Obligations contractuelles et défaillance des emprunteurs : enjeux de la régularité des opérations de crédit à la consommation

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Obligations contractuelles et défaillance des emprunteurs : enjeux de la régularité des opérations de crédit à la consommation

Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] ont souscrit un contrat de location avec option d’achat d’un véhicule d’une valeur de 23 000 € auprès de la SA DIAC, avec un remboursement en 49 mensualités. En raison de loyers impayés, un véhicule a été appréhendé le 10 novembre 2023 et vendu aux enchères pour 12 500 €. La SA DIAC a assigné les deux débiteurs le 20 mars 2024 pour obtenir le paiement de 6 996,39 € majoré d’intérêts, ainsi que 800 € pour les frais de justice. Lors de l’audience du 4 juillet 2024, la SA DIAC a maintenu ses demandes, tandis que les débiteurs ne se sont pas présentés. Le juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, condamné les débiteurs à payer 3 258,44 € avec intérêts légaux, et a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile. Les débiteurs ont également été condamnés aux dépens, avec exécution provisoire de la décision.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

8 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Toulouse
RG
24/01540
TRIBUNAL JUDICIAIRE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

NAC: 53F

N° RG 24/01540 – N° Portalis DBX4-W-B7I-S2SY

JUGEMENT

N° B

DU : 08 Octobre 2024

S.A. DIAC

C/

[Y] [H]
[I] [Z]

Expédition revêtue de
la formule exécutoire
délivrée le 08 Octobre 2024

à Me Jérôme MARFAING-DIDIER

Expédition délivrée
à toutes les parties

JUGEMENT

Le Mardi 08 Octobre 2024, le Tribunal judiciaire de TOULOUSE,

Sous la présidence de Florence LEBON, Vice Présidente au Tribunal judiciaire de TOULOUSE, chargée des contentieux de la protection statuant en matière civile, assistée de Anne-Christelle PELLETIER Greffier, lors des débats et Fanny ACHIGAR Greffier chargé des opérations de mise à disposition.
Après débats à l’audience du 04 Juillet 2024, a rendu la décision suivante, mise à disposition conformément à l’article 450 et suivants du Code de Procédure Civile, les parties ayant été avisées préalablement ;

ENTRE :

DEMANDERESSE

S.A. DIAC, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Maître Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL DECKER, avocats au barreau de TOULOUSE

ET

DÉFENDEURS

Mme [Y] [H], demeurant [Adresse 1]

non comparante, ni représentée

M. [I] [Z], demeurant [Adresse 1]

non comparant, ni représenté

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre acceptée le 29 mai 2020, Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] ont souscrit auprès de la SA DIAC un contrat de location avec option d’achat d’un véhicule d’un montant de 23000€ remboursable en 49 mensualités acquis auprès de la société RENAULT RETAIL GROUP NIMES.

Le véhicule a fait l’objet d’une ordonnance à fin d’appréhension en date du 30 mars 2023 signifiée avec sommation de restituer le 06 avril 2023.

Le véhicule a été appréhendé selon procès-verbal de commissaire de justice le 10 novembre 2023 et vendu aux enchères pour la somme de 12500€.

Des loyers étant demeurés impayés, la SA DIAC a, en conséquence, assigné respectivement Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] par actes séparés de commissaire de justice en date du 20 mars 2024, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de céans pour obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :
– 6996,39€ majorée des intérêts au taux contractuel depuis l’arrêté de compte du 14 mars 2024,
– 800€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

A l’audience du 04 juillet 2024, la SA DIAC représentée par son conseil, maintient ses demandes dans les termes de son assignation. Interrogée sur le respect des diverses obligations édictées par le Code de la consommation et les moyens pouvant être relevés d’office, la SA DIAC a produit à l’audience la fiche de liaison avec le tribunal contenant ses observations détaillées par lesquelles elle a rejeté toute irrégularité.

Bien que régulièrement assignés par acte de commissaire de justice remis respectivement à personne et à domicile le 20 mars 2024, Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] n’ont pas comparu et n’étaient pas représentés.

La date du délibéré a été fixée au 08 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en paiement

En vertu de l’article R. 632-1 du Code de la consommation, « le juge peut soulever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application ». En outre, en application de l’article 472 du code de procédure civile, quand le défendeur ne comparaît pas le juge ne fait droit à la demande que si elle est recevable et bien fondée.

Les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation prévoient qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de défaillance, sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 et 1231 du code civil.

Aux termes de l’article 1103 du Code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires. En application de l’article 1217 du même code, lorsque l’emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés.
Aux termes de l’article 1353 du Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En outre, il convient de rappeler que les dispositions du code de la consommation sont applicables au contrat de location avec option d’achat assimilées à des opérations de crédit, conformément à l’article L. 311-2 du code de la consommation.
Il appartient donc au créancier qui réclame des sommes au titre d’un crédit à la consommation de justifier de la régularité de l’opération, en produisant spontanément les documents nécessaires.

En l’espèce, la SA DIAC produit :
Le contrat de crédit signé électroniquement le 29 mai 2020,La fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs,La fiche de renseignements sur la situation personnelle et financière des emprunteurs,Les conditions particulières de l’offre de reprise du véhicule, La fiche conseil assurance,Le procès-verbal de livraison,Le justificatif de déblocage des fonds,La facture d’achat du véhicule,Les justificatifs de consultation du FICP,Les relances des 22 mars, 28 avril et 12 mai 2022,Les mises en demeure du 8 juin 2022 et du 18 mars 2024Le décompte des sommes dues L’ordonnance d’appréhension du véhicule du 30 mars 2023Le procès-verbal d’appréhension du 10 novembre 2023La facture de la vente aux enchèresL’historique des règlements,Le plan de location du véhiculeEn revanche, La SA DIAC ne justifie pas des éléments suivants :
La preuve de la remise du double de la notice d’information en matière d’assurances et de celui de la fiche d’informations précontractuelles qui doivent être visées par l’emprunteur. Les justificatifs qui sont fournis en l’espèce ne sont pas signés contrairement à la fiche de dialogue sur laquelle apparait la signature manuscrite des emprunteurs sur support électronique.De même, l’enveloppe de preuve « Service Protect&Sign » fourni indique au titre des documents signés « contrat2.pdf » de sorte qu’il ne puisse être déterminé ni les documents réellement signés par les emprunteurs ni si lesdits documents ont été remis à ces derniers. Par ailleurs, si la page de signature du contrat mentionne que «  nous déclarons accepter le présent contrat, après avoir pris connaissance de la fiche d’informations précontractuelle européennes normalisés , des conditions particulières et générales de l’offre et de la notice comportant les extraits des conditions générales de l’assurance », il convient de rappeler à ce titre, que la signature par l’emprunteur de l’offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît avoir reçu un document de la part du prêteur constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires (Civ. 1re, 8 avr. 2021, n° 19-20. 890 ; articles L.312-12 et L.312-7 du Code de la consommation) non fournis en l’espèce.

La copie des pièces justificatives (domicile) exigées par l’article D 311-10-3 devenu D 312-8 du Code de la consommation, s’agissant d’une opération supérieure à 3 000 €. Le contrat est signé électroniquement, sans qu’aucun justificatif de domicile de Monsieur [I] [Z] ne soit fourni.

Avoir vérifié la solvabilité des emprunteurs à partir d’un nombre suffisant d’informations corroborées par des justificatifs contemporains à la souscription du crédit conformément à l’article L312-16 du code de la consommation. En l’espèce, la vérification aurait dû être d’autant plus complète que le contrat portait sur un montant non négligeable de 23000 euros or le prêteur, ne fournit aucun justificatif des charges de Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z], la fiche de dialogue ne mentionnant par ailleurs que 0€ au titre des charges ce qui aurait dû alerter le prêteur à solliciter des justificatifs complémentaires de la situation alléguée.
En raison des manquements précités, le prêteur n’a pas respecté les formalités prescrites et par application des dispositions combinées de l’article 6 du Code civil et de l’article L 311-48 devenu L341-1 et suivants du Code de la consommation, le prêteur doit être déchu du droit aux intérêts.

Conformément à l’article L 311-48 al. 3 devenu L 341-8 du Code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, le débiteur n’est tenu qu’au remboursement du seul capital restant dû. Cette déchéance s’étend donc aux intérêts et à tous leurs accessoires : frais de toute nature (Civ. 1°, 31 mars 2011, n° 09-69963 – CA Paris, 29 septembre 2011, Pôle 04 Ch. 09 n° 10/01284), et primes d’assurances.

Cette limitation légale de la créance du prêteur déchu du droit aux intérêts exclut qu’il puisse prétendre au paiement de l’indemnité légale de 8 %.

Les sommes dues se limiteront dès lors à la différence entre le montant effectivement débloqué au profit de Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] (23000€) et les règlements effectués (7241,56€) auxquels s’ajoutent le prix de revente du véhicule restitué (12500€), tels qu’ils résultent du décompte des sommes dues et de l’historique du compte fournis par le prêteur, soit 3 258,44 € et à l’exclusion de toute autre somme notamment la clause pénale.

Bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 1231-6 du Code civil, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, le taux d’intérêt étant en principe majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice.

Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] seront solidairement condamnés à payer la somme de 3 258,44 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 08 juin 2022.

Sur les demandes accessoires

En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z], parties perdantes, sont condamnés aux dépens.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société demanderesse les frais irrépétibles exposés par elle pour agir en justice et non compris dans les dépens.

En application de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant au fond, par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts sur le crédit consenti le 29 mai 2020 à Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] ;

CONDAMNE solidairement Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] à payer à la SA DIAC la somme de 3 258,44 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 08 juin 2022 ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum Madame [Y] [H] et Monsieur [I] [Z] aux entiers dépens ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

Le Greffier La Vice-Présidente


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