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Numérisation : 14 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/01101

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Numérisation : 14 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/01101

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 14 NOVEMBRE 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01101 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG6EJ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Décembre 2022 rendue par le Président du TJ de PARIS – RG n° 22/54399

APPELANTE

Société RESOURCE GROUP HOLDING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

MH96 REPULIQUE DES ILES MARSHALL

Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334 et assistée par Me Jean Philippe ALVES, avocat au barreau des Hauts de Seine

INTIMES

M. [S] [A]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Assisté par Me Martin DONATO de l’AARPI VIGUIE SCHMIDT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0564

S.A. BRED BANQUE POPULAIRE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assistée par Me Fanny DESCLOZEAUX de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

PARTIES INTERVENANTES

Société RESOURCE GROUP HOLDING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

MH96 REPUBLIQUE DES ILES MARSHALL

Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334 et assistée par Me Jean Philippe ALVES, avocat au barreau des Hauts de Seine

S.A. BRED BANQUE POPULAIRE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Assistée par Me Fanny DESCLOZEAUX de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 Octobre 2023, en audience publique, rapport ayant été fait par Valérie GEORGET, Conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du Code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre

Patricia LEFEVRE, Conseillère

Valérie GEORGET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Stefanie VERSTRAETEN

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière présente lors du prononcé.

*****

Par acte daté du 15 juillet 2021, M. [A] a signé un contrat d’investissement avec la société Resource Group Holding Limited, portant sur une somme de 450 000 000 d’euros, en contrepartie d’une rémunération comprise entre 3, 5 % et 4, 5 % l’an ou au taux en vigueur dans le pays de l’investisseur.

M. [A] a émis deux chèques, l’un d’un montant de 350 000 0000 d’euros daté du 3 août 2021, l’autre d’un montant de 100 000 000 d’euros portant le numéro 9245930, daté du 17 août 2021, tiré auprès de la Bred banque populaire à l’ordre de la société Resource Group Holding Limited.

Le 19 octobre 2021, la société Resource Group Holding Limited a présenté le chèque de 100 000 000 d’euros à l’encaissement. Celui-ci a été rejeté par la banque, le 22 octobre 2021, pour le motif ‘opposition pour perte’.

Le 3 février 2022, la société Resource Group Holding a vainement mis en demeure M. [A] de procéder à la mainlevée de l’opposition.

Par acte d’huissier de justice du 30 mai 2022, la société Resource Group Holding Limited a fait assigner M. [A] et la société Bred banque populaire devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :

ordonner la mainlevée de l’opposition du chèque de 100 000 000 d’euros émis le 17 août 2021 ;

ordonner à la société Bred banque populaire d’immobiliser la provision d’un montant de 100 000 000 d’euros sur les comptes de M. [A].

Par ordonnance contradictoire du 14 décembre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de mainlevée d’opposition du chèque n° 9245930 d’un montant de 100 000 000 d’euros établi par M. [A], tiré sur la société Bred banque populaire et sur la demande d’immobilisation de la provision subséquente;

condamné la société Resource Group Holding Limited aux dépens ;

condamné la société Resource Group Holding Limited à payer à la société Bred banque populaire la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Resource Group Holding Limited à payer à M. [A] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

dit n’y avoir lieu à référé sur toute autre demande ;

rappelé que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration du 7 février 2023, la société Resource Group Holding Limited a relevé appel de l’ensemble des chefs de dispositif de l’ordonnance entreprise.

Par ses dernières conclusions remises et notifiées le 3 octobre 2023, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens développés, la société Resource Group Holding Limited demande à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,

en conséquence,

infirmer l’ordonnance du 14 décembre 2022 en ce qu’elle a :

dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de mainlevée d’opposition du chèque n° 9245930 d’un montant de 100 millions d’euros établi par M. [A], tiré sur la société Bred banque populaire et sur la demande d’immobilisation de la provision subséquente ;

condamné la société Resource Group Holding Limited aux dépens ;

condamné la société Resource Group Holding Limited à payer à la société Bred Banque populaire la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Resource Group Holding Limited à payer à M. [A] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

statuant de nouveau,

déclarer que les motifs d’opposition, pour vol et man’uvres frauduleuses, allégués par M. [A], ne sont pas démontrés ;

ordonner la mainlevée de l’opposition du chèque n°9245930, d’un montant de 100 000 000 euros émis le 17 août 2021 et tiré auprès de la Bred banque populaire ;

ordonner à la banque Bred banque populaire d’immobiliser la provision correspondant au chèque n° 9245930, d’un montant de 100 000 000 euros émis le 17 août 2021 dans l’attente de la décision à intervenir sur la mainlevée de l’opposition ;

débouter les parties de l’ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires ;

condamner M. [A] à payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions remises et notifiées le 4 octobre 2023, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [A] demande à la cour de :

confirmer l’ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions :

« Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de mainlevée d’opposition du chèque n°9245930 d’un montant de 100 millions d’euros établi par M. [S] [A], tiré sur la société Bred-Banque Populaire et sur la demande d’immobilisation de la provision subséquente ;

Condamnons la société Resource Group Holding Limited aux dépens ;

Condamnons la société Resource Group Holding Limited à payer à la société Bred Banque Populaire la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la société Resource Group Holding Limited à payer à M. [S] [A] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur toute autre demande »,

Y ajoutant,

débouter la société Resource Group Holding Limited de l’ensemble de ses demandes, fins ou conclusions à son encontre ;

condamner la société Resource Group Holding Limited à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de ses frais irrépétibles en appel ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

Par ses dernières conclusions remises et notifiées le 4 juillet 2023, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens développés, la société Bred banque populaire demande de :

juger qu’elle s’en rapporte à justice s’agissant de la demande de mainlevée du chèque litigieux de la société Resource Group Holding Limited ;

juger que le solde du compte bancaire n° [XXXXXXXXXX01] de M. [A] ne lui permet pas la provision correspondant au chèque litigieux ;

condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2023.

SUR CE,

Aux termes de l’article L. 131-35 du code monétaire et financier il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit. Tout banquier doit informer par écrit les titulaires de compte des sanctions encourues en cas d’opposition fondée sur une autre cause que celles prévues au présent article. Si, malgré cette défense, le tireur fait une opposition pour d’autres causes, le juge des référés, même dans le cas où une instance au principal est engagée, doit, sur la demande du porteur, ordonner la mainlevée de l’opposition.

Au cas présent, la société Resource Group Holding Limited demande la mainlevée de l’opposition à paiement émise par M. [A] au titre d’un chèque portant le n° 9245930 tiré sur son compte personnel d’un montant de 100 000 000 d’euros.

Par courrier adressé à sa banque le 26 juin 2021, M. [A] a en effet formé opposition au paiement de cinq chèques, dont le chèque litigieux, pour vol. Dans le cadre de la présente procédure, M. [A] expose que, en réalité, le motif de l’opposition n’est pas le vol mais l’existence de manoeuvres frauduleuses.

Contrairement à ce soutient la société Resource Group Holding Limited, l’auteur de l’opposition à paiement est en droit de soutenir que cette opposition a un motif différent de celui indiqué initialement à la banque à charge pour lui de démontrer que la cause invoquée est prévue par le texte susvisé.

La société Resource Group Holding Limited, immatriculée dans la République des Iles Marshall et dirigée par M. [Y], se présente comme opérant des investissements et des levées de fonds dans le secteur des nouvelles technologies pour le compte de la société Resource Group.

M. [A] indique, quant à lui, être retraité après avoir été dirigeant d’entreprises notamment de la banque ARJIL.

M. [A] prétend s’être laissé convaincre par un interlocuteur, tiers au présent litige, se nommant M. [P] [C] qui se serait présenté comme un proche du dirigeant d’un groupe de renommée avec lequel M. [A] espérait entretenir des relations d’affaires. Cet individu lui aurait assuré que le chèque litigieux, qui ne serait pas encaissé, avait pour seul objet d’afficher ses capacités financières et de rassurer ses interlocuteurs.

La société Resource Group Holding Limited conteste cette version des faits et affirme que M. [A] a librement remis le chèque litigieux en exécution d’un contrat d’investissement régulièrement établi.

S’agissant, tout d’abord de l’intervention de M. [C], interrogé par courriel par M. [A], M. [E], vice-président de la banque suisse EFG, lui répondait dans un courriel du 22 septembre 2022 (pièce n° 10 de l’intimé) que ‘ En effet, fin de printemps, début d’été 2021, tu m’avais dit être en négociation avec un certain [H]/[P] [R]/[M] dans le cadre d’un consulting que tu voulais faire aboutir avec lui et sa famille. Le détail du deal que tu voulais faire avec eux m’est inconnu et mes souvenirs remontent à plus d’une année. Le dénommé J [C] n’a cessé de me joindre par téléphone durant l’été 2021 pour me dire qu’il voulait devenir client de la banque car une succession au sein de sa famille allait lui permettre de toucher une importante somme qu’il voulait déposer sur un compte personnel à ouvrir chez EFG Bank AG. Il insistait pour se faire appeler également [N] [Z] ce que j’ai trouvé très étrange et mis sur la réserve. Tu m’avais indiqué l’avoir rencontré plusieurs fois chez lui à [Localité 7], il promettait des visites à Genève qu’il n’a jamais honorées. Cela m’a rendu assez circonspect si bien que j’ai demandé qu’il m’envoie une copie de son passeport. Tout d’abord il m’a envoyé une copie de passeport (Sierra Leone si je me souviens) d’un tiers qui n’avait rien à voir avec lui puis ensuite un passeport du Koweit mais visiblement son nom avait été ajouté maladroitement via Photoshop ou équivalent. On devait être en octobre/novembre. Pour [Y]/Resource Group toi et ‘[N] [R]’ en ont fait référence mais je ne l’ai jamais rencontré ni à Genève ni ailleurs. J’ignore qui il est et ce que fait cette boîte et si elle existe car [O] semble être un mythomane pathologique.’

Ensuite, concernant le contrat d’investissement conclu entre les parties, M. [A] ne dénie pas avoir signé ce document sous seing privé (version du contrat en anglais, signée par les deux parties, pièce n° 17-1 de la société Resource Group Holding Limited ; version en français, traduction libre non contestée, pièce n° 17-2 de la société Resource Group Holding Limited).

Ce contrat prévoit, notamment, que :

– M. [A] souhaite engager la société Resource Group Holding Limited et investir avec celle-ci une partie de sa fortune afin qu’elle procède à un investissement et un désinvestissement appropriés de cette fortune ainsi que son réinvestissement dans ‘différentes opportunités commerciales dans le but de générer un retour sur investissement’;

-la société Resource Group Holding Limited a accepté d’investir avec et par l’intermédiaire de M. [A] à concurrence d’un montant total de 450 000 000 d’euros ;

– une partie de l’investissement sera utilisée dans tout/et ou partie des opportunités commerciales suivantes :

une cimenterie en Ethiopie, qui desservira a priori le marché éthiopien en premier lieu puis le marché de l’Afrique de l’Est pour s’étendre enfin à toute l’Afrique au moyen d’une ou de plusieurs usines, en fonction de l’étude de marché et de faisabilité qui doit être réalisée en bonne et due forme ;

des services mobiles à valeur ajoutée pour les opérateurs de télécommunications en Afrique, en commençant par des solutions développées pour l’Ethiopie, la République démocratique du Congo, le Royaume d’Arabie saoudite et les Emirats Arabes Unis où la société Resource Group Holding Limited mène actuellement des discussions avec les parties concernées pour la mise en oeuvre de ces services ;

des opérations de numérisation et des contrôles d’évaluation en Angola : le projet porte sur la mise à disposition de la technologie, la formation, l’assistance et le savoir-faire pour déployer, exploiter et entretenir les installations pertinentes dans le respect des meilleures pratiques internationales.

L’article 5 intitulé ‘décaissement de l’investissement’ stipule que M. [A] a déclaré et confirmé que le montant total de l’investissement sera dûment transféré sur le compte bancaire désigné de la société Resource Group Holding Limited ou sur le compte bancaire de l’entité cédée ou payé par chèque à cette société ou à l’entité cédée conformément à la présente clause 5.1. dans les délais suivants :

– 350 000 000 d’euros à payer par virement ou par chèque au plus tard le 3 août 2021 ;

– 100 000 000 d’euros à payer par virement ou par chèque au plus tard le 17 août 2021.

Il convient tout d’abord de souligner le caractère tout à la fois curieusement diversifié et imprécis de la nature des obligations de la société Resource Group Holding Limited au regard de celles de M. [A] qui, nonobstant sa solide expérience dans le secteur financier, d’une part, investit, à titre personnel, la somme très importante de 450 000 000 d’euros, d’autre part, s’engage à payer cette somme dans un délai très contraint après la signature du contrat.

Par ailleurs, force est de constater que les pièces versées aux débats n’établissent pas que les parties ont négocié les termes du contrat d’investissement. La société Resource Group Holding Limited affirme que son président, M. [Y], a rencontré M. [A] au cours de l’hiver 2020-2021 à [Localité 7]. Ces rencontres ne sont toutefois pas démontrées, étant observé, ainsi qu’il sera développé ci-après, qu’au cours de l’automne 2020 l’intimé a été hospitalisé pendant trois semaines. De plus, les projets de contrat produits par l’appelante (ses pièces n° 16-1 à 16-4), que M. [A] indique découvrir à l’occasion de la présente instance, ne portent trace d’aucune date et ne sont accompagnés d’aucune preuve d’une transmission numérique ou par courrier entre les parties.

L’intervention d’un notaire le 27 juillet 2021 ne saurait atténuer l’incongruité des termes de ce contrat sous seing privé dès lors que le rôle de cet officier ministériel s’est limité à l’authentification de la signature apposée par M. [A].

Celui-ci a, d’ailleurs, introduit une action en annulation de ce contrat d’investissement (sa pièce n° 2).

En outre, si le chèque litigieux mentionne la date du 17 août 2021 (photographie du chèque pièce n° 23 de l’appelante), M. [A] indique qu’il a été émis dès le mois de mars 2021 ce qui est étayé par la date de l’opposition à paiement du 26 juin 2021.

Il sera ajouté qu’aucune des pièces versées aux débats ne permet de déterminer les conditions dans lesquelles ce chèque a été effectivement remis à l’appelante.

Il se déduit de l’ensemble des motifs qui précèdent que le chèque en cause a été remis dans un contexte frauduleux. L’envoi d’une lettre de référence à la société Resource Group Holding Limited par la banque suisse de M. [A] le 5 août 2021 (pièce n° 21 de l’appelante) ou les contacts entre M. [A] et M. [Y] ou un proche de l’appelante pendant l’automne 2021 (pièces n° 24 et 29 de l’appelante) sont insuffisants pour apporter la preuve contraire.

Cette conclusion est confortée par l’état de santé défaillant de M. [A], âgé de 80 ans au moment des faits. Celui-ci verse la lettre de liaison de l’hôpital américain du 4 novembre 2020 indiquant que, atteint d’une forme grave du Covid 19, il a été hospitalisé du 19 octobre 2020 au 4 novembre 2020 ‘pour pneumonie Covid + avec atteinte étendue à la TDM. Atteinte neurologique associée avec encéphalopathie, explorée par le Pr Alla par 2 EEG montrant une encéphalopathie métabolique sans foyer épileptogène. Evolution favorable’ (sa pièce n°5). Le Dr [F], spécialisé en médecine interne, certifie le 22 mars 2021 (pièce n° 6 de l’intimé) que l’état de santé de M. [A] ne lui permet pas d’exercer une activité professionnelle pour une durée de trois mois. Le Dr [I], médecin psychiatre, atteste, pour sa part, le 2 septembre 2022 (pièce n° 7 de l’intimé), que M. [A] l’a sollicité au mois de juillet 2022, qu’après l’infection par le Covid-19, il a pu reprendre progressivement ses activités, avec quelques séquelles, dont une perturbation du contrôle des impulsions, une amnésie des noms propres et des troubles neurocognitifs à type de ralentissement psychique, de manque de clarté de la pensée, de difficultés attentionnelles et de difficultés de planification. Ce médecin ajoute que ‘on ne met pas en évidence aujourd’hui de trouble cognitif patent mais il persiste une anomie des noms propres, une légère dysphorie et une perturbation du contrôle pulsionnel.’

M. [A] produit, en outre, l’attestation de M. [G], datée du 30 septembre 2022, qui indique assister M. [A] dans ‘un cadre administratif et financier dans la clôture des sociétés dont il est président et qui n’ont plus d’activité depuis plusieurs années.’ Il fait état des troubles de la mémoire de M. [A] et d’une pensée parfois confuse (pièce n° 8 de l’intimé). Mme [A], épouse de l’intimé, affirme, le 30 septembre 2022, que son époux a ‘très souvent, […] du mal à se rappeler où il a déposé les clefs de son véhicule ou à se souvenir de l’emplacement où il l’avait stationné la veille. Etant impliqué dans le suivi quotidien des procédures des sociétés dont il est le président et qui durent depuis plusieurs années, j’ai constaté une confusion entre les affaires et les sociétés impliquées. Il a du mal à discerner et à prioriser les dossiers.’

Ces éléments médicaux et les attestations de M. [G] et de Mme [A] établissent les difficultés psychiques, la pensée confuse et les troubles de l’attention dont souffre M. [A] en lien, notamment, avec les conséquences d’une forme sévère de l’infection au Covid 19 au cours de l’hiver 2020-2021.

Il sera enfin observé que M. [A] a déposé plainte avec constitution de partie civile le 9 septembre 2022 devant le doyen des juges d’instruction des chefs d’escroquerie et d’abus de confiance pour les faits relatifs au chèque litigieux.

Ainsi que retenu par le premier juge, de telles manoeuvres frauduleuses constituent l’une des causes d’opposition à paiement prévues par l’article L. 131-35 du code monétaire et financier.

En revanche, il convient, non pas de dire n’y avoir lieu à référé, mais de rejeter la demande de mainlevée de l’opposition à paiement ainsi que la demande subséquente tendant à voir ordonner à la banque Bred banque populaire d’immobiliser la provision correspondant au chèque n° 9245930, d’un montant de 100 000 000 d’euros émis le 17 août 2021 dans l’attente de la décision à intervenir sur la mainlevée de l’opposition. L’ordonnance sera infirmée en ce sens.

Eu égard à l’issue du litige, les dispositions de l’ordonnance relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

La société Resource Group Holding Limited, qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement de la somme de 5 000 euros à M. [A] et de celle de 2 000 euros à la Bred banque populaire sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise sauf en ce qu’elle dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de mainlevée d’opposition du chèque n°9245930 d’un montant de 100 000 000 d’euros établi par M. [A], tiré sur la société Bred banque populaire et sur la demande d’immobilisation de la provision subséquente ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Rejette la demande de mainlevée d’opposition du chèque n°9245930 d’un montant de 100 000 000 d’euros établi par M. [A], tiré sur la société Bred banque populaire, et la demande d’immobilisation de la provision subséquente ;

Condamne la société Ressource Group Holding Limited aux dépens ;

Condamne la société Ressource Group Holding Limited à payer à M. [A] la somme de 5 000 euros et à la société Bred banque populaire la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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