Obligations déontologiques des fonctionnaires sur les réseaux sociaux  
Obligations déontologiques des fonctionnaires sur les réseaux sociaux  
Ce point juridique est utile ?

Les faits commis par un fonctionnaire sur les réseaux sociaux, en dehors du service, peuvent constituer une faute passible d’une sanction disciplinaire lorsque, eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l’intéressé et à l’étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service, jeté le discrédit sur la fonction exercée par l’agent ou sur l’administration, ou encore si ces faits sont incompatibles avec la qualité d’agent public.

Par arrêté, le ministre de l’intérieur a infligé à un gardien de la paix de la police nationale, la sanction disciplinaire de révocation pour voir entretenu des relations sexuelles virtuelles avec un mineur. 

Dignité et probité du fonctionnaire  

Les faits reprochés constituaient des manquements caractérisés de l’intéressé à ses obligations statutaires et déontologiques, notamment rappelés aux articles R. 4341 et suivants du code de la sécurité intérieure, et en particulier aux devoirs de dignité, d’intégrité et d’exemplarité qui s’imposent à tout fonctionnaire de police, et ils ont porté une atteinte grave à l’image du service public de la police nationale.

Extension des principes déontologique à l’usage des réseaux sociaux

Un policier ne doit se départir de sa dignité en aucune circonstance et, en tout temps, dans ou en dehors du service, y compris lorsqu’il s’exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux.

Il doit également s’abstenir de tout acte, propos ou comportement de nature à nuire à la considération portée à la police nationale.

Les faits commis par un fonctionnaire en dehors du service peuvent constituer une faute passible d’une sanction disciplinaire lorsque, eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l’intéressé et à l’étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service, jeté le discrédit sur la fonction exercée par l’agent ou sur l’administration, ou encore si ces faits sont incompatibles avec la qualité d’agent public.

Relations sexuelles virtuelles avec un mineur 

D’une part, il ressort de l’arrêté contesté que, pour prononcer la révocation, le ministre de l’intérieur lui a fait grief d’avoir, à compter du début du mois de septembre 2016 et jusqu’au mois d’avril 2017, alors qu’il était âgé de  quarante trois ans, volontairement entretenu, en dehors de son service, une relation virtuelle à caractère sexuel avec un mineur qu’il savait âgé de treize ans et à qui il avait indiqué être policier, consistant en de très nombreux appels téléphoniques ainsi que l’échange, sur les réseaux sociaux, de photographies et de séquences vidéo à connotation sexuelle et pornographique. 

Sanction précédée d’une condamnation en correctionnel  

Un jugement rendu par le tribunal correctionnel de Marseille le 27 novembre 2019, avait également condamné le fonctionnaire à une peine d’emprisonnement d’un an, assortie d’un sursis probatoire d’une durée de trois ans, d’obligations particulières et d’une inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles, pour avoir détenu des images ou représentations d’un mineur présentant un caractère pornographique et pour avoir échangé des messages à caractère pornographique avec un mineur. 

En raison de l’autorité de la chose jugée qui s’attache aux constatations matérielles, retenues par le juge pénal dans une décision dont il n’est ni établi, ni même allégué qu’elle ne serait pas devenue définitive, et qui s’impose tant aux autorités qu’aux juridictions administratives, la matérialité de ces faits, également retenus dans les motifs de l’arrêté contesté du 31 décembre 2018, doit être regardée comme établie

Sanction proportionnée 

Il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes (Conseil d’Etat, Assemblée, 13 novembre 2013, n° 347704, A).

Les obligations déontologiques des fonctionnaires 

Aux termes l’article 25 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité.  () Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. () ». Selon l’article 29 de la même loi, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ».

Par ailleurs, aux termes de l’article R. 4343 du code de la sécurité intérieure, qui s’insère au sein des dispositions constituant le code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie nationale : 

« Les règles déontologiques énoncées par le présent code de déontologie ()  définissent les devoirs qui incombent aux policiers () dans l’exercice de leurs missions de sécurité intérieure pendant ou en dehors du service et s’appliquent sans préjudice des règles statutaires et autres obligations auxquelles ils sont respectivement soumis () ». 

Aux termes de l’article R. 4349 du même code : « Le policier () exerce ses fonctions avec probité.  Il ne se prévaut pas de sa qualité pour en tirer un avantage personnel () ». 

Selon l’article R. 43412 dudit code : « Le policier () ne se départ de sa dignité en aucune circonstance. 

En tout temps, dans ou en dehors du service, y compris lorsqu’il s’exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux, il s’abstient de tout acte, propos ou comportement de nature à nuire à la considération portée à la police nationale et à la gendarmerie nationale. Il veille à ne porter, par la nature de ses relations, aucune atteinte à leur crédit ou à leur réputation. » 

L’article R. 43414 de ce même code dispose que : « Le policier () est au service de la population.  () Respectueux de la dignité des personnes, il veille à se comporter en toute circonstance d’une manière exemplaire, propre à inspirer en retour respect et considération. » 

Aux termes de l’article R. 43427 de ce code : « Tout manquement du policier ou du gendarme aux règles et principes définis par le présent code de déontologie l’expose à une sanction disciplinaire en application des règles propres à son statut, indépendamment des sanctions pénales encourues le cas échéant ». 

Aux termes de l’article 29 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : « Le fonctionnaire actif des services de la police nationale doit, en tout temps, qu’il soit ou non en service, s’abstenir en public de tout acte ou propos de nature à porter la déconsidération sur le corps auquel il appartient ou à troubler l’ordre public ». 

Enfin, selon l’article 1132 de l’arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d’emploi de la police nationale : « Les fonctionnaires actifs de la police nationale () se départissent de leur dignité en aucune circonstance. Placés au service du public, ils se comportent envers celuici d’une manière exemplaire. () ». 

L’échelle des sanctions applicables 

Aux termes de l’article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : 

” Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes.  Premier groupe :  l’avertissement ;  le blâme.  Deuxième groupe :  la radiation du tableau d’avancement ;  l’abaissement d’échelon ;  l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ;  le déplacement d’office.  Troisième groupe :  la rétrogradation ;  l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans.  Quatrième groupe :  la mise à la retraite d’office ;  la révocation. () “.


Cour administrative d’appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 20 décembre 2022, n° 21MA02173

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C A a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler l’arrêté du 31 décembre 2018 par lequel le ministre de l’intérieur lui a infligé la sanction disciplinaire de révocation et de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 7611 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901589 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2021, M. A, représenté par Me Reynaud, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 mai 2021 ;

2°) à titre principal, d’annuler cet arrêté du ministre de l’intérieur du 31 décembre 2018 ou, à titre subsidiaire, et à supposer qu’une sanction disciplinaire puisse être prononcée à son encontre, de la réduire à de plus justes proportions ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 7611 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l’instance distraits au profit de son conseil.

Il soutient que :

il n’est pas démontré que les dispositions de l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983 ont été respectées et que la séance de la commission administrative paritaire interdépartementale ait été régulièrement tenue ; c’est de manière non fondée et sans motiver son jugement, que le tribunal administratif de Marseille a écarté ce moyen tiré du vice de procédure ;

l’arrêté contesté du ministre de l’intérieur du 31 décembre 2018 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation :

. les faits qui lui sont reprochés n’avaient pas été pénalement sanctionnés au moment du prononcé de la sanction disciplinaire litigieuse et, dès lors, ils n’étaient pas susceptibles de fonder cette sanction ; il était présumé innocent ;

. ces faits n’étaient pas établis ; une partie des faits qui lui ont été reprochés pour fonder la décision de révocation a d’ailleurs fait l’objet d’un nonlieu par le tribunal correctionnel ; c’est de manière non fondée que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a écarté ce moyen en jugeant qu’il ne contestait pas réellement les faits ; 

. contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif de Marseille, la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée, notamment au regard de ses états de service et alors que les faits en cause ont été commis en dehors du service et sans lien avec ses fonctions de policiers ; le ministre de l’intérieur n’établit pas les faits, ni leur caractère grave et répété.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2022, le ministre de l’intérieur et des outremer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

la régularité du jugement attaqué ne saurait être utilement contestée par M. A ;

sur le fond, M. A réitère, dans sa requête d’appel, ses moyens de première instance ; il s’en rapporte donc à ses écritures de première instance et aux motifs retenus par les premiers juges que la Cour pourra adopter.

Un courrier du 12 septembre 2022, adressé aux parties en application des dispositions de l’article R. 611111 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l’instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 6131 et le dernier alinéa de l’article R. 6132 du même code.

Par une ordonnance du 28 octobre 2022, la clôture de l’instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l’article R. 6131 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

le code de la sécurité intérieure ;

la loi n° 83634 du 13 juillet 1983 ;

la loi n° 8416 du 11 janvier 1984 ;

le décret n° 84964 du 25 octobre 1984 ;

le décret n° 95654 du 9 mai 1995 ;

l’arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d’emploi de la police nationale ;

le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

le rapport de M. B,

et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 31 décembre 2018, le ministre de l’intérieur a infligé à M. A, gardien de la paix de la police nationale, jusqu’alors affecté à la circonscription de la sécurité publique (CSP) de Marseille, la sanction disciplinaire de révocation. M. A relève appel du jugement du 25 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant principalement à l’annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille du 25 mai 2021 :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué du 25 mai 2021 que les premiers juges ont expressément répondu aux moyens contenus dans la demande de première instance présentée par M. A. En particulier, lesdits juges, qui, au demeurant, n’étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n’ont pas omis de répondre au moyen tiré du vice de procédure pris dans toutes ses branches. Par suite, M. A n’est pas fondé à soutenir que ce jugement serait entaché d’une irrégularité en tant qu’il serait insuffisamment motivé sur ce point. Il suit de là que ce moyen doit être écarté comme manquant en fait.

Sur le bienfondé du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille du 25 mai 2021 :

En ce qui concerne le moyen de légalité externe :

3. M. A reprend, dans des termes identiques et sans critique utile du jugement attaqué, son moyen de première instance tiré du vice de procédure, sans se prévaloir d’aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l’argumentation qu’il a développée devant le tribunal administratif de Marseille. Dès lors, il y a lieu, d’écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, aux points 2 à 4 de leur jugement.

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

4. Il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes (Conseil d’Etat, Assemblée, 13 novembre 2013, n° 347704, A).

S’agissant de la matérialité des faits reprochés à M. A et de leur qualification de fautes disciplinaires :

5. Aux termes l’article 25 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. / () Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. () ». Selon l’article 29 de la même loi, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ».

6. Par ailleurs, aux termes de l’article R. 4343 du code de la sécurité intérieure, qui s’insère au sein des dispositions constituant le code de déontologie de la police nationale et de la gendarmerie nationale : « Les règles déontologiques énoncées par le présent code de déontologie () / définissent les devoirs qui incombent aux policiers () dans l’exercice de leurs missions de sécurité intérieure pendant ou en dehors du service et s’appliquent sans préjudice des règles statutaires et autres obligations auxquelles ils sont respectivement soumis () ». Aux termes de l’article R. 4349 du même code : « Le policier () exerce ses fonctions avec probité. / Il ne se prévaut pas de sa qualité pour en tirer un avantage personnel () ». Selon l’article R. 43412 dudit code : « Le policier () ne se départ de sa dignité en aucune circonstance. / En tout temps, dans ou en dehors du service, y compris lorsqu’il s’exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux, il s’abstient de tout acte, propos ou comportement de nature à nuire à la considération portée à la police nationale et à la gendarmerie nationale. Il veille à ne porter, par la nature de ses relations, aucune atteinte à leur crédit ou à leur réputation. » L’article R. 43414 de ce même code dispose que : « Le policier () est au service de la population. / () Respectueux de la dignité des personnes, il veille à se comporter en toute circonstance d’une manière exemplaire, propre à inspirer en retour respect et considération. » Aux termes de l’article R. 43427 de ce code : « Tout manquement du policier ou du gendarme aux règles et principes définis par le présent code de déontologie l’expose à une sanction disciplinaire en application des règles propres à son statut, indépendamment des sanctions pénales encourues le cas échéant ». Aux termes de l’article 29 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : « Le fonctionnaire actif des services de la police nationale doit, en tout temps, qu’il soit ou non en service, s’abstenir en public de tout acte ou propos de nature à porter la déconsidération sur le corps auquel il appartient ou à troubler l’ordre public ». Enfin, selon l’article 1132 de l’arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d’emploi de la police nationale : « Les fonctionnaires actifs de la police nationale () se départissent de leur dignité en aucune circonstance. Placés au service du public, ils se comportent envers celuici d’une manière exemplaire. () ». En application de ces dispositions précitées, les faits commis par un fonctionnaire en dehors du service peuvent constituer une faute passible d’une sanction disciplinaire lorsque, eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l’intéressé et à l’étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service, jeté le discrédit sur la fonction exercée par l’agent ou sur l’administration, ou encore si ces faits sont incompatibles avec la qualité d’agent public.

7. D’une part, il ressort de l’arrêté contesté du 31 décembre 2018 que, pour prononcer la révocation de M. A, le ministre de l’intérieur lui a fait grief d’avoir, à compter du début du mois de septembre 2016 et jusqu’au mois d’avril 2017, alors qu’il était âgé de  quarantetrois ans, volontairement entretenu, en dehors de son service, une relation virtuelle à caractère sexuel avec un mineur qu’il savait âgé de treize ans et à qui il avait indiqué être policier, consistant en de très nombreux appels téléphoniques ainsi que l’échange, sur les réseaux sociaux, de photographies et de séquences vidéo à connotation sexuelle et pornographique. 

Le ministre de l’intérieur lui a également reproché d’avoir tenté de justifier cette relation auprès des parents de cet enfant en arguant de sa qualité de policier et de l’avoir poursuivie alors même que, dès la fin du mois de septembre 2016, ces derniers avaient exigé qu’il y mette un terme. 

Or, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêt du 8 juillet 2020, la cour d’appel d’AixenProvence, statuant sur les appels interjetés par M. A et le procureur de la République contre le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Marseille le 27 novembre 2019, a condamné M. A à une peine d’emprisonnement d’un an, assortie d’un sursis probatoire d’une durée de trois ans, d’obligations particulières et d’une inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles, pour avoir détenu des images ou représentations d’un mineur présentant un caractère pornographique et pour avoir échangé des messages à caractère pornographique avec un mineur. En raison de l’autorité de la chose jugée qui s’attache aux constatations matérielles, retenues par le juge pénal dans une décision dont il n’est ni établi, ni même allégué qu’elle ne serait pas devenue définitive, et qui s’impose tant aux autorités qu’aux juridictions administratives, la matérialité de ces faits, également retenus dans les motifs de l’arrêté contesté du 31 décembre 2018, doit être regardée comme établie. Il doit en être de même avec celle des autres griefs formulés dans cet acte par le ministre de l’intérieur à l’encontre de l’appelant, lesquels ne sont pas sérieusement contestés par ce dernier et qui sont avérés au regard des nombreuses pièces versées aux débats par le représentant de l’Etat.

8. D’autre part, la procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale. Dans l’hypothèse où c’est à raison des mêmes faits que sont engagées parallèlement les deux procédures, l’autorité investie du pouvoir disciplinaire ne méconnaît pas le principe de la présomption d’innocence en prononçant une sanction sans attendre que les juridictions répressives aient définitivement statué. Par suite, en l’espèce, le ministre de l’intérieur n’a pas commis d’illégalité en infligeant à M. A la sanction disciplinaire de révocation alors que le tribunal correctionnel de Marseille n’avait pas encore rendu sa décision sur les poursuites pénales engagées contre ce dernier à raison des faits litigieux. De même, la circonstance que, suite à une ordonnance de requalification et de renvoi devant ledit tribunal correctionnel rendue le 3 août 2018, le juge pénal n’a pas poursuivi M. A pour avoir favorisé la corruption du mineur en cause est sans incidence sur la matérialité des faits cidessus rappelés au point précédent et qui ont servi de fondement à la sanction disciplinaire en litige, et est donc sans influence sur la légalité de l’arrêté contesté du ministre de l’intérieur du 31 décembre 2018. 

9. Il s’ensuit que l’arrêté contesté du ministre de l’intérieur du 31 décembre 2018 n’est pas entaché d’inexactitude matérielle des faits. En outre, si M. A a commis les faits en cause en dehors de l’exercice de ses fonctions, comme il a été rappelé cidessus au point 6, un policier ne doit se départir de sa dignité en aucune circonstance et, en tout temps, dans ou en dehors du service, y compris lorsqu’il s’exprime à travers les réseaux de communication électronique sociaux, et doit s’abstenir de tout acte, propos ou comportement de nature à nuire à la considération portée à la police nationale. Les faits reprochés à M. A constituent ainsi des manquements caractérisés de l’intéressé à ses obligations statutaires et déontologiques, notamment rappelés aux articles R. 4341 et suivants du code de la sécurité intérieure, et en particulier aux devoirs de dignité, d’intégrité et d’exemplarité qui s’imposent à tout fonctionnaire de police, et ils ont porté une atteinte grave à l’image du service public de la police nationale. Ainsi, ils sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.

S’agissant de la proportionnalité de la sanction infligée à M. A :

10. Aux termes de l’article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, dans sa rédaction applicable au présent litige : ” Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : / l’avertissement ; / le blâme. / Deuxième groupe : / la radiation du tableau d’avancement ; / l’abaissement d’échelon ; / l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; / le déplacement d’office. / Troisième groupe : / la rétrogradation ; / l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. / Quatrième groupe : / la mise à la retraite d’office ; / la révocation. () “.

11. Eu égard à la nature et à la gravité des manquements commis à l’encontre d’un mineur par M. A, par nature incompatibles avec la qualité de fonctionnaire de police, et alors même que ce dernier justifiait de bons états de service, le ministre de l’intérieur n’a pas entaché son arrêté contesté du 31 décembre 2018 d’une erreur d’appréciation en lui infligeant la sanction disciplinaire de révocation. Par suite, et alors qu’au demeurant, il n’appartient pas au juge de l’excès de pouvoir, saisi d’une contestation portant sur une sanction que l’administration inflige à l’un de ses agents, de prononcer une sanction se substituant à celleci, le moyen tiré de la disproportion de la sanction litigieuse doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d’annulation doivent dès lors être rejetées, de même que, par voie de conséquence, ses conclusions au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative. Enfin, la présente instance n’ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions de l’appelant présentées sur le fondement des dispositions de l’article R. 7611 du même code doivent être également rejetées. 

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C A et au ministre de l’intérieur et des outremer.

Délibéré après l’audience du 6 décembre 2022, où siégeaient :

M. Marcovici, président,

M. Revert, président assesseur, 

M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2022.

No 21MA02173


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