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Numérisation : 6 septembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/07092

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Numérisation : 6 septembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/07092

N° RG 18/07092 – N° Portalis DBVX-V-B7C-L624

Décision du

Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 17 septembre 2018

RG : 13/07122

ch n°4

Mutuelle MACIF RHONE ALPES

C/

[O]

Société GENERALI IARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 06 Septembre 2022

APPELANTE :

MACIF, société d’assurance mutuelle à cotisations variables

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par la SELARL BISMUTH AVOCATS, avocats au barreau de LYON, toque : T.88

INTIMÉS :

M. [G] [O]

né le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 9] (69)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Arnaud CUCHE, avocat au barreau de LYON, toque : 1325

GENERALI IARD SA

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par la SELARL MANTE SAROLI & COULOMBEAU, avocats au barreau de LYON, toque : 1217

******

Date de clôture de l’instruction : 14 Octobre 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Mai 2022

Date de mise à disposition : 06 Septembre 2022

Audience tenue par Olivier GOURSAUD, président, et Stéphanie LEMOINE, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier

A l’audience, l’un des membres de la Cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

– Olivier GOURSAUD, président

– Laurence VALETTE, conseiller

– Stéphanie LEMOINE, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DE L’AFFAIRE

Le 31 juillet 2009, vers 23 heures, dans la commune de [Localité 8], un accident est survenu impliquant un véhicule Peugeot 306 immatriculé appartenant à M. [L] [M], assuré auprès de la société Macif et conduit par M. [G] [O] et un autre véhicule.

Parmi les personnes présentes à bord du véhicule Peugeot 306, Mmes [E] [B] et [S] [J] sont décédées des suites de cet accident et Mme [P] [Y] a été grièvement blessée.

Par jugement en date du 21 octobre 2011, confirmé par un arrêt de la cour d’appel de Lyon du 11 octobre 2012, le tribunal correctionnel de Lyon a déclaré M. [G] [O] coupable des faits d’homicides involontaires et de blessures involontaires et des infractions connexes de franchissement d’une ligne continue et de conduite d’un véhicule à vitesse excessive.

Par jugement sur intérêts civils en date du 22 novembre 2012, rendu au contradictoire de la société Macif, partie intervenante, le tribunal correctionnel de Lyon a condamné M. [G] [O] à verser la somme de 122.361,73 € aux consorts [B] et celle de 127.262,33 € aux consorts [J].

Par arrêt en date du 16 mars 2017, la cour d’appel de Lyon a fixé le préjudice de Mme [P] [Y] à la somme de 9.357.800,93 € au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel et alloué diverses sommes aux victimes par ricochet.

Par exploit d’huissier en date du 28 mai 2013, la société Macif a fait assigner M. [G] [O] et la société Generali Iard, assureur responsabilité civile de M. [O], devant le tribunal de grande instance de Lyon aux fins de garantie et remboursement des sommes mises à sa charge au titre de l’accident du 31 juillet 2009.

Par jugement du 17 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Lyon a :

– débouté la société Macif de son recours subrogatoire fondé sur l’article L 211-1 du code des assurances à l’encontre de M. [G] [O],

– débouté la société Macif de son recours subrogatoire fondé sur les articles 1251 et 1382 anciens du code civil à l’encontre de M. [G] [O],

– débouté la société Macif de sa demande tendant à voir la société Generali Assurances à la garantir des sommes dont elle réclamait le paiement à M. [G] [O],

– condamné la société Macif à régler à M. [G] [O] et à la société Generali Iard la somme de 1.500 € à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Macif au paiement des dépens,

– dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire ,

– débouté les parties de surplus de leurs autres demandes.

Par déclaration du 10 octobre 2018, la société Macif a interjeté appel de ce jugement.

Par courrier en date du 9 octobre 2020, le conseiller de la mise en état a invité les parties à présenter leurs observations sur l’étendue de la saisine de la cour au regard de la déclaration d’appel mentionnant un appel total sans qu’aucun chef de jugement ne soit énoncé.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 27 avril 2021, la société Macif demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu le 17 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Lyon,

statuant à nouveau,

– débouter M. [O] et la société Generali de leurs argumentations tirées de l’absence d’effet dévolutif de l’appel interjeté par elle,

– la dire et juger bien fondée en son action,

– dire et juger qu’elle dispose d’un recours subrogatoire à l’encontre de M. [O] qui a obtenu la garde et la conduite du véhicule de M. [M] contre son gré,

– dire et juger que la Generali devra être condamnée en sa qualité d’assureur responsabilité civile de M. [O] à le relever en garantie,

– condamner solidairement M. [O] et la Generali à lui verser la somme de 11.132 586,63€ (9.591.708,77 € +1.241.464,21 € + 163.314,21 € + 136.099,44 €) qu’elle a été amenée à verser aux victimes et aux organismes sociaux dans le cadre de l’accident,

– condamner solidairement M. [O] et la Generali à la garantir de toutes les sommes qui serait mises à sa charge au titre de l’indemnisation des préjudices subis par les victimes et leurs ayants droit,

– condamner solidairement M. [O] et la Generali à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

– condamner solidairement M. [O] et la Generali aux entiers dépens et frais d’instance distraits au profit de la selarl Bismuth – société d’avocats sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 14 juin 2021, M. [G] [O] demande à la cour de :

sur l’étendue de la saisine de la cour d’appel de Lyon,

– dire qu’en l’absence de mention des chefs du jugement expressément critiqués sur la déclaration d’appel de la société Macif, la cour n’est pas saisie de l’appel de cette société,

– constater l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel formé par la Macif, la cour n’étant saisie d’aucune demande de la société Macif,

Si la cour d’appel de Lyon s’estimait saisie de demandes de la Macif

confirmant le jugement attaqué,

– dire et juger qu’il n’a pas conduit la voiture de M. [M] contre son gré,

– dire et juger que M. [M] n’a pas exprimé de refus formel de lui confier la conduite de son véhicule,

en conséquence,

– débouter la Macif de l’intégralité de ses demandes et notamment de sa demande en recours subrogatoire,

à titre subsidiaire et si par extraordinaire, le tribunal considérait que la responsabilité de M. [O] était engagée et que la demande de l’assurance Macif était bien fondée,

– dire et juger que la société Generali lui doit sa garantie contractuelle au regard du contrat ‘Tout en un Agricole’,

– dire et juger que la société Generali devra le relever et garantir les conséquences de l’action subrogatoire exercée par la société Macif à son encontre,

– condamner la société Generali à lui payer une somme équivalente à la somme à laquelle il serait condamné à verser à la société Macif au titre de la présente procédure,

en tout état de cause,

– condamner la société Macif, ou à titre subsidiaire la société Generali, à lui verser la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Macif, ou à titre subsidiaire la société Generali, aux entiers dépens de l’instance, distraits au profit de son avocat sur son affirmation de droit.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 30 juillet 2021, la société Generali Iard demande à la cour de :

– constater que la cour n’est saisie d’aucune demande par la déclaration d’appel du 10 octobre 2018 de la Macif qui n’a pas opéré dévolution,

– dire n’y avoir lieu à statuer sur l’appel de la Macif,

– condamner la Macif à lui verser la somme supplémentaire en cause d’appel de 6.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la Macif aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de la selarl Mante Saroli et Coulombeau, représentée par Maître Mante Saroli, avocat sur son affirmation de droit,

subsidiairement,

– confirmer intégralement le jugement rendu le 17 septembre 2018,

– juger que M. [O] n’a pas conduit la voiture de M. [M] contre son gré,

– juger que M. [M] n’a pas exprimé de refus formel de confier la conduite de son véhicule à M. [O],

en conséquence,

– juger que le recours subrogatoire de la Macif ne peut prospérer et débouter la Macif de ses entières demandes,

en tout état de cause,

– juger que sa police d’assurance n’a pas vocation à couvrir les conséquences d’un recours subrogatoire fondé sur l’article L 211-1 alinéa 3 du code des assurances, à l’encontre de son assuré,

– débouter la Macif de ses entières demandes,

subsidiairement et si par extraordinaire la cour devait considérer que la garantie responsabilité civile familiale peut avoir vocation à couvrir les conséquences d’une action visant l’article L 211-1 alinéa 3 du code des assurances,

– juger que l’exclusion de garantie N°6 visée en page 31 des conditions générales du contrat ‘tout en un agricole’ souscrit par M. [O] est applicable à l’espèce,

en conséquence,

– juger qu’elle ne peut garantir les conséquences de l’action subrogatoire exercée par la Macif à l’encontre de M. [O],

– débouter la Macif de ses entières demandes,

– condamner la Macif à lui verser la somme supplémentaire en cause d’appel de 6.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

à titre plus subsidiaire et si par extraordinaire la cour devait accueillir le recours de la société Macif à son encontre,

– juger que la Macif ne justifie pas du paiement effectif de la somme de 11.132.586,63 € dont elle demande le remboursement,

en conséquence,

– juger que la Macif ne justifie pas de sa subrogation légale dans les droits des victimes de l’accident de la circulation du 31 juillet 2009 à hauteur de 11.132.586,63 € et la débouter de toute demande à ce titre,

– juger que seul le paiement de la somme de 578.905,75 € est justifié,

– limiter toute condamnation à son encontre à la somme de 304.898,03 € compte tenu du plafond de garantie expressément mentionné dans les conditions particulières du contrat,

en tout état de cause,

– juger que le contrat d’assurance est opposable à M. [O],

– le débouter de l’ensemble de ses demandes à son encontre,

– condamner la Macif aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de la selarl Mante Saroli et Coulombeau, représentée par Maître Mante Saroli, avocat sur son affirmation de droit.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2021.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. sur la saisine de la cour :

Les parties intimées font valoir que la déclaration d’appel ne comporte pas les chefs du jugement qui sont critiqués mais seulement la mention ‘appel total’ et que par application de l’article 562 du code de procédure civile, l’effet dévolutif n’a pas joué.

Elles s’estiment recevables à se prévaloir de l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel dés lors qu’elles ne soulèvent pas la nullité de la déclaration d’appel mais demandent seulement à la cour de constater qu’elle n’est saisie d’aucune demande et déclarent en outre que :

– l’annexe qui n’est pas la déclaration d’appel ne peut se substituer à cette dernière mais uniquement la compléter en cas d’impossibilité technique et en l’espèce, il n’y avait aucune impossibilité technique de faire figurer les mentions du jugement critiqué dans la déclaration d’appel,

– il n’est d’ailleurs pas mentionné dans la déclaration d’appel l’existence d’une annexe et au demeurant, l’annexe produite par la société Macif comporte moins de 4080 caractères, en l’espèce 2631, de sorte que les chefs du jugement critiqués devaient figurer sur la déclaration d’appel elle même et non pas sur l’annexe.

La société Macif fait valoir en réplique que :

– les parties intimées ont conclu au fond sans que la nullité de la déclaration d’appel n’ait été soulevée liminairement par celles-ci de sorte que la nullité ne peut plus être soulevée,

– en interjetant appel, elle a adressé à la cour en plus du message RPVA, un document intitulé ‘déclaration d’appel’ laquelle contenait à la fois sa position d’appelante et les chefs de jugement critiqués, de sorte que les dispositions de l’article 901 du code de procédure civile ont été respectées,

– le débat sur la saisine de la cour a déjà eu lieu devant le conseiller de la mise en état lequel a décidé de joindre l’incident au fond sans statuer sur une quelconque nullité de la déclaration d’appel.

Sur ce :

L’article 901 du code de procédure civile dans sa version issue du décret du 25 février 2022, dont les dispositions sont applicables aux instances en cours en vertu de l’article 6 du dit décret, dispose que la déclaration d’appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, et à peine de nullité…

4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Par ailleurs, l’article 4 de l’arrêté du 20 mai 2020 tel que résultant de l’arrêté du 25 février 2022 pris en application du décret du même jour, également applicable aux instances en cours, dispose que :

‘lorsqu’un document doit être joint à un acte, ledit acte renvoie expressément à ce document.

«Ce document est communiqué sous la forme d’un fichier séparé du fichier visé à l’article 3. Ce document est un fichier au format PDF, produit soit au moyen d’un dispositif de numérisation par scanner si le document à communiquer est établi sur support papier, soit par enregistrement direct au format PDF au moyen de l’outil informatique utilisé pour créer et conserver le document original sous forme numérique.»

Il ressort de ces dispositions que la déclaration d’appel peut le cas échéant comporter une annexe contenant les mentions exigées par l’article 901 du code de procédure civile notamment les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sous la réserve toutefois que les mentions figurant sur la dite annexe ne contredisent pas celles mentionnées dans le document fichier au format XML (déclaration d’appel) ainsi que rappelé à l’article 3 2ème alinéa de l’arrêté du 20 mai 2020 modifié par l’arrêté du 25 février 2022.

En l’espèce, la déclaration d’appel bien que portant au titre de l’objet de l’appel la mention ‘appel total’ renvoie à des ‘éventuelles annexe en PJ’.

Cette PJ, intitulée déclaration d’appel et transmise dans un document fichier au format PDF vise expressément les dispositions du jugement qui sont critiquées à savoir le rejet de ses prétentions fondées au titre d’un recours subrogatoire, de celle tendant à se faire garantir par la société Generali Iard des sommes dont elle réclamait le paiement à M. [G] [O] et sa condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Cette annexe qui vise l’ensemble des chefs du jugement ne contredit pas la mention portée sur la déclaration d’appel.

Il en résulte que la cour a été valablement saisie par la déclaration d’appel et par le document joint en annexe et il convient de rejeter les demandes des intimés tendant à constater l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel.

2. sur le recours de la société Macif :

La société Macif sollicite le remboursement par M. [O] et son assureur Generali, des sommes qu’elle justifie avoir réglées à ce jour.

Elle fait valoir que :

– en application de l’article L 211-1 alinéa 3ème du code des assurances, elle est en droit d’agir à l’encontre du conducteur du véhicule dés lors qu’il a obtenu la garde du dit véhicule contre le gré du propriétaire,

– en effet, ce dernier lui a prêté le véhicule uniquement sur une distance de 300 mètres séparant le restaurant où les jeunes gens avaient mangé jusqu’à une station service située à proximité puis à nouveau pour avancer le véhicule de quelques mètres afin de permettre à l’autre véhicule de faire le plein mais par la suite, c’est sans son autorisation qu’il s’est servi du véhicule, en voulant faire une blague pour aller cacher le véhicule dans un coin reculé du parking,

– ainsi, l’accord du propriétaire ne valait que pour le trajet entre le fast food et la station service et sur les quelques mètres dans la station service mais il a manifesté de manière formelle et expresse son refus quant à la subtilisation de son véhicule.

A titre subsidiaire, elle soutient que M. [G] [O] a commis une faute détachable de son acte de conduite susceptible de justifier la mise en oeuvre de la garantie responsabilité civile familiale souscrite par son père et déclare que la clause d’exclusion alléguée par la société Generali ne s’applique pas dés lors que la responsabilité de l’assuré est recherchée pour un fait fautif qui doit être considéré comme commis par l’assuré au cours de sa vie privée.

La société Generali Iard fait valoir que :

– M. [M] n’a jamais manifesté de manière expresse et formelle un quelconque refus de confier la conduite de son véhicule à M. [O] et le tribunal en a justement déduit que la condition légale d’une conduite du véhicule contre le gré du propriétaire n’était pas démontrée, de sorte que l’action introduite sur le fondement de l’article L 211-1 alinéa 3ème du code des assurances n’est pas fondée,

– en outre, l’objet de la garantie de la police d’assurances souscrite auprès d’elle ne vise que les conséquences de la responsabilité civile de droit commun de l’assuré, et non pas celles résultant de l’application de l’article L 211-1 alinéa 3ème du code des assurances,

– par ailleurs, la police d’assurances exclut de la garantie responsabilité civile familiale les dommages résultant de l’utilisation ou de la détention des véhicules à moteur dont l’assuré ou toute personne dont il est responsable a la garde et en l’espèce, l’accident est intervenu en raison de faits fautifs intervenus au cours de l’acte de conduite,

– la société Macif ne justifie pas en outre du paiement effectif des sommes réclamées et les conditions de la subrogation légale ne sont pas réunies,

– elle est fondée enfin à opposer le plafond de garantie stipulé au contrat, soit 304.898,03 €.

M. [G] [O] déclare que :

– la société Macif ne peut fonder son recours à la fois sur les dispositions de l’article L 211-1 du code des assurances et mettre en cause sa responsabilité personnelle au titre d’un fait fautif détachable de l’acte de conduite, les dispositions du code des assurances étant exclusives de celles de l’article 1382 du code civil,

– M. [M], propriétaire du véhicule, n’a jamais manifesté de manière expresse et formelle un quelconque refus de lui en confier la conduite,

– il lui a en effet prêté à plusieurs reprises son véhicule par le passé et le jour même des faits et ne lui a pas fait injonction de s’arrêter immédiatement afin de lui rendre le véhicule, lui demandant au contraire de retourner rechercher son sac qu’il avait laissé sur le toit de la voiture,

– à titre subsidiaire, il est fondé à solliciter la garantie de la société Generali Iard auprès de laquelle son père a souscrit une garantie ‘responsabilité civile familiale’,

– la société Generali Iard ne démontre pas que les conditions générales qu’elle invoque lui soient opposables et qu’elles aient été remises à son père,

– la clause d’exclusion de la garantie invoquée par la société Generali Iard ne s’applique pas et aucun plafond d’indemnisation ne peut lui être opposé au regard des dispositions de l’article R 211-7 du code des assurances.

Sur ce :

L’article L 211-1 3ème alinéa du code des assurances dispose que l’assureur est subrogé dans les droits que possède le créancier de l’indemnité contre la personne responsable de l’accident lorsque la garde ou la conduite du véhicule a été obtenue contre le gré du propriétaire.

Il est constant que ce recours de l’assureur contre le conducteur responsable ne peut être exercé que sur le fondement de l’article L 211-1 alinéa du code des assurances à l’exclusion du droit commun.

Ce recours subrogatoire est subordonné à la preuve qui incombe à l’assureur que le propriétaire a exprimé un refus formel de confier la garde ou la conduite de son véhicule à un tiers non autorisé.

Par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a retenu que l’exigence légale de conduite contre le gré du propriétaire excluait la situation d’une conduite obtenue sans l’autorisation du propriétaire du véhicule impliqué et imposait au contraire que ce propriétaire ait posé une interdiction formelle à la conduite de son véhicule par un tiers.

En l’espèce, il est constant que l’accident s’est produit alors que [G] [O] conduisait le véhicule de son ami [L] [M].

Il ressort de l’audition de plusieurs jeunes entendus lors de l’enquête qu’après avoir mangé dans un restaurant Mac’Donald, [G] [O], avec l’accord de [L] [M], a emprunté son véhicule Peugeot 306 et s’est rendu dans une station service située à proximité, les trois jeunes filles, victimes de l’accident qui allait survenir quelques minutes plus tard, se trouvant à l’arrière.

[F] [X] fait état d’une blague lors du départ de la station service et déclare en effet qu’après que [L] ait fait le plein des deux véhicules, [G] a démarré avec le véhicule 306, qu’ils sont allés se cacher au fond du parking afin de faire croire à [L] qu’ils l’avaient laissé et que [L] les a appelés pour leur demander s’ils avaient pris son sac qui se trouvait sur sa voiture.

[G] [O] confirme cette déclaration et avoir fait une blague à [L] en allant se stationner un peu plus loin dans un coin sombre pour se cacher.

[L] [M] déclare de son côté qu’en sortant du Mac Donald, [G] [O] a souhaité conduire sa voiture et qu’il lui a laissé les clés, qu’une fois arrivés à la station service, il a fait le plein du véhicule, qu’après que deux des véhicules, dont le sien toujours conduit par [G] [O], aient quitté la station service, il est monté avec un autre camarade dans la clio de ce dernier, qu’après avoir circulé pendant 5 à 6 km, il s’est rendu compte qu’il avait oublié son sac sur le toit de la 306, qu’il a alors appelé [P] [Y] qui se trouvait dans son véhicule 306 pour lui demander s’il l’avait pris et qu’à la suite de sa réponse négative, celle-ci lui a dit qu’ils allaient faire demi-tour pour le chercher.

Il ressort de ces déclarations ainsi que du rapport d’enquête que la société Macif a fait diligenter par un enquêteur privé que :

– [L] [M] avait déjà prêté occasionnellement son véhicule à [G] [O],

– le jour des faits, il a accepté qu’il conduise son véhicule jusqu’à la station service,

– une fois le plein du véhicule fait, les occupants du véhicule toujours conduit par [G] [O], pour faire une blague à leur camarade, se sont cachés dans un coin sombre au fond du parking avant de repartir,

– [L] [M] les a ensuite appelés sur son portable afin de savoir s’ils avaient son sac à dos et a fait dire à [G] de conduire doucement (rapport d’enquête Macif page 4).

S’il est constant ainsi qu’après l’épisode de la station de service, M. [M] n’a pas autorisé son camarade [G] [O] à conduire son véhicule, il ne peut pour autant en être déduit qu’il lui ait expressément, voire même implicitement, fait interdiction de le reprendre et l’acceptation de lui prêter le véhicule dans les minutes qui ont précédé cet épisode et l’appel téléphonique qu’il a eu avec une des occupantes du véhicule pour demander s’ils avaient son sac et inciter M. [O] à conduire doucement démontrent à l’évidence le contraire.

Le premier juge a en a donc justement déduit que la condition légale d’une conduite d’un véhicule contre le gré du propriétaire n’était pas démontrée par la société Macif.

Il convient pour le surplus de rappeler que le recours de l’assureur du véhicule impliqué contre le conducteur responsable du dit véhicule a pour fondement exclusif les dispositions de l’article L 211-1 alinéa 3ème du code des assurances.

La société Macif n’est donc pas fondée à rechercher à titre subsidiaire la garantie de M. [G] [O] sur le fondement d’une faute qui serait détachable de son acte de conduite et de son assureur en responsabilité civile.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté la société Macif de l’ensemble de ces demandes.

3. sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Le jugement est également confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

La cour estime que l’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit des parties intimées en cause d’appel et leur alloue à chacune la somme de 3.000 €.

Les dépens d’appel sont à la charge de la société Macif qui succombe en sa tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Dit que la cour est valablement saisie,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Condamne la société Macif à payer à M. [G] [O] et à la société Generali Iard la somme de 3.000 € à chacun d’entre eux en cause d’appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Macif aux dépens d’appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

 


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