Nullité de marque pour dénomination sociale antérieure existante
Nullité de marque pour dénomination sociale antérieure existante
Ce point juridique est utile ?

Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à une dénomination sociale antérieure s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public. Par ailleurs, la dénomination sociale ne bénéficie d’une protection que pour les activités effectivement exercées par la société et non pour celles énumérées dans ses statuts, comme l’ont pertinemment rappelé les premiers juges.

Affaire Amaris

La société Amaris énergie s’est prévalu en vain de l’antériorité de sa dénomination sociale en soutenant qu’il existait un risque de confusion entre celle-ci et la marque AMARIS pour l’ensemble des produits et services visés dans l’enregistrement de la marque.

Le risque de confusion doit s’apprécier globalement

Il ressort de l’article L. 711-4, b), du code de la propriété intellectuelle, alors applicable, que ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à une dénomination sociale antérieure s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

Le risque de confusion doit s’apprécier globalement, par référence au contenu des enregistrements de la marque, vis-à-vis du consommateur des produits ou services tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte des conditions d’exploitation des marques ni de l’activité de leur titulaire.

Référence au consommateur d’attention moyenne

Le risque de confusion s’apprécie par rapport à un consommateur d’attention moyenne de la catégorie des produits et services en cause, c’est-à-dire, en l’espèce, des professionnels à la recherche d’études de projets techniques et d’évaluation et recherches dans des domaines scientifiques et technologiques, dont la connaissance du marché est élevée, compte tenu de la technicité des services litigieux.

Absence de risque de confusion

S’il est constant que les deux signes en présence utilisent le signe Amaris, celui-ci apparaît faiblement distinctif au vu du nombre de sociétés l’utilisant dans leur dénomination sociale, notamment en matière de conseil et de technologie, ainsi que le justifie la société Amaris France.

Par ailleurs, la marque semi-figurative AMARIS est composée d’un seul mot contrairement à la dénomination sociale Amaris énergie, ce qui les distingue sur le plan phonétique, le nombre de syllabes n’étant pas identique.

Intellectuellement, l’utilisation du vocable « énergie » précise le domaine d’intervention de la société Amaris énergie contrairement à la marque AMARIS, ce qui produit une impression différente.

Visuellement le signe de la marque AMARIS est composé d’un cercle orange autour de la lettre A et d’un point orange sur le « i », ce qui traduit une recherche graphique, et, comme le soutient la société Amaris France, est attractif et la distingue.

Ainsi, l’impression d’ensemble qui se dégage des deux signes en présence est différente malgré l’utilisation commune du signe « Amaris » en position d’attaque.

Enfin, la société Amaris énergie ne justifie pas d’une notoriété particulière en 2007, date du dépôt de la marque contestée.

Dans ces conditions, il n’est pas justifié d’un risque de confusion par le consommateur de référence pour les services concernés, fût-ce au titre d’une origine commune.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 07 Juillet 2022

 
N° RG 17/07241 – N° Portalis DBVX-V-B7B-LJMP
 
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON
 
Au fond du 06 juin 2017
 
( chambre 10 cab 10 J)
 
RG : 12/06724
 
APPELANTE :
 
SARL AMARIS ENERGIE
 
[Adresse 4]
 
[Localité 3]
 
Représentée par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 938
 
Et ayant pour avocat plaidant la SELARL CVS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0098
 
INTIMES :
 
M. [K] [I]
 
[Adresse 9]
 
[Localité 6]
 
Non constitué
 
SAS AMARIS FRANCE venant aux droits de la Société AMARIS
 
[Adresse 1]
 
[Adresse 8]
 
[Localité 5]
 
Représentée par la SELARL CABINET SANNIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 584
 
Et ayant pour avocat plaidant Me Julie BELLESORT, avocat au barreau de PARIS
 
Société AMARIS
 
[Adresse 2]
 
[Localité 7]
 
Non constituée
 
******
 
Date de clôture de l’instruction : 19 Mai 2020
 
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Mai 2022
 
Date de mise à disposition : 07 Juillet 2022
 
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
 
— Anne WYON, président
 
— Françoise CLEMENT, conseiller
 
— Annick ISOLA, conseiller
 
assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier
 
A l’audience, Annick ISOLA a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
 
Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
 
Signé par Anne WYON, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
 
****
 
La société Amaris énergie a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nantes le 22 novembre 2000.
 
En avril 2008, les associés cogérants de la société Amaris énergie ont constitué la société Amaris ingénierie, qui exerce une activité similaire.
 
En février 2011, a été constituée la société Amaris projet, filiale de la société Amaris énergie.
 
La marque française semi figurative AMARIS n°07 3 506 308 a été déposée le 11 juin 2007 par M. [K] [I] pour le compte de la société Amaris en cours de formation :
 
Elle désigne les services et produits suivants en classes 9, 35, 38, 41 et 42 :
 
— classe 9 : logiciels (programmes enregistrés)
 
— classe 35 : gestion des affaires commerciales, conseil en organisation et direction des affaires, bureaux de placement, gestion des fichiers informatiques
 
— classe 38 : Télécommunications, informations en matière de télécommunications
 
— classe 41 : Formation
 
— classe 42 : Evaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs, conception et développement des logiciels, recherche et développement de nouveaux produits pour les tiers, études de projet technique, élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciel, programmation pour ordinateur, consultations en matière d’ordinateur, conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique.
 
La société Amaris a été immatriculée le 5 juillet 2007 au registre du commerce et des sociétés d’Annecy.
 
La société Amaris France a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris le 29 septembre 2011.
 
Les sociétés Amaris et Amaris France appartiennent au groupe Amaris, devenu depuis Mantu, groupe international de conseil en technologies, management, systèmes d’informations créé à Genève en 2007.
 
Le 10 avril 2012, la société Amaris énergie a mis en demeure la société Amaris France de modifier sa dénomination sociale.
 
Les 24 et 25 mai 2012, la société Amaris énergie a assigné les société Amaris et Amaris France ainsi que M. [I] devant le tribunal de grande instance de Lyon en annulation de la marque française Amaris et en concurrence déloyale du fait de l’exploitation des dénominations sociales Amaris et Amaris France.
 
Parallèlement à cette instance, le 13 juin 2012, la société Amaris a assigné les sociétés Amaris ingénierie et Amaris projet en référé-contrefaçon devant le tribunal de Nanterre en se prévalant de sa marque française Amaris.
 
Le 4 décembre 2012, le juge des référés a débouté les sociétés Amaris et Amaris group, qui était intervenue à l’instance, en retenant la vraisemblance de l’antériorité constituée par la dénomination sociale Amaris énergie, décision confirmée le 18 décembre 2013 par la cour d’appel de Versailles.
 
Le 21 novembre 2012, la société Amaris énergie a assigné la société Amaris group en déchéance de la marque AMARIS TECHNOLOGIES et par jugement du 5 mars 2015, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé la déchéance partielle de cette marque.
 
Par jugement du 6 juin 2017, dont appel, le tribunal de grande instance de Lyon a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
 
— prononcé la nullité de l’enregistrement de la marque Amaris n°07 3 506 308 effectué le 11 juin 2007 par la société Amaris pour les services d’évaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs, études de projet technique ;
 
— débouté la société Amaris Énergie de sa demande tendant à prononcer la nullité de l’enregistrement de la marque Amaris n°07 3 506 308 effectuée 11 juin 2007 par la société Amaris SARL pour les services suivants : logiciels (programmes enregistrés) ; gestion des affaires commerciales, conseil en organisation et direction des affaires, bureaux de placement, gestion des fichiers informatiques ; télécommunications, informations en matière de télécommunications ; formation conception et développement des logiciels, recherche et développement de nouveaux produits pour les tiers, élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciel, programmation pour ordinateur, consultations en matière d’ordinateur, conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique ;
 
— dit que la décision sera transcrite au Registre national des marques tenu auprès de l’INPI à la requête de la société Amaris énergie, et ce, aux frais avancés des sociétés Amaris et Amaris France ;
 
— débouté la société Amaris énergie de sa demande en concurrence déloyale du fait de l’enregistrement de la marque Amaris n° 07 3 506 308 ;
 
— dit qu’en utilisant les dénominations sociales Amaris et Amaris France pour des services identiques ou similaires aux services d’ingénierie dans le domaine de l’énergie, les sociétés Amaris et Amaris France ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Amaris énergie ;
 
— condamné en conséquence les sociétés Amaris et Amaris France à payer à la société Amaris énergie la somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi ;
 
— débouté la société Amaris énergie de sa demande tendant à condamner les sociétés Amaris et Amaris France à cesser toute utilisation du terme ‘Amaris’ à quelque titre que ce soit et notamment à titre de marque et de dénomination sociale ;
 
— débouté la société Amaris énergie de sa demande tendant à ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir dans trois journaux ;
 
— débouté la société Amaris énergie de sa demande tendant à ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir sur le site internet des sociétés Amaris et Amaris France;
 
— débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle en contrefaçon de la marque AMARIS n° 07 3 506 308 ;
 
— débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle tendant à limiter l’utilisation de la dénomination sociale Amaris énergie ;
 
— débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle tendant à voir interdire l’utilisation des signes ‘Groupe Amaris’ ‘Amaris Group’ et du signe ‘Amaris’ sans le signe ‘énergie’, à quelque titre que ce soit ;
 
— débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle en contrefaçon de droit d’auteur ;
 
— débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle pour procédure abusive ;
 
— condamné in solidum les sociétés Amaris et Amaris France à payer à la société Amaris énergie la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
 
— debouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
 
La société Amaris énergie a relevé appel de cette décision le 12 octobre 2017.
 
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 janvier 2020, elle demande à la cour de :
 
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la nullité de la marque Amaris n°07 3 506 308 pour les services d’« évaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs » et d’« études de projet technique » ;
 
— infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande tendant à prononcer la nullité de l’enregistrement pour les « logiciels (programmes enregistrés) ; gestion des affaires commerciales, conseil en organisation et direction des affaires, bureaux de placement, gestion des fichiers informatiques ; Télécommunications, informations en matière de télécommunications ; Formation ; conception et développement des logiciels, recherche et développement de nouveaux produits pour les tiers, élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciel, programmation pour ordinateur, consultation en matière d’ordinateur, conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique » ;
 
— prononcer en conséquence la nullité de la marque AMARIS n° 07 3 506 308 pour l’ensemble des produits et services visés lors de sa demande d’enregistrement ;
 
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit que la décision sera transcrite au Registre national des marques tenu auprès de l’INPI à sa requête, et ce aux frais avancés la société Amaris France ;
 
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit qu’en utilisant les dénomination sociales Amaris SARL et Amaris France pour des services identiques ou similaires aux services d’ingénierie dans le domaine de l’énergie, les société Amaris SARL et Amaris France ont commis des actes de concurrence déloyale à son préjudice ;
 
— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande tendant à condamner les société Amaris SARL et Amaris France à cesser toute utilisation du terme « Amaris » à quelque titre que ce soit, notamment à titre de marque et de dénomination sociale ;
 
— statuant à nouveau, condamner la société Amaris France à cesser toute utilisation du terme « Amaris » à quelque titre que ce soit, et notamment à titre de marque et de dénomination sociale, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;
 
— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné les sociétés Amaris SARL et Amaris France au paiement de dommages et intérêts ;
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a limité le montant des dommages et intérêts octroyés à la somme de 10 000 euros ;
 
— statuant à nouveau, condamner la société Amaris France au paiement de la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice subi ;
 
— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de publication de la décision à intervenir ;
 
— statuant à nouveau, ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir dans trois journaux nationaux du choix de la société Amaris Énergie, aux frais de la société Amaris France, dans la limite de 5 000 euros par publication, en noir sur fond blanc et suivant une police d’écriture de type Times New Roman et de taille 12 ;
 
— statuant à nouveau, ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir sur le site internet des sociétés Amaris et Amaris France, et en particulier sur le site www.Amaris.com, dans un encart noir sur fond blanc, visible sur la page d’accueil dudit site, dès la connexion du visiteur audit site et sans qu’aucune manipulation ne soit nécessaire et en respectant une police d’écriture de type Times New Roman et de taille 12 ;
 
— confirmer le jugement en ce qu’il a
 
* débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle de contrefaçon de la marque Amaris n°07 3 506 308 ;
 
* débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle tendant à limiter l’utilisation de la dénomination sociale Amaris Énergie ;
 
* débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle tendant à voir interdire l’utilisation des signes « GROUPE Amaris », « Amaris GROUP » et du signe « Amaris » sans le signe « Énergie », à quelque titre que ce soit ;
 
* débouté les société Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle en contrefaçon de droit d’auteur ;
 
* débouté les société Amaris et Amaris France de leur demande reconventionnelle pour procédure abusive ;
 
* condamné in solidum les société Amaris et Amaris France à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
 
— y ajoutant, condamner la société Amaris France à lui payer la somme de 18 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la procédure d’appel ;
 
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné in solidum les société Amaris et Amaris France aux entiers dépens de première instance ;
 
— condamner la société Amaris France aux entiers dépens de l’appel, en allouant à la Selarl Lexavoué Lyon (Maître Romain Laffly), avocat aux offres de droit, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
 
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 4 septembre 2019, la société Amaris France demande, en substance, à la cour de :
 
— débouter la société Amaris énergie de l’ensemble de ses demandes ;
 
— constater la fusion-absorption de la société Amaris par la société Amaris France et dire que la société Amaris France vient aux droits de la société Amaris SARL ;
 
— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Amaris énergie de sa demande de nullité de la marque française n° 3506308 pour les produits et services de logiciels (programmes enregistrés), Gestion des affaires commerciales ; conseils en organisation et direction des affaires ; bureaux de placement ; gestion de fichiers informatiques ; Télécommunications ; informations en matière de télécommunications ; Formation ; conception et développement de logiciels; recherche et développement de nouveaux produits pour des tiers ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation pour ordinateur ; consultation en matière d’ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique ;
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité de la marque française n° 3506308 pour les services d’évaluations, estimations et recherches dans les domaines scientifique et technologiques rendues par des ingénieurs » et « études de projets techniques » et dit que la décision sera transcrite au RNM tenu auprès de l’INPI aux frais des sociétés Amaris et Amaris France,
 
— statuant à nouveau, débouter la société Amaris énergie de sa demande de nullité de la marque française n° 3506308 pour les services d’« évaluations, estimations et recherches dans les domaines scientifique et technologiques rendues par des ingénieurs » et « études de projets techniques »,
 
— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Amaris énergie de sa demande de condamnation pour concurrence déloyale en dehors des services d’ingénierie dans le domaine de l’énergie,
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a dit qu’en utilisant les dénominations sociales Amaris et Amaris France pour des services identiques ou similaires au service d’ingénierie dans le domaine de l’énergie, les sociétés Amaris et Amaris France ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Amaris Énergie,
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a condamné les sociétés Amaris et Amaris France à payer à la société Amaris énergie la somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi,
 
— statuant à nouveau, dire mal fondée en droit la demande de la société Amaris énergie fondée sur l’article 1382 du code civil,
 
— l’en débouter et toute hypothèse, débouter la société Amaris énergie de sa demande au titre de la concurrence déloyale.
 
A titre reconventionnel,
 
— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de condamnation au titre de la contrefaçon de droits d’auteurs et de la contrefaçon de la marque française n° 3506308;
 
— statuant à nouveau, condamner la société Amaris énergie à lui payer la somme forfaitaire de 100 000 euros en réparation de son préjudice ;
 
En tout état de cause :
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés Amaris SARL et Amaris France de leur demande tendant à limiter l’utilisation de la dénomination sociale Amaris Énergie et à interdire la société Amaris énergie d’utiliser le signe « GROUP Amaris » et le signe « Amaris » sans le signe « énergie » à quelque titre que ce soit ;
 
— statuant à nouveau, limiter l’utilisation de la dénomination sociale Amaris aux seules activités prévues dans ses statuts et d’interdire la société Amaris énergie d’utiliser le signe « GROUPAmaris » et le signe « Amaris » sans le signe « énergie » à quelque titre que ce soit;
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leurs demandes de condamnation pour procédure abusive,
 
— statuant à nouveau, condamner la société Amaris énergie à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de la procédure abusive,
 
— infirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés Amaris et Amaris France de leur demande de paiement de la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— statuant à nouveau, condamner la société Amaris énergie à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en première instance et y ajouter la somme de 18 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d’appel,
 
— condamner la société Amaris énergie aux dépens.
 
Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
 
L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 mai 2020.
 
La société Amaris, à laquelle la déclaration d’appel a été signifiée le 6 décembre 2017 par remise à personne habilitée, n’a pas constitué avocat.
 
M. [I], à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 6 décembre 2017 par remise à domicile, n’a pas constitué avocat.
 
MOTIFS DE LA DECISION
 
A titre liminaire, sur demande de la cour qui avait fait observer que le Kbis de la société Amaris France avait absorbé la société Amaris, qui était une SAS et non une SARL, la société Amaris France a expliqué que la société Amaris SARL avait été transformée en SAS le 28 avril 2016, soit postérieurement à l’introduction de l’instance devant le tribunal.
 
Ainsi, il est établi que la société Amaris France vient aux droits de la société Amaris.
 
Sur la nullité de la marque AMARIS
 
La société Amaris énergie se prévaut de l’antériorité de sa dénomination sociale et soutient qu’il existe un risque de confusion entre celle-ci et la marque AMARIS pour l’ensemble des produits et services visés dans l’enregistrement de la marque.
 
Il ressort de l’article L. 711-4, b), du code de la propriété intellectuelle, alors applicable, que ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à une dénomination sociale antérieure s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.
 
Le risque de confusion doit s’apprécier globalement, par référence au contenu des enregistrements de la marque, vis-à-vis du consommateur des produits ou services tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte des conditions d’exploitation des marques ni de l’activité de leur titulaire.
 
Par ailleurs, la dénomination sociale ne bénéficie d’une protection que pour les activités effectivement exercées par la société et non pour celles énumérées dans ses statuts, comme l’ont pertinemment rappelé les premiers juges.
 
En l’espèce, la société Amaris énergie soutient que son activité était identique ou à tout le moins similaire à l’ensemble des produits et services visés à l’enregistrement de la marque AMARIS.
 
Par des motifs que la cour adopte, les premiers juges ont retenu à juste titre que seuls les services d’« évaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs » et d’« études de projet technique » visés à l’enregistrement étaient similaires à l’activité réelle de la société Amaris énergie antérieurement au dépôt de la marque litigieuse.
 
La nouvelle pièce produite en cause d’appel par cette dernière, à savoir une capture d’écran du site www.goupamaris.com datant de 2005 ne modifie pas l’analyse du tribunal, dès lors, d’une part, qu’elle reprend les mentions relevées par le tribunal, d’autre part, qu’elle concerne le groupe des deux sociétés, et non pas spécifiquement la société Amaris énergie.
 
Il sera rappelé que le risque de confusion s’apprécie par rapport à un consommateur d’attention moyenne de la catégorie des produits et services en cause, c’est-à-dire, en l’espèce, des professionnels à la recherche d’études de projets techniques et d’évaluation et recherches dans des domaines scientifiques et technologiques, dont la connaissance du marché est élevée, compte tenu de la technicité des services litigieux.
 
S’il est constant que les deux signes en présence utilisent le signe Amaris, celui-ci apparaît faiblement distinctif au vu du nombre de sociétés l’utilisant dans leur dénomination sociale, notamment en matière de conseil et de technologie, ainsi que le justifie la société Amaris France.
 
Par ailleurs, la marque semi-figurative AMARIS est composée d’un seul mot contrairement à la dénomination sociale Amaris énergie, ce qui les distingue sur le plan phonétique, le nombre de syllabes n’étant pas identique.
 
Intellectuellement, l’utilisation du vocable « énergie » précise le domaine d’intervention de la société Amaris énergie contrairement à la marque AMARIS, ce qui produit une impression différente.
 
Visuellement le signe de la marque AMARIS est composé d’un cercle orange autour de la lettre A et d’un point orange sur le « i », ce qui traduit une recherche graphique, et, comme le soutient la société Amaris France, est attractif et la distingue.
 
Ainsi, l’impression d’ensemble qui se dégage des deux signes en présence est différente malgré l’utilisation commune du signe « Amaris » en position d’attaque.
 
Enfin, la société Amaris énergie ne justifie pas d’une notoriété particulière en 2007, date du dépôt de la marque contestée.
 
Dans ces conditions, il n’est pas justifié d’un risque de confusion par le consommateur de référence pour les services concernés, fût-ce au titre d’une origine commune.
 
Il convient en conséquence de rejeter la demande de la société Amaris énergie en annulation de la marque AMARIS, le jugement étant infirmé de ce chef.
 
Sur l’action de la société Amaris énergie en concurrence déloyale
 
La société Amaris énergie soutient que le choix des dénominations sociales Amaris et Amaris France constitue un acte de concurrence déloyale, ce que conteste cette dernière.
 
Compte tenu des dates à laquelle les sociétés intimées ont été immatriculées, soit respectivement le 5 juillet 2007 et le 29 septembre 2011, la société Amaris énergie fonde son action à juste titre sur l’article 1382 du code civil, devenu depuis l’article 1240.
 
L’action en concurrence déloyale en raison d’une dénomination sociale suppose l’existence d’un risque de confusion.
 
Il ressort du site internet www.groupamaris.com que la société Amaris énergie se présente comme « spécialisée dans le secteur nucléaire pour les métiers liés à la mécanique, la chaudronnerie et les projets » (pièce 19 intimée).
 
Si elle affirme qu’elle intervient dans d’autres domaines que le nucléaire, force est de constater qu’elle ne le démontre pas, contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, étant observé qu’elle ne peut se prévaloir de l’activité des autres sociétés du groupe auquel elle appartient.
 
Ainsi, le seul fait que, dans une annonce de recrutement en 2014, dans le domaine du nucléaire, elle indique qu’elle dédie son expertise au secteur nucléaire mais également au « oil and gas », apparaît insuffisant pour justifier son activité dans ce domaine, en l’absence de toute autre pièce établissant la réalité de son activité dans ce domaine du pétrole et du gaz avant l’immatriculation des deux sociétés intimées.
 
Les sociétés Amaris et Amaris France ont une activité de conseil.
 
Comme l’ont relevé les premiers juges, les statuts de la société Amaris ont délimité son objet social comme suit : « exécution de prestations dans les domaines informatiques, télécommunications, technologies industrielles, électroniques ou mécaniques, notamment en matière de conseils, organisation, management, études, ingénierie, formation, assistance, maintenance, exploitation de systèmes et réseaux, infogérance, développement et distribution de produits, matériels ou logiciels, ainsi que prise d’intérêts et participation, sous quelque forme que soit, dans toutes entreprises similaires ou ayant le même domaine d’activité » et il en est de même pour la société Amaris France.
 
S’il est constant que les dénominations sociales des trois sociétés ont en commun le signe « Amaris », le risque de confusion est écarté en raison de leurs activités distinctes, à l’exclusion de l’ingénierie dans le secteur du nucléaire.
 
Or, dans ce dernier domaine d’activité, le consommateur de référence dispose d’une connaissance accrue du marché et de ses acteurs, ce qui exclut tout risque de confusion.
 
Le fait qu’une société belge ait, dans un contrat, indiqué comme représentant de la société Amaris énergie le nom de M. [I], au lieu de M. [G], n’apparaît pas probant pour établir le risque de confusion, dès lors qu’il est démontré qu’était en réalité en cause la société Amaris consulting Belgium, représentée par M. [I], avec laquelle la société belge avait contracté en premier lieu et qu’un contrat a été conclu quelques mois plus tard avec la société Amaris énergie.
 
Il n’est nullement démontré que le courrier électronique adressé par la société Areva à la société Amaris et au groupe Amaris le 21 novembre 2011 procède d’une erreur ou d’une confusion entre les sociétés Amaris énergie et Amaris.
 
Enfin, la confusion à laquelle il est fait référence dans un courrier électronique du 16 octobre 2017 concerne les sociétés Amaris group et Amaris inspection.
 
Il convient en conséquence de retenir l’absence de risque de confusion et par conséquent de concurrence déloyale au détriment de la société Amaris énergie, le jugement étant infirmé de ce chef.
 
Sur les demandes de la société Amaris France
 
* sur la limitation de l’utilisation de la dénomination Amaris énergie et l’interdiction d’utiliser le signe GroupAmaris
 
La société Amaris France, qui plaide par ailleurs l’absence de risque de confusion entre la marque AMARIS et la dénomination sociale Amaris énergie, ne démontre pas l’existence d’un tel risque de confusion depuis l’enregistrement de la marque.
 
Par ailleurs, la société Amaris group n’est pas partie à la présente procédure et il ne peut être fait interdiction à la société Amaris énergie d’utiliser cette dénomination qui n’est pas la sienne.
 
Il en est de même du « label » Groupamaris, qui est utilisé par la société Amaris group.
 
Enfin, il n’est pas justifié que la société Amaris énergie utiliserait sa dénomination sociale sans le terme « énergie », de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Amaris France relatives à la limitation de la dénomination Amaris énergie.
 
* sur la contrefaçon de droits d’auteur et de la marque
 
S’il est avéré que, dans deux annonces d’emploi publiés sur le site generation-cleantech.com en 2012, a été reproduit le signe
 
la société Amaris énergie justifie qu’elle n’est pas à l’origine de l’emploi de ce signe mais qu’un stagiaire du site en question a trouvé lui-même ce « logo » qu’il a intégré aux annonces publiées, sans en informer l’appelante.
 
Ainsi, la société Amaris énergie n’est pas à l’origine de la contrefaçon alléguée des droits d’auteur et de la marque et n’a commis aucune faute à ce titre, de sorte que le jugement qui a rejeté les demandes à ce titre sera confirmé.
 
* sur la procédure abusive
 
La société Amaris France n’établissant aucune faute ayant fait dégénérer en abus le droit d’agir en justice de la société Amaris énergie, une erreur sur l’étendue de ses droits ne constituant pas un abus, il y a lieu de confirmer le jugement qui l’a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive
 
Sur les autres demandes
 
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Amaris France.
 
PAR CES MOTIFS :
 
La cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,
 
Infirme le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité de l’enregistrement de la marque Amaris n° 07 3 506 308 effectué le 11 juin 2007 par la société Amaris pour les services d’évaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs, études de projet technique, dit que la décision sera transcrite au Registre national des marques tenu auprès de l’INPI à la requête de la société Amaris énergie, et ce, aux frais avancés des sociétés Amaris et Amaris France, dit qu’en utilisant les dénominations sociales Amaris et Amaris France pour des services identiques ou similaires aux services d’ingénierie dans le domaine de l’énergie, les sociétés Amaris et Amaris France ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Amaris énergie et condamné en conséquence les sociétés Amaris et Amaris France à payer à la société Amaris énergie la somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi, condamné in solidum les sociétés Amaris et Amaris France à payer à la société Amaris énergie la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
 
Confirmant pour le surplus, statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
 
Rejette les demandes de la société Amaris énergie en nullité de l’enregistrement de la marque Amaris n° 07 3 506 308 pour les services d’évaluation, estimations et recherches dans les domaines scientifiques et technologiques rendues par des ingénieurs, études de projet technique et en condamnation au paiement de dommages-intérêts pour actes de concurrence déloyale ;
 
Condamne la société Amaris énergie aux dépens de première instance et d’appel ;
 
Rejette la demande de la société Amaris énergie au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à la société Amaris France la somme de 5 000 euros.
 
Le Greffier Le Président

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