Opposabilité de la décision de prise en charge de maladie professionnelle

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Opposabilité de la décision de prise en charge de maladie professionnelle
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Nos Conseils:

1. Assurez-vous de bien respecter les obligations légales en matière de transmission de documents relatifs à la déclaration de maladie professionnelle, notamment en envoyant un double de la déclaration à l’employeur par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception.

2. En cas d’enquête de la caisse sur une maladie professionnelle, veillez à ce que l’employeur soit correctement interrogé et informé, notamment en recevant un questionnaire à remplir. Assurez-vous de conserver des preuves tangibles de cet envoi pour éviter toute contestation ultérieure.

3. En cas de litige sur l’opposabilité d’une décision de prise en charge de maladie professionnelle, vérifiez attentivement que la caisse a respecté toutes les obligations légales en matière de communication de documents et d’interrogation des parties concernées. En cas de doute, n’hésitez pas à demander des preuves tangibles de ces démarches.

Résumé de l’affaire

Mme [L] [F], salariée de la société [5], a été reconnue en maladie professionnelle pour une tendinopathie du coude droit. La société conteste cette décision et demande à la cour de la déclarer inopposable. La caisse d’assurance maladie demande le rejet des demandes de la société.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

15 mars 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/06135
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 12

ARRÊT DU 15 Mars 2024

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 20/06135 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCMPF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Août 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’EVRY RG n° 19/00286

APPELANTE

Société [5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Corinne POTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0461 substituée par Me Charlotte BLANC LAUSSEL, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE D’ASURANCE MALADIE DE [Localité 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

dispensée de comparaître à l’audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Décembre 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par la société [5] d’un jugement rendu le 25 août 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire d’Evry, dans un litige l’opposant à la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7].

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Il est rappelé que, le 31 mai 2018, Mme [L] [F], salariée de la société [5] (la société) en qualité d’assistante de vente au drive, a souscrit une déclaration de maladie professionnelle ; que le certificat médical initial établi le 5 avril 2018 mentionne : “épicondylite droite + canal carpien droit avec signes sensitivo-moteur, apparition suite à des mouvements répétés de manutention au travail” et une date de première constatation de la maladie le 5 avril 2018 ; que, par décision du 18 octobre 2018, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7] (la caisse) a retenu que la maladie Tendinopathie des muscles épicondyliens du coude droit inscrite dans le tableau n°57 : “affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail” était d’origine professionnelle ; que la société a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la caisse, laquelle a rejeté son recours dans sa séance du 17 janvier 2019 ; que, le 14 mars 2019, la société a porté le litige devant une juridiction de sécurité sociale ; que, par jugement du 25 août 2020, le pôle social du tribunal judiciaire d’Evry a déclaré la société recevable en son recours, débouté la société de l’ensemble de ses demandes, déclaré opposable à la société l’ensemble des conséquences de la prise en charge de la maladie professionnelle relevant du tableau n°57 déclarée le 31 mai 2018 dont a été victime sa salariée, condamné la société aux dépens et rejeté toute autre demande plus ample ou contraire.

Le jugement a été notifié à la société le 14 septembre 2020, laquelle en a interjeté appel par courrier recommandé avec demande d’accusé de réception du 24 septembre 2020.

Aux termes de ses conclusions visées à l’audience du 20 décembre 2023 soutenues oralement par son avocat, la société demande à la cour, par voie d’infirmation du jugement, de :

– lui déclarer inopposable la décision de la caisse du 18 octobre 2018 ayant reconnu le caractère professionnel de la maladie “tendinopathie des muscles épicondyliens du coude droit” de sa salariée du 5 avril 2018,

– à titre subsidiaire, lui déclarer inopposables les soins et arrêts de travail délivrés à la salariée, au titre de la maladie professionnelle du 5 avril 2018, à compter du 5 juillet 2018,

– à titre infiniment subsidiaire, ordonner une mesure d’expertise judiciaire aux fins de déterminer l’imputabilité des soins et arrêts de travail à la maladie professionnelle déclarée par la salariée du 5 avril 2018.

Par courrier du 17 novembre 2023, la caisse a sollicité une dispense de comparution, à laquelle il a été fait droit.

Aux termes de ses conclusions transmises à la cour avec ce courrier, la caisse demande à la cour de débouter la société de ses demandes, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de rejeter toute demande d’expertise médicale.

En application du deuxième alinéa de l’article 446-2 et de l’article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens.

SUR CE,

1- Sur l’opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle

A- La société fait valoir que la caisse ne justifie pas lui avoir transmis le double de la déclaration de maladie professionnelle lors de l’ouverture de l’instruction du dossier de la salariée

Selon l’article R.441-11 II du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, la victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l’employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception.

La caisse produit (pièce n°7) copie d’une lettre datée du 2 juillet 2018 à destination de l’employeur mentionnant qu’elle lui adressait copie de la déclaration de maladie professionnelle.

Ce courrier mentionne un numéro de dossier 182405696.

La caisse justifie, par une production de son logiciel métier, que ce numéro correspond à un courrier recommandé référencé 2C13794345486 déposé le 2 juillet 2018 et communique un accusé de réception reproduisant ce numéro, lequel a été signé par un représentant de la société le 6 juillet 2018.

Par conséquent, le moyen soulevé par la société sera rejeté, la caisse justifiant lui avoir transmis copie de la déclaration de maladie professionnelle lors de l’ouverture de l’instruction de la demande de la salariée.

B- La société oppose qu’elle n’a pas été interrogée par l’agent enquêteur de la caisse au cours de l’enquête, n’ayant jamais reçu de questionnaire à remplir.

Conformément à l’article R.441-11 III du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, en cas de réserves motivées de la part de l’employeur ou si elle l’estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l’employeur et à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.

Il est relevé que la caisse justifie avoir adressé à la salariée un questionnaire qu’elle a rempli le 14 août 2018 (pièce n°3).

En revanche, concernant l’envoi d’un questionnaire à l’employeur, la caisse a produit un accusé de réception référencé 2C13144555374 signé par un représentant de l’employeur le 6 août 2018 mais ne fournit aucune copie du courrier correspondant à cet accusé de réception et notamment aucune lettre d’accompagnement d’un questionnaire employeur.

Elle produit deux copies d’écran de son logiciel métier avec les mentions suivantes:

– “AT Initial-Demander Rens. MP employeur- date d’exécution : 2/7/2018- code agent : 2598- code siret : [N° SIREN/SIRET 3]”, et mentionnant : “Dem. Emp.- Rens Compl. MP adr administrative”,

-“AT Initial-Rappeler Dem. Rens. MP Employeur” – date d’exécution : 2/8/2018- code agent : 1327- code siret : [N° SIREN/SIRET 4]”, et mentionnant : “Dem. Emp.- Rens Compl. MP- adr administrative”.

Or, ces seules copies d’écran du logiciel métier de la caisse sont insuffisantes pour établir l’envoi effectif d’un questionnaire à l’employeur.

Par conséquent, en l’absence de preuve de l’envoi d’un questionnaire à l’employeur dans le cadre de l’instruction de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle de la salariée, la caisse ne justifie pas avoir respecté les obligations édictées par l’article R.441-11 III du code de la sécurité sociale, de sorte qu’il convient, par infirmation du jugement, de déclarer inoppposable à la société la décision de prise en charge de la maladie professionnelle.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DECLARE recevable l’appel de la société [5],

INFIRME le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire d’Evry du 25 août 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a déclaré la société [5] recevable en son recours,

Statuant à nouveau ;

DECLARE inopposable à la société [5] la décision de la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7] de prendre en charge la maladie déclarée par Mme [L] [F] le 31 mai 2018 au titre de la législation sur les risques professionnels,

CONDAMNE la Caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7] aux dépens de première instance et d’appel.

La greffière La présidente


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