Contexte de l’affaireM. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont commandé une installation photovoltaïque le 10 décembre 2015 auprès de la SAS ECORENOVE pour un montant de 23 800 euros, financée par un prêt de même montant souscrit auprès de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE. Assignation en justiceLe 31 janvier 2023, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont assigné la SELARL [O] [P], mandataire liquidateur de la SAS ECORENOVE, ainsi que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, pour obtenir l’annulation des contrats de vente et de crédit. Demandes des emprunteursLors de l’audience du 4 juin 2024, les emprunteurs ont demandé la nullité du contrat de vente, l’enlèvement de l’installation à la charge de la liquidation judiciaire, la nullité du contrat de prêt, et le remboursement des sommes versées, ainsi que des dommages pour préjudice moral. Réponse de la banqueLa SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a contesté la recevabilité des demandes des emprunteurs, invoquant la prescription des actions en nullité et arguant que les contrats étaient valides et que les emprunteurs avaient reconnu leur dette par le remboursement anticipé. Prescription des demandesLe tribunal a examiné la prescription des demandes en nullité, concluant que les actions des emprunteurs étaient prescrites, car elles n’avaient pas été introduites dans le délai de cinq ans suivant la signature des contrats. Nullité du contrat de prêtLa demande de nullité du contrat de prêt a été jugée irrecevable, car elle était liée à la nullité du contrat de vente, qui était également prescrite. Responsabilité de la banqueLes actions en responsabilité contre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour dol et pour manquement à ses obligations ont été déclarées prescrites, le tribunal ayant fixé le point de départ de la prescription à la date de signature des contrats ou au déblocage des fonds. Procédure abusiveLa banque a demandé des dommages et intérêts pour procédure abusive, arguant que les emprunteurs savaient que leur action était prescrite. Le tribunal a reconnu cette procédure abusive et a condamné les emprunteurs à verser 1 000 euros à la banque. Dépens et fraisM. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont été condamnés aux dépens de l’instance et à payer 3 000 euros à la banque pour les frais irrépétibles, en plus de la condamnation pour procédure abusive. Conclusion du jugementLe tribunal a déclaré irrecevables les demandes des emprunteurs, a condamné ces derniers à des dommages et intérêts pour procédure abusive, et a ordonné le paiement des dépens et des frais à la banque. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Me Jérémie BOULAIRE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Sébastien MENDES GIL
S.E.L.A.R.L. [O] [P]
Pôle civil de proximité
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PCP JCP fond
N° RG 23/03556 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZVW4
N° MINUTE :
JUGEMENT
rendu le jeudi 31 octobre 2024
DEMANDEURS
-Monsieur [E] [S], demeurant [Adresse 2]
– Madame [B] [R] épouse [S], demeurant [Adresse 2]
tous deux représentés par Me Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI,
DÉFENDERESSES
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dont le siège social est sis [Adresse 1]
Venant aux droits de la société SYGMA BANQUE dont le siège social était [Adresse 3]
représentée par Maître Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #P0173
S.E.L.A.R.L. [O] [P], prise en la personne de Maître [O] [P] demeurant [Adresse 5], es qualité de mandataire liquidateur de la société SAS ECORENOVE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
non comparante, ni représentée
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Christine FOLTZER, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 04 juin 2024
JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 31 octobre 2024 par Christine FOLTZER, Vice-présidente assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière
Décision du 31 octobre 2024
PCP JCP fond – N° RG 23/03556 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZVW4
M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont commandé le 10 décembre 2015, selon bon de commande n° 5243, auprès de la SAS ECORENOVE et après démarchage à domicile, une installation photovoltaïque pour la somme de 23 800 euros.
L’opération a été entièrement financée par un prêt d’un montant de 23 800 euros, souscrit le 10 décembre 2015 par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] auprès de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, remboursable en 144 mensualités d’un montant de 264,83 euros, au TAEG de 4,88 % (taux débiteur de 4,80 %) après franchise de 12 mois.
Par acte d’huissier du 31 janvier 2023, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont assigné la SELARL [O] [P] représentée par Me [O] [P], en qualité de mandataire liquidateur de la SAS ECORENOVE, ainsi que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE par acte du 3 février 2023, afin que soit prononcée l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté du 10 décembre 2015.
L’affaire a été appelée pour la première fois à l’audience du 23 mai 2023 du Tribunal judiciaire de Paris et a fait l’objet de plusieurs renvois afin de permettre aux parties de se mettre en l’état.
A l’audience du 4 juin 2024 à laquelle l’affaire est appelée pour plaidoiries et retenue, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], représentés par leur conseil, déposent des écritures qu’ils font viser, en vertu desquelles ils demandent au juge de céans de :
* Déclarer leurs demandes recevables et bien fondées ;
* Prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] et la SAS ECORENOVE ;
* Mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la SAS ECORENOVE l’enlèvement de l’installation litigieuse et la remise en état de l’immeuble à ses frais ;
* Prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] d’une part et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE d’autre part ;
* Constater que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE a commis une faute dans le déblocage des fonds et doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et la condamner à procéder au remboursement de l’ensemble des sommes versées par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] au titre de l’exécution normale du contrat de prêt litigieux ;
*Condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE à verser à M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] l’intégralité des sommes suivantes :
– 23 800 euros correspondant à l’intégralité du prix de vente de l’installation,
– 14 344,16 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE en exécution du prêt souscrit,
– 5 000 euros au titre du préjudice moral,
– 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
En tout état de cause,
* Prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l’encontre de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ;
* Débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE et la SAS ECORENOVE de l’intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires ;
* Condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE à supporter les dépens de l’instance.
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, représentée par son conseil, dépose des écritures qu’elle fait viser, en vertu desquelles elle demande au juge de céans de :
In limine litis,
* Déclarer la demande en nullité du contrat conclu avec la SAS ECORENOVE sur le fondement d’irrégularités formelles irrecevable car prescrite ;
* Déclarer la demande en nullité du contrat conclu avec la SAS ECORENOVE sur le fondement du dol irrecevable car prescrite ;
* Déclarer en conséquence irrecevables les demandes de M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] en nullité du contrat de crédit conclu avec la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE et en privation de la créance de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE en restitution du capital prêté ; à tout le moins les rejeter du fait de la prescription de l’action en nullité du contrat conclu avec la SAS ECORENOVE et rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ; à tout le moins, déclarer irrecevable l’action en responsabilité formée contre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE car prescrite ;
* Déclarer irrecevable l’ensemble des demandes du fait du remboursement anticipé du contrat de crédit valant reconnaissance de dette ;
* Déclarer en conséquence irrecevables les demandes en nullité du contrat de crédit et en privation de la créance de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ; à tout le moins les rejeter du fait du remboursement anticipé du contrat de crédit valant reconnaissance de dette et rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ; à tout le moins, déclarer irrecevable l’action en responsabilité formée contre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ;
A titre principal,
* Dire et juger que la nullité du bon de commande pour une irrégularité formelle n’est pas encourue ; ou subsidiairement dire et juger que les emprunteurs ont renoncé à se prévaloir d’une irrégularité purement formelle du contrat et ont confirmé la nullité relative alléguée ;
* Dire et juger que le dol allégué n’est nullement établi et que les conditions du prononcé de la nullité de ce chef ne sont pas remplies ;
* En conséquence, déclarer la demande de nullité des contrats irrecevable ; à tout le moins, débouter les emprunteurs de leur demande de nullité ;
* Déclarer irrecevable la demande visant au prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; dire et juger à tout le moins qu’elle n’est pas fondée ; la rejeter ;
Subsidiairement, en cas de nullité des contrats,
* Dire et juger que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE n’a commis aucune faute dans la vérification du bon de commande ni dans le versement des fonds prêtés ;
* Dire et juger de surcroît que les emprunteurs n’établissent pas le préjudice qu’ils auraient subi en lien avec l’éventuelle irrégularité alléguée du bon de commande ou le versement des fonds, donc avec la fonte alléguée à l’encontre de la banque, ce alors même que l’installation fonctionne ;
* Dire et juger en conséquence que les conditions d’engagement de la responsabilité de la banque ne sont pas réunies ;
* Dire et juger que, du fait de la nullité, l’emprunteur est tenu de restituer le capital prêté au prêteur ;
* Condamner en conséquence M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] à régler à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE la somme de 23 800 euros en restitution du capital prêté ;
Très subsidiairement,
* Limiter la réparation qui serait due par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE eu égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs, à charge pour eux de l’établir et eu égard à leur faute ayant concouru à leur propre préjudice ;
* Dire et juger que les emprunteurs restent tenus de restituer l’entier capital à hauteur de 23 800 euros et ordonner la compensation des créances réciproques à due concurrence ;
A titre infiniment subsidiaire, si le tribunal devait prononcer la nullité des contrats et ne pas ordonner la restitution du capital prêté à charge des emprunteurs,
* Condamner M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE la somme de 23 800 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable ;
* Leur enjoindre de restituer, à leurs frais, le matériel installé au liquidateur de la SAS ECORENOVE, dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et dire et juger qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté ;
En tout état de cause,
* Dire et juger que les autres griefs formés par les emprunteurs ne sont pas fondés ;
* Les débouter de leur demande de dommages et intérêts ;
* Débouter M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] de toutes autres demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ;
* Ordonner le cas échéance la compensation des créances réciproques à due concurrence ;
* Condamner in solidum M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
* Condamner in solidum M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] au paiement de la somme de 3 000 euros au bénéfice de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
La SELARL [O] [P] représentée par Me [O] [P], en qualité de mandataire liquidateur de la SAS ECORENOVE, régulièrement convoquée, ne comparaît pas et n’est pas représentée.
Il sera référé aux écritures des parties déposées à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire, susceptible d’appel, est réputée contradictoire et a été mise en délibéré au 31 octobre 2024.
Il sera rappelé que les demandes des parties tendant à voir » dire et juger » ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile en ce qu’elles ne tendent aucunement à ce que soit tranché un point litigieux et se trouvent dépourvues de tout effet juridictionnel. Il ne sera donc pas statué sur celles-ci dans le présent jugement et elles ne donneront pas davantage lieu à mention au dispositif de celui-ci.
Il convient, par ailleurs, de rappeler que, eu égard à l’article 2 du code civil selon lequel » la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif « , les contrats demeurent régis par les dispositions légales sous l’empire desquelles ils ont été passés.
Ainsi, compte tenu de la date des contrats (10 décembre 2015), il sera fait application pour l’ensemble de la décision des dispositions du code de la consommation applicables postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, conformément aux dispositions transitoires de cette loi qui prévoient une entrée en vigueur pour les contrats conclus après le 13 juin 2014 (article 34 de la loi du 17 mars 2014).
De plus, les dispositions applicables en l’espèce sont celles du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2016.
Enfin, l’article 472 du code de procédure civile énonce que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond : le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
I – Sur les fins de non-recevoir tirées de la prescription
1.Sur la prescription de la demande en nullité du contrat de vente
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE invoque la prescription quinquennale des demandes formées par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] au titre de la nullité du contrat de vente. Selon la banque, l’action en nullité d’un contrat est soumise au délai de prescription quinquennale qui démarre au jour de la signature du contrat, soit le 10 décembre 2015.
Concernant la nullité du contrat de vente pour non-respect des dispositions du code de la consommation, la banque affirme que les irrégularités alléguées étaient décelables dès la signature du bon de commande, peu importe que celui-ci ait reproduit ou non les dispositions du code de la consommation.
Concernant la nullité du contrat de vente pour dol, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE affirme que les emprunteurs ne justifient nullement qu’ils auraient découvert des éléments à même de caractériser une erreur postérieurement à la souscription des contrats. De plus, selon la banque, la copie du bon de commande ne fait pas état d’une garantie de revenus ou d’autofinancement. Il n’est donc pas établi que le point de départ de la prescription puisse être reporté dès lors que les emprunteurs ont eu connaissance dès la réalisation du raccordement de la quantité d’électricité produite au vu du chiffre figurant sur son compteur. Enfin, selon la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, à supposer que la date retenue pour faire débuter le délai de prescription soit la date de la première facture (le 25 juillet 2016), la prescription serait tout de même acquise.
Selon M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], le point de départ de la prescription quinquennale n’est pas la date de conclusion du contrat mais la date à laquelle le justiciable a la connaissance effective des faits lui permettant d’agir.
Selon les demandeurs, s’agissant d’une action en responsabilité au titre d’un manquement commis par un cocontractant à ses obligations, les faits justifiant d’agir sont, d’une part, la faute consistant dans le manquement à une obligation et, d’autre part, le préjudice qui en est résulté. Ils estiment qu’il revient à la banque, qui prétend que la prescription est acquise, de démontrer que les emprunteurs consommateurs auraient eu parfaitement connaissance du dommage mais encore de la faute :
– sur le dommage, il consiste pour M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] d’avoir été engagés dans une opération désavantageuse sur la base de fausses promesses ;
– sur la connaissance du fait générateur, il consiste pour le banquier d’avoir commis une faute dans le déblocage des fonds en manquant à son devoir d’information et d’alerte au préjudice des emprunteurs.
M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] estiment ainsi que le délai de prescription doit être un délai » utile » dont le point de départ mobile, apprécié in concreto, doit permettre au justiciable d’exercer effectivement ses droits. Ils s’appuient notamment sur la jurisprudence de la CJUE pour affirmer qu’en cas de manquement de la banque à son devoir, un consommateur ne peut pas être informé quant à la non-conformité d’un contrat avant d’avoir consulté un avocat ou un conseiller juridique. M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ayant légitimement ignoré les faits leur permettant d’agir, notamment la faute commise par la banque, ils affirment que la prescription ne peut leur être opposée.
Sur la recevabilité de la demande en nullité fondée sur le non-respect des exigences posées par le code de la consommation
L’article 2224 du code civil dispose, depuis le 19 juin 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article 1304 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu’en cas d’octroi d’un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur (Civ. 1re, 11 juin 2009, n° 08.11-755).
En l’espèce, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] forment une demande de nullité du contrat de vente qu’ils ont conclu avec la SAS ECORENOVE, sur le fondement de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation.
Les actions en nullité d’un contrat se prescrivent par cinq ans, peu importe le comportement de la banque qui est partie du contrat de crédit affecté. Le bon de commande ayant été signé le 10 décembre 2015, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] avaient jusqu’au 10 décembre 2020 minuit pour assigner la SAS ECORENOVE en nullité du contrat de vente.
S’agissant des éléments de nature à repousser le point de départ du délai de prescription, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] n’apportent pas la preuve qu’ils n’étaient pas en mesure de vérifier au jour de la remise de leur exemplaire du bon de commande, soit le 10 décembre 2015, que ce contrat était incomplet au regard de l’absence de certaines mentions qu’ils jugeaient essentielles pour la validité de celui-ci.
Sur le fait que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] sont des consommateurs, donc des profanes qui ne sont pas en mesure de constater les irrégularités du contrat de vente, il convient de relever que le droit de la consommation protège précisément les consommateurs, notamment en leur octroyant un délai de rétractation après la signature du contrat de vente. La possibilité de ce délai de rétractation est clairement mentionnée sur le bon de commande de sorte que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] pouvaient agir en consommateurs diligents et profiter de ce délai pour se renseigner quant à la validité de leur contrat, par exemple en consultant un professionnel du droit. De plus, ils bénéficiaient encore d’un délai de cinq ans après la signature du bon de commande pour constater les irrégularités affectant le contrat de vente et agir en nullité. En enfermant la prescription dans un délai de cinq ans, le législateur a entendu garantir la sécurité juridique et ne pas permettre qu’un acte puisse être remis en cause au-delà d’une certaine limite. M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] bénéficiaient donc en réalité d’un délai de cinq années pour consulter un conseiller juridique et prendre la décision d’agir en nullité du contrat de vente s’ils estimaient que le contrat était affecté d’une cause de nullité depuis le moment de sa formation, ce qu’ils n’ont pas fait. Ils ne peuvent désormais invoquer à l’appui de leurs prétentions leur propre manque de diligence, quand bien même ils sont des consommateurs.
Concernant la jurisprudence de la CJUE invoquée par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], l’arrêt C-679-18 du 5 mars 2020, dit » OPR-Finance s.r.o. contre GK « , dont la solution est transposable en droit interne, n’est pas applicable au présent litige. Il concerne en effet un contrat de crédit et ses éventuelles clauses pouvant être jugées comme abusives or, en l’espèce, la nullité du contrat de crédit affecté n’est demandée que parce que ce contrat est précisément affecté à un contrat principal. Ce sont les conditions de nullité du contrat de vente qui doivent être examinées.
Ainsi, sur la demande de nullité du contrat de vente pour méconnaissance des dispositions impératives du code de la consommation, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] n’apportent pas la preuve que le point de départ du délai de prescription doive être repoussé.
Le délai pour agir est ainsi expiré depuis le 10 décembre 2015 à minuit, de sorte que l’action introduite au visa des dispositions du code de la consommation par assignation des 31 janvier et 3 février 2023 est prescrite.
Sur la recevabilité de la demande en nullité fondée sur l’existence d’un dol
L’article 2224 du code civil dispose, depuis le 19 juin 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
En application de l’article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l’action en nullité d’une convention se prescrit par cinq ans à compter du jour où l’erreur ou le dol a été découvert. Cette découverte est un fait juridique, qui se prouve donc par tous moyens. Il appartient au juge qui déclare l’action irrecevable comme prescrite de constater la date de la découverte de l’erreur alléguée (Civ. 1re, 14 octobre 2010, n° 09-13.646).
En l’espèce, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] demandent que le contrat de vente soit déclaré nul pour cause de dol, au motif que la SAS ECORENOVE a présenté l’installation photovoltaïque comme étant rentable, voire autofinancée.
S’agissant de la promesse d’autofinancement et de rentabilité de l’installation, celle-ci doit être formalisée par une mention dans le bon de commande signé par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] le 10 décembre 2015, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, et non dans une simulation de projet ou des documents commerciaux non versés au dossier.
De plus, la preuve de la rentabilité effective ne peut résulter que de l’envoi de la première facture de revenus d’électricité de ERDF, seul document pouvant permettre au demandeur d’évaluer la rentabilité de son installation photovoltaïque. Sur ce point, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] produisent une facture, établie le 25 juillet 2020 sur la période allant du 26 juillet 2019 au 25 juillet 2020, pour un montant de 465,80 euros. Cette facture n’est pas la première qu’ils ont reçue puisqu’elle indique : » date ancien relevé du : 26/07/2019 « . Il est également porté sur cette facture la mention manuscrite : » moyenne du 25 avril 2016 au 25 juillet 2020 » avec les calculs qui correspondent, laissant entendre que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] produisent et revendent leur électricité depuis le 25 avril 2016.
S’il est exact que la signature du contrat de vente ne permettait pas à M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] de constater le manque de rentabilité voire d’autofinancement de leur installation photovoltaïque, ceux-ci pouvaient toutefois s’en apercevoir à compter de la réception de la première facture. Celle-ci n’étant pas produite par les demandeurs, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] n’apportent pas la preuve nécessaire pour retenir un point de départ du délai de prescription postérieur à la date de signature du contrat de vente.
Il convient de retenir la date de signature du contrat de vente comme point de départ de la prescription, soit le 10 décembre 2015, de sorte que l’action introduite en nullité du contrat de vente sur le fondement du dol pour manquement à la rentabilité de l’installation achetée est prescrite depuis le 10 décembre 2020 minuit.
Dès lors, l’action introduite par assignation des 31 janvier et 3 février 2023 sur le fondement du dol est prescrite.
2.Sur la recevabilité de la demande en nullité du contrat de prêt
Selon la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, le fait que la demande de nullité du contrat de vente pour non-respect des dispositions impératives du code de la consommation et pour dol soit prescrite rend la demande de nullité du contrat de crédit affecté également irrecevable, à tout le moins infondée. La banque sollicite donc que la demande d’annulation du contrat de crédit affecté soit déclarée irrecevable, à tout le moins soit rejetée.
En l’espèce, il résulte des développements précédents et de l’interdépendance des contrats de vente et de prêt prévue par les dispositions de l’article L. 311-32 du code de la consommation devenu L. 312-55 que les demandes d’annulation du contrat de prêt conclu le 10 décembre 2015 ne pourront prospérer tant qu’elles sont fondées sur le lien entre le contrat principal de vente et l’affectation du contrat de crédit à ce contrat principal.
La demande de nullité du contrat de prêt souscrit par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], subséquente à la demande d’annulation du contrat de vente, est donc également irrecevable.
3.Sur la prescription de la demande concernant les éventuelles fautes de la banque
M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] soulèvent la faute de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE pour participation au dol et dans le déblocage des fonds d’une part, et pour manquement à son obligation de conseil et de mise en garde d’autre part.
Sur la faute de la banque pour participation au dol et dans le déblocage des fonds
Selon la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, l’action en responsabilité initiée à son encontre n’est que la conséquence de l’action en nullité du bon de commande ; l’irrecevabilité de la demande de nullité des contrats entraîne donc l’irrecevabilité de la demande formée par l’emprunteur visant à la privation de la créance de la banque en restitution du capital prêté. L’action en responsabilité de la banque doit donc être déclarée irrecevable ou doit être rejetée sur ce fondement.
En tout état de cause, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ajoute que l’action en responsabilité de la banque est prescrite puisque la prescription quinquennale s’applique et que le délai commence à courir au moment où les emprunteurs ont eu connaissance à la fois du préjudice mais aussi du manquement commis par la banque :
-S’agissant de la faute de la banque dans le déblocage des fonds, le délai a commencé à courir au jour dudit déblocage, soit le 25 avril 2016 ;
-S’agissant de la faute de la banque qui n’aurait pas vérifié la régularité du bon de commande, à nouveau la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE estime que le point de départ du délai de prescription ne peut être repoussé au-delà de la date de déblocage des fonds ;
-S’agissant de la faute de la banque qui n’a pas alerté les demandeurs quant au manque de rentabilité de l’achat d’une installation photovoltaïque, le point de départ du délai de prescription ne peut démarrer après la date d’émission de la première facture de revente d’électricité à EDF, soit le 25 juillet 2016, de sorte que la prescription est bien acquise.
Enfin, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE estime que la jurisprudence de la CJUE invoquée par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] n’est pas applicable en l’espèce.
L’article 2224 du code civil dispose, depuis le 19 juin 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article 1304 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu’en cas d’octroi d’un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur (Civ. 1re, 11 juin 2009, n° 08.11-755).
Concernant le point de départ du délai de prescription pour l’action en responsabilité de la banque qui aurait commis une faute en participant au dol, il ressort des développements précédents que celui-ci doit être fixé à la date où il a été possible pour M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] de prendre conscience dudit dol, soit la date d’établissement de la première facture, ou à défaut la date de conclusion du contrat qui correspond au moment où le dol a été commis. Or les demandeurs ne versent pas au dossier les premières factures de production et de revente d’électricité à EDF. Ainsi, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] n’apportent pas la preuve que le point de départ doit être repoussé ultérieurement à la date de conclusion de contrat.
A défaut de cet élément, il convient de retenir comme point de départ du délai de prescription de l’action en nullité pour dol le jour où le dol est supposé avoir été commis, soit le jour de la conclusion du contrat. Le point de départ du délai de prescription est donc fixé au 10 décembre 2015 de sorte que l’action en responsabilité de la banque pour avoir participé au prétendu dol est prescrite depuis le 10 décembre 2020 à minuit.
L’action intentée par assignation des 31 janvier et 3 février 2023 en responsabilité de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE sur le fondement de sa participation au dol est donc irrecevable car prescrite.
Concernant la responsabilité de la banque dans le déblocage des fonds, le point de départ de la prescription doit être fixé à la date dudit déblocage, soit le 25 avril 2016 (pièce n° 6 de la société défenderesse). C’est donc à compter de cette date que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont pu se rendre compte des éventuels manquements de la banque dans l’accomplissement de ses obligations.
Le point de départ de la prescription de l’action en responsabilité de la banque est donc le 25 avril 2016 de sorte que le délai de prescription est écoulé depuis le 25 avril 2021 minuit.
L’action introduite par assignation des 31 janvier et 3 février 2023 en responsabilité de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE sur le fondement de sa faute dans le déblocage des fonds est donc irrecevable puisque prescrite.
Il n’y a donc pas lieu d’examiner la responsabilité de la banque pour faute.
Sur les manquements de la banque quant à son devoir de conseil et de mise en garde
Selon la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, les demandes de M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] fondée sur les manquements éventuels de la banque quant à son devoir de conseil et de mise en garde doivent également être déclarées irrecevables.
L’absence d’annulation du contrat de vente n’interdit pas aux emprunteurs de rechercher la responsabilité de la banque sous réserve de la preuve d’une faute la banque, de l’existence un préjudice de l’acquéreur-emprunteur et d’un lien de causalité entre la faute de la banque et ledit préjudice (Civ. 1re, 19 février 2014, n° 12-26.100 ; Civ. 1re, 26 septembre 2019, n° 18-14.100).
Depuis le 1er mai 2011, l’établissement de crédit consentant un crédit à la consommation régi par le Code de la consommation doit fournir à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière ainsi qu’attirer l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du crédit proposé et sur les conséquences que ce crédit peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement (art. L. 311-8, al. 1er du code de la consommation).
Ce devoir d’information, sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts, doit être distingué du devoir de mise en garde.
L’obligation de mise en garde à laquelle peut être tenu un établissement de crédit à l’égard d’un emprunteur non averti ne porte donc que sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi du prêt et il faut en déduire que si le crédit est adapté au regard des capacités financières de l’emprunteur et du risque de l’endettement né de l’octroi du prêt à la date de la conclusion du contrat, la banque n’est tenue à aucune obligation de mise en garde (Com., 7 juillet 2009, n° 08-13.536 ; Civ. 1re, 19 novembre 2009, n° 08-13.601 ; Com., 30 novembre 2010, n° 10-30.274). Le manquement à l’obligation de mise en garde est sanctionné par l’octroi de dommages et intérêts.
L’article 2224 du code civil dispose, depuis le 19 juin 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Il résulte par ailleurs des dispositions de l’article 1304 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu’en cas d’octroi d’un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur (Civ. 1re, 11 juin 2009, n° 08.11-755).
En l’espèce, les contrats de vente et de crédit affecté ont été signé le 10 décembre 2015 et les fonds ont été débloqués le 25 avril 2016 selon l’historique de compte versé par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE. C’est au plus tard au moment du versement des fonds que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont pu se rendre de compte que la banque aurait manqué à ses obligations, de sorte que l’action en responsabilité de la banque est prescrite depuis le 25 avril 2021 minuit.
L’action introduite par assignation des 31 janvier et 3 février 2023 sur le fondement des manquements de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE quant à son devoir de conseil et de mise en garde est donc irrecevable puisque prescrite.
Il n’y a donc pas lieu d’examiner les manquements de la banque au titre de son devoir de conseil et de mise en garde
II – Sur l’allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE sollicite que M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] soient condamnés au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive à hauteur de 5 000 euros. Selon la banque, les emprunteurs ne pouvaient pas ignorer que leur action était prescrite. Ils ont pourtant fait le choix d’assigner les sociétés, et ce alors que leur installation photovoltaïque est parfaitement fonctionnelle et productive de revenus générés par la revente de l’électricité.
A l’appui de ses prétentions, la banque verse un article de l’association UFC QUE CHOISIR daté du 10 septembre 2018 relatant les agissements de certaines associations peu scrupuleuses qui promettent à des particuliers l’annulation de leur contrat de crédit et l’obtention de dommages et intérêts.
Aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En application de l’article 1240 code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Il est de jurisprudence constante que la faute, même non grossière ou dolosive suffit, lorsqu’un préjudice en résulte, à justifier une condamnation à des dommages-intérêts pour abus du droit d’agir en justice ou de résistance abusive à une action judiciaire, notamment lorsque l’auteur de l’action judiciaire ne pouvait pas légitimement penser qu’il obtiendrait gain de cause. Toutefois le simple fait que toutes les demandes d’une partie aient été rejetées ne saurait caractériser un abus de droit. Il en est de même du seul défaut de paiement.
Il est également constant que l’exercice d’une action en justice est un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol.
En outre, conformément à l’article 2274 du code civil, la bonne foi est toujours présumée, et que c’est à celui qui se prévaut de la mauvaise foi d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ont conclu un contrat de vente avec la SAS ECORENOVE et un contrat de crédit affecté avec la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE le 10 décembre 2015, soit plus de sept années avant d’assigner les sociétés en nullité du contrat.
Ils ne justifient d’aucune plainte ni contestation pendant cette durée auprès de l’une des sociétés et ils ne contestent pas que leur installation photovoltaïque soit en parfait état de marche et génératrice d’électricité et de revenus, quand bien même ceux-ci seraient moindres que ceux espérés lors de la conclusion du contrat – espoirs non contractualisés. L’assignation des sociétés afin d’obtenir l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté dans ce contexte, largement après l’écoulement du délai de prescription, apparaît donc surprenante.
De plus, à l’appui de leurs prétentions, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ne versent qu’un » rapport d’expertise » (pièce n° 3) qui n’a pas été établi par un commissaire de justice de manière contradictoire et qui n’est pas de nature à démontrer un quelconque préjudice subi par les demandeurs au regard des éléments entrés dans le champ contractuel.
Enfin, il est de jurisprudence constante que le délai de prescription quinquennale ne commence pas à s’écouler au jour où les consommateurs consultent un professionnel du droit mais bien au jour où les faits susceptibles d’entraîner l’annulation des contrats se produisent (qu’il s’agisse du jour de la signature du contrat, du jour où la banque a libéré les fonds ou encore du jour où les consommateurs reçoivent leur première facture de revente d’électricité). Ainsi, M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], dont le conseil est coutumier de ce contentieux, ne pouvaient pas ignorer que leur action en justice n’avait aucune chance de prospérer.
Il s’ensuit que la faute consistant en le fait d’exercer une action en justice de manière abusive est démontrée.
Le fait d’exercer une action en justice ne peut donner lieu au paiement d’une amende civile sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile que si cet article est mis en œuvre de la propre initiative de la juridiction elle-même, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Cette même action peut néanmoins donner lieu à la condamnation au paiement de dommages et intérêts si la procédure abusive a causé un préjudice à la partie qui le demande.
En l’espèce, le fait d’assigner en justice la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE en annulation du contrat de crédit affecté dans un tel contexte a nécessairement causé un préjudice à l’établissement bancaire.
La demande de dommages et intérêts sur le fondement de la procédure abusive, au titre des articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil, sera donc accueillie mais revue à de plus justes proportions.
M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] seront condamnés solidairement au paiement de la somme de 1 000 euros en réparation du préjudice de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE dans le cadre de la procédure abusive.
III – Sur les dépens, les frais irrépétibles et l’exécution provisoire
M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R], qui succombent en leurs demandes, supporteront solidairement les dépens d’instance en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 3 000 euros lui sera ainsi accordée.
Il est rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,
DECLARE irrecevable comme prescrite la demande en nullité du contrat de vente conclu le 10 décembre 2015 entre M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] d’une part et la SAS ECORENOVE d’autre part en tant qu’elle est fondée sur la méconnaissance des dispositions du code de la consommation ;
DECLARE irrecevable comme prescrite la demande en nullité du contrat de vente conclu le 10 décembre 2015 entre M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] d’une part et la SAS ECORENOVE d’autre part en tant qu’elle est fondée sur le dol ;
DECLARE en conséquence irrecevable la demande subséquente de nullité du contrat de crédit affecté conclu le 10 décembre 2015 entre M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] d’une part et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE d’autre part ;
DECLARE irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE fondée sur la participation au dol et formée par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ;
DECLARE irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE fondée sur la faute dans le déblocage des fonds et formée par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ;
DECLARE irrecevable comme prescrite l’action dirigée contre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE fondée sur les manquements de la banque à ses obligations de conseil et de mise en garde et formée par M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] ;
CONDAMNE solidairement M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] au paiement de la somme de 1 000 euros à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
CONDAMNE solidairement M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] aux dépens ;
CONDAMNE solidairement M. [E] [S] et Mme [B] [S] née [R] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
La greffière La juge des contentieux de la protection
Décision du 31 octobre 2024
PCP JCP fond – N° RG 23/03556 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZVW4