Oeuvre musicale contrefaite : la réparation du préjudice hors UE

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Oeuvre musicale contrefaite : la réparation du préjudice hors UE
Ce point juridique est utile ?

La réparation du préjudice de contrefaçon en Angleterre ou hors Union européenne ne relève pas du juge français.

En la cause, c’est à juste titre que le juge de la mise en état après avoir rappelé les dispositions des articles 7 du règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 et 46 du code de procédure civile a considéré que le supposé contrefacteur étant réputé domicilié hors du territoire français, le tribunal judiciaire de Paris n’est pas compétent pour connaître du dommage causé hors de France.

Résumé de l’affaire :

Ordonnance du 22 septembre 2023

Le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a rendu une ordonnance le 22 septembre 2023, rejetant l’exception de nullité de l’assignation. Il a également déclaré le tribunal incompétent pour connaître des dommages résultant de la contrefaçon alléguée survenue hors de France. M. [F] a été déclaré irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits d’artiste-interprète et a été condamné aux dépens de l’instance, ainsi qu’à verser 2 000 euros à M. [N] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Appel de M. [F]

M. [F] a interjeté appel le 5 octobre 2023, demandant à la cour de confirmer l’ordonnance en ce qui concerne le rejet de la demande de nullité de l’assignation. Il a également demandé la réforme de l’ordonnance pour être jugé recevable à agir contre M. [N] en contrefaçon de ses droits d’artiste-interprète. En outre, il a formulé des demandes subsidiaires concernant la production de divers documents par M. [N] sous astreinte.

Conclusions de M. [N]

Le 22 mars 2024, M. [N] a remis ses conclusions, demandant l’infirmation de l’ordonnance en ce qui concerne la nullité des actes introductifs d’instance. Il a également demandé la confirmation de l’incompétence des juridictions françaises pour connaître des dommages causés hors du territoire français. M. [N] a soulevé des arguments concernant l’irrecevabilité de l’action de M. [F] en raison de son adhésion à l’Adami et a demandé à la cour de débouter M. [F] de ses demandes de communication de documents.

Ordonnance de clôture du 16 mai 2024

L’ordonnance de clôture rendue le 16 mai 2024 a confirmé l’ordonnance dont appel en toutes ses dispositions. La cour a condamné M. [F] à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a également condamné M. [F] aux dépens d’appel.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

25 octobre 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/16353
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2024

(n°102, 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 23/16353 – n° Portalis 35L7-V-B7H-CIKZ2

Décision déférée à la Cour : ordonnance du juge de la mise en état du 22 septembre 2023 – Tribunal judiciaire de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n°22/13489

APPELANT AU PRINCIPAL et INTIME INCIDENT

M. [H] [F]

Né le 14 juillet 1953 à [Localité 5]

De nationalité française

Exerçant la profession d’auteur, compositeur et interprète

Demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Jean AITTOUARES de la SELARL OX, avocat au barreau de PARIS, toque A 966

Assisté de Me Benjamin MANKUT plaidant pour la SELARL OX et substituant Me Jean AITTOUARES, avocat au barreau de PARIS, toque A 966

INTIME AU PRINCIPAL et APPELANT INCIDENT

M. [J] [N]

Né l 5 avril 1969 à [Localité 2] (Angleterre)

De nationalité britannique

Demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Ariane FUSCO-VIGNÉ, avocate au barreau de PARIS, toque P 41

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Mmes Véronique RENARD et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Mme Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, désignée pour compléter la Cour

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu l’ordonnance rendue le 22 septembre 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris qui a :

– rejeté l’exception tirée de la nullité de l’assignation,

– déclaré le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaitre du dommage résultant de la contrefaçon alléguée causé hors de France,

– déclaré M. [F] irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits d’artiste-interprète,

– condamné M. [F] aux dépens de l’instance,

– condamné M. [F] à payer à M. [N] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Vu l’appel principal interjeté le 5 octobre 2023 par M. [F],

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 4 mars 2024 par M. [F], appelant à titre principal, qui demande à la cour de :

– confirmer l’ordonnance du 22 septembre 2023 en ce qu’elle a débouté [J] [N] de sa demande de nullité de l’assignation délivrée par [H] [F],

– réformer l’ordonnance du 22 septembre 2023,

et, statuant à nouveau :

– à titre principal, juger que M. [F] est recevable à agir contre M. [J] [N] en contrefaçon de ses droits d’artiste-interprète,

à titre subsidiaire,

– ordonner à M. [N] de produire, dans le délai d’un mois suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard :

– tous décomptes de redevances d’exploitation des quatre premiers albums du groupe Space, établis par ou au nom de la société Accadia Ltd,

– l’adresse exacte de la société Accadia Ltd,

– surseoir à statuer sur la demande d’irrecevabilité tirée du prétendu défaut de mise en cause de la société Accadia Ltd, jusqu’à son intervention à la présente procédure,

– débouter M. [N] de sa fin de non-recevoir tirée du prétendu caractère nouveau des demandes de production des informations relatives à la société Accadia Ltd,

en tout état de cause,

– ordonner à M. [N] de produire, dans le délai d’un mois suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard :

– l’original du document intitulé Royalty Agreement & Master Recording Rights Agreement prétendument signé le 11 novembre 2014 avec [U] [S] [Z] & Interglobtrans,

– l’ensemble des devis, bons de commande, factures et contrats relatifs à l’exploitation des phonogrammes contenus dans les albums Magic Fly, Deliverance et Just Blue du groupe Space et, plus généralement, de tout enregistrement du groupe Space,

– l’ensemble des contrats d’exploitation de ces enregistrements et des décomptes relatifs à cette exploitation, établis par lui-même, ainsi que par tous sous exploitants, distributeurs et/ou licenciés,

– les justificatifs de tous versements effectués au profit de [Y] [C] en exécution du contrat intitulé Master Recordings Ownership Agreement du 27 novembre 2022,

– une pièce d’identité,

– tout justificatif de domicile permettant d’identifier sa véritable adresse,

– condamner M. [N] à indemniser M. [F] à hauteur de 16 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– réserver les dépens,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 22 mars 2024 par M. [N], intimé à titre principal, qui demande à la cour de :

in limine litis (sic)

– infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a débouté M. [N] de sa demande de nullité des actes introductifs d’instance (assignation et acte de signification) et, statuant à nouveau, juger nulles l’acte de signification et de l’assignation introductive d’instance délivrées par M. [H] [F] à l’encontre de M. [J] [N],

– subsidiairement, confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a jugé les juridictions françaises incompétentes pour connaitre des éventuels dommages causés hors du territoire français,

– subsidiairement, si la cour confirmait l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté la demande en nullité de l’assignation et de l’acte de signification,

– confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a jugé M. [F] irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits d’artiste-interprète en raison de son adhésion à l’Adami et,

– à défaut de confirmation, déclarer en tout état de cause M. [F] irrecevable en raison de la prescription de son action et, subsidiairement, pour défaut de qualité à défendre de M. [N]

– très subsidiairement, si la cour infirmait l’ordonnance entreprise en jugeant M. [F] recevable en son action malgré son adhésion à l’Adami et jugeait l’action de M. [F] non prescrite mais irrecevable à l’encontre de M. [N] à titre personnel,

– débouter M [F] de sa demande de sursis à statuer,

encore plus subsidiairement, si la cour jugeait M. [F] recevable en son action à l’encontre de M. [N] à titre personnel,

– juger que la présente procédure ne porte que sur les 3 albums suivants : Magic Fly – enregistre en 1977 en France, Deliverance – enregistre en 1977 en France, Just Blue – enregistré en 1978 en France,

– juger M. [F] irrecevable, pour constituer une demande nouvelle en appel, et subsidiairement infondé en sa demande de communication des décomptes de redevances d’exploitation des albums du groupe Space établit par ou au nom de la société Accadia ltd ainsi que l’adresse exacte de la société Accadia Ltd,

– juger M. [F] infondé en sa demande de communication de :

-l’original du document intitulé « Royalty Agreement & Master Recording Rights Agreement signé le 11 novembre 2014,

– l’ensemble des devis bon de commande factures et contrats relatifs à l’exploitation des phonogrammes contenus dans les albums « Magic Fly »,

« Deliverance » et « Just Blue » du groupe Space et plus généralement de tout enregistrement du groupe Space,

– l’ensemble des décomptes relatif à l’exploitation de ces enregistrements établis par lui-même ainsi que par tout sous exploitant distributeur et ou licenciés,

– justificatifs de tous versements effectués au profit de [Y] [C] en exécution du contrat intitulé « Master Recordings Ownership Agreement du 27 novembre 2020,

-une pièce d’identité, de tout justificatif de domicile permettant d’identifier la véritable adresse de [J] [N],

en tout état de cause,

– confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné M. [F] à régler à M. [N] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux

dépens,

-condamner au titre de l’appel M. [F] a verser à M. [N] la somme de 5500 euros au titre de l’article 700 outre les dépens,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 16 mai 2024 ;

SUR CE,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que M. [F], membre fondateur du groupe Space, est notamment interprète des oeuvres musicales réunies dans les albums « Magic Fly » et « Deliverance » sortis en 1977 et « Just Blue » sorti en 1978.

Il expose n’avoir jamais cédé ses droits d’artiste-interprète ni reçu de rémunération de l’exploitation de ces oeuvres mais avoir découvert qu’elles ont été exploitées sans droit par diverses entités ayant en commun d’être ou d’avoir été dirigées par M. [N].

Par courrier du 16 avril 2020 adressé par mail à Accadia Ltd MRC t /a Nang Records, le conseil de M. [F] aurait demandé (pièce 6-1 de l’appelant en langue anglaise non traduite) la cessation des actes d’exploitation des albums de Space précités et de lui communiquer les décomptes correspondant à son exploitation et la restitution des masters originaux.

Par courriel du 4 mai 2020, M. [N] aurait répondu (pièce 6-2 de l’appelant en langue anglaise non traduite) « Nous sommes les propriétaires des phonogrammes» cédés le 11 novembre 2014 à la société Accadia Ltd par [U] [S] [Z], décédé le 18 juin 2015, présenté comme producteur des albums, et demandé quels étaient les souhaits de M. [F] s’agissant des droits d’interprète.

Les parties et les héritiers de [S] [Z] ont tenté, en vain, de trouver un accord fin 2020 début 2021. .

Le 27 novembre 2022, M. [F] a fait assigner M. [N] devant le tribunal judiciaire de Paris sollicitant de voir juger que l’exploitation des phonogrammes contenus dans les albums « Magic Fly », « Deliverance » et « Just Blue » et de tout enregistrement du groupe par M. [N] est constitutive de contrefaçon, interdire à M. [N], que ce soit en son nom propre ou par l’intermédiaire de toute société, d’exploiter ces oeuvres, ordonner à M. [N] de communiquer les éléments relatifs à cette exploitation et le condamner à lui payer diverses provisions en réparation de ses préjudices patrimoniaux et moraux en résultant.

M. [N] a saisi le juge de la mise en état d’incidents de procédure.

C’est dans ce contexte qu’a été rendue l’ordonnance dont appel.

Sur la nullité de l’assignation et de l’acte de signification

M. [N] fait grief au juge de la mise en état d’avoir rejeté son exception de nullité de l’assignation et de la signification en estimant que les diligences de l’huissier instrumentaire et la recherche sur le moteur google étaient suffisantes pour l’établissement du procès-verbal prévu à l’article 687-1 du code de procédure civile. Il fait valoir que seul est mentionné au procès-verbal une recherche sur google sans autre élément, que l’huissier instrumentaire n’explicite pas les occurrences entrées sur le moteur de recherche google, enfin qu’il avait communiqué tant au conseil de M. [F] qu’à l’huissier instrumentaire, l’adresse de la société Accadia LTD, société qui aurait dû être attraite dans la cause au lieu et place de M [N] à titre personnel.

M. [F] réplique en substance que l’huissier a accompli toutes les diligences imposées par la Convention de la Haye, que M. [N] dissimule sa véritable adresse et n’a en tout état de cause subi aucun grief dès lors qu’il a constitué avocat et présenté une défense, ajoutant que l’argument concernant la société Accadia est relatif à la recevabilité de l’action mais ne peut affecter la validité de l’acte introductif d’instance.

Il résulte des productions que l’assignation du 27 avril 2022 a été transmise par l’huissier instrumentaire à l’autorité compétente britannique et réceptionnée le 4 mai 2022, puis le 16 août suivant après complément d’adresse. Elle a également été envoyée par lettre recommandée réceptionnée le 30 avril 2022. Averti par téléphone par une personne se disant le frère de M. [N] et indiquant que l’intéressé demeurait aux Etats-Unis d’Amérique, il a été fourni à l’huissier une adresse électronique « [Courriel 4] ». Le 19 septembre 2022, l’huissier a contacté M. [N] par courriel. Le 29 septembre 2022, M. [N] a répondu en fournissant l’adresse d’une société MRC à [Localité 3].

Force est donc de constater que M. [N] n’a pas donné son adresse personnelle à l’huissier instrumentaire. Par ailleurs les recherches sur Internet de ce dernier qui sont en lien avec la recherche d’adresse de M. [N] sont parfaitement suffisantes. Dès lors, face aux éléments en sa possession, l’huissier instrumentaire a valablement établi un procès-verbal conformément à l’article 687-1 du code de procédure civile.

Enfin et en tout état de cause, M. [N] a constitué avocat devant le premier juge.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l’ordonnance dont appel qu’elle a rejeté la demande de nullité de l’assignation.

Sur la compétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaître du dommage résultant de la contrefaçon alléguée causé hors de France

M. [F] sollicite l’infirmation de l’ordonnance qui a déclaré le tribunal judiciaire de Paris incompétent pour connaître du dommage résultant de la contrefaçon alléguée causé hors de France au motif que M. [N] n’était pas recevable à demander au tribunal de se déclarer incompétent pour statuer sur des demandes non encore formées.

Il résulte des termes non contestés de l’ordonnance dont appel, qu’en réponse à l’exception d’incompétence du tribunal judiciaire de Paris pour réparer les dommages indemnisables au titre de la contrefaçon « commis hors du territoire de la France » M. [F] a répliqué que « la question de la réparation des préjudices est subordonnée à la caractérisation de la contrefaçon, question de fond au sens de article 789 du code de procédure civile, de sorte qu’il appartiendra au tribunal statuant au fond de déterminer les préjudices réparables ». Il n’a donc invoqué aucune fin de non- recevoir devant le juge de la mise en état.

Pour solliciter l’infirmation de l’ordonnance sur ce point, il indique devant la cour qu’il est « pour le moment dans l’incapacité de procéder à l’évaluation de ses préjudices, que ce soit en France ou à l’étranger », se réservant ainsi manifestement la possibilité de réclamer réparation d’éventuels actes de contrefaçon commis en dehors du territoire français.

C’est donc à juste titre que le juge de la mise en état après avoir rappelé les dispositions des articles 7 du règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 et 46 du code de procédure civile a considéré que M. [N] étant réputé domicilié hors du territoire français, le tribunal judiciaire de Paris n’est pas compétent pour connaître du dommage causé hors de France.

L’ordonnance doit donc également être confirmée sur ce point.

Sur les fins de non- recevoir

A titre subsidiaire M. [N] invoque des fins de non- recevoir tirées de l’irrecevabilité à agir de M. [F] du fait de son adhésion à l’Adami, à défaut, de la prescription de son action et plus subsidiairement de son absence de qualité à défendre.

S’il est constant que [F] est adhérent de l’Adami, il suffit de relever que cette dernière indique elle-même dans une attestation produite en pièce 10.3 par l’appelant, que le demandeur (M. [F]) n’a « à aucun moment souhaité confier en gérance à l’Adami les droits patrimoniaux sur ses prestations objet du litige » et que «  Celui-ci est non seulement libre mais seul fondé à initier son action en contrefaçon ».

En conséquence la fin de non- recevoir tirée de l’irrecevabilité à agir de M. [F] du fait de son adhésion à l’Adami doit être rejetée.

S’agissant de la prescription de l’action de M. [F], M. [N] fait valoir que les albums litigieux ont été commercialisés dès 1976, que [U]. [S] avait connaissance de cette exploitation depuis plus de 45 ans et que M. [F] était parfaitement informé de la cession des droits d’exploitation à la société Accadia Ltd comme le prouvent les échanges de mails versés aux débats, les plus anciens remontant à juillet 2014 alors que l’assignation a été délivrée en avril 2022.

Or, le fait que [U]. [S] ait eu ou non connaissance de l’exploitation des albums litigieux est indifférent à la recevabilité de l’action de M. [F]. S’agissant de ce dernier, les deux seuls courriels versés aux débats par l’intimé en pièces 18 et 20, daté de 2022 et rédigé en langue anglaise non traduite pour le premier et du 9 juillet 2014 pour le second et selon lequel M. [F] écrit « Voici ce que [O] a reçu hier. Peux-tu demander à [J] de bien vouloir accepter cette proposition, important au niveau des droits de diffusion. Nous allons accepter leur proposition en tant qu’éditeur », le surplus étant écrit en langue anglaise non traduite, n’est pas suffisant à établir que le demandeur à l’action en contrefaçon avait connaissance de l’exploitation des albums litigieux plus de 5 ans avant l’assignation du 27 avril 2022 comme l’affirme M. [N] sans plus de démonstration.

La fin de non- recevoir tirée de la prescription de l’action doit en conséquence être pareillement rejetée.

S’agissant de la fin de non- recevoir tirée de l’irrecevabilité à agir à l’encontre de M. [N] faute de qualité à défendre de ce dernier, M. [F] indique en page 15 de son assignation au point 34 que M. [N] exploitait les enregistrements litigieux car il dirigeait la société Music Rights Collective dissoute en 2014, qu’il a expressément indiqué qu’il était propriétaire desdits enregistrements et n’a jamais nié et a même toujours revendiqué les exploiter, enfin que selon M. [C], M. [N] a signé un contrat lui arrogeant la « propriété de masters à 50/50 » avec les frères [C]. Il en conclut qu’« il ne fait aucun doute » que M. [N] a exploité les phonogrammes litigieux sans son autorisation. Il ajoute devant la cour qu’il y a une confusion quant à l’entité se disant titulaire des droits dans l’acte de cession qu’il produit en pièce 5, une confusion quant à l’entité exploitant les droits mais que toutes les entités ont pour point commun d’être ou d’avoir été dirigées par M. [N], lequel a en tout état de cause reconnu exploiter personnellement les enregistrements par courriel du 4 mai 2020 et du 19 juin 2020.

Or, en l’état, M. [N] est assigné à titre personnel et non pas en qualité de dirigeant de société ; il est produit en copie un contrat intitulé « Royalty Agreement & Master Recording Rights Agreement » du 11 novembre 2014 dont l’exemplaire versé aux débats n’est pas plus traduit en langue française mais au terme duquel la société Accadia Ldt détiendrait les droits d’exploitation de [U] [S]. Le numéro IBC de la société Accadia figure sur ce contrat. Cette société est également identifiée dans un contrat du 27 novembre 2020 conclu avec les héritiers de [U] [S] et versé aux débats par M. [N], avec le même numéro de société et la même adresse. Il résulte également des éléments du débats que la dénomination Nang est le « consumer facing brand » et que la marque « Nang » appartient ou appartenait à la société Accadia Ltd, que par ailleurs la société Tirade Ltd perçoit les royalties. Enfin les courriels des 4 mai et 19 juin 2020 dont se prévaut M. [F] sont produits en langue anglaise non traduite, étant en tout état de cause ajouté que le simple fait que le nom de M. [N] y figure n’établit nullement la reconnaissance par ce dernier d’une exploitation personnelle des enregistrements litigieux.

Dès lors, M. [F] ne justifie pas de la qualité à défendre de M. [N] et il y a lieu de faire droit à la fin de non-recevoir soulevée par M. [N] à ce titre.

Sur les autres demandes

Il résulte de ce qui précède que la demande de communication de pièces est sans objet ou mal fondée et qu’il n’y a pas lieu de surseoir à statuer dans l’attente des coordonnées de la société Accadia et/ou de son intervention.

Les dispositions de l’ordonnance ayant condamné M. [F] aux dépens et au paiement de frais irrépétible seront confirmées.

Par ailleurs M. [F] sera condamné aux dépens d’appel.

Enfin M. [N] a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance dont appel en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne M. [F] à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [F] aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente


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