste à [V] [B] dans le cadre d’un remplacement en CDD ou en intérim de son collègue malade, l’appelante relève elle-même que cet emploi de moniteur du secteur usinage requérait à la fois des compétences techniques en matière d’usinage et des compétences d’encadrement des salariés handicapés de cet atelier. Or l’intéressée n’allègue en rien disposer de telles compétences, et il est constant que l’obligation pesant sur l’employeur de rechercher un reclassement au salarié concerné ne saurait lui imposer de prendre en charge une formation complète telle que celle qu’imposerait l’affectation de [V] [B] à ce poste, cette formation dépassant très largement en l’occurrence la simple obligation d’adaptation prévue par l’article L 1233’4 précité.
Enfin, il n’est pas contesté que l’association INDUSTRIE SERVICE n’appartient à aucun groupe d’entreprises, si bien qu’il ne saurait lui être utilement reproché de ne pas avoir recherché de solution de reclassement dans le cadre d’un tel groupe.
En l’état de l’ensemble de ces éléments, la cour constate qu’aucun manquement ne peut être reproché à l’association INDUSTRIE SERVICE au titre de cette recherche infructueuse de reclassement, si bien que le licenciement litigieux pour motif économique repose bien sur une cause réelle et sérieuse.
Il y a donc lieu de débouter [V] [B] tant de sa contestation de ce licenciement que de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents.
3.’ Sur le non-respect des critères d’ordre lors du licenciement
Par application de l’article L 1223-5 du code du travail, l’employeur est tenu, en cas de licenciement pour motif économique, d’établir un ordre des licenciements et d’appliquer pour cela les critères fixés par la convention collective applicable, ou à défaut par lui-même sur la base des prescriptions légales, après consultation des représentants du personnel.
En l’espèce, il est constant que la convention collective applicable ne contient aucune disposition dérogatoire au dispositif légal en la matière.
Selon l’article L.1233-7 du code du travail, lorsque l’employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique, il prend en compte, dans le choix du salarié concerné, les critères prévus à l’article L.1233-5 du même code, à savoir :
1° Les charges de famille, en particulier celle des parents isolés ;
2° l’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
3°la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
L’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse. Cette illégalité entraîne un préjudice, pouvant aller jusqu’à la perte injustifiée de l’emploi, qui doit être intégralement réparé,
Invoquant l’illégalité de la mise en ‘uvre des critères d’ordre lors de son licenciement, [V] [B] sollicite aujourd’hui la condamnation de l’association INDUSTRIE SERVICE à lui payer la somme de 41’377,14 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu’elle dit avoir subi de ce chef .
Pour la première fois en cause d’appel, elle soutient que la consultation des représentants du personnel effectuée par l’employeur sur les critères d’ordre à mettre en ‘uvre lors de ce licenciement n’est pas régulière. En ce sens, elle fait valoir que la convocation des délégués du personnel datée du 19 décembre 2012 figurant en pièce 42 de l’employeur aurait fait l’objet d’un « découpage grossier » .
Il s’avère toutefois que ce qu’elle présente comme étant un «découpage grossier » apparaît être simplement la trace laissée sur la photocopie versées aux débats par le pliage de l’original de ce courrier lorsqu’il a été mis dans son enveloppe’
Par ailleurs et surtout, l’employeur verse aux débats le procès-verbal, régulier en la forme, de la réunion du 2 janvier 2013 des délégués du personnel, dont il résulte que ces derniers ont bien été utilement consultés sur ce projet après qu’une information suffisante leur ait été communiquée.
Au fond, l’association INDUSTRIE SERVICE communique les critères d’ordre de licenciement qu’elle a mis en ‘uvre, qui sont directement issus de l’article L1233’7 précité, la pondération apportée à chacun de ces critères, ainsi que le nombre de points obtenus par [V] [B] et par sa collègue [O] [N], agent administratif achat/facturation.
Pour critiquer la mise en ‘uvre de ces critères d’ordre, [V] [B] fait tout d’abord valoir qu’elle aurait également dû également être mise en concurrence avec la responsable du service administratif Madame [W]. Cette critique n’apparaît toutefois pas fondée, dans la mesure où Madame [W] n’appartient pas la même catégorie professionnelle que [V] [B] et [O] [N], puisqu’elle occupe un emploi de cadre, à la différence des deux autres salariées précitées.
Par ailleurs, [V] [B] fait grief à l’employeur d’avoir accordé à [O] [N] deux points au titre des qualités professionnelles tandis qu’elle-même n’en a obtenu qu’un, différence qu’aucun élément objectif ne permettrait selon elle de légitimer.
Il n’appartient toutefois pas au juge chargé de contrôler les modalités de mise en ‘uvre des critères d’ordre du licenciement de substituer à celle de l’employeur son appréciation des qualités professionnelles des salariés en concurrence.
L’argument sera donc rejeté, si bien que la cour ne peut que constater qu’aucune critique sérieuse ne peut être articulée contre l’employeur quant à la mise en ‘uvre de ces critères d’ordre ayant abouti au licenciement de [V] [B] , qui avait obtenu au total deux points de moins que sa collègue.
La demande de dommages-intérêts présentés de ce chef par [V] [B] sera donc rejetée comme mal fondée.
4.’ Sur les demandes accessoires :
La cour constate le jugement déféré a omis de statuer sur les dépens de première instance et a débouté chacune des parties de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les données du litige, les dépens de première instance et d’appel, suivant le principal, seront intégralement supportés par [V] [B].
S’il ne paraît effectivement pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu’elles ont exposés devant les premiers juges, il n’en va pas de même en cause d’appel, où s’impose une participation de [V] [B] aux frais irrépétibles que son employeur a dû exposer pour assurer sa défense.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y AJOUTANT,
CONDAMNE [V] [B] à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel ;
CONDAMNE [V] [B] à payer à l’association INDUSTRIE SERVICE la somme de 400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais que cet employeur a dû exposer en cause d’appel ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le GreffierLe Président
Gaétan PILLIEMichel SORNAY