Your cart is currently empty!
Il incombe au locataire de panneau publicitaire d’agir dans le délai de 5 ans à compter de la conclusion du contrat de location sous peine de prescription de l’action en nullité.
Si le locataire ne maîtrise pas la langue française, il a l’obligation d’exiger la traduction du contrat de location d’emplacement publicitaire (en langue anglaise par exemple) préalablement à sa signature. En la cause, la demande du locataire tendant au prononcé de la nullité du contrat de louage d’emplacement publicitaire signé le 1er octobre 2016 a par conséquent été déclarée irrecevable comme prescrite. Le 1er octobre 2016, la société Espaces Conseils a signé un contrat de location avec M. [E] pour un emplacement de panneau publicitaire, prenant effet le 1er avril 2017. Le 10 février 2020, M. [E] a promis de vendre son bien immobilier à un promoteur, sous condition de retirer le panneau d’affichage. Un protocole de résiliation du contrat de location a été signé le 12 janvier 2020, mais M. [E] a refusé de l’exécuter. Le 27 janvier 2022, Espaces Conseils a effectué une saisie conservatoire de 30.000 euros sur les fonds de la vente de M. [E]. Le 3 février 2022, la société a assigné M. [E] devant le tribunal judiciaire de Nice. Dans ses conclusions du 30 juin 2023, Espaces Conseils demande le paiement de 30.000 euros, des intérêts, 16.875 euros pour résistance abusive, 7.000 euros selon l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que la confirmation de la saisie conservatoire. M. [E], dans ses conclusions du 1er mars 2024, demande la nullité du contrat de location et du protocole, la mainlevée de la saisie, le débouté des demandes d’Espaces Conseils, et 3.000 euros pour ses frais. Il argue que son consentement était vicié lors de la signature du protocole et que le panneau a simplement été déplacé, permettant à Espaces Conseils de continuer à exploiter ses contrats. Il conteste également la validité du contrat de location en raison de l’absence de traduction en anglais. L’affaire a été clôturée le 7 mars 2024 et sera jugée le 21 mars 2024, avec une décision prévue pour le 18 juin 2024. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE
GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)
JUGEMENT : S.A.S. ESPACES CONSEILS c/ [F] [N] [E]
N°
Du 18 Juin 2024
4ème Chambre civile
N° RG 22/00584 – N° Portalis DBWR-W-B7G-OAPB
Grosse délivrée à
la SELARL BLOUIN AVOCAT
expédition délivrée à
Me Mérouane BRAHIMI
le 18 Juin 2024
mentions diverses
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du dix huit Juin deux mil vingt quatre
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame VALAT Présidente, assistée de Madame BOTELLA, Greffier.
Vu les Articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile sans demande de renvoi à la formation collégiale.
DÉBATS
A l’audience publique du 21 Mars 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 18 Juin 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction, les parties en ayant été préalablement avisées.
PRONONCÉ
Par mise à disposition au Greffe le 18 Juin 2024, signé par Madame VALAT Présidente, assistée de Madame PROVENZANO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DE LA DÉCISION :
contradictoire, en premier ressort, au fond.
DEMANDERESSE:
S.A.S. ESPACES CONSEILS
[Adresse 6]
[Localité 2]
représentée par son représentant légal en exercice y domicilié
représentée par Me Jimmy BLOUIN de la SELARL BLOUIN AVOCAT, avocats au barreau de NICE, avocats plaidant
DÉFENDEUR:
Monsieur [F] [N] [E]
[Adresse 5]
[Localité 1]
représenté par Me Mérouane BRAHIMI, avocat au barreau de NICE, avocat plaidant
Le 1er octobre 2016, la société Espaces Conseils, opérant dans le domaine de l’affichage publicitaire, a conclu avec M. [F] [N] [E], demeurant [Adresse 5] à [Localité 7] un contrat de location portant sur la jouissance d’un emplacement de dispositif publicitaire à compter du 1er avril 2017.
Le 10 février 2020, M. [E] a conclu une promesse de vente de son bien immobilier avec un promoteur, conditionnée à la dépose du panneau d’affichage.
Le 12 janvier 2020, un protocole transactionnel a été signé par la société Espaces Conseils et M. [E] relatif à la résiliation du contrat de location d’emplacement de panneau publicitaire et la suppression de ce panneau.
M. [E] a refusé d’exécuter ce protocole.
Le 27 janvier 2022, la société Espaces Conseils a fait réaliser une saisie conservatoire entre les mains de Maître [G] [Z], notaire, des fonds provenant de la vente du bien de M. [E] à hauteur de 30.000 euros.
Par acte d’huissier en date du 3 février 2022, la société Espaces Conseils a fait assigner M. [E] devant le tribunal judiciaire de Nice.
Par conclusions notifiées le 30 juin 2023, la société Espaces Conseils sollicite :
la condamnation de M. [E] à lui payer la somme de :30.000 euros produisant intérêts au taux légal à compter du jour de la délivrance de l’assignation,16.875 euros au titre de la résistance abusive,7.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;Elle demande en outre au tribunal de rendre définitive et exécutoire la saisie conservatoire réalisée entre les mains de Maître [Z], le 27 janvier 2022 à 11 heures 49.
Elle soutient que le protocole transactionnel signé est valide et devait être exécuté. Elle fait valoir que le contrat de location conclu pour une durée de six ans devait se terminer le 31 mars 2023 et que le démontage du panneau publicitaire lui a cause une perte de chiffre d’affaires d’un montant de 38.196 euros HT par an, soit la somme de 3.183 euros HT par mois pendant la durée du bail. Elle demande réparation pour la perte du droit acquis d’exploiter le panneau implanté chez M. [E] et des recettes afférentes pour le temps restant à courir du bail.
Par conclusions notifiées le 1er mars 2024, M. [E] sollicite :
A titre principal,
le prononcé de la nullité du contrat de location du 1er octobre 2016,le prononcé de la nullité du protocole transactionnel du 13 janvier 2022,le prononcé de la mainlevée de la saisie conservatoire réalisée le 27 janvier 2022,le débouté de la société Espaces Conseils de l’ensemble de ses demandes,la condamnation de la société Espaces Conseils à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [E] fait valoir que son consentement était vicié lors de la signature du protocole transactionnel puisque la société Espaces Conseils lui a fait croire que la rupture du contrat de bail aurait pour conséquence de faire perdre à la société Espaces Conseils un chiffre d’affaires sur seize mois de 43.000 euros, sans produire les contrats signés avec les annonceurs et leur résiliation. Il a cependant observé que le panneau publicitaire litigieux n’a été que déplacé sur la propriété voisine située à environ 200 mètres, permettant ainsi à la société Espaces Conseils de ne pas résilier les contrats avec ses clients et d’amortir le panneau publicitaire. Il soutient également que le contrat de location d’emplacement de panneau publicitaire est entaché de nullité en raison de l’absence de traduction en langue anglaise fournie lors de la signature.
Pour un exposé complet des faits et de l’argumentation des parties, il est renvoyé à leurs écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture de l’affaire est intervenue le 7 mars 2024 et l’affaire a été retenue à l’audience du 21 mars 2024. Le prononcé de la décision a été fixé au 18 juin 2024 par mise à disposition au greffe.
Sur la validité de contrats signés
Selon l’article 1131 du code civil, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
L’article 1137 du même code dispose que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.
sur la validité du contrat de louage d’emplacement publicitaire conclu le 1er octobre 2016
M. [E] fait valoir qu’il ne maîtrise pas la langue française et qu’il a signé le contrat de location de l’emplacement publicitaire sans en comprendre la teneur et notamment la clause pénale relative à la résiliation de ce contrat. Il ajoute que ce contrat était rédigé en petits caractères de sorte que sa lecture était particulièrement difficile et que cela a eu pour conséquence de le tromper sur la portée de ses engagements.
Or, ce contrat ayant été régularisé le 1er octobre 2016, la prescription quinquennale est acquise depuis le 1er octobre 2021 en application des dispositions de l’article 2224 du code civil selon lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Surabondamment, il incombait à M. [E] de préciser à la société Espaces Conseils que, même s’il résidait en France, il ne maîtrisait pas la langue française et d’exiger la traduction du contrat de location d’emplacement publicitaire en langue anglaise préalablement à sa signature. De même, M. [E] n’apporte aucune précision relative à la taille de la police et l’examen de la copie du contrat produite en tant que pièce numéro 2 ne met pas le tribunal en mesure de se prononcer sur le défaut allégué.
La demande de M. [E] tendant au prononcé de la nullité du contrat de louage d’emplacement publicitaire signé le 1er octobre 2016 sera par conséquent déclarée irrecevable comme prescrite.
sur la validité du protocole transactionnel du 12 janvier 2022M. [E] invoque au soutien de sa demande de prononcé de la nullité du protocole transactionnel daté du 12 janvier 2022, et signé par son conseil le 13 janvier 2022, un constat établi par Maître [H], huissier de justice, le 24 janvier 2022 selon lequel un dispositif publicitaire a été installé « sur la propriété mitoyenne à 200 mètres approximativement » offrant « une visibilité identique au panneau » supprimé du bien de M. [E]. Il fait donc valoir que la société Espaces Conseils n’a pas été contrainte de résilier les contrats avec ses clients annonceurs.
Toutefois, la société Espaces Conseils n’était pas tenue d’informer M. [E] du contrat conclu avec Mme [V] le 9 décembre 2021 pour la location d’un nouvel emplacement publicitaire à l’adresse [Adresse 3] dès lors que ce contrat a été négocié de façon indépendante de la signature du protocole transactionnel afin de lui donner la possibilité d’utiliser un nouvel emplacement pour installer un dispositif publicitaire en contrepartie du règlement d’une redevance annuelle de 10.800 euros.
La société Espaces Conseils aurait pu en effet installer sur ce nouvel emplacement un nouveau panneau publicitaire lui procurant des recettes supplémentaires au lieu d’y implanter le panneau démonté à la demande de M. [E].
Le préjudice de résiliation des contrats en cours avec les annonceurs évalué à 3.183 euros ne constitue de surcroît qu’une faible partie des préjudices que la société Espaces Conseils a fait valoir dans le cadre de la négociation du protocole transactionnel, la perte principale découlant de la perte de recettes publicitaires liée à la suppression d’un emplacement accueillant un dispositif publicitaire.
M. [E] ne démontre donc pas des manœuvres et des mensonges de nature à vicier son consentement ni le fait que la société Espaces Conseils a dissimulé des informations ayant un caractère déterminant pour celui-ci.
Aussi, M. [E] sera débouté de sa demande de prononcé de la nullité pour dol du protocole transactionnel conclu le 12 janvier 2022.
Sur la demande en condamnation à payer la somme de 30.000 euros
Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être exécutés de bonne foi.
Le protocole transactionnel signé par la société Espaces Conseils et M. [E] le 12 janvier 2022 stipule que les parties se sont rapprochées et « ont entendu mettre définitivement un terme aux contestations nées ou à naître en acceptant de rédiger et signer [une] transaction dans les termes et conditions du Code civil » concernant la résiliation anticipée du contrat de location d’un emplacement publicitaire à compter du 1er avril 2017.
M. et Mme [E] se sont engagés dans le cadre de cet accord à verser à la société Espaces Conseils « la somme totale, forfaitaire et non réductible, valant ‘solde de tout compte’ […] de trente mille euros (30.000,00 €) euros visant à réparer le préjudice commercial subi par Espaces Conseils lié à la rupture anticipée du contrat et à la dépose du panneau ».
M. [E] sera par conséquent condamné à verser à la société Espaces Conseils la somme de 30.000 euros comme convenu dans l’accord transactionnel signé, assortie d’intérêts au taux légal à compter du 3 février 2022, date de signification de l’assignation à M. [E].
Sur la demande de rendre définitive et exécutoire la saisie conservatoire
L’article L. 162-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le tiers saisi laisse à disposition du débiteur personne physique, dans la limite du solde créditeur du ou des comptes au jour de la saisie, une somme à caractère alimentaire d’un montant égal au montant forfaitaire, pour un allocataire seul, mentionné à l’article L.262-2 du code de l’action sociale et des familles.
L’article L. 211-3 du même code prévoit que le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s’il y a lieu, les cessions de créances, délégations, nantissements ou saisies antérieures.
En l’espèce, la société Espaces Conseils demande au tribunal de rendre définitive et exécutoire la saisie conservatoire réalisée entre les mains de Maître [G] [Z] le 27 janvier 2022 à 11 heures 49 en application d’une ordonnance rendue par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nice le 25 janvier 2022.
Elle verse au soutien de sa demande un procès-verbal de saisie conservatoire de créances délivré par Maître [M] [L], huissier de justice, le 27 janvier 2022 à la SCP [U] [O], [G] [Z] et [T] [A], notaires associés d’une société civile professionnelle titulaire d’un office notarial situé [Adresse 4]).
L’acte délivré fait sommation à l’office notarial de lui faire connaître les créances qu’il détient pour le compte de M. [E] et précise que Maître [G] [Z], notaire, lui a déclaré en réponse : « Je dispose des fonds constitutifs du solde du prix de vente, je prends acte de la saisie formulée entre mes mains. Non juge du fond, je me conformerai à la décision à intervenir. Requis de signer cette déclaration : a satisfait sur l’original. Ces créances étant saisies, je vous rappelle qu’il vous est fait défense de disposer des sommes réclamées, dans la limite de ce que vous devez au débiteur. »
La société Espaces Conseils ne produit cependant pas de façon contradictoire l’ordonnance du juge de l’exécution l’autorisant à procéder à la saisie conservatoire et ne met pas le tribunal en mesure de vérifier le bien-fondé de cette saisie. Elle ne produit pas non plus un justificatif établi par l’office notarial quant à la réalisation effective de cette saisie.
Elle sera par conséquent déboutée de sa demande de rendre définitive et exécutoire la saisie conservatoire réalisée le 27 janvier 2022.
Sur la demande de paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive
L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
La société Espaces Conseils sollicite la condamnation de M. [E] à lui payer la somme de 16.875 euros correspondant à la moitié de l’indemnité forfaitaire dont aurait été redevable M. [E] au titre de la résolution anticipée du contrat de location d’un emplacement publicitaire.
Aux termes du protocole transactionnel signé le 12 janvier 2022, la société Espaces Conseils a cependant accepté de percevoir la somme de 30.000 euros en tant que « somme totale, forfaitaire et non réductible, valant ‘solde de tout compte’ » au titre de la résiliation du contrat de location. Elle ne peut donc pas prétendre au paiement d’une somme supplémentaire en application de ce contrat.
En revanche, le refus de M. [E] de respecter les termes du protocole transactionnel a contraint la société Espaces Conseils d’agir en justice afin de défendre ses droits et a prolongé significativement le délai d’exécution du protocole transactionnel.
M. [E] sera par conséquent condamné à lui payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le non-respect des termes de l’accord transactionnel.
Sur les demandes accessoires
Partie perdante au procès, M. [E] sera condamné aux dépens et à payer à la société Espaces Conseils la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Aucune circonstance ne commande d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision.
Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire rendu en premier ressort:
CONDAMNE M. [F] [N] [E] à payer à la SAS Espaces Conseils la somme de 30.000 euros au titre de l’accord transactionnel signé le 12 janvier 2022, assortie d’intérêts au taux légal à compter du 3 février 2022 ;
CONDAMNE M. [F] [N] [E] à payer à la SAS Espaces Conseils la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
CONDAMNE M. [F] [N] [E] à payer à la SAS Espaces Conseils la somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [F] [N] [E] aux dépens de la présente instance ;
DEBOUTE les parties de toute autre demande ;
RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
Le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT