Ordre des licenciements : 10 novembre 2016 Cour de cassation Pourvoi n° 15-21.961

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Ordre des licenciements : 10 novembre 2016 Cour de cassation Pourvoi n° 15-21.961
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10 novembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-21.961

SOC.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 novembre 2016

Rejet

M. CHAUVET, conseiller le plus ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 2023 F-D

Pourvoi n° F 15-21.961

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Laboratoire Theramex, société de droit étranger, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [L] [R], liquidateur, domiciliée [Adresse 1],

contre l’arrêt rendu le 28 mai 2015 par la cour d’appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l’opposant à Mme [Q] [F], domiciliée [Adresse 3],

défenderesse à la cassation ;

Mme [F] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 11 octobre 2016, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et rapporteur, MM. Déglise, Bétoulle, conseillers, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Chauvet, conseiller, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Laboratoire Theramex, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme [F], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 28 mai 2015), que Mme [F] a été engagée le 15 février 1995 en qualité de déléguée médicale par la société Laboratoire Theramex, représentée par son liquidateur amiable, qui fait partie du groupe Teva ; que l’activité de la société était organisée selon deux entités, l’une dédiée à la médecine générale (Monathex), et l’autre à la gynécologie (Theramex) ; que la salariée, qui était affectée au secteur de la médecine générale, a été licenciée pour motif économique le 13 octobre 2011, dans le cadre d’un licenciement collectif pour motif économique ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée qui est préalable :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l’employeur :

Attendu que la société fait grief à l’arrêt de dire que la société n’a pas respecté les critères de l’ordre des licenciements et de la condamner au paiement de dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ que l’employeur peut privilégier le critère des qualités professionnelles des salariés, pour ne conserver à son service que les salariés les plus aptes à contribuer au redressement de l’entreprise, dès lors qu’il prend en considération l’ensemble des critères applicables présidant à l’ordre des licenciements ; que le juge, qui n’a pas à substituer son appréciation des qualités professionnelles du salarié à celle de l’employeur, doit simplement vérifier que cette appréciation est fondée sur des éléments objectifs et qu’elle ne procède ni d’une erreur manifeste, ni d’un détournement de pouvoir ; que ne commet ni erreur manifeste, ni détournement de pouvoir l’employeur qui tient compte notamment, pour l’appréciation des qualités professionnelles des salariés, de l’expérience acquise par ces derniers dans la spécialité vers laquelle la réorganisation oriente l’activité de l’entreprise ; qu’en l’espèce, il est constant que l’activité de la société Laboratoire Theramex, qui intervient dans le secteur de la santé de la femme, était principalement orientée vers la ménopause et qu’elle a décidé, pour faire face aux mutations du marché, de faire évoluer son portefeuille de produits vers la contraception et d’adapter ses réseaux de visite médicale en conséquence ; que la cour d’appel a constaté que l’employeur, s’il a privilégié le critère des qualités professionnelles, a bien pris en compte l’ensemble des critères légaux et que les qualités professionnelles des visiteurs médicaux ont été évaluées en fonction, d’une part, de la connaissance du profil « gynéco » mesuré par le taux d’activité du salarié dans ce secteur et, d’autre part, des résultats aux deux derniers entretiens d’évaluation ; qu’en retenant, pour dire que l’employeur a méconnu les critères d’ordre des licenciements, que le système valorisant le pourcentage d’activité développée vers les gynécologues était « inégalitaire et déloyal » puisque défavorisant les salariés qui, comme Mme [F], faisaient partie du réseau Monathex dont l’activité était déployée essentiellement vers les médecins généralistes, cependant qu’un tel critère, justifié par l’orientation nouvelle de l’activité de l’entreprise, ne procède d’aucun détournement de pouvoir, ni erreur manifeste d’appréciation, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-5 du code du travail ;

2°/ que pour l’évaluation des qualités professionnelles prises en compte dans la détermination de l’ordre des licenciements, l’employeur peut parfaitement tenir compte des connaissances du salarié dans la spécialité vers laquelle s’oriente l’activité de l’entreprise et mesurer ces connaissances, objectivement, par son expérience dans cette spécialité ; que la circonstance que cette expérience résulte de l’affectation antérieure du salarié, décidée par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction, ne donne pas un caractère subjectif à un tel critère ; qu’en affirmant que le critère du niveau de connaissance de l’activité gynécologique dépendait de la seule appréciation de l’employeur et était subjectif, au motif inopérant que la part d’activité que chaque salarié devait consacrer soit aux médecins généralistes, soit aux gynécologues, était fixée par l’employeur, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-5 du code du travail ;

3°/ que sauf détournement de pouvoir ou erreur manifeste d’appréciation, l’employeur est seul juge des qualités professionnelles des salariés et des critères d’appréciation de ces qualités professionnelles, dans la perspective de l’établissement de l’ordre des licenciements ; qu’en se bornant à affirmer, pour dire que le critère du taux d’activité dans le secteur gynécologique ne permet pas d’apprécier les qualités professionnelles des salariés, que les salariés du réseau Monathex pouvaient avoir des compétences en matière gynécologique indépendamment de l’exercice d’une activité tournée vers ce secteur professionnel, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé de détournement de pouvoir, ni erreur manifeste d’appréciation de l’employeur, a encore violé l’article L. 1233-5 du code du travail ;

4°/ qu’il résulte des constatations de l’arrêt attaqué que le critère des qualités professionnelles était évalué en fonction, non seulement du niveau de connaissance du profil « gynéco », mais aussi en fonction des notes obtenues aux deux derniers entretiens annuels d’évaluation ; que la note maximale pouvant être obtenue au titre de l’évaluation (30 points) était égale à la note maximale pouvant être obtenue au titre de la connaissance du profil « gynéco » ; qu’en conséquence, la combinaison de ces critères permettait de « préserver » les salariés du réseau Monathex, qui déployaient leur activité essentiellement à destination des médecins généralistes et n’avaient qu’une faible activité tournée vers les gynécologues, mais dont les évaluations professionnelles étaient excellentes ou très bonnes ; que la cour d’appel a constaté que Mme [F] avait obtenu seulement 15 points au titre des évaluations professionnelles, ce qui correspondait à un note moyenne ; qu’en affirmant néanmoins que la seule note obtenue par la salariée au titre du niveau de connaissance du profil « gynéco » la privait de toute chance de conserver son emploi, sans s’expliquer sur la combinaison de cette note avec celle attribuée au titre des évaluations annuelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-5 du code du travail ;

 


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