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Nos Conseils:
– Pour prouver un dol dans un contrat, il est essentiel de fournir des preuves concrètes des manœuvres ou mensonges ayant influencé le consentement de l’autre partie. |
→ Résumé de l’affaireL’affaire concerne un contrat de vente et de crédit affecté signé entre Mme [V] et la société Iratek 92 pour l’installation d’un ballon thermodynamique et d’une centrale photovoltaïque, ainsi qu’un contrat de crédit avec la société Cofidis. Le tribunal de proximité de Longjumeau a prononcé la nullité des contrats, ordonné la restitution des équipements, la remise en état de la toiture, et le remboursement des sommes versées par M. [H] et Mme [V]. La société Cofidis a fait appel de cette décision, contestant la nullité des contrats et demandant le remboursement des sommes prêtées. M. [H] et Mme [V] ont également fait appel, demandant des dommages et intérêts pour préjudice financier, moral et de jouissance. La société Iratek 92 a également fait appel, contestant la nullité du contrat de vente. La cour a rappelé les dispositions du code de la consommation et a demandé la production de l’original du bon de commande pour éclaircir les faits. L’affaire a été mise en délibéré pour le 16 mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 16 MAI 2024
(n° , 18 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/15319 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCROF
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 juillet 2020 – Tribunal de proximité de LONGJUMEAU – RG n° 11-19-001588
APPELANTE
La société COFIDIS, société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de osn représentant légal domicilié audit siège
N° SIRET : 325 307 106 00097
[Adresse 7]
[Adresse 11]
[Localité 6]
représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l’ESSONNE
INTIMÉS
Monsieur [J] [H]
né le [Date naissance 3] 1989 à [Localité 13] (02)
[Adresse 5]
[Localité 1]
représenté et assisté de Me Harry BENSIMON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0524
Monsieur [G] [V]
né le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 12] (02)
[Adresse 5]
[Localité 1]
représenté et assistée de Me Harry BENSIMON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0524
La société IRATEK 92, SASU agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 751 252 339 00047
[Adresse 4]
[Localité 9]
représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090
PARTIE INTERVENANTE
La SELARL S21Y prise en la personne de Me [O] [E] en qualité de liquidateur de la SAS IRATEK
[Adresse 8]
[Localité 10]
DÉFAILLANTE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par M. Grégoire GROSPELLIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon bon de commande en date du 19 juillet 2017, Mme [G] [V] a signé avec la société Iratek 92 un bon de commande en vue de l’installation d’un ballon thermodynamique et d’une centrale photovoltaïque, pour un montant total de 29 900 euros TTC. Le même jour, M. [J] [H] et Mme [V] ont conclu avec la société Cofidis sous l’enseigne Projexio un contrat de crédit affecté d’un montant de 29 900 euros, remboursable sur 162 mois soit après un report de 6 mois en 155 mensualités de 234,04 euros et une dernière de 233,57 euros, hors assurance facultative, au taux nominal de 2,70 % soit un TAEG de 2,96 % et des mensualités avec assurance de 284,87 euros.
Saisi les 19 décembre 2018 et 14 février 2019 par M. [H] et Mme [V] d’une demande tendant principalement à l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le tribunal de proximité de Longjumeau, par un jugement contradictoire rendu le 23 juillet 2020 auquel il convient de se reporter, a :
– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 19 juillet 2017 entre Mme [V] et la société Iratek 92,
– prononcé la nullité subséquente du contrat de crédit affecté conclu le 19 juillet 2017 entre M. [H] et Mme [V] d’une part et la société Cofidis d’autre part,
– dit que M. [H] et Mme [V] devront permettre à la société Iratek 92 de venir récupérer les équipement installés chez eux au [Adresse 5], et que faute pour la société Iratek 92 de s’exécuter de son obligation dans le délai de 2 mois suivant la signification de la décision, M. [H] et Mme [V] pourront librement disposer des éléments de l’installation,
– dit que la société Iratek 92 devra en outre remettre la toiture de la maison de M. [H] et Mme [V] en l’état où elle l’a trouvée lorsqu’elle a procédé à l’installation du matériel,
– condamné la société Cofidis à rembourser à M. [H] et Mme [V] l’intégralité des sommes versées par eux au jour du prononcé du jugement en exécution du contrat de crédit affecté avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, outre les mensualités postérieures dont M. [H] et Mme [V] se seraient acquittés entre ses mains,
– condamné in solidum les sociétés Iratek 92 et Cofidis aux dépens et à payer à M. [H] et Mme [V] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Après avoir constaté que les bons de commande produits par les parties n’étaient pas les mêmes, la société Cofidis produisant un bon de commande n° 1225 et M. [H] et Mme [V] et la société Iratek 92 produisant un bon de commande n° 1447, le premier juge a considéré que devait être pris en compte ce dernier bon de commande d’une part parce qu’il était celui auquel l’attestation de livraison produite par la société Iratek 92 faisait référence et d’autre part parce qu’il était produit en copie originale comme provenant d’un décalque au papier carbone.
Il a considéré que ce bon de commande n° 1447 ne présentait aucune trace visible au niveau des cases relatives à la marque, au modèle et au prix du ballon thermodynamique, que la case relative au système GSE n’était pas cochée non plus que les espaces concernant le nombre de matrices et de bouches et de prix du système GSE, que ni la marque ni le modèle de la centrale photovoltaïque, ni la marque de l’onduleur, ni le nombre de modules solaires ni leur nature n’étaient renseignés pas plus que le coût total de cette centrale, que la date de livraison n’était pas indiquée non plus que le montant des mensualités avec assurance, ni le coût total de financement ni le nom de l’établissement de crédit contrairement au bon de commande produit par la société Iratek 92. Il a considéré qu’en tout état de cause, le bon de commande produit par les sociétés Iratek 92 et Cofidis ne respectait pas non plus les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation et qu’il était en conséquence nul. Il a estimé que rien ne permettait de considérer que Mme [V] connaissait les vices même si les dispositions des articles L. 221-8 à L. 221-28 du code de la consommation étaient reproduites au verso du bon de commande et avait choisi en toute connaissance de cause de les couvrir. Il a prononcé la nullité subséquente du contrat de crédit avant de considérer que la banque avait commis une faute en ne contrôlant pas la régularité du contrat principal puis en débloquant les fonds au vu d’un certificat de livraison incomplet et imprécis insuffisant à caractériser que la livraison et l’installation étaient complètes et ce d’autant qu’elle faisait référence à un contrat portant un numéro différent de celui qu’elle avait en sa possession et que la banque devait dès lors être sanctionnée par la privation de sa créance de restitution sans qu’il soit nécessaire de rechercher si les demandeurs avaient souffert d’un préjudice et sans que la société Iratek 92 ne soit tenue de la garantir puisque le but était de sanctionner une faute objective du prêteur.
Il a enfin rejeté les demandes indemnitaires de M. [H] et Mme [V] faute pour eux de justifier de préjudices qui ne seraient pas déjà réparés par l’annulation des contrats.
Par une déclaration en date du 27 octobre 2020, la société Cofidis a relevé appel de cette décision. Elle a conclu pour la première fois le 9 décembre 2020.
M. [H] et Mme [V] ont constitué avocat le 23 novembre 2020 et conclu pour la première fois le 27 janvier 2021.
La société Iratek 92 s’est constituée le 24 février 2021 et a conclu le 16 mars 2021.
Le 14 juin 2023, le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Iratek 92 et a désigné la Selarl S21Y prise en la personne de Maître [O] [E] en qualité de liquidateur.
Le 4 juillet 2023, le conseiller de la mise en état a constaté l’interruption de l’instance par suite de cette liquidation judiciaire.
Le 10 août 2023, M. [H] et Mme [V] ont déclaré leur créance à la liquidation judiciaire de la société Iratek 92.
Le 4 septembre 2023, la société Cofidis a fait assigner la Selarl S21Y prise en la personne de Maître [O] [E] en intervention forcée par acte délivré à personne morale, laquelle n’a pas constitué avocat.
Les prétentions des parties sont les suivantes :
Aux termes de conclusions n° 3 remises le 7 septembre 2023, la société Cofidis demande à la cour :
– d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– de dire M. [H] et Mme [V] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et de les en débouter,
– de dire la société Iratek 92 mal fondée en ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre et de l’en débouter,
– de condamner solidairement M. [H] et Mme [V] à reprendre l’exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement et à lui rembourser l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire au jour de l’arrêt à intervenir,
– de condamner M. [H] et Mme [V] solidairement à lui rembourser l’intégralité des sommes perçues dans le cadre de l’exécution provisoire,
– subsidiairement si la cour confirmait la nullité des conventions, de condamner solidairement M. [H] et Mme [V] à lui rembourser la somme de 29 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
– plus subsidiairement, si la cour confirmait la dispense des emprunteurs de rembourser le capital, de condamner Maître [O] [E], membre de la Selarl S21Y, es qualité de liquidateur judiciaire de la société Iratek 92 à lui payer la somme de 36 509,77 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir et à titre infiniment subsidiaire, de condamner Maître [O] [E], membre de la Selarl S21Y, es qualité de liquidateur judiciaire de la société Iratek 92 à lui rembourser la somme de 29 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
– en tout état de cause de condamner tout succombant aux dépens et à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle relève que les trois parties n’ont pas produit le même bon de commande, qu’elle-même ne dispose que du bon de commande n° 1225 tandis que M. [H] et Mme [V] d’une part et la société Iratek 92 d’autre part ont produit le même bon de commande n° 1447. Elle souligne qu’elle a débloqué les fonds au vu du bon de commande n° 1225 seul en sa possession. Elle fait valoir que ceci démontre que la société Iratek 92 a fait remplir plusieurs bons de commande, qu’elle a ensuite complété le bon n° 1447 et lui a transmis le bon n° 1225 lequel était complet et considère que ceci démontre les man’uvres de cette société mais aussi la faute des acheteurs qui ont manifestement signé un bon de commande en blanc.
Elle admet que le bon de commande qui doit être analysé pour la validité de la vente est le bon de commande n° 1447 versé aux débats par la société Iratek 92 et les emprunteurs mais considère que ses obligations ne portaient que sur le bon qui lui avait été transmis à savoir le bon n° 1225.
Elle soutient que les emprunteurs ont nécessairement eu connaissance des causes de nullité qu’ils invoquent puisqu’ils versent eux-mêmes aux débats un bon de commande sur lequel figure au verso tous les articles relatifs au démarchage à domicile et qu’ils ont signé juste en dessous de la mention suivante : “Je déclare être d’accord et reconnais avoir pris connaissance des articles L. 221-26 à L. 221-28 du Code de la consommation applicables lors de la vente à domicile, ainsi que d’avoir reçu l’exemplaire de ce présent contrat doté d’un formulaire détachable de rétractation et le cas échéant avoir reçu un exemplaire de l’offre de prêt”. Elle considère qu’ils ont en parfaite connaissance de cause réitéré leur consentement.
Elle prétend que les allégations de dol ne sont aucunement étayées, qu’il ne peut y avoir nullité pour dol ou résolution judiciaire des conventions dès lors que le matériel a été livré, posé, raccordé au réseau ERDF et mis en service et que M. [H] et Mme [V] produisent aux débats une facture de vente d’électricité mais se gardent de les produire toutes. Elle souligne qu’aucune expertise sur le rendement de l’installation n’est produite.
A titre subsidiaire, elle souligne qu’en cas de nullité ou de résolution des contrats, les emprunteurs doivent être condamnés à lui rembourser le montant du capital emprunté et ce indépendamment du fait que les fonds aient été initialement adressés au vendeur.
Elle conteste toute obligation de contrôler la mise en service de l’installation et soutient qu’il importe peu de s’attacher à la valeur de l’attestation de livraison dès lors que le matériel a été livré, posé, raccordé au réseau ERDF et mis en service car les obligations des emprunteurs prennent alors nécessairement effet à son égard et fait valoir qu’un simple décalage temporel ne peut la priver de sa créance au moins en capital. Elle affirme qu’elle n’a en tout état de cause commis aucune faute dans le déblocage des fonds dès lors qu’il a eu lieu sur la foi d’une attestation suffisamment précise pour rendre compte de la complexité de l’opération et relève qu’elle a au surplus été rédigée de manière manuscrite si bien qu’il ne s’agit pas d’un document préimprimé. Elle souligne qu’elle fait référence aux prestations accessoires pleinement réalisées et qu’elle a été signée sans réserve. Elle soutient que c’est aux emprunteurs de démontrer que l’installation ne fonctionne pas ce qu’ils ne font pas.
S’agissant de la régularité formelle qu’il lui appartiendrait de contrôler, elle souligne que ce contrôle ne peut pas porter sur la désignation des biens trop aléatoire, la jurisprudence n’étant pas uniforme, que le bon en sa possession est très complet et que les acheteurs peuvent au surplus couvrir les causes de nullité. Elle rappelle que les mentions relatives au crédit figurent sur le contrat de crédit signé le même jour, que même si le bon qui lui a été transmis ne comporte aucun délai de livraison, cette livraison a été acceptée. Elle soutient enfin que les emprunteurs ne démontrent aucun préjudice en lien avec ses prétendues fautes.
Elle fait enfin valoir que si par extraordinaire la juridiction venait à dispenser les emprunteurs de rembourser la banque en cas de nullité ou résolution des conventions, elle devrait condamner la société venderesse à un pareil remboursement, la convention de crédit le prévoyant. Elle se prévaut à titre très subsidiaire de l’enrichissement sans cause de la société Iratek 92.
Sur le manquement au devoir de mise en garde que lui reprochent M. [H] et Mme [V], elle soutient qu’ils ne présentaient aucun risque d’endettement.
Par des conclusions remises le 9 octobre 2023, M. [H] et Mme [V] demandent à la cour :
– de les recevoir en leur écritures et de les déclarer bien fondés,
– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il les a déboutés de leurs demandes tendant à la condamnation des sociétés Cofidis et Iratek 92 à leur verser les sommes de 5 000 euros au titre des frais de désinstallation et de remise en état de la toiture en son état initial, de 8 000 euros au titre de la réparation de leur préjudice financier et de leur trouble de jouissance et de 3 000 euros à titre de réparation de leur préjudice moral,
– de confirmer le jugement pour le surplus et en conséquence de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées, de dire que le contrat conclu avec la société Iratek 92 est nul car contrevenant aux dispositions éditées par le code de la consommation, que cette société a commis un dol à leur encontre et que la société Cofidis a délibérément participé au dol commis par la société Iratek 92,
– au surplus de déclarer que la société Cofidis a commis des fautes personnelles en laissant prospérer l’activité de la société Iratek 92 par la fourniture de financements malgré les nombreux manquements de cette dernière qu’elle ne pouvait prétendre ignorer, en accordant des financements inappropriés s’agissant de travaux construction, en manquant à ses obligations d’informations et de conseils à leur égard, en délivrant les fonds à la société Iratek 92 sans s’assurer de l’achèvement des travaux et que les fautes ainsi commises par la société Cofidis leur ont causé un préjudice et,
– en conséquence de déclarer que les sociétés Cofidis et Iratek 92 sont solidairement responsables de l’ensemble des conséquences de leurs fautes à leur égard,
– de prononcer la nullité ou à défaut la résolution des contrats de vente et de crédit les liant à la société Iratek 92,
– de déclarer que la société Cofidis ne pourra se prévaloir des effets de l’annulation à l’égard des emprunteurs,
– d’ordonner le remboursement des sommes qu’ils ont versées à la société Cofidis au jour du jugement à intervenir, outre celles à venir soit la somme de 36 541,24 euros, sauf à parfaire,
– de condamner solidairement les sociétés Iratek 92 et Cofidis à leur payer la somme de 5 000 euros au titre des frais de désinstallation et de remise de la toiture dans son état initial à défaut de dépose spontanée,
– de condamner la société Cofidis à leur verser les sommes de 8 000 euros au titre de leur préjudice financier et du trouble de jouissance et de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral,
– de dire qu’à défaut pour la société Iratek 92 de récupérer le matériel fourni dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, celui-ci leur sera définitivement acquis,
– de condamner la société Iratek 92 à les garantir de toute éventuelle condamnation prononcée à leur encontre,
– de déclarer qu’en toutes hypothèses, la société Cofidis ne pourra se faire restituer les fonds auprès d’eux mais devra nécessairement récupérer les sommes auprès de la société Iratek 92 seule bénéficiaire des fonds débloqués eu égard au mécanisme de l’opération commerciale litigieuse,
– d’ordonner leur radiation du FICP à la diligence et aux frais de la société Cofidis sous astreinte de 100 euros par jour à compter du jugement à intervenir et de se réserver la liquidation de l’astreinte,
– de condamner solidairement les sociétés Iratek 92 et Cofidis à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner in solidum les sociétés Iratek 92 et Cofidis dans l’hypothèse ou à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, une exécution forcée serait nécessaire, à supporter le montant des sommes retenues par l’huissier par application des articles 10 et 12 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n° 96/1080 relatif au tarif des huissiers, en application de l’article R. 631-4 du code de la consommation.
Ils exposent que le bon de commande n° 1447 a été conclu dans le cadre d’un démarchage commercial, et font valoir l’absence sur leur bon de commande des mentions exigées par les articles L. 111-1, L. 221-5 et suivants du code de la consommation, en ce qui concerne les caractéristiques essentielles des biens vendus dont ils soutiennent notamment que les mentions prévues par le bon ont été laissées vierges et ont été complétées ultérieurement par la société Iratek 92.
Ils soulignent que ni la marque ni le modèle des panneaux et des onduleurs ne sont précisés, qu’il n’y a aucun calendrier précis de livraison et de réalisation de la prestation, aucune ventilation du prix de vente entre le prix des panneaux, le coût de la main d”uvre et le coût de réalisation des prestations de service lesquels devaient être indiqués même s’ils étaient gratuits, soulignent que le prix unitaire n’est pas précisé, que ne figurent non plus ni le coût de l’assurance, ni les frais de dossier, ni les mensualités comprenant le coût de l’assurance et que le bon de commande ne fait nullement référence au médiateur de la consommation.
Les intimés soutiennent au visa des articles 1130 et suivants du code civil que leur consentement a été vicié par les agissements dolosifs de la venderesse qui a fait état de partenariats avec la société EDF, qui leur a présenté l’opération comme étant “une candidature sans engagement” en précisant “caduc si refus administratif” et en intitulant le document “devis – bon de commande” et que ce n’est qu’après écoulement de son droit de rétractation qu’ils ont eu l’occasion d’apprendre le caractère définitif du contrat en cause. Ils ajoutent que les inconvénients d’une telle installation sont tels que pour les leur faire accepter, la société Iratek 92 leur a nécessairement promis des rendements importants dont elle a veillé à ne laisser aucune trace, tout argument écologique étant indécent. Ils font également état d’un dol par réticence et soulignent que la société Iratek 92 leur a caché les frais annexes que sont la location d’un compteur EDF, le complément d’assurance habitation, la durée de vie des matériels et notamment de l’onduleur, la nécessité de remettre le toit en son état initial après obsolescence des panneaux et ne leur a pas indiqué le prix de rachat de l’électricité. Ils ajoutent qu’une telle installation de 3 000 Watts-crêtes ne peut matériellement rapporter plus de 1 000 euros par an, ce que le vendeur ne pouvait ignorer et qu’il leur a fait emprunter trois fois plus qu’ils ne pourraient gagner.
Ils contestent avoir confirmé l’acte entaché de nullité et rappellent qu’en tant que consommateurs profanes, la seule reproduction des articles du code de la consommation au demeurant obsolètes ne saurait présumer de leur connaissance du vice, de sorte qu’ils n’ont pu couvrir la nullité encourue.
M. [H] et Mme [V] se prévalent de l’article L. 312-55 du code de la consommation pour réclamer la nullité du contrat de crédit affecté puis soutiennent que la société Cofidis s’est rendue complice du dol commis par la société Iratek 92 en laissant son activité prospérer grâce à l’octroi de ses crédits et a attendu la signature de l’attestation de réception pour envoyer son accord de financement alors qu’elle ne pouvait ignorer que la cause prépondérante était le revenu. Ils affirment qu’elle n’aurait jamais dû octroyer le crédit au regard de la capacité de production maximale de la centrale.
Ils ajoutent en visant les articles L. 312-48 et L. 312-55 du code de la consommation que la banque a commis une faute en ne contrôlant pas la régularité du contrat principal puis en libérant les fonds sur la base d’un certificat de livraison incomplet et imprécis et alors que l’autorisation de la mairie n’avait pas pu être octroyée compte tenu des délais. Ils précisent à cet égard que la seule attestation de fin de travaux ne dispense pas le prêteur de se référer au bon de commande pour vérifier sa bonne exécution.
Ils dénoncent en outre un manquement de la banque à son devoir de mise en garde prévu par l’article L. 311-8 du code de la consommation, le crédit consenti étant excessif au regard de leurs capacités financières. Les intimés font enfin état de divers préjudices, notamment un préjudice financier du fait du déblocage des fonds, des frais de remise en état de la toiture ou encore un préjudice moral.
Par ses conclusions remises le 16 mars 2021 avant sa liquidation, la société Iratek 92 demande à la cour :
– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a rejeté des demandes faites à son encontre et a débouté la société Cofidis de ses demandes d’appel en garantie et de condamnation à son encontre,
– de juger que le contrat de vente est valable ne saurait être annulé, et qu’il n’y a donc pas lieu de procéder à la désinstallation du matériel,
– subsidiairement de juger que toute condamnation prononcée à son encontre doit être ramenée à de plus justes proportions,
– en tout état de cause, de juger que M. [H] et Mme [V] font preuve d’une mauvaise foi certaine, de les débouter de l’ensemble de leurs demandes, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société COFIDIS de ses demandes d’appel en garantie et de condamnation à l’encontre de la société IRATEK 92 et de les condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La société Iratek 92 expose que lors de la conclusion d’une vente, elle remet le troisième feuillet en papier carbone à son client et qu’il est moins lisible et qu’il n’est donc pas exclu que toutes les informations mentionnées dessus n’aient pas été reproduites lors de la numérisation de cette pièce pour les besoins du litige. Elle souligne qu’il est possible d’identifier les coordonnées du client et sa signature sur l’imprimé carbone mais qu’étrangement toutes les informations relatives aux matériels commandés sont illisibles. Elle ajoute que si le bon était illisible il leur était loisible d’en demander une copie lisible.
Elle soutient que le bon de commande est parfaitement lisible et comprend toutes les mentions nécessaires en ce qui concerne les caractéristiques essentielles des biens vendus et fait valoir que différentes brochures ont été remises à M. [H] et Mme [V]. Elle ajoute que dans le cadre de l’enquête de satisfaction, ils ont indiqué avoir été satisfaits de la clarté du devis si bien qu’ils ne peuvent contester que le bon de commande comportait les caractéristiques des biens vendus. Elle fait encore valoir que le prix est mentionné, que l’exigence ne porte que sur le prix global, que le délai de livraison est prévu, que l’installation est intervenue dans les 30 jours de la commande comme prévu par l’article L. 226-1 du code de la consommation et qu’il n’est pas possible de fixer le délai de raccordement qui ne dépend pas d’elle mais que les conditions générales alertent sur ce point (article 3.3). Elle fait enfin valoir que les informations relatives au mode de règlement ont été fournies et que M. [H] et Mme [V] ont été informés de la possibilité de se rétracter. Elle conteste que le nom du démarcheur soit faux et indique que la possibilité de faire appel au médiateur figure dans les conditions générales au verso.
Elle affirme que le rendement n’est jamais rentré dans le champ contractuel. Elle soutient que les allégations de dol ne sont aucunement étayées et relève qu’aucun élément n’est fourni sur la réalité d’une promesse d’autofinancement ou sur la rentabilité de l’installation.
Elle ajoute que M. [H] et Mme [V] ne peuvent soutenir sans mauvaise foi avoir été trompés par la présentation d’une candidature alors que c’est un bon de commande qui a été signé et qu’un crédit a été souscrit pour payer la commande.
Elle vise les dispositions de l’article 1182 du code civil pour rappeler que si la nullité était encourue, celle-ci n’est que relative et qu’en réceptionnant les travaux, en n’exerçant pas le droit de rétractation, en remboursant le crédit et en revendant de l’électricité, M. [H] et Mme [V] ont couvert les éventuelles causes de nullité et souligne qu’aucune preuve de préjudice n’est rapportée.
Elle fait état de ce que le matériel a été reconnu conforme par le consuel et que la mairie a rendu le 4 août 2017 un arrêté de non-opposition. Elle souligne qu’elle bénéficiait d’une assurance décennale et d’une assurance multirisques. Elle ajoute avoir accordé à M. [H] et Mme [V] une remise commerciale exceptionnelle de 1 126 euros nets confirmée via un protocole d’accord en date du 29 novembre 2017.
Elle relève que M. [H] et Mme [V] sont de mauvaise foi, qu’ils disposaient d’un délai de quatorze jours pour se rétracter ce qu’ils n’ont pas fait, qu’ils n’ont pas non plus émis de réserves lors de la réception des travaux, et qu’ils ont fait part de leur satisfaction et qu’ils ont attendu plus d’un an après pour contester la validité du contrat.
Elle soutient qu’en cas d’annulation, elle n’a pas à supporter le remboursement du crédit.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 19 décembre 2023.
Par arrêt du 22 février 2024, la cour a rappelé qu’elle n’était pas tenue de statuer sur les demandes de “dire et juger” qui ne sont pas des prétentions juridiques.
Elle a rappelé :
– qu’il était constant que le contrat conclu entre la société Iratek 92 et Mme [O] [X] le 22 mai 2017 était soumis aux dispositions du code de la consommation dans sa version postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile et postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,
– qu’en application de l’article L. 221-5 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel devait communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2,
– que l’article L. 221-9 disposait que le professionnel devait fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties et que ce contrat devait comprendre toutes les informations prévues à l’article L. 221-5. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5,
– que selon l’article L. 111-1, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel devait communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence de toute restriction d’installation de logiciel, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI,
– que selon l’article L. 242-1 du code de la consommation, les dispositions de l’article L. 221-9 étaient prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Elle a retenu que le bon de commande à prendre en considération était le bon n° 1447 qui était produit à la fois par M. [H] et Mme [V] et par la société Iratek 92.
Elle a toutefois relevé que ce que produisaient M. [H] et Mme [V] n’était pas la copie carbone de leur bon de commande qui constituait leur original mais une copie numérisée particulièrement pâle et peu lisible sur laquelle même la signature n’était pas visible, qu’il était ainsi impossible de déterminer quelles étaient les précisions qui y avaient été apportées et elle a ordonné la réouverture des débats et leur a enjoint de produire leur original du bon de commande n° 1447 à l’audience du 12 mars 2024 à 09H30 et a réservé les dépens.
A cette date, le conseil de M. [H] et Mme [V] s’est présenté et a produit un document exposant ne pas disposer d’autre chose.
L’affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024.
Sur la demande d’annulation des contrats
Sur le moyen tiré du vice du consentement
M. [H] et Mme [V] soulèvent la nullité du contrat de vente pour vice du consentement sur le fondement des articles 1130, 1131 et 1137 du code civil et L. 111-1 du code de la consommation.
Selon l’article 1130 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
Aux termes de l’article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
L’article 1137 du même code définit le dol par le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des man’uvres ou des mensonges ou encore par dissimulation intentionnelle par l’un des cocontractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre.
Le dol ne se présume pas et doit être prouvé.
M. [H] et Mme [V] affirment en premier lieu que la société a fait état de faux partenariats avec EDF mais cette affirmation n’est étayée par aucune pièce.
Ils font aussi valoir que le contrat leur a été présenté comme une simple candidature sans engagement en précisant “caduc si refus administratif” et en intitulant le document “devis – bon de commande”. La cour observe que cet intitulé n’est pas trompeur car le fait d’accepter un devis vaut effectivement commande, que la mention “caduc si refus administratif” qui n’apparaissait d’ailleurs pas sur le premier document versé aux débats avant la réouverture des débats, démontre au contraire l’existence d’un engagement susceptible d’être remis en cause en cas de refus administratif auquel ils ne démontrent d’ailleurs pas s’être heurtés et qu’ils n’établissent pas le caractère fallacieux de la présentation.
Ils soutiennent encore avoir été trompés sur la rentabilité attendue qui était pour eux la cause de cet engagement et que tout argument écologique serait indécent.
Force est de constater que le bon de commande ne comporte aucun engagement de rentabilité et qu’aucun élément n’est produit de nature à justifier que la société Iratek 92 aurait surpris leur consentement avec des promesses ou des perspectives illusoires de rendement chiffré.
M. [H] et Mme [V] ne démontrent pas non plus l’erreur prétendument commise sur la rentabilité. Ils ne produisent aucune pièce permettant de renseigner la cour sur les capacités effectives de l’installation basée sur une estimation réalisée sur la durée de vie de l’installation.
Enfin, même s’ils estiment que tout argument écologique serait indécent, ils ne démontrent pas n’avoir été animés que par une volonté de profit. Ils font état d’une disproportion entre l’emprunt et la rentabilité estimant que la société “leur a fait emprunter”. Il convient toutefois d’observer que le recours à l’emprunt relevait de leur choix, qu’ils ont rempli le contrat de crédit qui mentionne notamment le montant de l’emprunt équivalent au prix d’achat, le taux, le coût total, le montant des mensualités et qu’ils n’établissent pas que le seul fait de leur proposer un financement soit constitutif de man’uvres dolosives.
Ils se prévalent encore d’un dol par réticence.
Il n’est toutefois pas démontré que le fait d’ignorer le coût relativement modique de la location du compteur EDF ait été déterminant de leur engagement. Ils déplorent l’absence d’informations sur la durée de vie du matériel, la nécessité de procéder à la dépose des panneaux une fois leur obsolescence constatée, le prix de rachat de l’électricité pratiqué par EDF et les rendements envisageables.
Si le vendeur a une obligation d’information concernant les caractéristiques du matériel, il ne lui incombe pas d’apporter des explications complémentaires sur la durée de vie de tous les composants vendus, les coûts annexes et la rentabilité n’étaient pas entrés dans le champ contractuel. En outre M. [H] et Mme [V] ne démontrent pas que la méconnaissance de ces éléments ait été déterminante de leur engagement.
Les prétentions de M. [H] et Mme [V] relatives à un dol comme à une erreur qui ne sont pas démontrés sont donc rejetées.
Sur le moyen tiré du non-respect du formalisme contractuel
Aux termes de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En conséquence c’est au consommateur qui soutient que son bon de commande est atteint d’une cause de nullité formelle de le démontrer et il ne peut se contenter de soutenir que tel est le cas en produisant un document peu lisible qui n’est pas une copie carbone mais une photocopie.
Il résulte toutefois du document produit suite à la réouverture des débats qui n’est pas un “original” mais une photocopie où apparaissent certaines mentions manuscrites et que des emplacements sont laissés vacants sans qu’il soit possible de déterminer si cette vacance est due à une copie volontairement palie voire remaniée ou à une mention qui n’a jamais été remplie, étant observé que le premier juge avait relevé que le bon produit par la société venderesse alors in bonis était beaucoup plus complet.
Ce bon 1447 communiqué par la société Iratek est versé aux débats devant la cour par la société Cofidis et permet en effet de constater que sont mentionnés :
– la marque et le modèle du ballon, non visibles sur les documents produits par M. [H] et Mme [V] avant et après réouverture,
– les prix unitaires du ballon, du système GSE et de la centrale, lesquels ne sont pas visibles sur les documents produits par M. [H] et Mme [V] avant et après réouverture,
– la marque de la centrale de l’onduleur et des micro onduleurs, le nombre de modules et la croix dans le type de module “monocristallin” ce qui n’est pas visible sur les documents produits par M. [H] et Mme [V] avant et après réouverture.
L’écriture est la même sur le document initialement produit par la société Iratek et désormais versé aux débats par le prêteur mais le nouveau document produit par M. [H] et Mme [V] à la demande de la cour suite à la réouverture des débats fait apparaître à la différence de celui qu’ils produisaient initialement avant la réouverture :
– la puissance du Kit photovoltaïque (3 000 en écriture manuscrite qui se superpose à ce qui figure sur le bon initialement produit par le vendeur et reversé aux débats par la banque) qui n’apparaissait pas du tout sur le bon initialement remis par M. [H] et Mme [V] portant pourtant le même numéro, et apparaît sur celui remis après réouverture et alors pourtant que les pointillés destinés à recevoir la mention apparaissent tous sans altération sur les deux documents produits par ces derniers,
– la puissance d’un module solaire photovoltaïque (250 en écriture manuscrite qui se superpose à ce qui figure sur le bon initialement produit par le vendeur et reversé aux débats par la banque) qui n’apparaissait pas du tout sur le bon initialement remis par M. [H] et Mme [V] avant réouverture portant pourtant le même numéro, et alors pourtant que les pointillés apparaissent tous sans altération sur les deux documents remis par ces derniers,
– la date et le lieu, le nom et la signature du conseiller ainsi que la date et le lieu, le nom et la signature de Mme [V] qui n’apparaissaient pas sur le bon initialement remis par M. [H] et Mme [V] avant réouverture portant pourtant le même numéro, et alors pourtant que les pointillés apparaissent tous sans altération sur les deux documents remis par ces derniers,
– un encadré “informations complémentaires” qui sur le nouveau document produit après réouverture présente 3 lignes de pointillés et mentionne manuscritement sur la ligne du milieu “sous réserve d’acceptation ‘ administratif” mais qui sur le document produit avant la réouverture ne présentait aucune mention mais surtout une seule ligne de pointillés à savoir la troisième ce qui démontre suffisamment que les deux premières avaient été effacées sur le premier document qu’ils avaient remis.
Ces différences plus que troublantes entre deux documents produits à la cour par la même partie sans que ne soit jamais produit d’original doivent conduire à considérer que M. [H] et Mme [V] n’établissent pas que le document qui leur a été remis par le vendeur ne comportait pas les mentions prévues à l’article L. 111-1 du code de la consommation tandis que celui qui avait été produit par la société Iratek 92 était complet et répondait aux exigences de ce texte en ce qui concerne la désignation des biens vendus et le prix. Le texte n’exige en effet pas, contrairement à ce qu’affirment M. [H] et Mme [V], qu’apparaisse de manière distincte le coût de la main d”uvre et le coût de réalisation des prestations de service. Aucune annulation n’est donc encourue de ce chef.
Contrairement à ce qu’a relevé le premier juge, le texte applicable n’exige plus que le bon de commande mentionne le montant des mensualités avec assurance, ni le coût total de financement ni le nom de l’établissement de crédit. Aucune annulation n’est donc encourue de ce chef.
S’agissant de la mention de la possibilité du recours au médiateur et contrairement à ce qu’affirment M. [H] et Mme [V], celle-ci apparaît au paragraphe XII du contrat qu’ils produisent.
S’agissant de la date de livraison en revanche, si le contrat est en son article IV particulièrement clair sur le fait que la livraison n’est pas le raccordement au réseau public, il prévoit à la fois une référence explicite à l’article L. 226-1 du code de la consommation, lequel prévoit un délai de trente jours après la conclusion du contrat et un délai de 200 jours à compter du contrat ce qui est pour le moins contradictoire et démontre qu’en réalité le vendeur ne s’est pas réellement engagé sur un délai ce qui constitue une cause de nullité formelle.
Sur la confirmation du contrat
Par application des dispositions des articles 1181 et suivants du code civil, il est admis que la nullité formelle résultant du texte précité est une nullité relative à laquelle la partie qui en est bénéficiaire peut renoncer par des actes volontaires explicites dès lors qu’elle avait connaissance des causes de nullité.
À défaut d’acte de confirmation ou ratification, il suffit que l’obligation soit exécutée volontairement après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l’époque déterminées par la loi emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l’on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.
Outre que rien dans les conditions générales qui ne reproduisent pas le texte de l’article L. 111-1 du code de la consommation ne permettait à M. [H] et Mme [V] de déceler l’existence de la cause de nullité, il reste que depuis un arrêt rendu le 24 janvier 2024 (pourvoi n° 22-15.199), la première chambre civile de la Cour de cassation juge désormais que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d’avoir une connaissance effective du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l’absence de circonstances, qu’il appartient au juge de relever, permettant de justifier d’une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l’envoi par le professionnel d’une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l’article 1183 du code civil, dans sa rédaction issue l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable, en vertu de l’article 9 de cette ordonnance aux contrats conclus dès son entrée en vigueur.
En l’espèce aucun élément ne permet donc de dire que M. [H] et Mme [V] ont eu connaissance du vice affectant l’obligation critiquée et ont eu l’intention de le réparer, aucun acte ultérieur ne révélant leur volonté univoque de ratifier le contrat en toute connaissance de cause.
Dès lors, la nullité formelle n’a pas été couverte et il y a lieu de confirmer l’annulation du contrat de vente et subséquemment celle du contrat de crédit.
Sur les conséquences de la nullité des contrats
Les contrats étant anéantis, il convient de replacer les parties dans leur état antérieur à la conclusion des contrats.
Sur la vente
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a :
– dit que M. [H] et Mme [V] devront permettre à la société Iratek 92 de venir récupérer les équipements installés chez eux au [Adresse 5], et que faute pour la société Iratek 92 de s’exécuter de son obligation dans le délai de 2 mois suivant la signification de la décision, M. [H] et Mme [V] pourront librement disposer des éléments de l’installation,
– dit que la société Iratek 92 devra en outre remettre la toiture de la maison de M. [H] et Mme [V] en l’état où elle l’a trouvée lorsqu’elle a procédé à l’installation du matériel.
Sur le contrat de crédit
Il est admis que la résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
Dès lors qu’aucun dol n’a été retenu à l’encontre du vendeur, c’est en vain que M. [H] et Mme [V] arguent de la complicité de la société Cofidis dans la commission de ce dol. Il ne peut être reproché à cette dernière d’avoir fourni des imprimés de crédit affecté aux démarcheurs alors qu’il n’est ni soulevé, ni a fortiori établi, que les imprimés de crédit affecté seraient atteints d’irrégularités.
Ils soutiennent encore que la société Cofidis a attendu la signature de l’attestation de réception pour envoyer son accord de financement alors qu’elle ne pouvait ignorer que la cause prépondérante était le revenu et affirment qu’elle n’aurait jamais dû octroyer le crédit au regard de la capacité de production maximale de la centrale. Or la banque n’est pas tenue à un devoir de conseil sur l’opportunité économique de l’opération qu’elle finance et M. [H] et Mme [V] ne démontrent pas en quoi le délai mis par la banque pour envoyer son agrément qu’elle leur a accordé leur a causé un préjudice.
Ils se prévalent de la faute de la banque pour ne pas avoir contrôlé la régularité du contrat principal.
Même si la société Cofidis détenait un contrat numéroté 1225 et fait valoir qu’elle ne pouvait donc vérifier que la régularité dudit contrat dont la cour souligne qu’il avait été également signé par Mme [V] et non le contrat n° 1147, il reste qu’elle n’établit pas que ce contrat était régulier en ce qui concerne le délai de livraison ni d’ailleurs d’autres mentions puisqu’elle n’en produit pas les conditions générales.
Ils font encore valoir que la banque a libéré les fonds sur la base d’un certificat de livraison incomplet et imprécis et alors que l’autorisation de la mairie n’avait pas pu être octroyée compte tenu des délais. Ils précisent à cet égard que la seule attestation de fin de travaux ne dispense pas le prêteur de se référer au bon de commande pour vérifier sa bonne exécution.
En application de l’article L. 312-48 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er juillet 2016, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, les obligations prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci.
Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.
En revanche, il n’appartient pas au prêteur de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et il ne saurait être garant de l’exécution du contrat principal.
Il est rappelé que la société Cofidis a procédé au déblocage des fonds le 26 octobre 2017 entre les mains du vendeur au vu d’une attestation de livraison du 17 août 2017 signée par Mme [V] laquelle ne mentionne pas de numéro de bon de commande de sorte qu’il ne peut être reproché une dichotomie entre cette demande et le bon en possession de la banque, a en outre été remplie manuscritement, fait état des travaux réalisés par la société Iratek 92 et sollicite le déblocage des fonds en faveur du vendeur mais aussi d’une attestation de conformité du 9 octobre 2017 validée par le consuel le 18 octobre 2017.
Il ne peut donc être reproché de faute au prêteur qui n’était pas tenu d’effectuer des vérifications complémentaires.
En outre et en tout état de cause, M. [H] et Mme [V] qui disposent d’une installation raccordée et fonctionnelle n’établissent aucun préjudice en lien avec les fautes qu’ils dénoncent. Or en l’absence de préjudice, ils ne peuvent prétendre priver la banque de sa créance de restitution.
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a sanctionné la société Cofidis du seul fait des fautes retenues et l’a condamnée à rembourser à M. [H] et Mme [V] l’intégralité des sommes versées par eux au jour du prononcé du jugement en exécution du contrat de crédit affecté avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, outre les mensualités postérieures dont M. [H] et Mme [V] se seraient acquittés entre ses mains.
Ces derniers doivent au contraire être condamnés à rembourser le capital soit 29 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir déduction faite des mensualités payées, et ce avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt conformément à la demande.
Le présent arrêt infirmatif constituant le titre permettant le remboursement des sommes perçues de la société Cofidis dans le cadre de l’exécution provisoire, toute condamnation à cet égard apparaît superflue.
Le contrat de crédit étant annulé, il ne peut fonder aucune inscription au FICP et il y a donc lieu d’ordonner la radiation de M. [H] et Mme [V] du FICP à la diligence et aux frais de la société Cofidis sans toutefois qu’une astreinte apparaisse à ce stade nécessaire.
Sur les demandes indemnitaires de M. [H] et Mme [V]
Au titre du devoir de mise en garde
M. [H] et Mme [V] soutiennent que la banque a manqué à ses obligations de conseil et de mise en garde quant à l’opportunité économique du projet et au caractère illusoire des rendements escomptés et en finançant des installations dont elle ne pouvait ignorer le caractère ruineux. Ils invoquent aussi un défaut de vérification de leur capacité d’endettement.
Il convient de rappeler que si le banquier n’a pas de devoir de conseil ou de mise en garde concernant l’opportunité de l’opération principale financée, il est en revanche tenu d’un devoir de mise en garde par rapport au risque d’endettement généré par le crédit contracté au regard des capacités financières de l’emprunteur. Il est admis qu’en l’absence de risque d’endettement, le banquier n’est pas tenu à ce devoir de mise en garde.
La fiche de dialogue signée par M. [H] et Mme [V] mentionne que monsieur est employé au salaire de 1 219 euros par mois, que madame perçoit 1 829 euros de salaire, et que le couple est propriétaire de son logement avec une charge d’emprunt immobilier de 700 euros par mois et n’a aucun crédit à la consommation. L’ensemble de ces éléments rend très raisonnable une demande de crédit qui prévoyait 155 mensualités de 284,87 euros après une période de franchise totale de six mois.
Ainsi il ne saurait être reproché à la banque de n’avoir pas satisfait une obligation générale de mise en garde à laquelle elle n’était pas tenue dès lors que le crédit ne faisait pas naître un risque d’endettement excessif. Il n’appartenait pas au demeurant à la banque de s’immiscer dans les choix de son client et il n’est pas démontré en quoi la banque était tenue d’une obligation particulière de conseil et d’information relative à l’opportunité économique du projet.
Au titre du déblocage des fonds, des frais de remise en état de la toiture et d’un préjudice moral
M. [H] et Mme [V] qui disposent d’une installation raccordée qui fonctionne ne démontrent pas s’être heurtés à un refus de la mairie. Ils sont déboutés de toute demande fondée sur le dol et n’obtiennent l’annulation du contrat que pour un motif de régularité purement formel. Ils ne démontrent subir aucun préjudice allant au-delà de l’annulation des contrats qu’ils ont eux-mêmes poursuivie et de leurs conséquences. Ils doivent donc être déboutés de leurs demandes indemnitaires étant observé que la remise en état de la toiture n’aura lieu d’être que si le vendeur dépose effectivement l’installation et qu’il est en ce cas déjà condamné à cette remise en état et qu’il a été prévu que faute pour le vendeur de déposer l’installation dans un certain délai, M. [H] et Mme [V] pourront en faire ce que bon leur semblera ce qui apparaît couvrir le préjudice invoqué.
Enfin le préjudice esthétique invoqué résulte de leur volonté de faire installer des panneaux et ne saurait être réparé.
M. [H] et Mme [V] doivent donc être déboutés de ces demandes et le jugement confirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
Les motifs qui précèdent rendent sans objet les demandes subsidiaires.
Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
La société Cofidis appelante qui succombe en partie doit être condamnée aux dépens d’appel. Il apparaît toutefois équitable dans la mesure où le jugement est en partie infirmé de laisser supporter à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.
LA COUR,
Statuant par arrêt réputé contradictoire,
Vu l’arrêt du 22 février 2024,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société Cofidis à rembourser à M. [J] [H] et à Mme [G] [V] l’intégralité des sommes versées par eux au jour du prononcé du jugement en exécution du contrat de crédit affecté avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, outre les mensualités postérieures dont M. [H] et Mme [V] se seraient acquittés entre ses mains ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne M. [J] [H] et à Mme [G] [V] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté soit la somme de 29 900 euros déduction faite des mensualités payées, et ce avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt ;
Rappelle que le présent arrêt infirmatif constitue le titre permettant le remboursement des sommes perçues dans le cadre de l’exécution provisoire ;
Ordonne la radiation de M. [J] [H] et Mme [G] [V] du FICP au titre du contrat de crédit annulé à la diligence et aux frais de la société Cofidis ;
Condamne la société Cofidis aux dépens d’appel ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente