La nullité d’une Assignation en contrefaçon de droits d’auteur est frappée de nullité en l’absence d’identification précise de l’oeuvre originale revendiquée par l’auteur. En matière de propriété intellectuelle, l’assignation doit indiquer clairement et précisément les éléments sur lesquels des droits sont revendiqués, ainsi que les éléments qu’ils considèrent comme ayant été reproduits au mépris de ces droits.
L’article 56, 2o, du code de procédure civile dispose, dans sa version issue du décret no2020-1452 du 27 novembre 2020, que l’assignation contient à peine de nullité, « outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 (?) un exposé des moyens en fait et en droit ».
Ces dispositions visent à assurer le respect du principe du contradictoire en permettant à la partie assignée de présenter en temps utile ses moyens de défense.
Une nullité prévue
Selon les articles 114 et 115 du code de procédure civile, « Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ».
En matière de propriété intellectuelle, l’assignation doit indiquer clairement et précisément les éléments sur lesquels des droits sont revendiqués, ainsi que les éléments qu’ils considèrent comme ayant été reproduits au mépris de ces droits.
Exemple d’assignation nulle
L’assignation des 28 et 29 mars 2022 vise les articles 835 du code de procédure civile, relatif à la compétence du juge des référés en matière de trouble manifestement illicite, et les articles L. 111.1, L. 112-2, 12o, L. 121-1, L. 122-2 et L. 131-1 du code de la propriété intellectuelle, relatifs au droit d’auteur et à la contrefaçon, et la demanderesse soutient que le permis de construire incluait des plans de sa conception, constituant une oeuvre protégée.
Les dernières conclusions de la demanderesse précisent qu’elle demande à mettre fin au trouble manifestement illicite produit pas la contrefaçon de son oeuvre architecturale « à savoir un projet de restructuration et construction d’un palais de justice du XVIIIème siècle désaffecté assorti de la restructuration d’un bâtiment adjacent datant de l’après-guerre, ainsi que l’ajout d’un bâtiment».
Les pièces graphiques qu’elle verse à l’appui de sa demande consistent dans des relevés de l’état actuel des bâtiments à réhabiliter et le règlement de l’appel à projet de mai 2018 de la ville de [Localité 6], un cahier d’images de synthèse, de plans et de coupes datés du 30/10/2018 ne mentionnant aucun auteur, et qui ont été établis avant son intervention.
La seule pièce (no9.9) mentionnant son nom, associé à Equipage architecture, et qui, selon elle, « rapporte la preuve de sa participation effective dans la création de l’oeuvre litigieuse » est un fascicule intitulé « le palais Fondette une nouvelle urbanité » reproduisant les pièces ci-dessus énumérées, avec des zones coloriées différemment selon qu’elles sont destinées à recevoir un hôtel, une brasserie, ou un centre de congrès. Or, elle ne prétend pas avoir réalisé ce fascicule ni les plans qu’il contient.
Il y a donc lieu de constater que, quoiqu’interpellée sur ce point par les trois jeux d’écritures de la société LIM, la SAS Richez associés ne décrit ni n’identifie les éléments susceptibles d’être le support de l’oeuvre architecturale qu’elle revendique sous les termes imprécis évoqués ci-dessus et pour lesquels elle revendique la protection par le droit d’auteur.
Ce faisant elle ne permet pas à la société LIM de présenter utilement sa défense, ce qui lui fait nécessairement grief.
Par ailleurs, aucune demande de fond n’est formée à l’encontre de la SARL Equipage Architecture.
La juridiction a prononcé la nullité de l’assignation faute d’exposé suffisant des moyens de fait et de droit.
République française
Au nom du peuple français
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
No RG 22/54211 – No Portalis 352J-W-B7G-CWQTZ
No : 2/FF
Assignation du :
28 Mars 2022
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 10 janvier 2023
par Irène BENAC, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Fabienne FELIX, Faisant fonction de greffier.
DEMANDERESSE
S.A.S. RICHEZ ASSOCIES
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Jérôme MARTIN de la SELARL SELARL D’AVOCATS MARTIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS – #P0158
DEFENDERESSES
Société LUMINARE INVEST MANAGEMENT
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Maître Diane DELUME de l’AARPI 186 Avocats, avocats au barreau de PARIS – #D0010
Société EQUIPAGE ARCHITECTURE
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Ophélie BOULOS, avocat au barreau de PARIS – #J0128
DÉBATS
A l’audience du 22 Novembre 2022, tenue publiquement, présidée par Irène BENAC, Vice-Président, assistée de Fabienne FELIX, Faisant fonction de greffier,
Exposé des faits et de la procédure
La société de droit luxembourgeois Luminare Invest Management (ci-après “la société LIM”) a remporté un appel d’offres de la ville de Caen pour le montage d’un projet de reconversion de l’ancien palais de justice en hôtel et centre de congrès.
Le 4 mai 2021, la société LIM a confié à la SARL Equipage Architecture et à la SAS Richez associés – sociétés ayant toutes deux pour activité l’architecture – une mission de maîtrise d’oeuvre pour la conception et le suivi de l’exécution de ce projet jusqu’à la fin de l’année de parfait achèvement suivant la réception des travaux.
Bien que la société LIM n’ait réglé aucune des prestations réalisées, la SARL Equipage Architecture a déposé la demande de permis de construire le 29 octobre 2021.
Celle-ci a été rejetée par arrêté du maire de la ville de [Localité 6] le 30 mars 2022.
Par actes des 28 et 29 mars 2022, la SAS Richez associés a assigné la société LIM et la SARL Equipage Architecture devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé pour faire interdire à la société LIM de représenter les plans, esquisses et pièces graphiques dont elle est l’auteur et la condamner à lui payer la somme de 50.000 euros ainsi que les dépens et 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en présence de la SARL Equipage Architecture.
L’affaire a été appelée à l’audience du 27 septembre 2022, renvoyée au 22 novembre 2022, date à laquelle elle a été plaidée et la décision a été mise en délibéré au 10 janvier 2023.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 18 novembre 2022, la SAS Richez associés maintient ses demandes initiales.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 21 novembre 2022, la société LIM soulève la nullité de l’assignation faute d’exposé des moyens de fait et de droit.
A titre subsidiaire, elle soulève une fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la SAS Richez associés faute de titularité du droit d’auteur sur le permis de construire.
A titre infiniment subsidiaire, elle demande le débouté en présence d’une contestation sérieuse.
A titre reconventionnel, elle demande la condamnation de la SAS Richez associés à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, aux dépens et à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 novembre 2022, la SARL Equipage Architecture soulève la nullité de l’assignation et, subsidiairement, l’irrecevabilité de la demande faute de saisine préalable de l’Ordre des architectes.
A titre infiniment subsidiaire, elle demande le débouté en présence d’une contestation sérieuse.
En tout état de cause, elle demande la condamnation de la SAS Richez associés aux dépens et à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Motivation
L’article 56, 2o, du code de procédure civile dispose, dans sa version issue du décret no2020-1452 du 27 novembre 2020, que l’assignation contient à peine de nullité, « outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 (?) un exposé des moyens en fait et en droit ».
Ces dispositions visent à assurer le respect du principe du contradictoire en permettant à la partie assignée de présenter en temps utile ses moyens de défense.
Selon les articles 114 et 115 du code de procédure civile, « Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief ».
En matière de propriété >< intellectuelle >, l’assignation doit indiquer clairement et précisément les éléments sur lesquels des droits sont revendiqués, ainsi que les éléments qu’ils considèrent comme ayant été reproduits au mépris de ces droits.
Sur ce,
L’assignation des 28 et 29 mars 2022 vise les articles 835 du code de procédure civile, relatif à la compétence du juge des référés en matière de trouble manifestement illicite, et les articles L. 111.1, L. 112-2, 12o, L. 121-1, L. 122-2 et L. 131-1 du code de la < propriété >< intellectuelle , relatifs au droit d’auteur et à la contrefaçon, et la demanderesse soutient que le permis de construire incluait des plans de sa conception, constituant une oeuvre protégée.
Les dernières conclusions de la demanderesse précisent qu’elle demande à mettre fin au trouble manifestement illicite produit pas la contrefaçon de son oeuvre architecturale « à savoir un projet de restructuration et construction d’un palais de justice du XVIIIème siècle désaffecté assorti de la restructuration d’un bâtiment adjacent datant de l’après-guerre, ainsi que l’ajout d’un bâtiment».
Les pièces graphiques qu’elle verse à l’appui de sa demande consistent dans des relevés de l’état actuel des bâtiments à réhabiliter et le règlement de l’appel à projet de mai 2018 de la ville de [Localité 6], un cahier d’images de synthèse, de plans et de coupes datés du 30/10/2018 ne mentionnant aucun auteur, et qui ont été établis avant son intervention.
La seule pièce (no9.9) mentionnant son nom, associé à Equipage architecture, et qui, selon elle, « rapporte la preuve de sa participation effective dans la création de l’oeuvre litigieuse » est un fascicule intitulé « le palais Fondette une nouvelle urbanité » reproduisant les pièces ci-dessus énumérées, avec des zones coloriées différemment selon qu’elles sont destinées à recevoir un hôtel, une brasserie, ou un centre de congrès. Or, elle ne prétend pas avoir réalisé ce fascicule ni les plans qu’il contient.
Il y a donc lieu de constater que, quoiqu’interpellée sur ce point par les trois jeux d’écritures de la société LIM, la SAS Richez associés ne décrit ni n’identifie les éléments susceptibles d’être le support de l’oeuvre architecturale qu’elle revendique sous les termes imprécis évoqués ci-dessus et pour lesquels elle revendique la protection par le droit d’auteur.
Ce faisant elle ne permet pas à la société LIM de présenter utilement sa défense, ce qui lui fait nécessairement grief.
Par ailleurs, aucune demande de fond n’est formée à l’encontre de la SARL Equipage Architecture.
Il y a donc lieu de prononcer la nullité de l’assignation faute d’exposé suffisant des moyens de fait et de droit.
La société LIM ne démontre pas une quelconque intention de nuire de la SAS Richez associés, qui a pu se méprendre sur l’étendue de ses droits.
Il y a donc lieu de rejeter sa demande reconventionnelle à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
La SAS Richez associés, qui succombe est condamnée aux dépens et à payer à la société LIM la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à la SARL Equipage Architecture la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,
Disons que l’assignation délivrée par la SAS Richez associés les 28 et 29 mars 2022 est nulle ;
Déboutons la société de droit luxembourgeois Luminare Invest Management de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;
Condamnons la SAS Richez associés aux dépens ;
Condamnons la SAS Richez associés à payer à la société de droit luxembourgeois Luminare Invest Management la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
Condamnons la SAS Richez associés à payer à la SARL Equipage Architecture la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
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