Sommaire Constitution du contratPar acte du 4 juillet 2016, M. [V] [T] et son épouse, Mme [S] [K], ont signé un contrat d’installation d’une centrale photovoltaïque avec la SARL Groupe France Eco-Logis. Ce même jour, ils ont également souscrit un prêt de 26 900 euros auprès de la société Cofidis pour financer cette installation. Réalisation des travauxLes travaux d’installation ont été effectués en août 2016, et la centrale photovoltaïque a été raccordée au réseau électrique le 5 janvier 2017. Assignation en nullitéLe 10 et 12 juin 2020, les époux [T] ont assigné les sociétés France Eco-Logis et Cofidis en nullité des contrats. La société France Eco-Logis n’a pas comparu à l’audience. Jugement du tribunalLe tribunal judiciaire de Troyes a rendu un jugement le 26 mai 2023, déclarant nuls le contrat de vente et le contrat de crédit. Il a également condamné la société France Eco-Logis à verser 4 950 euros aux époux [T] pour la dépose de la centrale, et la société Cofidis à rembourser 20 893,80 euros, en plus des mensualités payées après septembre 2021. Appel de la société France Eco-LogisLe 14 août 2023, la société France Eco-Logis a interjeté appel de la décision, demandant la réformation du jugement et contestant la nullité des contrats, tout en affirmant avoir respecté ses obligations légales. Demandes des époux [T]Les époux [T] ont également formulé des demandes en appel, cherchant à confirmer le jugement tout en demandant le remboursement intégral des sommes versées à la société Cofidis et la restitution du prix de l’installation. Demandes de la société CofidisLa société Cofidis a demandé à la cour d’infirmer le jugement, de débouter les époux [T] de leurs demandes et de les condamner à reprendre l’exécution du contrat de crédit. Conséquences de la nullité des contratsLe tribunal a statué sur la nullité des contrats, ordonnant la restitution des biens et des sommes versées. La société France Eco-Logis a été condamnée à récupérer le matériel installé, tandis que les époux [T] devaient restituer le capital emprunté à Cofidis. Préjudice moralLes époux [T] ont été reconnus comme ayant subi un préjudice moral, ce qui a conduit à l’octroi de 3 000 euros de dommages et intérêts à leur égard. Décision finale de la courLa cour a confirmé en partie le jugement initial, en ordonnant à la société France Eco-Logis de récupérer le matériel à ses frais et de rembourser les époux [T] pour le prix de vente de l’installation photovoltaïque. La société Cofidis a été déboutée de ses demandes. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelles sont les conséquences juridiques de la nullité des contrats conclus entre les époux [T] et les sociétés France Eco-Logis et Cofidis ?La nullité des contrats, tant celui de vente que celui de crédit, entraîne des conséquences juridiques précises, régies par le Code civil et le Code de la consommation. Selon l’article 1178 du Code civil, « la nullité d’un contrat entraîne la restitution des prestations effectuées. » Cela signifie que les parties doivent être remises dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat. En l’espèce, la société France Eco-Logis est condamnée à récupérer à ses frais le kit photovoltaïque et tous les éléments afférents à l’installation. De plus, l’article L. 242-1 du Code de la consommation stipule que la nullité d’un contrat conclu hors établissement entraîne la restitution des sommes versées par le consommateur. Ainsi, les époux [T] doivent être remboursés des 26 900 euros versés pour l’installation, ce qui a été confirmé par le jugement. Il est également important de noter que la nullité du contrat de crédit, accessoire au contrat principal, entraîne la restitution des mensualités déjà payées par les époux [T]. Ainsi, la société Cofidis est condamnée à rembourser les sommes versées au titre du crédit affecté déclaré nul, conformément à l’article L. 221-27 du Code de la consommation. Quels sont les droits des consommateurs en matière de contrats conclus hors établissement ?Les droits des consommateurs dans le cadre de contrats conclus hors établissement sont principalement régis par le Code de la consommation, notamment par les articles L. 111-1, L. 221-5, et L. 221-9. L’article L. 111-1 impose au professionnel de fournir au consommateur des informations claires et compréhensibles sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix, et les modalités de livraison. L’article L. 221-5 précise que le consommateur doit recevoir un exemplaire du contrat, daté et signé, qui doit inclure toutes les informations nécessaires, y compris celles relatives au droit de rétractation. En cas de non-respect de ces obligations, comme le stipule l’article L. 242-1, le contrat peut être déclaré nul. Dans le cas présent, le bon de commande ne respectait pas ces exigences, ce qui a conduit à la nullité des contrats. Les époux [T] n’ont pas été correctement informés de leurs droits, notamment en ce qui concerne le délai de rétractation, ce qui constitue une violation de leurs droits en tant que consommateurs. Comment la nullité d’un contrat affecte-t-elle les obligations des parties ?La nullité d’un contrat a pour effet d’annuler toutes les obligations qui en découlent, comme le prévoit l’article 1178 du Code civil. Cela signifie que les parties ne peuvent plus exiger l’exécution des obligations contractuelles. Dans le cas présent, la société France Eco-Logis ne peut pas exiger des époux [T] qu’ils continuent à exécuter le contrat de vente, et la société Cofidis ne peut pas exiger le remboursement du crédit affecté, puisque ces contrats ont été déclarés nuls. De plus, l’article 1338 du Code civil stipule que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la connaissance du vice et à l’intention de le réparer. Les époux [T] n’ayant pas eu connaissance des vices affectant le contrat, ils ne peuvent pas être considérés comme ayant confirmé le contrat par leur comportement. Ainsi, les obligations des parties sont entièrement annulées, et chaque partie doit restituer ce qu’elle a reçu, conformément aux principes de la restitution en nature. Quelles sont les implications de la nullité pour les préjudices moraux ?La nullité des contrats peut également avoir des implications sur les préjudices moraux subis par les parties. Selon l’article 1240 du Code civil, « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Dans cette affaire, les époux [T] ont subi un préjudice moral en raison des fautes commises par la société France Eco-Logis et la société Cofidis. Le tribunal a reconnu ce préjudice et a accordé une indemnisation de 3 000 euros, ce qui est conforme à la jurisprudence en matière de réparation du préjudice moral. Il est important de noter que la réparation du préjudice moral est distincte de la restitution des sommes versées. Elle vise à compenser la souffrance ou l’angoisse causées par les fautes des parties, et le montant accordé est laissé à l’appréciation du juge, qui doit tenir compte des circonstances de l’affaire. Ainsi, la reconnaissance du préjudice moral et l’indemnisation qui en découle sont des conséquences importantes de la nullité des contrats, permettant aux victimes de recevoir une compensation pour les désagréments subis. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
du 10 décembre 2024
N° RG 23/01321
N° Portalis DBVQ-V-B7H-FL7Z
SARL GROUP FRANCE ECO-LOGIS
c/
1) [S] [K], épouse [T]
2) [V] [T]
3) SA COFIDIS
Formule exécutoire le :
à :
la SELARL SF CONSEIL
ET ASSOCIES
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 10 DECEMBRE 2024
APPELANTE :
d’un jugement rendu le 26 mai 2023 par le tribunal judiciaire de TROYES,
La Société Groupe France Éco-Logis, société à responsabilité limitée au capital de 45 000 euros, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro B 508.762.390, représentée par son représentant légal, demeurant en cette qualité au siège :
[Adresse 8],
[Adresse 3]
[Localité 6],
Représentée par Me Brigitte BERNARD, avocat au barreau de REIMS,et ayant pour avocat la SELARL Cabinet Fabienne CHATEL-LOUROZ, avocats au barreau de LYON,
INTIMES :
1) Madame [S] [K] épouse [T], née le 3 mai 1989, à [Localité 9] (AUBE), de nationalité française, demeurant :
[Adresse 1]
[Localité 2],
Représentée par Me Benjamin MADELENAT, avocat au barreaau de l’AUBE (SELARL SF CONSEIL ET ASSOCIES), et ayant pour avocat Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS,
2) Monsieur [V] [T], né le 20 août 1984 à [Localité 9] (AUBE),
de nationalité française, demeurant :
[Adresse 1]
[Localité 2],
Représenté par Me Benjamin MADELENAT, avocat au barreau de l’AUBE (SELARL SF CONSEIL ET ASSOCIES), et ayant pour avocat Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS,
3) la SA COFIDIS, société anonyme, à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de LILLE METROPOLE sous le numéro 325.307.106, venant aux droits de la SA GROUPE SOFEMO suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015, prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège :
[Adresse 7]
[Adresse 5]
[Localité 4],
Représentée par Me Philippe PONCET, avocat au barreau de REIMS, et ayant pour avocat la SELARL INTERBARREAUX PARIS-LILLE H.K.H AVOCATS,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre,
Madame Sandrine PILON, conseillère,
Madame Anne POZZO DI BORGO, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS ET DE LA MISE A DISPOSITION :
Madame Jocelyne DRAPIER, greffière,
DEBATS :
A l’audience publique du 21 octobre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 10 décembre 2024,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024 et signé par Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et Madame Jocelyne DRAPIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Par acte du 4 juillet 2016, M. [V] [T] et son épouse, Mme [S] [K] (les époux [T]), ont conclu avec la SARL Groupe France Eco-Logis (la société France Eco-Logis) un contrat d’installation d’une centrale photovoltaïque. Le même jour et pour financer cette installation, ils ont souscrit un contrat de prêt auprès de la société Cofidis d’un montant de 26 900 euros.
Les travaux ont été réalisés en août 2016 et l’installation a été raccordée au réseau électrique le 5 janvier 2017.
Suivant exploits des 10 et 12 juin 2020, les époux [T] ont fait assigner les sociétés France Eco-Logis et Cofidis en nullité des contrats.
La société France Eco-Logis n’a pas comparu.
Par jugement réputé contradictoire du 26 mai 2023, le tribunal judiciaire de Troyes a :
– déclaré nul le contrat de vente et de prestation de service conclu entre les époux [T] et la société France Eco-Logis,
– déclaré nul le contrat de crédit affecté conclu entre les époux [T] et la société Cofidis,
– débouté la société Cofidis de sa demande tendant à condamner les époux [T] à poursuivre l’exécution du crédit affecté conformément au tableau d’amortissement,
– condamné la société France Eco-Logis à payer aux époux [T] la somme de 4 950 euros pour la dépose de la centrale photovoltaïque,
– condamné la société Cofidis à payer aux époux [T] la somme de 20 893,80 euros outre les mensualités acquittées postérieurement au mois de septembre 2021 au titre des sommes payés en remboursement du crédit affecté déclaré nul,
– condamné les époux [T] à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement en restitution du capital du crédit affecté déclaré nul,
– débouté les époux [T] de leur demande tendant à la condamnation de la société France Eco-Logis à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros en restitution du capital du crédit affecté déclaré nul,
– condamné in solidum les sociétés France Eco-Logis et Cofidis à payer aux époux [W] la somme de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral,
– débouté les époux [T] du surplus de leurs demandes d’indemnisation,
– débouté la société Cofidis de sa demande de garantie formée contre la société France Eco-Logis,
– condamné in solidum les sociétés France Eco-Logis et Cofidis aux dépens et à payer aux époux [T] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 14 août 2023, la société France Eco-Logis a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 13 mai 2024, elle demande à la cour de :
– réformer le jugement en ce qu’il déclare nul le contrat de vente et le contrat de crédit, la condamne aux dépens et à payer aux époux [T] les sommes de 4 950 euros pour la dépose de la centrale, 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral et 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– statuant à nouveau,
– juger qu’elle a respecté l’ensemble de ses obligations légales,
– constater que son bon de commande signé le 4 juillet 2016 contient l’ensemble des informations nécessaires à la compréhension par le consommateur,
– juger que le bon de commande respecte les dispositions du code de la consommation,
– en conséquence,
– débouter les époux [T] de leur demande de nullité du bon de commande et des conséquences de cette annulation,
– juger que les époux [T] ont confirmé le contrat de vente souscrit le 4 juillet 2016 par des actes positifs couvrant les irrégularités soulevées et ce pendant 4 ans avant l’assignation, soit 7 années à ce jour,
– débouter les époux [T] de leur demande de nullité du contrat du 4 juillet 2016,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les époux [T] de leur demande tendant à sa condamnation à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros en restitution du crédit affecté déclaré nul, et en ce qu’il les a déboutés du surplus de leurs demandes d’indemnisation,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Cofidis de sa demande de garantie formée contre la concluante,
– débouter les époux [T] de leur demande de remboursement de la somme de 26 900 euros par la concluante,
– débouter les époux [T] de toutes leurs demandes,
– débouter la société Cofidis de sa demande tendant à la voir condamner à lui payer la somme de 35 564 euros et celle de 26 900 euros,
– débouter la société Cofidis de sa demande à son encontre de garantir les emprunteurs de la condamnation au titre de la restitution du capital,
– débouter la société Cofidis de l’intégralité de ses demandes dirigées contre elle,
– en toute hypothèse,
– condamner les demandeurs à lui verser la somme de 12 000 euros au titre de l’indemnisation de la dépréciation subie,
– juger que des sommes qui pourraient être mises à sa charge doivent être déduits les remboursements effectués à la société Cofidis, les aides et déductions perçues et les revenus générés par l’installation,
– condamner les époux [T] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 24 septembre 2024, les époux [W] demandent à la cour de :
– confirmer le jugement sauf en ce qu’il les a déboutés de leur demande de condamnation de la société France Eco-Logis à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros en restitution du capital du crédit affecté et de leurs autres demandes,
– statuant à nouveau,
– débouter les sociétés Cofidis et France Eco-Logis de toutes ses demandes,
– ordonner le remboursement par la société Cofidis de l’intégralité des sommes qui lui ont été versées par les époux [T] outre les mensualités acquittées postérieurement,
– condamner la société France Eco-Logis à rembourser à la banque la somme de 26 900 euros correspondant au prix de l’installation,
– à titre subsidiaire,
– condamner la société France Eco-Logis à leur payer la somme de 26 900 euros correspondant au prix de l’installation,
– à titre infiniment subsidiaire,
– si la cour infirme la décision en ce qu’elle a prononcé la nullité des conventions,
– prononcer la déchéance du droit de la banque aux intérêts du crédit affecté,
– à titre subsidiaire,
– ordonner à la société France Eco-Logis que soit effectuée à sa charge la dépose des panneaux et la remise en état de la toiture de leur habitation dans les deux mois de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– en tout état de cause,
– condamner solidairement les sociétés Cofidis et France Eco-Logis à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 5 avril 2024, la société Cofidis demande à la cour de :
– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– statuant à nouveau,
– déclarer les époux [T] mal fondés en leurs demandes et les en débouter,
– la déclarer recevable en ses demandes,
– condamner les époux [T] à reprendre l’exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles,
– condamner les époux [T] à lui rembourser en une seule fois l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire au jour de l’arrêt à intervenir,
– à titre subsidiaire,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné les époux [T] au remboursement du capital,
– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Cofidis à payer aux époux [T] la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral,
– condamner solidairement les époux [T] à lui rembourser ‘la somme de 26 900 euros au taux légal déduction à faire des échéances payées’,
– à titre plus subsidiaire,
– condamner la société France Eco-Logis à lui payer la somme de ’35 564,40 euros au taux légal’ à compter de l’arrêt à intervenir,
– à titre infiniment subsidiaire condamner la société France Eco-Logis à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
– en tout état de cause,
– condamner la société France Eco-Logis à relever et garantir la société Cofidis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit des époux [T],
– condamner tout succombant à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 1er octobre 2024 et l’affaire a été renvoyée pour être plaidée à l’audience du 21 octobre suivant.
– sur la nullité du contrat principal :
Le droit commun de la vente impose au vendeur d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige, tout pacte obscur s’interprétant contre lui.
Le droit de la consommation, en particulier l’article L. 111-1 du code de la consommation, dont les dispositions sont d’ordre public, impose au professionnel de communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible un certain nombre d’informations. Ainsi il doit lui communiquer de manière lisible et compréhensible les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L.113-3-1;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son inter-opérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.
L’article L. 221-9 du code de la consommation prévoit que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties, que ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5 et qu’il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
Aux termes de l’article L. 242-1 du même code, les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
Contrairement aux affirmations de la société appelante, il résulte des articles L. 221-9 et L. 242-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable au présent litige, que, lorsque les informations relatives à l’exercice du droit de rétractation mentionnées à l’article L. 221-5, 2°, dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement ou sont erronées, la nullité de ce contrat est encourue.
Il n’est pas discuté que le contrat conclu par les époux [T] avec la société France Eco-Logis est un contrat hors établissement soumis au formalisme résultant de la combinaison des articles L. 111-1, L.221-5 et L. 221-9 du code de la consommation dont le non-respect est sanctionné de nullité par l’article L. 242-1.
En l’espèce, le bon de commande décrit l’objet de la vente comme suit :
‘un kit d’une puissance de 6 000 Wc :Solarworld
un système intégré au bâti-coffret de protection-disjoncteur-parafoudre
24 onduleurs Enphase’.
La case du formulaire relative au ballon thermodynamique n’est pas remplie.
Sans exiger que le prix unitaire de chaque panneau photovoltaïque soit détaillé par le bon de commande, il convient de relever que ce dernier ne mentionne que le prix global du « kit photovoltaïque autoconsommation » et non le prix des différents matériels qu’il inclut sans distinguer entre les prix des panneaux, de l’onduleur et du kit de montage notamment.
Ces informations incomplètes relatives à la nature, aux caractéristiques et prix des matériels compris dans le « kit photovoltaïque » ne permettent pas de définir l’objet précis de la commande et de renseigner suffisamment les acheteurs pour leur permettre de réaliser une étude comparative et de donner un consentement éclairé.
Le bon de commande contient au titre des informations complémentaires la mention pré-imprimée selon laquelle ‘le délai de pose contractuel maximum est au plus tard de 30 semaines à partir de l’accord définitif de non opposition délivré par la mairie.’ Cependant ainsi que l’indique à juste titre le tribunal l’obtention d’un accord définitif délivré par la mairie est subordonnée à l’accomplissement des démarches administratives incombant à la société France Eco-Logis alors qu’aucun délai n’est prévu pour la réalisation de cette prestation, cela rendant le point de départ du délai incertain et à la totale discrétion du vendeur. Il n’est pas non plus prévu de délai pour les opérations de raccordement.
Enfin, les modalités d’exercice du droit de rétractation sont erronées puisqu’en vertu de l’article L. 221-18 du code de la consommation, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement à compter soit de la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4, soit de la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens.
Il s’ensuit que le bon de commande conclu par les parties portant sur la fourniture d’un kit photovoltaïque ainsi que sur l’installation complète et la mise en service de ce matériel a donc pour objet à la fois la livraison de biens et la fourniture d’une prestation de services destinée à leur installation et mise en service, ce qui doit conduire à l’assimiler à un contrat de vente faisant courir le délai de rétractation de quatorze jours à compter de la réception du matériel par les époux [T] et non à compter de la conclusion du contrat comme indiqué à tort dans le bon de commande.
Dès lors, la mention d’un délai de rétractation de quatorze jours à compter de la conclusion du contrat par les conditions générales de vente est erronée et a été susceptible de faire croire aux acheteurs qu’il était expiré avant même la livraison des biens.
Par conséquent, les irrégularités affectant le bon de commande sont pleinement démontrées de sorte que c’est à bon droit que le tribunal a dit qu’il encourait la nullité.
Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts des acquéreurs démarchés, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle ils peuvent renoncer par une exécution volontaire, il résulte des dispositions de l’article 1338 du code civil que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.
S’il est établi que les époux [T] ont signé la fiche de réception des travaux demandant le déblocage des fonds empruntés au profit du vendeur et qu’ils ont remboursé les échéances du prêt, il n’est pas démontré qu’ils avaient connaissance des vices affectant le contrat de vente, ce dont il se déduit que l’exécution volontaire des obligations n’a pas pu être effectuée en parfaite connaissance du vice et avec l’intention de le réparer.
Le vendeur et l’organisme prêteur ne peuvent valablement soutenir que les époux [T] ont eu une pleine connaissance des irrégularités qui étaient apparentes et qu’ils sont déclarés avoir pris connaissance des conditions générales comportant le rappel des dispositions protectrices du code de la consommation. En effet si le bon de commande reproduit les dispositions de l’article L.111-1 du code de la consommation, ni les dispositions de l’article L. 111-8 ni celles de l’article L.242-1 de ce code ne sont reproduites alors que celles-ci informent le consommateur que les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation sont obligatoires et que le professionnel ne peut y déroger sous peine d’entraîner la nullité du contrat.
C’est donc à bon droit que les premiers juges ont prononcé la nullité du contrat principal ainsi que celle, subséquente, du contrat de crédit accessoire par application de l’article L.221-27 du code de la consommation.
– Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente et du contrat accessoire de financement.
1. Sur la restitution du matériel livré :
Les parties devant être remises en l’état antérieur au contrat annulé, la société France Eco-Logis sera condamnée à récupérer à ses frais le kit photovoltaïques, le système intégré au bâti et les 24 onduleurs ainsi que tous les éléments afférents à l’installation de ces biens au domicile des époux [T]. Le jugement est donc infirmé en ce qu’il a condamné la société France Eco-Logis à payer aux époux [T] la somme de 4 950 euros pour la dépose de la centrale photovoltaïque.
La société France Eco-Logis fait valoir qu’elle subi un préjudice lié à la dépréciation du matériel vendu qui est resté en place depuis 2016 et en raison du fait que les panneaux photovoltaïques ne peuvent être retirés sans détérioration. Elle réclame à ce titre la condamnation des époux [T] à lui verser la somme de 12 000 euros. Elle ne prouve cependant pas que le préjudice allégué sera en lien de causalité avec une quelconque faute commise par les époux [T], celui-ci n’étant que la conséquence de l’annulation du contrat qui a été prononcée en raison du non respect des règles d’ordre public qui s’imposaient au vendeur dans un souci de protection du consommateur. Sa demande à ce titre doit donc être rejetée comme étant mal fondée.
2. Sur la restitution du prix de vente financé par le crédit accessoire
La nullité du contrat de crédit subséquente à la nullité du contrat principal entraîne en principe la remise en état antérieur devant se matérialiser par la restitution par l’emprunteur du capital prêté quand bien même il a été versé directement au vendeur, ce dernier devant restituer le prix de vente aux acquéreurs et l’établissement de crédit étant tenu de restituer les mensualités réglées au titre du prêt à ces derniers.
La société France Eco-Logis sera dès lors condamnée à restituer aux époux [T] toutes les sommes versées en exécution du contrat de vente, soit la somme de 26 900 euros, le jugement étant infirmé en ce sens.
Pour soutenir que la banque doit être privée de son droit au remboursement des fonds prêtés, les époux [T] font valoir qu’elle n’a pas vérifié la régularité du contrat principal avant de procéder au déblocage des fonds.
Il est en effet acquis que, dans l’hypothèse d’un contrat de vente conclu hors établissement, le prêteur qui s’abstient de vérifier la régularité du contrat principal avant de remettre au vendeur les fonds empruntés commet une faute qui n’est cependant pas suffisante pour le priver de sa créance de restitution.
Cependant il incombe à l’emprunteur de rapporter la preuve d’un préjudice actuel et certain consécutif à la faute de la banque et de son évaluation à concurrence de la somme empruntée.
Il est établi en l’espèce que le bon de commande était manifestement irrégulier de sorte qu’en remettant les fonds au vendeur nonobstant ces irrégularités, la société Cofidis a commis une faute.
Cependant il est constant que l’installation complète des panneaux photovoltaïque a été effectuée par la société France Eco-Logis, qu’elle fonctionne normalement et que l’électricité produite est vendue à EDF. En raison de l’annulation des contrats la société France Eco-Logis va démonter l’installation à ses frais de sorte qu’aucun préjudice n’en découle pour les époux [T] du fait de la faute commise par la banque, le vendeur étant condamné à leur restituer le prix de vente. Il s’ensuit qu’à défaut pour les époux [T] de démontrer que la faute de la société Cofidis est à l’origine d’un préjudice direct et certain, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société Cofidis à payer aux époux [T] la somme de 20 893,80 euros outre les mensualités acquittées postérieurement au mois de septembre 2021 au titre des sommes payés en remboursement du crédit affecté déclaré nul, et condamné les époux [T] à payer à la société Cofidis la somme de 26 900 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement en restitution du capital du crédit affecté déclaré nul, les autres demandes des parties s’agissant de la remise en état antérieur après annulation des contrats étant nécessairement mal fondées.
3- sur le préjudice moral
Les époux [T] justifient de l’existence d’un préjudice moral qui est la conséquence directe des fautes commises par la société France Eco-Logis et la société Cofidis. Les premiers juges ont fait une juste appréciation des éléments de la cause en leur allouant à ce titre la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts à la charge in solidum de ces deux sociétés, le jugement étant confirmé de ce chef.
– sur les demandes accessoires
Partie perdante en appel, la société France Eco-Logis sera condamnée aux dépens d’appel et à payer aux époux [T] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande de laisser à la charge de la société Cofidis les frais de procédure exposés en appel.
Enfin le jugement est confirmé s’agissant des dépens et des frais de procédure exposés en première instance.
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société France Eco-Logis à payer aux époux [T] la somme de 4 950 euros pour la dépose de la centrale photovoltaïque ;
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ;
Condamne la société France Eco-Logis à venir récupérer à ses frais le kit photovoltaïque, le système intégré au bâti et les 24 ondulateurs ainsi que tous les éléments afférents à l’installation de ces biens au domicile des époux [W], et ce dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant un mois ;
Condamne la société France Eco-Logis à rembourser aux époux [T] la somme de 26 900 euros correspondant à la restitution du prix de vente de l’installation photovoltaïque ;
Déboute la société France Eco-Logis de ses demandes ;
Condamne la société France Eco-Logis aux dépens d’appel ;
Condamne la société France Eco-Logis à payer aux époux [T] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejette la demande de la société Cofidis de ce chef.
Le greffier La présidente