Your cart is currently empty!
Il résulte des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation qu’un contrat de vente ou de fourniture d’un bien ou de services conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles et le prix du bien ou du service.
Cette nullité est encourue indépendamment de tout dol. En l’espèce, le bon de commande précise bien le prix global de l’installation, ce qui est suffisant dès lors qu’aucun texte n’exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien offert ou du service proposé (1re Civ., 2 juin 2021, pourvoi n° 19-22.607). Cependant, en ce qui concerne les caractéristiques du bien et du service, le bon indique, dans sa partie relative à la « DÉSIGNATION du Pack Photovoltaïque et/ou autres produits ou services », « 1 Led Relamping » et « 1 Pack GSE 16 + Aerovoltaïque », sans autre précision. De plus, comme le premier juge l’a justement relevé, le bon de commande ne permet pas davantage de connaître la destination de l’énergie électrique devant être produite, caractéristique pourtant elle aussi essentielle de l’installation, ni de déterminer à quoi correspond le kit GSE Intégration, lequel, comme tout kit, est nécessairement composé de différents éléments. À cet égard, ni la plaquette commerciale produite par Mme [D], ni le fait que cette dernière ait reconnu, en signant le bon de commande, « avoir pris connaissance des Conditions Générales de Vente [‘] et de toutes les informations relatives aux produits », ne peuvent pallier l’insuffisance du contrat, lequel, selon les dispositions précitées, doit indiquer lui-même, à peine de nullité, les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Dans ces conditions, c’est à bon droit que le premier juge a considéré que la nullité du contrat principal était encourue. |
→ Résumé de l’affaireMme [D] a passé commande d’une offre de panneaux photovoltaïques auprès de la société Azur Solution Énergie et a souscrit un crédit auprès de la société Franfinance pour financer cette opération. Suite à des litiges, Mme [D] a demandé l’annulation des contrats et a obtenu gain de cause en première instance. La banque a fait appel de cette décision. La société a été placée en liquidation judiciaire, et le liquidateur judiciaire a été mis en cause. Les parties ont formulé des demandes de réformation du jugement et de condamnation. La banque demande notamment la restitution du capital du crédit, tandis que Mme [D] demande des dommages-intérêts et la prise en charge des frais de dépose et de remise en état du matériel par la société en liquidation judiciaire. La cour devra statuer sur ces différentes demandes.
|
→ Les points essentielsSur la recevabilité des prétentions de la banque et ses conséquencesMme [D] conteste les prétentions ajoutées par la banque dans ses conclusions du 4 mai 2023, les jugeant irrecevables en vertu de l’article 910-4 du code de procédure civile. La cour confirme l’irrecevabilité de ces prétentions ajoutées tardivement par la banque. Sur la demande d’annulation du contrat principal et ses conséquencesMme [D] conteste la validité du contrat principal, arguant du manque de précision dans sa description et de l’absence de mention du prix global. La cour confirme la nullité du contrat principal en raison de ces irrégularités. Sur la demande d’annulation du contrat de crédit et ses conséquencesLa banque soutient que Mme [D] a commis des fautes dans l’exécution du contrat de crédit, mais la cour reconnaît que la banque a également commis des fautes en débloquant les fonds prématurément et en ne vérifiant pas la conformité du contrat principal. La banque est condamnée à restituer une partie du capital prêté à Mme [D]. Sur les frais du procèsLes dispositions du jugement sur les dépens, les frais irrépétibles et les droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement sont confirmées. La banque est condamnée aux dépens de la procédure d’appel. Les montants alloués dans cette affaire: – La société Franfinance est condamnée à verser à Mme [N] [D] la somme de 2 800 euros
– La société Franfinance est condamnée à restituer à Mme [N] [D] la somme de 27 423,75 euros – La société Franfinance est condamnée à rembourser à Mme [N] [D] la somme de 9 383,12 euros – La société Franfinance est condamnée aux dépens de la procédure d’appel |
→ Réglementation applicable– Code de commerce
– Code de procédure civile – Code civil – Code de la consommation Article du Code de commerce cité: Article du Code de procédure civile cité: Article du Code civil cité: Article du Code de la consommation cité: Article L. 121-17 du code de la consommation: Article L. 121-18-1 du code de la consommation: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Christophe RIHET de la SCP LBR
– Me Aude POILANE – Me Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS – Me Cécile HUNAULT CHEDRU – Me [Z] [V] |
→ Mots clefs associés & définitions– Code de la consommation
– Liquidation judiciaire – Contrats litigieux – Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 – Article L. 622-22 du code de commerce – Recevabilité des prétentions – Irrecevabilité des conclusions – Nullité du contrat principal – Caractéristiques du matériel vendu – Prix global du contrat – Confirmation tacite d’un acte nul – Préjudice lié à la nullité du contrat – Contrat de crédit affecté – Faute de la banque – Préjudice subi par l’emprunteur – Restitution du capital prêté – Frais du procès – Dépens de la procédure d’appel – Code de la consommation: Ensemble des lois et règlements qui régissent les relations entre les consommateurs et les professionnels.
– Liquidation judiciaire: Procédure judiciaire qui consiste à vendre les actifs d’une entreprise en faillite pour rembourser ses créanciers. – Contrats litigieux: Contrats sur lesquels il existe un litige entre les parties concernant leur validité ou leur exécution. – Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016: Texte législatif qui a modifié certaines dispositions du code de la consommation. – Article L. 622-22 du code de commerce: Article du code de commerce qui traite de la procédure de liquidation judiciaire. – Recevabilité des prétentions: Possibilité pour une partie de faire valoir ses prétentions devant un tribunal. – Irrecevabilité des conclusions: Situation dans laquelle les conclusions d’une partie ne peuvent pas être prises en compte par le tribunal. – Nullité du contrat principal: Annulation d’un contrat en raison d’un vice de consentement, d’un vice de forme ou d’une cause illicite. – Caractéristiques du matériel vendu: Description des caractéristiques techniques et fonctionnelles du matériel vendu. – Prix global du contrat: Montant total à payer pour l’exécution du contrat. – Confirmation tacite d’un acte nul: Reconnaissance implicite de la validité d’un acte nul par une partie. – Préjudice lié à la nullité du contrat: Dommages subis par une partie en raison de l’annulation du contrat. – Contrat de crédit affecté: Contrat de crédit lié à l’achat d’un bien ou d’un service spécifique. – Faute de la banque: Manquement de la banque à ses obligations contractuelles ou légales. – Préjudice subi par l’emprunteur: Dommages subis par l’emprunteur en raison de la faute de la banque. – Restitution du capital prêté: Obligation pour l’emprunteur de rembourser le capital prêté par la banque. – Frais du procès: Dépenses engagées pour mener un procès devant les tribunaux. – Dépens de la procédure d’appel: Frais engagés pour faire appel d’une décision de justice. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
YW/CG
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 21/01619 – N° Portalis DBVP-V-B7F-E3OP
jugement du 08 Juin 2021
Juge des contentieux de la protection d’ANGERS
n° d’inscription au RG de première instance 11-18-0015
ARRET DU 05 MARS 2024
APPELANTE :
S.A. FRANFINANCE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Christophe RIHET de la SCP LBR, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 21/1619
INTIMEES :
Madame [N] [D]
née le 26 Septembre 1948 à [Localité 4] (49)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Aude POILANE, avocat au barreau d’ANGERS
S.A.S.U. AZUR SOLUTION ENERGIE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Inès RUBINEL de la SELARL LX RENNES-ANGERS, avocat postulant au barreau d’ANGERS et par Me Cécile HUNAULT CHEDRU, avocat plaidant au barreau de ROUEN
INTIMEE INTERVENANTE FORCEE :
S.E.L.A.R.L. ATHENA prise en la personne de Me [Z] [V] en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Sté AZUR SOLUTION ENERGIE
[Adresse 2]
[Localité 4]
N’ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 22 Mai 2023 à 14H00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. WOLFF, Conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
M. WOLFF, conseiller
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
Greffière lors du prononcé : Mme GNAKALE
ARRET : réputé contradictoire
Prononcé publiquement le 05 mars 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Yoann WOLFF, conseiller, pour la présidente empêchée et par Flora GNAKALE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par contrat conclu hors établissement le 2 mars 2015 (le contrat principal), Mme [N] [D] a passé commande auprès de la société Azur Solution Énergie, société par actions simplifiée (la société), d’une offre « PACK “GSE 16” » et « GSE AIR’SYSTEM », comprenant notamment 16 panneaux photovoltaïques, pour un montant total de 27 800 euros TTC.
Le même jour, Mme [D] a souscrit auprès de la société Franfinance, société anonyme (la banque), un crédit affecté à cette opération (le contrat de crédit), d’un montant de 27 800 euros également et au taux débiteur de 5,80 %, remboursable en 144 mensualités d’un montant, hors assurance, de 20 euros pour les neuf premières, de 95 euros pour les 12 suivantes, et de 319,70 euros pour les 123 dernières.
Par actes d’huissier de justice des 13 et 14 août 2018, Mme [D] a fait assigner la société et la banque devant le tribunal d’instance d’Angers, aux fins notamment d’annulation du contrat principal et du contrat de crédit.
Par jugement du 4 décembre 2018, le tribunal a ordonné la suspension du crédit dans l’attente de la décision au fond.
Puis, par jugement du 8 juin 2021 assorti de l’exécution provisoire, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Angers, prenant la suite du tribunal d’instance, a :
Prononcé la nullité des contrats ;
Fixé la créance indemnitaire de Mme [D] à l’encontre de la banque à la somme de 23 000 euros ;
Fixé la créance de la banque à l’encontre de Mme [D] à la somme de 18 416,88 euros ;
Ordonné la compensation de ces sommes ;
Condamné en conséquence la banque à verser à Mme [D] la somme de 4 583,12 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
Condamné la société à restituer à Mme [D] la somme de 27 800 euros ;
Condamné la société à venir récupérer à ses frais le matériel posé au domicile de Mme [D] et à remettre les lieux dans leur état antérieur, en justifiant préalablement d’une assurance décennale applicable aux travaux de couverture, et ce, dans le délai de deux mois suivant la signification du jugement et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant six mois ;
Rejeté la demande tendant à ce que le juge des contentieux de la protection se réserve la liquidation de l’astreinte ;
Condamné la société à garantir la banque de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre ;
Condamné la banque à verser à Mme [D] la somme de 2 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejeté les demandes faites par la société et la banque sur ce fondement ;
Mis à la charge de la banque l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement qui seront éventuellement engagés dans les conditions de l’article R. 631-4 du code de la consommation ;
Condamné la banque aux dépens.
Par déclaration du 13 juillet 2021 intimant les deux autres parties, la banque a relevé appel de l’intégralité des chefs de ce jugement, y compris ceux prononcés à son bénéfice ou concernant la société.
Le 31 mars 2022, la société a notifié par voie électronique à Mme [D] et à la banque qu’elle avait été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Angers du 2 février 2022. La banque a alors mis en cause le liquidateur judiciaire, la société Athena, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, prise en la personne de Me [Z] [V], et ce, par acte huissier de justice du 16 novembre 2022. La société Athena n’a néanmoins pas constitué avocat.
La clôture de l’instruction est ensuite intervenue le 22 mai 2023.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 mai 2023 et signifiées à la société Athena par acte d’huissier de justice du 9 mai 2023, la banque demande à la cour :
De réformer le jugement en toutes ses dispositions ;
De rejeter l’ensemble des prétentions de Mme [D] ;
Subsidiairement, si le contrat principal et le contrat de crédit devaient être annulés pour quelque cause que ce soit, d’ordonner la remise des parties dans leur état antérieur, de condamner Mme [D] à lui restituer la somme de 27 800 euros représentant le capital du crédit, et de condamner la société Athena à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;
De condamner Mme [D] aux dépens de première instance et d’appel et à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ou, subsidiairement de fixer au passif de la société les dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de son avocat, ainsi que la somme de 1 500 euros sur le fondement du même article 700, pour les procédures de première instance et d’appel.
Dans ses conclusions d’intimée n° 2 notifiées par voie électronique le 4 avril 2023 et signifiées à la société Athena le 24 avril suivant, Mme [D] demande à la cour :
À titre principal :
De confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité des contrats ou, subsidiairement, de prononcer la résolution de ces derniers ;
D’infirmer le jugement en ce qu’il a :
Limité sa créance indemnitaire à l’encontre de la banque à 23 000 euros ;
Fixé la créance de la banque à son encontre à la somme de 18 416,88 euros ;
Ordonné la compensation de ces sommes ;
Condamné la banque à lui verser en conséquence la somme de 4 583,12 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
Condamné la société à lui restituer la somme de 27 800 euros ;
Condamné la société à garantir la banque de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
De condamner la banque à lui rembourser la somme de 9 383,12 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision à intervenir ;
De dire que la banque est privée de sa créance de restitution du capital, ou qu’il n’y a pas lieu à fixation d’une telle créance ;
Subsidiairement, de condamner la banque à lui verser la somme de 27 800 euros à titre de dommages-intérêts, de fixer sa créance indemnitaire à l’encontre de cette dernière à la somme de 27 800 euros, et d’ordonner la compensation de cette somme avec la créance de la banque ;
Plus subsidiairement, de confirmer le jugement en ce qui concerne la fixation de sa créance indemnitaire et la condamnation de la banque qui en résulte ;
De dire que le liquidateur de la société disposera d’un délai de trois mois à compter de la signification de la décision à intervenir pour reprendre le matériel aux frais de la liquidation, et qu’à défaut d’une telle reprise, il sera considéré que la société en liquidation n’entend pas récupérer ce matériel et qu’elle-même pourra en disposer à son gré ;
De fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société à la somme de 7 211,95 euros TTC, correspondant aux frais de dépose et d’enlèvement de l’installation (1 127,50 euros), et de remise en état de la couverture en ardoises après dépose des panneaux (6 084,45 euros TTC) ;
En cas de rejet total ou partiel de ses demandes formées contre la banque, de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société à la somme de 27 800 euros TTC correspondant à la restitution du prix du contrat anéanti ;
À titre subsidiaire, en cas d’infirmation du jugement sur la nullité des contrats et de rejet de sa demande de résolution de ces derniers :
De prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la banque ;
De condamner en conséquence la banque à lui transmettre un nouveau décompte de sa créance expurgé de tout intérêt, et ce, dans un délai de huit jours à compter de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter l’expiration de ce délai ;
De se réserver expressément le pouvoir de liquider l’astreinte ;
De condamner la banque à imputer sur le capital restant dû les sommes perçues au titre des intérêts, majorées des intérêts au taux légal à compter du jour de leur paiement, ou, subsidiairement, à lui rembourser les sommes indûment perçues au titre des intérêts après majoration de celles-ci des intérêts au taux légal à compter du jour de leur paiement ;
De dire que la durée du contrat de crédit sera prolongée de la durée de la période de suspension du crédit et que les échéances reportées ne produiront pas d’intérêts et seront exigibles tous les mois avec un décalage correspondant à la période de suspension par rapport à l’échéancier initial ;
De dire que la banque ne pourra invoquer aucun incident de paiement tant qu’elle n’aura pas communiqué le nouveau tableau d’amortissement, conforme au dispositif du présent arrêt ;
En toute hypothèse :
De rejeter toutes les demandes de la société et de la banque ;
De confirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles ;
De condamner la banque aux dépens, qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile, et à lui verser la somme de 2 400 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;
De mettre à la charge de la banque l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévu à l’article 32 de la loi numéro 91-650 du 2 juillet 1991, et ce, en application de l’article R. 631-4 du code de la consommation.
Dans des conclusions notifiées par voie électronique le 17 mai 2023, Mme [D] demande en outre à la cour de déclarer irrecevables les prétentions mentionnées dans le dispositif des dernières conclusions de la banque, tendant à voir, à titre subsidiaire :
Ordonner, si le contrat principal et/ou le contrat de crédit devaient être annulés pour quelque cause que ce soit, la remise des parties dans leur état antérieur ;
Condamner en conséquence Mme [D] à lui restituer la somme de 27 800 euros représentant le capital du crédit.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 janvier 2022, la société demande à la cour :
D’infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
De rejeter l’ensemble des demandes de Mme [D] ;
De condamner celle-ci aux dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de son avocat, et à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les dispositions du code de la consommation applicables aux contrats litigieux, conclus le 2 mars 2015, sont celles antérieures à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.
La société ayant été placée en liquidation judiciaire depuis que le jugement a été rendu, celui-ci ne pourra en toute hypothèse qu’être infirmé en ce qu’il a prononcé des condamnations à son encontre, qui ne sont d’ailleurs plus demandées en tant que telles par Mme [D], et ce, en application de l’article L. 622-22 du code de commerce, selon lequel l’instance tend uniquement dans ce cas à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
Sur la recevabilité des prétentions de la banque et ses conséquences
Moyens des parties
Mme [D] soutient que :
Les conclusions de la banque du 4 mai 2023 comportent des prétentions qui ne figuraient pas dans ses conclusions initiales. Ces prétentions ne sont pas liées à la survenance de la liquidation judiciaire de la société. Elles ne sont pas non plus destinées à répliquer à ses propres conclusions d’intimée n° 2 du 4 avril 2023. Elles sont donc irrecevables en application de l’article 910-4 du code de procédure civile.
La société et la banque n’invoquent aucun moyen sur ce point.
Réponse de la cour
Selon l’article 910-4 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
En l’espèce, il ressort du jugement critiqué que la banque a notamment demandé en première instance que Mme [D] soit condamnée à lui restituer la somme de 27 800 euros, et, dans le cas contraire, que la société soit condamnée à la garantir de toute condamnation. Le tribunal a fait droit à ces deux prétentions, en limitant la créance de restitution de la banque. Cette dernière a alors relevé appel de l’intégralité du jugement, puis sollicité dans ses premières conclusions du 12 octobre 2021 que celui-ci soit réformé « en toutes ses dispositions », en ne demandant néanmoins que le rejet des prétentions de Mme [D], et la condamnation de celle-ci aux dépens et aux frais irrépétibles.
Puis, un an et demi plus tard, par ses dernières conclusions, n° 4, du 4 mai 2023, la banque a ajouté les prétentions suivantes :
« A TITRE SUBSIDIAIRE ;
ORDONNER, si le bon de commande AZUR SOLUTION ENERGIE du 2 mars 2015 et/ou le contrat de financement de la société FRANFINANCE du 2 mars 2015 devaient être annulés pour quelque cause que ce soit, la remise des parties dans leur état antérieur ;
EN CONSEQUENCE ;
CONDAMNER Madame [N] [D] à restituer à la société FRANFINANCE la somme de 27 800,00 € représentant le capital du crédit affecté ;
EN CONSEQUENCE,
DIRE que la SELARL ATHENA, liquidateur judiciaire de la société AZUR SOLUTION ENERGIE sera condamnée à relever et garantir la société FRANFINANCE de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre à quelque titre que ce soit ».
Ces trois prétentions, qui font écho au débat de première instance et qui s’inscrivent à la suite de la demande de réformation totale du jugement faite par la banque, n’étaient pourtant pas destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses, qui, sur ce point, n’ont rien ajouté au débat. Elles n’étaient pas davantage destinées à faire juger des questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. S’agissant notamment de la dernière, elle tient certes compte de la liquidation de la société qui est intervenue en cours de procédure, mais elle ajoute surtout une prétention pécuniaire à l’encontre, finalement, de la société, qui n’avait pas été formulée initialement contre celle-ci.
Alors que cette difficulté a été mise dans le débat par Mme [D], la banque n’a fait aucune observation sur ce point.
En conséquence, l’ensemble des prétentions que la banque a ajoutées dans ses conclusions du 4 mai 2023 seront déclarées irrecevables.
La disposition du jugement ayant condamné la société à garantir la banque de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre sera infirmée, comme toutes les parties le demandent, sans pouvoir être reprise en appel.
Pour le reste, il est constant que l’annulation d’un contrat entraîne de plein droit la remise des parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion, et que ne méconnaît pas l’objet du litige le juge qui, même à défaut de demande en ce sens, ordonne à l’issue d’une telle annulation la restitution de la chose vendue et celle du prix (1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.691 et 1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.693, publiés). L’irrecevabilité qui vient d’être prononcée n’empêchera donc pas à une éventuelle annulation du contrat de crédit de produire tous ses effets de plein droit, et à la cour de les préciser.
Sur la demande d’annulation du contrat principal et ses conséquences
Sur les moyens de nullité invoqués par Mme [D]
Moyens des parties
Mme [D] soutient que :
Le contrat ne contient pas la désignation suffisante des caractéristiques du matériel vendu et du service proposé. La description du matériel est elliptique et illisible. Celle qui figure sous les cases qui sont cochées est particulièrement sommaire et ne permet pas de déterminer ce qui est acheté. Aucune caractéristique technique n’est mentionnée en ce qui concerne le « GSE AIR’SYSTEM », qui représente pourtant à lui seul la quasi-totalité du prix du contrat. Il ne saurait lui être opposé la clause du contrat selon laquelle elle a reconnu avoir pris connaissance de toutes les informations relatives au produit, cette clause étant abusive. Il est vain également pour la banque d’invoquer le contenu de la brochure. En effet, celle-ci ne constitue qu’un support publicitaire sans valeur contractuelle. En outre, la conformité des contrats conclus hors établissement s’apprécie indépendamment du contenu des documents commerciaux remis le cas échéant aux consommateurs.
La mention d’un prix global de 27 800 euros n’est pas conforme aux exigences du code de la consommation. Le bon de commande ne distingue pas le coût de l’équipement photovoltaïque de celui de la récupération d’air chaud, alors même qu’il s’agit de deux biens totalement distincts et que les deux équipements ont ensuite donné lieu à l’établissement de factures distinctes.
La société soutient que :
Le bon de commande rappelle les caractéristiques essentielles de l’installation. Il est particulièrement détaillé. Concernant les autres éléments plus techniques, une plaquette commerciale est remise au client, comprenant les fiches détaillées des produits proposés, ce qui n’a jamais été contesté par Mme [D] qui produit un extrait de cette plaquette. En outre, avant d’apposer sa signature sur le bon de commande, Mme [D] a reconnu avoir pris connaissance de toutes les informations relatives au produit.
Il appartient au consommateur de démontrer que la caractéristique ou l’information qu’il revendique était bien objectivement essentielle, et que sa prétendue absence était de nature à vicier son consentement. Ce n’est pas le cas en l’espèce. La précision d’une mention ne peut donner lieu à nullité que si la preuve d’un dol est rapportée.
Le code de la consommation n’exige aucun prix unitaire, mais un prix global.
La banque soutient que :
Le bon de commande décrit les caractéristiques essentielles de l’installation et permet une appréhension suffisante du matériel et de la prestation fournie. Il est suffisamment précis et explicite. Au surplus, une plaquette commerciale a été remise à Mme [D], qui la verse d’ailleurs aux débats. Le terme le kit, utilisé de manière régulière pour la fourniture de matériaux, permet de comprendre qu’il s’agit d’une installation globale permettant un fonctionnement immédiat. En outre, Mme [D] reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales de vente.
Réponse de la cour
Il résulte des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation qu’un contrat de vente ou de fourniture d’un bien ou de services conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles et le prix du bien ou du service.
Cette nullité est encourue indépendamment de tout dol. En l’espèce, le bon de commande précise bien le prix global de l’installation, ce qui est suffisant dès lors qu’aucun texte n’exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien offert ou du service proposé (1re Civ., 2 juin 2021, pourvoi n° 19-22.607).
Cependant, en ce qui concerne les caractéristiques du bien et du service, le bon indique, dans sa partie relative à la « DÉSIGNATION du Pack Photovoltaïque et/ou autres produits ou services », « 1 Led Relamping » et « 1 Pack GSE 16 + Aerovoltaïque », sans autre précision. En outre, dans sa partie intitulée « CHOIX DE L’OFFRE PHOTOVOLTAÏQUE / AIR’SYSTEM », sont cochées les cases correspondant à « PACK “GSE16” » et « GSE AIR’SYSTEM », sous lesquelles sont listés les éléments suivants :
« 16 PANNEAUX PHOTOVOLTAÏQUES
1 ONDULEUR
1 KIT “GSE INTÉGRATION”
1 BOITIER DC
1 CABLÂGE
1 INSTALLATION
1 RACCORDEMENT
DÉMARCHES ADMINISTRATIVES INCLUSES ».
Or cette liste ne se rapporte manifestement qu’à l’installation des panneaux photovoltaïques.
Ainsi, alors que la société définit elle-même dans ses conclusions le GSE Air’System comme un système qui « fonctionne en complément d’un chauffage principal », et que le coût matériel de celui-ci représentait, selon les factures produites, 77 % du prix (21 290 euros sur 27 800 euros), ce qui en faisait l’objet essentiel du contrat, le bon de commande ne donne pas la moindre information sur les caractéristiques de ce système.
De plus, comme le premier juge l’a justement relevé, le bon de commande ne permet pas davantage de connaître la destination de l’énergie électrique devant être produite, caractéristique pourtant elle aussi essentielle de l’installation, ni de déterminer à quoi correspond le kit GSE Intégration, lequel, comme tout kit, est nécessairement composé de différents éléments.
À cet égard, ni la plaquette commerciale produite par Mme [D], ni le fait que cette dernière ait reconnu, en signant le bon de commande, « avoir pris connaissance des Conditions Générales de Vente [‘] et de toutes les informations relatives aux produits », ne peuvent pallier l’insuffisance du contrat, lequel, selon les dispositions précitées, doit indiquer lui-même, à peine de nullité, les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Dans ces conditions, c’est à bon droit que le premier juge a considéré que la nullité du contrat principal était encourue.
2.2. Sur le moyen tiré de la confirmation du contrat
Moyens des parties
La société soutient que :
Mme [D] a reconnu avoir pris connaissance des conditions générales de vente, qui rappellent bien les dispositions du code de la consommation. Elle a néanmoins entendu poursuivre le contrat en pleine connaissance de cause. Depuis la conclusion du contrat le 2 mars 2015, Mme [D] n’a pas usé de la possibilité qui lui était offerte de se rétracter, elle n’a sollicité à aucun moment la moindre information complémentaire, elle l’a laissé réaliser les démarches administratives en vue de la pose de la centrale photovoltaïque, elle l’a laissé intervenir pour cette pose, elle a signé un bon de fin de travaux sans émettre aucune réserve, elle a autorisé le déblocage des fonds par la banque, elle n’a fait aucune réclamation à la suite de la réception de sa facture, et elle a utilisé pendant plusieurs années une installation fonctionnelle. L’ensemble de ces circonstances ne laisse aucun doute sur la volonté de Mme [D] de confirmer le bon de commande.
Mme [D] soutient que :
La seule exécution du contrat ne vaut pas confirmation tacite. La confirmation d’un acte nul exige à la fois la connaissance du vice et l’intention de le réparer, ce que doit établir le professionnel qui s’en prévaut. En l’espèce, il n’est pas apporté la preuve qu’elle exécutait le contrat en connaissance des vices qui entachaient celui-ci.
La banque n’invoque quant à elle aucun moyen sur ce point.
Réponse de la cour
Il résulte de l’article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige, que la confirmation d’un acte nul procède de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l’affecte.
Il est constant à cet égard que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d’avoir une connaissance effective du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l’absence de circonstances, qu’il appartient au juge de relever, permettant de justifier d’une telle connaissance (1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 22-16.115, publié).
En l’espèce, la société motive la connaissance, par Mme [D], du vice affectant le contrat principal uniquement par le fait que les conditions générales du bon de commande que cette dernière a signé reproduisaient les dispositions du code de la consommation, ce qui est inopérant.
Dans ces conditions, aucune confirmation n’est établie et le jugement sera confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal.
2.3. Sur les conséquences de la nullité du contrat principal
Moyens des parties
Mme [D] soutient que :
La nullité emporte effacement rétroactif du contrat et remise des choses dans leur état antérieur. Cependant, il y a lieu de tenir compte de la liquidation judiciaire survenue postérieurement au jugement. En aucun cas le liquidateur ne pourra exiger d’elle qu’elle procède à la dépose du matériel pour le compte de la liquidation, la remise en état incombant au vendeur et la liquidation judiciaire n’étant pas de nature à inverser la charge de cette obligation.
La société n’invoque aucun moyen sur ce point.
Réponse de la cour
Comme cela a déjà été rappelé, il est constant que l’annulation d’un contrat entraîne de plein droit la remise des parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion, et que le juge qui, même à défaut de demande en ce sens, ordonne à l’issue d’une telle annulation la restitution de la chose vendue et celle du prix ne méconnaît pas l’objet du litige (1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.691 et 1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.693, préc.).
Ainsi, quand bien même Mme [D] ne demande en l’espèce la fixation de sa créance de restitution au passif de la société qu’à titre subsidiaire, en cas de rejet total ou partiel de ses demandes à l’encontre de la banque, cette fixation, de plein droit et qui a déjà fait l’objet d’une déclaration de créance dont Mme [D] justifie, sera d’ores et déjà actée.
Compte tenu de la nature et de la situation du bien que Mme [D] doit quant à elle restituer, ce sera au liquidateur de la société, en cette qualité, qu’il reviendra de faire retirer ce bien et de remettre les lieux en état, et ce, aux frais de liquidation. À défaut d’exécution, la société sera redevable vis-à-vis de Mme [D] des frais de remise en état, qui, ayant eux aussi fait l’objet d’une déclaration de créance, seront fixés à son passif à hauteur du montant dont Mme [D] justifie.
3. Sur la demande d’annulation du contrat de crédit et ses conséquences
3.1. Sur la nullité du contrat de crédit
Il résulte de l’article L. 311-32 du code de la consommation que le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
En l’espèce, l’annulation par le premier juge du contrat principal ayant été confirmée, celle, de plein droit, du contrat de crédit le sera également.
3.2. Sur les conséquences de la nullité
Moyens des parties
La banque soutient que :
Sur sa faute
Elle a respecté l’ensemble des règles en matière de crédit affecté au financement de travaux, à savoir : contrôle de l’ensemble des documents nécessaires à l’octroi du financement, et réception de l’attestation de fin de travaux pour le déblocage des fonds. Elle n’a commis aucune faute dans la libération des fonds.
Sa faute éventuelle ne saurait être exclusive de celle de Mme [D], dont le comportement a été léger et contestable, puisqu’elle a signé l’attestation de fin de travaux pour le déblocage des fonds, et qu’elle a réglé les mensualités du crédit pendant des années sans émettre la moindre contestation.
Sur le préjudice
Il appartient à Mme [D] de rapporter la preuve d’un préjudice consécutif à sa faute. Si l’existence d’un préjudice découlant de la procédure collective dont la société fait l’objet peut s’entendre, celui-ci n’est pas en lien avec les fautes invoquées par Mme [D]. En outre, Mme [D] n’a subi aucun préjudice tant en ce qui concerne le fonctionnement de l’installation, les griefs invoqués n’étant en rien établis, que s’agissant de sa rentabilité. Sur ce dernier point, aucun élément ne permet de dire que le matériel installé garantissait une économie d’énergie ou une production d’électricité.
Mme [D] soutient que :
Plusieurs manquements sont à reprocher à la banque.
Il est constant que le contrat principal est nul en raison de ses irrégularités formelles apparentes pour un lecteur non profane, et que la banque, professionnelle avisée spécialiste du crédit affecté dans le cadre d’un démarchage à domicile, ne l’en a pas alertée.
Si le premier juge n’en a pas tenu compte, la banque n’a pas pour autant contrôlé les pratiques commerciales de la société, qui lui a fait signer un contrat devenu ferme et définitif à l’issue du délai de rétractation, alors même qu’aucune étude préalable de faisabilité et d’opportunité n’avait été réalisée. La banque avait connaissance de cette pratique commerciale.
La banque a débloqué les fonds de façon prématurée, et ce, dès le 11 mai 2015, date qui correspond à la fourniture et à la pose du matériel. Elle n’a pas attendu pour cela l’exécution de l’intégralité des démarches administratives et du raccordement de l’installation, alors que ces prestations étaient incluses dans le bon de commande. Le raccordement n’est intervenu que le 1er octobre 2015, soit près de cinq mois après le déblocage des fonds. La banque ne saurait se prévaloir à cet égard du document intitulé ATTESTATION DE LIVRAISON ‘ DEMANDE DE FINANCEMENT daté du 6 mai 2015, lequel est trop imprécis et ne permet pas de rendre compte de la complexité l’opération financée, et notamment de l’accomplissement des démarches administratives.
Sa situation est préjudiciable à bien des égards.
Elle devra tenir le matériel à la disposition du liquidateur, mais le recouvrement de sa créance auprès de la liquidation en tant que créancier chirographaire est totalement illusoire.
La conclusion du contrat principal était totalement inadaptée à sa situation et s’est révélée être un gouffre financier, l’équipement ne pouvant manifestement pas être rentabilisé. La question n’est pas de savoir si la société s’est ou non engagée contractuellement à une rentabilité des équipements vendus. Il est ici question du préjudice découlant directement du défaut de mention du prix du GSE Air’System dans le contrat. Il est certain qu’elle n’aurait pas signé le contrat si elle avait été informée du coût de ce système.
Il manque deux panneaux photovoltaïques, aucune étude préalable permettant de déterminer la faisabilité technique de l’installation n’ayant été réalisée, et la toiture ne pouvant accueillir l’intégralité des panneaux. La banque n’est pas étrangère à ce préjudice. Elle avait connaissance de la pratique commerciale de son partenaire consistant à ne pas réaliser d’étude de faisabilité et d’opportunité préalable.
L’installation des panneaux sur la toiture n’a pas été effectuée conformément aux règles de l’art, de sorte que la couverture est affectée de multiples désordres constatés par deux couvreurs différents et un huissier de justice. Elle ne bénéficie à cet égard d’aucune garantie contractuelle ou légale du fait de l’annulation du contrat principal.
Réponse de la cour
L’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte, là encore de plein droit, pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté.
Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l’espèce, la banque a bien commis cette double faute.
Tout d’abord, alors que le défaut d’indication dans le contrat principal des caractéristiques essentielles du bien et du service ressortait d’une simple lecture de celui-ci, la banque, professionnelle du crédit affecté à ce type d’opération, ne l’a pas relevé.
Ensuite, la banque a débloqué les fonds au regard d’une attestation de livraison qui se contentait de mentionner la réception « sans restriction ni réserve [d’un] bien ou [d’une] prestation, objet du financement, conforme au bon de commande », ce qui ne lui permettait pas, comme il le lui incombait avant de verser les fonds, de s’assurer de l’exécution effective des prestations commandées, et notamment de celles administratives et de raccordement de l’installation auxquelles la société s’était également engagée.
Le fait que Mme [D] ait réglé les mensualités du crédit conformément au contrat correspondant, ce qu’on ne saurait lui reprocher, n’exonère pas la banque de sa responsabilité.
S’agissant du préjudice, il ressort des pièces versées aux débats que, comme la société a pu elle-même le reconnaître à l’occasion de l’échange de courrier qu’elle a eu avec l’avocate de Mme [D], seuls 14 des 16 panneaux commandés ont été installés. Or, malgré cela, la totalité du prix a été facturée par la société et débloquée, de manière fautive comme cela vient d’être dit, par la banque. Il en résulte pour Mme [D] un préjudice en lien avec la faute de la banque, d’un montant de 376,25 euros correspondant à la part des deux panneaux concernés (2/16) dans le prix de l’installation photovoltaïque en elle-même (3 010 euros TTC selon la facture afférente et ce que Mme [D] indique elle-même dans ses conclusions).
Pour le reste, on ne peut, comme le premier juge l’a fait, caractériser le préjudice en retenant, d’une part, que la faute de la banque a « permis la conclusion d’un contrat sur une installation indéterminée sans permettre à Mme [N] [D] d’être alertée sur le fait que l’objet principal de sa commande au regard de son coût était le système GSE air système, système dont l’objet n’a jamais été clairement défini », et, d’autre part, que « si Mme [N] [D] avait été informée du coût de cette installation, il est certain qu’elle n’aurait pas conclu le contrat ». La seule conclusion, concomitamment au contrat de crédit, du contrat principal, dont le prix était expressément indiqué à Mme [D] selon des modalités conformes au code de la consommation, dont celle-ci ne justifie pas s’être plainte initialement et qui est quoi qu’il en soit désormais annulé conformément au souhait de l’intéressée, ne constitue pas en effet un préjudice réparable en lien avec les fautes de la banque, pas plus d’ailleurs que le placement ultérieur de la société en liquidation judiciaire et ses conséquences éventuelles pour Mme [D].
Ensuite, il est constant que l’installation litigieuse a été raccordée au réseau ERDF et qu’elle fonctionne, l’expert amiable désigné par l’assureur de Mme [D] ayant même noté dans son rapport du 3 juillet 2017 (pièce n° 10 de Mme [D]) que « les productions enregistrées [‘] d’octobre 2016 à juin 2017, sont conformes aux prévisions (voire supérieures) », et ce, malgré l’absence des deux panneaux. Mme [D] produit à cet égard les factures concernées et celles postérieures, qui montrent une certaine constance sur ce point depuis 2017.
Quant aux infiltrations dont Mme [D] se plaint, il n’est absolument pas établi qu’elles soient liées à l’installation litigieuse, l’expert amiable précité ayant relevé au contraire que « les ardoises naturelles de couverture installées sur le logement propriété de Madame [D] présentent d’importants désordres liés à des phénomènes de pyrite infiltrante », que « les désordres d’infiltrations observées ne sont pas constatés au droit des panneaux intégrés dans la couverture [‘] permettant de confirmer que l’origine des désordres se trouve dans des défauts d’étanchéité des ardoises », et qu’en conséquence, « l’intervention de l’entreprise CPTE CONSEIL [sous-traitante de la société] [n’]apparaît pas en lien direct avec les désordres observés ».
Dans ces conditions, la banque ne doit être privée de sa créance de restitution qu’à hauteur de la somme de 376,25 euros.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce que, après avoir fixé les créances réciproques de Mme [D] et de la banque et ordonné leur compensation, il a condamné cette dernière à verser la somme de 4 583,12 euros.
Mme [D] sera condamnée à restituer à la banque la somme de 27 423,75 euros (27 800 euros, correspondant au capital prêté, moins 376,25 euros), et la banque à restituer à Mme [D] l’ensemble des sommes que celle-ci lui a versées. À cet égard, Mme [D] demande que la banque soit condamnée à lui rembourser la somme de 9 383,12 euros, somme que le premier juge avait déjà prise en compte en tant que « versements realisés au titre des mensualités tel qu’indiquées par la demanderesse et non contesté par le prêteur » (sic), et qui n’est toujours pas contestée par la banque. Le montant de la restitution due par cette dernière sera donc fixée à cette somme qui, comme celle dont Mme [D] est redevable, portera de plein droit intérêt au taux légal à compter de la signification du présent arrêt.
4. Sur les frais du procès
Les dispositions du jugement sur les dépens, les frais irrépétibles et les droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement seront confirmées.
La banque sera également condamnée aux dépens de la procédure d’appel.
Le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile sera accordé à l’avocat de Mme [D] et à celui de la société.
Enfin, il n’apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve la charge des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés devant la cour.
La cour :
CONFIRME le jugement en ce qu’il a :
Prononcé la nullité du contrat conclu le 2 mars 2015 entre Mme [N] [D] et la société Azur Solution Énergie ;
Prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 2 mars 2015 entre Mme [N] [D] et la société Franfinance ;
Condamné la société Franfinance aux dépens ;
Condamné la société Franfinance à verser à Mme [N] [D] la somme de 2 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejeté les demandes faites par les sociétés Azur Solution Énergie et Franfinance sur le fondement de ce même article 700 ;
Mis à la charge de la société Franfinance l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement qui seront éventuellement engagés dans les conditions de l’article R. 631-4 du code de la consommation ;
INFIRME le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Déclare irrecevables les prétentions de la société Franfinance tendant à voir :
Ordonner, si le bon de commande du 2 mars 2015 et/ou le contrat de crédit du 2 mars 2015 devaient être annulés pour quelque cause que ce soit, la remise des parties dans leur état antérieur ;
Condamner Mme [N] [D] à lui restituer la somme de 27 800 euros représentant le capital du crédit affecté ;
Dire que la société Athena, liquidateur judiciaire de la société Azur Solution Énergie, sera condamnée à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre à quelque titre que ce soit ;
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Azur Solution Énergie la créance de Mme [N] [D] d’un montant de 27 800 euros, correspondant à la restitution du prix du contrat qui a été conclu entre ces deux parties le 2 mars 2015 et qui a été annulé ;
Dit qu’il appartiendra à la société Athena, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Azur Solution Énergie, de faire retirer chez Mme [N] [D] le matériel objet de ce contrat, et de remettre les lieux dans leur état antérieur, et ce, dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt ;
Dit qu’à défaut d’exécution du fait de la société Athena, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Azur Solution Énergie, Mme [N] [D] pourra disposer de ce matériel, et la société Azur Solution Énergie sera débitrice à l’égard de cette dernière de la somme de 7 211,95 euros correspondant aux frais de remise en état ;
Fixe cette somme au passif de la liquidation judiciaire de la société Azur Solution Énergie ;
Dit que la société Franfinance a commis une faute justifiant que sa créance de restitution soit diminuée de 376,25 euros ;
Condamne Mme [N] [D] à restituer à la société Franfinance la somme de 27 423,75 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Condamne la société Franfinance à rembourser à Mme [N] [D] la somme de 9 383,12 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Condamne la société Franfinance aux dépens de la procédure d’appel ;
Accorde le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile à l’avocat de Mme [N] [D] et à celui de la société Azur Solution Énergie ;
Rejette les autres demandes des parties.
LA GREFFIERE P/LA PRESIDENTE, empêchée
F. GNAKALE Y. WOLFF