Nullité de dessin et modèle : 16 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/13906

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Nullité de dessin et modèle : 16 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/13906

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 16 JUIN 2023

(n°99, 23 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 21/13906 – n° Portalis 35L7-V-B7F-CED64

Décision déférée à la Cour : jugement du 06 mai 2021 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°17/15335

APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE

S.A.S.U. ALTHO, agissant en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Localité 3]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 397 729 591

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque L 0018

Assistée de Me Anne-Charlotte LE BIHAN, avocate au barreau de PARIS, toque R 255

INTIMEES AU PRINCIPAL et APPELANTES INCIDENTES

S.A.S. PEPSICO FRANCE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 381 511 039

Société FRITO-LAY NORTH AMERICA, INC., société de droit américain, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé [Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 7]

ETATS-UNIS D’AMÉRIQUE

Représentées par Me Marie-Aimée DE DAMPIERRE de HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocate au barreau de PARIS, toque J 033

Assistées de Me Marie-Aimée DE DAMPIERRE plaidant pour HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocate au barreau de PARIS, toque J 033, Me Etienne BARJOL plaidant pour HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque J 033

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mmes Véronique RENARD et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Véronique RENARD, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 6 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris.

Vu l’appel interjeté le 16 juillet 2021 par la société Altho.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 12 janvier 2023 par la société Altho, appelante.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 février 2023 par la société Pepsico France et la société Frito-Lay North America, intimées.

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 16 février 2023.

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société de droit américain Frito-Lay North America se présente comme une filiale du groupe Pepsico, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de produits alimentaires, elle fabrique et distribue des produits de type snack, tout particulièrement des chips.

La société Pepsico France est la filiale française du groupe agroalimentaire américain Pepsico Inc. Elle commercialise en France des produits apéritifs, des snacks, des boissons et des céréales.

La société Frito-Lay North America est titulaire des modèles communautaires suivants’:

– «’En-cas », n°001301733-003 (FL3) déposé et enregistré le 4 novembre 2011 :

– «’En-cas’» n°001301733-0010 (FL10) déposé et enregistré le 4 novembre 2011 :

– «’En-cas’» n°001301733-0011 (FL11) déposé et enregistré le 4 novembre 2011′:

Ces modèles, régulièrement renouvelés le 21 octobre 2021, sont utilisés pour l’élaboration d’une gamme de chips sous la dénomination «’deep ridged’», commercialisée en France par la société Pepsico France.

La SASU Altho, qui a pour activité principale la fabrication de produits alimentaires à base de pomme de terre, commercialise des chips sous la marque «’Bret’s’».

La société Frito-Lay North America expose avoir découvert que la société Altho commercialisait en France depuis 2016 une nouvelle gamme de chips sous le signe «’Shark’».

Estimant que les chips «’Shark’», portaient atteinte aux droits dont elle est titulaire sur ses dessins communautaires précités et copiaient les packagings «’Deep Ridged’», la société Frito-Lay North America a fait procéder à un constat d’achat en ligne sur le site internet de la société Altho. Ces produits ont été livrés et ouverts à l’étude en présence de Me [I], huissier de justice, respectivement le 24 et le 27 février 2017. Le 2 juin 2017, la société Frito-Lay North America a fait réaliser un second constat sur le site internet de la société Altho afin de démontrer que les Chips Shark étaient toujours en vente.

Ensuite, la société Frito-Lay North America, autorisée par ordonnance sur requête en date du 12 septembre 2017, a fait pratiquer des opérations de saisie-contrefaçon le 18 septembre 2017 dans l’usine de la société Altho de Saint-Gérand, le siège social de la société Altho étant une domiciliation.

Par acte en date du 18 octobre 2017, les sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France ont fait assigner la société Altho devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire de Paris, en contrefaçon de dessins ou modèles communautaires et concurrence déloyale et parasitaire.

C’est dans ce contexte qu’a été rendu le jugement dont appel, qui a’:

– déclaré les sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France recevables en leurs demandes,

– rejeté la demande reconventionnelle de la société Altho en annulation de l’enregistrement des dessins communautaires n°001301733-003, 001301733-010 et 001301733-011,

– dit qu’en fabriquant et commercialisant les produits «’Bret’s Shark’» saveurs Barbecue et Hot & Spicy, la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin communautaire n°001301733-010 au préjudice de la société Frito-Lay North America,

– dit que la société Altho a également été l’auteur d’actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Pepsico France,

– débouté la société Pepsico France de ses demandes formées au titre du parasitisme,

– fait interdiction à la société Altho de fabriquer, distribuer, commercialiser et offrir à la vente tous produits de snack reproduisant les caractéristiques du dessin communautaire enregistré n°001301733-010, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois,

– dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte,

– condamné la société Altho à payer à la société Frito-Lay North America 60 037 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice économique et moral imputable à la contrefaçon du dessin communautaire enregistré n°001301733-010,

– condamné la société Altho à payer à la société Pepsico France 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

– débouté les sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France du surplus de leurs demandes indemnitaires au titre de la contrefaçon et de la concurrence déloyale,

– rejeté les demandes de rappel, de confiscation et de destruction des stocks de chips «’Bret’s Shark’»,

– rejeté la demande de publication du jugement,

– condamné la société Altho aux dépens, qui pourront être recouvrés par le cabinet Hogan Lovells (Paris) LLP dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

– condamné la société Altho à payer aux sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France 40 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

La société Altho a relevé appel de ce jugement et par ses dernières conclusions demande à la cour de’:

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 en ce qu’il a débouté la société Pepsico France de ses demandes en concurrence déloyale fondées sur une prétendue reprise du packaging Deep Ridged,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 en ce qu’il a débouté la société Pepsico France de ses demandes en parasitisme,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 de ces chefs suivants :

– déclare les sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France recevables en leurs demandes,

– rejette la demande reconventionnelle de la société Altho en annulation de l’enregistrement des dessins communautaires n°001301733-0003, 001301733-0010 et 001301733-011,

– dit qu’en fabriquant et commercialisant les produits « Bret’s Shark » saveurs Barbecue et Hot & Spicy, la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin communautaire n°001301733-010 au préjudice de la société Frito-Lay North America,

– dit que la société Altho a également été l’auteur d’actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Pepsico France,

– fait interdiction à la société Altho de fabriquer, distribuer, commercialiser et offrir à la vente tous produits de snack reproduisant les caractéristiques du dessin communautaire enregistré n°001301733-010, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois,

– dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte,

– condamne la société Altho à payer à la société Frito-Lay North America 60’037 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice économique et moral imputable à la contrefaçon du dessin communautaire enregistré n°001301733-010,

– condamne la société Altho à payer à la société Pepsico France 15’000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

– condamne la société Altho aux dépens, qui pourront être recouvrés par le cabinet Hogan Lovells (Paris) LLP dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

– condamne la société Altho à payer aux sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France 40 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau :

– prononcer la nullité des modèles communautaires n°001301733-0003, 001301733-0010, 001301733-0011 détenus par la société Frito-Lay North America, Inc,

– dire que la mention de l’annulation de ces modèles sera inscrite au registre des dessins ou modèles communautaires tenu par l’Office de l’Union Européenne pour la propriété intellectuelle sur réquisition de la cour ou à la diligence de l’une des parties,

– dire et juger qu’elle n’a pas commis d’acte de contrefaçon des modèles communautaires n°001301733-0003, 001301733-0010, 001301733-0011 de la société Frito-Lay North America, Inc,

– dire et juger qu’elle n’a commis aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire à l’encontre de Pepsico France,

– rejeter les demandes en interdiction et en dommages et intérêts de la société Frito- Lay North America, Inc au titre de la contrefaçon et de sa demande pour frais d’instance,

– rejeter les demandes en interdiction et en dommages et intérêts de la société Pepsico France au titre de la concurrence déloyale et de sa demande pour frais d’instance,

– ordonner le remboursement des frais d’instances de 40 000 euros payés par Altho aux sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Subsidiairement sur ces deux derniers points si la cour estimait devoir entrer en voie de condamnation contre elle :

– ramener les condamnations en dommages et intérêts prononcées à son encontre à de plus justes proportions,

En tout état de cause,

– débouter les sociétés Frito-Lay North America Inc. et Pepsico France de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

– condamner solidairement les sociétés Frito-Lay North America, Inc et Pepsico France à lui payer la somme de 150’000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement les sociétés Frito-Lay North America, Inc et Pepsico France aux entiers dépens de l’instance,

Les sociétés Frito-Lay North America, Inc et Pepsico France, intimées et appelantes incidentes, demandent à la cour de’:

– rejeter l’appel interjeté par la société Altho sollicitant l’infirmation partielle du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021,

Et en conséquence de,

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 en ce qu’il a,

– déclaré les sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France recevables en leurs demandes,

– rejeté la demande reconventionnelle de la société Altho en annulation de l’enregistrement des dessins communautaires n°001301733-003, 001301733-010 et 001301733-011,

– dit qu’en fabriquant et commercialisant les produits ‘Bret’s Shark’ saveurs Barbecue et Hot & Spicy, la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin communautaire n°001301733-010 au préjudice de la société Frito-Lay North America,

– dit que la société Altho a également été l’auteur d’actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Pepsico France,

– fait interdiction à la société Altho de fabriquer, distribuer, commercialiser et offrir à la vente tous produits de snack reproduisant les caractéristiques du dessin communautaire enregistré n°001301733-010, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois,

– dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte,

– condamné la société Altho à payer à la société Frito-Lay North America 60 037 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice économique et moral imputable à la contrefaçon du dessin communautaire enregistré n°001301733-010,

– condamné la société Altho à payer à la société Pepsico France 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

– condamné la société Altho aux dépens, qui pourront être recouvrés par le cabinet Hogan Lovells (Paris) LLP dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

– condamné la société Altho à payer aux sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France 40 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 en ce qu’il a,

– débouté la société Frito-Lay de ses demandes en contrefaçon des dessins et modèles Frito-Lay n°001301733-0003 et n°001301733-0011,

– débouté la société Pepsico de ses demandes formées au titre de la concurrence déloyale résultant de la commercialisation des Chips Shark dans le Packaging Shark,

– débouté la société Pepsico de ses demandes formées au titre de parasitisme,

Et, statuant à nouveau,

– dire et juger que la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin et modèle Frito-Lay n°001301733-0003,

– condamner la société Altho au paiement de la somme complémentaire de 19 737 euros en faveur de la société Frito-Lay au titre du préjudice économique résultat de l’atteinte à ses droits sur le dessin et modèle Frito-Lay n°001301733-0003,

– condamner la société Altho au paiement de 30 000 euros en faveur de la société Frito-Lay au titre du préjudice moral résultant de l’atteinte à ses droits sur le dessin et modèle Frito-Lay n°001301733-0003,

– dire et juger que la société Altho a commis des actes de concurrence déloyale envers la société Pepsico en imitant le packaging Deep Ridged de ce dernier,

– condamner la société Altho à réparer le préjudice subi par la société Pepsico au titre des actes de concurrence déloyale résultant du risque de confusion créé avec le packaging Deep Ridged dans lequel la société Pepsico commercialise les Deep Ridged, à hauteur de 255 089 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire,

– dire et juger que la société Altho a commis des actes de parasitisme à l’encontre de la société Pepsico en tirant indûment profit de la réputation de la société Pepsico en général et des Deep Ridged en particulier, ainsi que des investissements de la société Pepsico pour les promouvoir,

– condamner la société Altho à réparer le préjudice économique subi par la société Pepsico au titre des actes de parasitisme en cherchant à tirer indûment profit de la réputation de la société Pepsico, des Deep Ridged, et de ses investissements pour les promouvoir, et donc à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire,

– condamner la société Altho à réparer le préjudice moral subi par la société Pepsico au titre des actes de concurrence déloyale résultant notamment de la banalisation et la dévalorisation de son packaging Deep Ridged, et donc à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire,

A titre subsidiaire et si par extraordinaire, la cour venait à infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 6 mai 2021 en ce qu’il a dit qu’en fabriquant et commercialisant les produits «’Bret’s Shark’» saveurs Barbecue et Hot & Spicy, la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin communautaire n°001301733-010 au préjudice de la société Frito-Lay North America,

– dire et juger que la société Altho a commis des actes de contrefaçon des dessins et modèles Frito-Lay n°001301733-0011,

– condamner la société Altho au paiement de la somme complémentaire de 62 968 euros en faveur de la société Frito-Lay au titre du préjudice économique résultat de l’atteinte à ses dessins et modèles Frito-Lay n°001301733-0011,

– condamner la société Altho au paiement de 30 000 euros en faveur de la société Frito-Lay au titre du préjudice moral résultant de l’atteinte à son dessin et modèle Frito-Lay n°001301733-0011,

Et en tout état de cause,

– condamner la société Altho à verser aux sociétés Frito-Lay et Pepsico la somme de 100 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sauf à parfaire,

– condamner la société Altho en tous les dépens de l’instance dont distraction au profit du cabinet Hogan Lovells (Paris) LLP, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

– Sur la contrefaçon des dessins et modèles communautaires dont est titulaire la société Frito-Lay

Le jugement déféré a rejeté les demandes de nullité de la société Altho formées contre les trois modèles communautaires FL3, FL10 et FL11 et a accueilli la demande en contrefaçon de modèle fondée sur le seul modèle FL10.

Devant la cour, la société Altho, appelante, sollicite à nouveau la nullité des trois modèles communautaires qui lui sont opposés et critique la décision qui a retenu la contrefaçon du modèle FL10. Les sociétés Pepsico et Frito-Lay forment quant à elles des demandes incidentes au titre de la contrefaçon sur les fondements des modèles FL3 et FL11.

Sur la validité des dessins et modèles

La société Altho critique le jugement entrepris qui a rejeté ses demandes de nullité des modèles communautaires qui lui sont opposés et fait valoir que le modèle FL3 et FL10 sont nuls faute de caractère individuel et que le modèle FL11 doit également être annulé pour défaut de nouveauté et, à titre subsidiaire, de caractère individuel.

Il n’est pas discuté par le titulaire du modèle qu’il ne peut se prévaloir des dates de priorité, les modèles divulgués dans ces priorités n’étant pas identiques. Les sociétés Pepsico et Frito-Lay indiquent à cet égard en page 6 de leurs écritures ne pas invoquer la date de priorité pour chacun des modèles invoqués. Seule la date de dépôt du 4 novembre 2011 sera donc prise en considération pour apprécier la validité de ces modèles.

La société Frito-Lay précise que ces trois modèles appartiennent à une famille de 13 modèles enregistrés et que leurs caractéristiques communes sont la présence de striures marquées hautes et profondes en relativement petit nombre et affirme que cette caractérisation est nouvelle et produit une impression de nouveauté chez l’utilisateur averti qu’est le consommateur de chips, les éléments propres à chaque modèle sont la forme globalement ronde ou ovale, le degré d’incurvation de la forme, le nombre de striures et leur amplitude ainsi que la direction et la hauteur des bords.

La société Altho fait valoir les dispositions de l’article 8, paragraphe 1, qui prévoient qu’un dessin ou modèle communautaire ne confère pas de droits sur les caractéristiques de l’apparence d’un produit qui sont exclusivement imposées par sa fonction technique, et le considérant 10 dudit règlement selon lequel : ‘L’innovation technologique ne devrait pas être entravée par l’octroi de la protection des dessins ou modèles à des caractéristiques imposées exclusivement par une fonction technique, étant entendu qu’il n’en résulte pas qu’un dessin ou modèle doit présenter un caractère esthétique. De même, l’interopérabilité de produits de fabrications différentes ne devrait pas être entravée par l’extension de la

protection aux dessins ou modèles des raccords mécaniques. Par conséquent, les caractéristiques d’un dessin ou modèle qui sont exclues de la protection pour ces motifs ne devraient pas être prises en considération pour apprécier si d’autres caractéristiques de ce dessin ou modèle remplissent les conditions d’obtention de la protection’ pour en déduire que les caractéristiques du modèle qui sont exclues de la protection car imposées exclusivement par leur fonction technique ne doivent pas être prises en considération pour apprécier si d’autres caractéristiques de ce modèle remplissent les conditions d’obtention de la protection.

Selon l’appelante, les ondulations parallèles (striures) et l’amplitude des striures sont des caractéristiques imposées par leur fonction technique et ne peuvent donc être prises en considération.

Ainsi que l’a pertinemment relevé le tribunal, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit (Aff. C-395-15 CJUE 8 mars 2018) que ”L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n°’6/2002 du Conseil, du 12’décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires doit être interprété en ce sens que, pour apprécier si des caractéristiques de l’apparence d’un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique de celui-ci, il y a lieu d’établir que cette fonction est le seul facteur ayant déterminé ces caractéristiques, l’existence de dessins ou modèles alternatifs n’étant pas déterminante à cet égard.’ Au paragraphe 23 de cet arrêt la Cour précise que «”Concernant, ensuite, le contexte de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n°’6/2002, il y a lieu de relever que cette disposition fait partie de la section 1 du titre II de ce règlement, intitulée «’Conditions de protection’», et vise le cas où la protection n’est pas conférée par un dessin ou modèle communautaire aux caractéristiques de l’apparence d’un produit lorsqu’elles sont exclusivement imposées par la fonction technique de celui-ci. Selon le considérant 10 dudit règlement, il ne résulte pas de l’exclusion de la protection dans ce cas qu’un dessin ou modèle doit présenter un caractère esthétique. Il n’est donc pas nécessaire, ainsi que l’a relevé M.’l’avocat général au point 27 de ses conclusions, que l’apparence du produit concerné revête un aspect esthétique pour pouvoir être protégée en vertu du même règlement.’

L’article 8 paragraphe 1 exclut de la protection le cas où la nécessité de remplir une fonction technique du produit concerné est le seul facteur ayant déterminé le choix du créateur d’une caractéristique de l’apparence de ce produit.

La société Altho invoque le brevet US numéro 4’855’151 (brevet US 151) intitulé «’potato product with asymmétric corrugations » publié le 8 août 1989. Ce brevet porte sur une invention proposant une chips ondulée plus croustillante et plus ferme que les chips antérieures.

Comme le relève les sociétés intimées, ce brevet ne porte pas sur les ondulations parallèles d’un produit alimentaire tel une chips de pomme de terre mais sur des caractéristiques techniques relatives à ces ondulations ayant une fonction en dent de scie, ayant substantiellement la même fréquence et amplitude’; chaque dent étant asymétrique par rapport à son sommet, ayant un premier et un second côté, le premier étant plus long que le second’; les ondulations de la surface supérieure et celles de la surface inférieure étant en phase pour donner une section relativement épaisse adjacente au premier côté de ladite dent et une section relativement mince adjacente au second côté de ladite dent (revendication 1).

En conséquence, l’appelante ne peut être suivie lorsqu’elle soutient que les ondulations parallèles des trois modèles en cause sont imposées par une fonction technique.

De même, il ne ressort pas du brevet US numéro 9’462’818 (brevet US 818) déposé le 18 juillet 2013, intitulé «’high amplitude corrugated food product’» dont la société Frito Lay est titulaire que l’amplitude des striures a un effet technique. En effet, le but de cette invention est d’obtenir un produit alimentaire ondulé avec une texture que les consommateurs trouvent attrayante, tout en permettant une humidité finale uniforme après les étapes de déshydratation ayant permis de fabriquer ce produit de longue conservation pour qu’il soit suffisamment solide pour être utilisé comme encas à tremper et ne pas se casser. La revendication 1 dudit brevet qui porte sur le produit alimentaire ondulé et son procédé de fabrication comprend des caractéristiques techniques telles une zone d’inertie normalisée comprise entre 20×10-8 m3 et environ 160×10-8, un facteur de déshydratation inférieur à 1,7, une épaisseur globale allant d’environ de 3,17 à environ 7,11 mm et une pluralité de pics ayant des valeurs d’amplitude sensiblement égales d’au moins environ 2,54 mm, ce qui montre que l’effet technique recherché ne ressort pas de la seule amplitude des stries mais également d’autres caractéristiques, ce quand bien même la société Frito-Lay met en avant sur son site internet le caractère unique de la forme de son produit aux côtés de la texture et du croquant de celui-ci, qui font l’objet d’un brevet.

La société Altho échoue donc à démontrer que les ondulations parallèles (striures) et l’amplitude des striures constituent des caractéristiques des modèles imposées par leur fonction technique, les déclarations du directeur de la R&D de la société Pepsico dans un article publié sur Internet sur le lien entre la largeur et la profondeur des striures et la solidité de la chips qui reste mince étant inopérantes.

Sur le modèle FL3

Ce modèle porte sur une forme ronde et incurvée comportant des striures parallèles lui donnant un aspect dentelé, les striures étant arrondies, régulières et de faible amplitude, les bords étant légèrement relevés.

La société Altho en conteste la validité faute de caractère individuel.

Selon les dispositions de l’article 6 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires,

1. Un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public:

(…)

b) dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité.

2. Pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

L’utilisateur averti à prendre en considération est le connaisseur des produits de type snacks et particulièrement des chips secteur particulier concerné par les modèles, étant rappelé que la notion d’utilisateur doit être comprise comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d’homme de l’art, expert doté de compétences techniques approfondies. Ainsi, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considère (CJUE C-, 20’oct. 2011, aff. C-281/10 P, PepsiCo, point 57).

La société Altho soutient que ce modèle doit être annulé pour défaut de caractère individuel et oppose le modèle US D495852 (modèle US 852) publié en 2004 dont la société Frito-Lay est titulaire et un modèle de chips «’Gold Creek’» objet d’une vidéo mise en ligne en janvier 2011.

Le modèle US 852 porte sur les représentations suivantes’:

Si ce modèle a une forme ronde, comporte des striures et des bords légèrement relevés, le nombre de striures est beaucoup plus important dans le modèle antérieur, celles-ci apparaissent crantées et non arrondies et d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité. En conséquence, le modèle FL3 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur le modèle US 852.

Le modèle de chips «’Gold Creek’» est présenté dans une vidéo ‘How do they make potato chips”.

Selon le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 13 octobre 2020 sur le site internet Youtube How do they make potato chips’ l’huissier instrumentaire constate que cette vidéo date du 19 janvier 2011, la visionne, la copie et l’annexe à son constat. Cette vidéo explique comment les chips Gold Creek sont fabriquées depuis la pomme de terre brute jusqu’au produit fini. Au visionnage de cette vidéo, il apparaît que les chips sont toujours présentées entremêlées et que la forme de celles-ci est difficile à discerner ainsi que le montre un extrait sélectionné par l’huissier instrumentaire à la 2-20 minutes et reproduit dans son procès-verbal’:

Ce procès-verbal qui a été régulièrement communiqué à la procédure n’a pas à être écarté des débats quelle que soit la qualité des reproductions qu’il comporte.

Si les chips que montrent cette vidéo comportent des striures, il est difficile de déterminer qu’elle est leur forme et leurs caractéristiques exactes. C’est en vain que la société Altho considère que les chips présentées dans cette vidéo ont une forme globale ronde, des striures arrondies de faibles amplitudes et des bords légèrement relevés, ces affirmations n’étant pas corroborées par le visionnage de la vidéo.

Aussi cette antériorité ne peut être considérée comme pertinente à démontrer le défaut de caractère individuel du modèle FL3, la seule présence de striures étant insuffisante à ce titre.

Sur le modèle FL11

La société Altho conteste la validité de ce modèle pour défaut de nouveauté et à titre subsidiaire pour défaut de caractère individuel.

Sur le défaut de nouveauté du modèle FL11

L’article 4 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose que la protection d’un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire n’est assurée que dans la mesure où il est nouveau et présente un caractère individuel.

Selon l’article 5 de ce règlement, un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué au public, dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants.

La société Frito-Lay décrit ainsi’son modèle FL11 :

– une forme globale ronde et légèrement incurvée,

– une surface dentelée constituée de plusieurs striures,

– des striures dentelées, de grande amplitude et irrégulières,

– des bords dans des directions opposées.

La société Altho oppose le document Reinert qui est un modèle national enregistré en Allemagne sous le numéro 40203260-02 qui a été publié le 10 mai 2003.

Selon elle, cette antériorité divulgue un modèle de forme ovale, peu incurvé, comprenant quatre striures d’une certaine amplitude et deux extrémités repliées dans des directions opposées, l’extrémité des ondulations étant dentelées en forme de V et constitue une antériorité destructrice de nouveauté.

Il n’est pas discuté que le document Reinert a été divulgué au public antérieurement à la date du dépôt du modèle FL11. Cette antériorité divulgue des lamelles de charcuterie de forme ovale et incurvée, une surface dentelée constituée de plusieurs striures, ces striures dentelées, présentant une faible amplitude et étant d’apparence assez régulière, le bord n’apparaissant pas à l’évidence avoir des directions opposées comme l’affirme la société Altho.

Aussi, la forme divulguée au public par le document Reinert n’est pas identique à celle objet du modèle FL11 et n’en diffère pas que par des détails insignifiants en raison de la différence de forme du produit, de l’amplitude des striures et des caractéristiques des bords. Elle n’est donc pas destructrice de nouveauté du modèle FL11.

Sur le défaut de caractère individuel du modèle FL11

Les dispositions de l’article 6 du règlement 6/2002 ont été précédemment rappelées.

La société Altho invoque à ce titre plusieurs antériorités’:

L’antériorité Reinert précitée.

Néanmoins, il n’existe pas une même impression d’ensemble pour l’observateur averti entre ces modèles en raison des différences précédemment relevées tenant à la forme du produit, à l’amplitude des striures et aux caractéristiques des bords. En conséquence, le modèle FL3 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur le modèle Reinert qui a une apparence générale moins plissée que celle du modèle dont la nullité est sollicitée.

L’antériorité McClure divulguée dans un article de blog publié le 11 juillet 2011 ainsi qu’il ressort d’un procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 13 octobre 2021 sur le site ‘McClure’s potato chips cool hunting’ (pièce 30 Altho).

L’huissier instrumentaire relève sur le blog consulté notamment les pages suivantes :

Ce procès-verbal qui a été régulièrement communiqué à la procédure n’a pas à être écarté des débats quelle que soit la qualité des reproductions qu’il comporte.

Les chips représentées dans ce procès-verbal apparaissent avoir une forme arrondie, comportent des striures et des extrémités repliées. Néanmoins, les striures sont d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité, celles-ci sont plus régulières et les bords ne sont pas repliés dans des directions opposées. En conséquence, le modèle FL11 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité McClure.

La société Altho oppose également le document Zweifel divulgué au public au mois d’avril 2006 sur le site Taquitos selon procès-verbal dressé par huissier de justice le 13 octobre 2021 (pièce 31 Altho).

La période d’avril 2006 qui serait celle de la divulgation de ces chips telle que l’affirme le rédacteur du blog Taquitos.net objet du procès-verbal, est corroborée par le rapport de la société Mintel (pièce 47 Altho) qui répertorie les lancements de produits de snacking avec ondulation profonde entre janvier 1996 et octobre 2011 et date le produit Zweifel wave en février 2005.

Selon ce procès-verbal dressé sur le blog Taquitos.net, comme le rapport Mintel, l’antériorité Zweifel se présente ainsi’:

Les chips représentées dans ce procès-verbal comportent des striures et des extrémités repliées. Néanmoins, elles ont une forme ovale et non ronde, les striures sont d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité, celles-ci sont plus régulières et les bords ne sont pas repliés dans des directions opposées. En conséquence, le modèle FL11 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Zweifel.

La société Altho invoque encore le modèle communautaire n° 001102180-0007 publié le 20 avril 2009 dit Lorenz Snack. Ce modèle porte sur sept représentations de chips.

Les chips représentées dans ce dépôt de modèle communautaire comportent des striures et des extrémités repliées qui peuvent apparaître dans un sens opposé. Néanmoins, elles ont une forme très allongée, dans le sens des striures et non ronde, les striures sont d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité et celles-ci sont plus régulières ce qui leur donne une apparence plus plate. En conséquence, le modèle FL11 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Lorenz Snack.

La société Altho oppose enfin les chips Herr’s constatées sur le site Taquitos.net selon procès-verbal dressé par huissier de justice le 13 octobre 2021 (pièce 46 Altho).

Selon ce procès-verbal dressé sur le blog Taquitos.net, l’antériorité Zweifel a été divulguée au public au mois d’août 2007 et se présente ainsi’:

La divulgation antérieure à date certaine de ces chips est corroborée par deux extraits du site Youtube (pièces 51 et 52 Altho) datés des 4 et 23 juin 2010 montrant deux personnes mangeant des chips Herr’s conditionnées dans des emballages identiques à celui-ci-dessus représenté.

Les chips représentées sur le paquet sont peu visibles mais l’on voit qu’elles comportent des striures. Néanmoins, elles ont une forme très allongée, dans le sens des striures et non ronde, les striures apparaissent d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité ce qui leur donne une apparence plus plate. En conséquence, le modèle FL11 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Herr’s.

Sur le modèle FL 10

Ce modèle porte sur une forme ovale ou oblongue comportant des striures parallèles lui donnant un aspect dentelé, les striures étant en forme de V, régulières et de forte amplitude, les bords étant de moindre amplitude.

La société Altho en conteste la validité faute de caractère individuel au visa des dispositions de l’article 6 du règlement 6/2002 précitées.

Elle oppose les antériorités suivantes’:

– l’antériorité Zweifel,

– l’antériorité Reinert,

– l’antériorité Lorenz Snack,

– l’antériorité McClure

– l’antériorité Herr’s

qui étaient également invoquées pour contester le caractère individuel du modèle FL 11 et qui sont ci-dessus décrites.

Elle invoque également une antériorité Mc Coys qui est un modèle de chips qu’elle dit connu du public depuis le mois de février 2007 selon le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 13 octobre 2021 sur le site wikipedia, l’huissier instrumentaire constatant la présence dans la catégorie «’file history’» dans l’encadré «’date/time’» la présence de la mention «’00:31, 14 february 2007’» (pièce 33 Altho). Cette date de divulgation n’est pas sérieusement contestée par les appelantes.

Selon ce procès-verbal, l’antériorité Mc Coys se présente ainsi’:

Si les chips que montrent cette photographie sont des chips de forme oblongue comportant des striures parallèles leur donnant un aspect dentelé, il est difficile de déterminer quelles sont les caractéristiques exactes des striures notamment si elles sont en forme de V, régulières et de forte amplitude, celles-ci apparaissant d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité et plus arrondies ce qui donne à la chips une apparence bien plus plate.

Aussi cette antériorité ne peut être considérée comme pertinente à démontrer le défaut de caractère individuel du modèle FL10 celui-ci produisant sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Mc Coys.

En ce qui concerne l’antériorité Zweifel, les chips représentées dans le procès-verbal précité comportent une forme ovale, des striures et des extrémités repliées. Néanmoins, la forme est beaucoup moins allongée que dans le modèle critiqué, les striures sont d’une amplitude moindre et plus larges, ce qui donne un aspect moins long et plus plat à la chips antérieure. En conséquence, le modèle FL10 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Zweifel.

De même, le modèle allemand Reinert divulgue des lamelles de charcuterie de forme ovale et incurvée, une surface dentelée constituée de plusieurs striures, ces striures dentelées, présentant une faible amplitude et étant d’apparence assez régulière, et des bords repliés. Toutefois, la forme est beaucoup moins allongée que dans le modèle critiqué, les striures sont d’une amplitude moindre et plus larges, ce qui donne un aspect moins long, moins dentelé, et plus plat à la chips antérieure. En conséquence, le modèle FL10 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Reinert.

Pour le modèle communautaire Lorenz Snack, les chips représentées dans ce dépôt de modèle communautaire sont de forme oblongues allongées et comportent des striures et des extrémités repliées qui peuvent apparaître dans un sens opposé. Néanmoins, les striures sont d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité, la chips est légèrement incurvée et non plate et les bords ne sont pas dentelés mais plus réguliers ce qui leur donne une apparence différente. En conséquence, le modèle FL10 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Lorenz Snack.

Ainsi qu’il a été dit s’agissant de l’antériorité McClure, les chips représentées dans le procès-verbal précité apparaissent comporter des striures et des extrémités repliées. Néanmoins, la forme de la chips antérieure est plutôt arrondie et non oblongue, les striures sont d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité, les bords ne sont pas ciselés mais arrondis. En conséquence, le modèle FL10 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité McClure.

S’agissant de l’antériorité Herr’s, ainsi qu’il a été dit, les chips représentées sur le paquet sont peu visibles mais l’on voit qu’elles ont une forme très allongée dans le sens des striures. Néanmoins, les striures apparaissent d’une amplitude moindre que dans le modèle argué de nullité ce qui leur donne une apparence plus aplatie. En conséquence, le modèle FL10 produit sur l’utilisateur averti précédemment défini une impression globale qui diffère de celle que produit sur un tel utilisateur l’antériorité Herr’s.

Enfin, pour justifier du défaut de caractère individuel de ces trois modèles, la société Altho n’invoque pas utilement une décision de l’EUIPO du 18 juillet 2022 statuant sur une demande de nullité d’un modèle déposé par la société Fam initiée par la société Frito-Lay sur la base de ses modèles de chips (FL1 et FL8) appartenant à la même série que les modèles en cause, l’office européen ayant considéré le modèle nul. En effet, les modèles en cause ne sont pas les mêmes que ceux objets de la présente procédure et cette décision qui ne lie par la cour ne peut être prise en considération.

Les demandes de nullité des modèles FL3, FL10 et FL11 dont la société Frito-Lay est titulaire seront rejetées et le jugement confirmé de ces chefs.

– Sur la contrefaçon des dessins et modèles communautaires

Chacune des parties critique le jugement déféré qui a rejeté les demandes de la société Frito-Lay au titre de la contrefaçon des modèles FL3 et FL11 mais les a accueillies pour celles fondées sur le modèle FL 10.

L’article 10 du règlement n°6/2002 prévoit que :

1- la protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente.

2 – pour apprécier l’étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

L’article 19, premier alinéa, du même règlement prévoit que “Le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l’utiliser et d’interdire à tout tiers de l’utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l’offre, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation ou l’utilisation d’un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins.”

L’article L. 515-1 du code de la propriété intellectuelle précise que’: «’Toute atteinte aux droits définis par l’article 19 du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.’»

L’utilisateur averti a été précédemment défini comme le connaisseur des produits de type snacks et particulièrement des chips secteur particulier concerné par les modèles.

Il sera également rappelé que les ondulations parallèles (striures) et l’amplitude des striures ne constituent pas des caractéristiques des modèles imposées par leur fonction technique.

La société Frito-Lay reproche à la société Altho la contrefaçon de ses modèles FL3, FL10 et FL11, faisant valoir que les différences entre les chips Bret’s Shark et les modèles dont elle est titulaire sont minimes, que l’utilisateur averti aura la même impression d’ensemble que celle créée par ses modèles à savoir la vision d’une chips comportant des striures de grande amplitude ce qui est inhabituel, et en relativement petit nombre.

La société Altho fait valoir pour contester les actes de contrefaçon qui lui sont reprochés que les chips qu’elle commercialise sous la dénomination «’Bret’s Shark’» n’ont pas toutes la même forme, celles-ci ayant des tailles, des formes et des incurvations différents, seule la forme des striures en arche gothique induite par le forme du couteau utilisé se retrouvant sur l’ensemble des chips qu’elle commercialise.

Elle conclut que l’impression d’ensemble qui se dégage des chips qu’elle commercialise diffère de celle des modèles FL3, FL10 et FL11 de la société Frito-Lay.

Il sera tout d’abord relevé que la société Frito-Lay ne peut varier dans la description des caractéristiques du modèle de chips argué de contrefaçon en fonction du modèle antérieur sur lequel elle se fonde, arguant indifféremment que la chips «’Bret’s Shark’» a des striures de faible puis de large amplitude ou que celles-ci sont soit régulières, soit irrégulières.

Un procès-verbal de saisie-contrefaçon a été réalisé le 18 septembre 2017 à la demande de la société Frito-Lay dans les locaux de la société Altho à [Localité 6] (pièce 13 intimées).

Selon les photographies prises par l’huissier instrumentaire lors de la saisie-contrefaçon qui portent sur le packaging ou les chips trouvées dans les paquets et la lecture du procès-verbal, le modèle de chips «’Bret’s Shark’» a une forme ovale ou oblongue, comporte plusieurs striures positionnées perpendiculairement à la forme ovale, sont profondes et régulières et sont en forme d’arche gothique en raison du couteau utilisé pour découper les pommes de terre.

Le modèle FL3 porte sur une forme ronde et incurvée comportant des striures parallèles lui donnant un aspect dentelé, les striures étant arrondies, régulières et de faible amplitude, les bords étant légèrement relevés.

La société Frito-Lay soutient que le modèle de chips représenté sur le packaging des chips Bret’s Shark commercialisés par la société Altho

contrefait le modèle FL3 en ce que cette chips reprend l’ensemble des caractéristiques ci-avant rappelées. Elle sollicite l’infirmation du jugement qui a rejeté sa demande à ce titre.

La représentation de la chips «’Bret’s Shark’» sur le packaging des produits est une chips de forme allongée et non ronde, les striures apparaissent plus profonde et plus large que dans le modèle opposé ce qui lui donne une apparence plus ondulée, ces striures n’étant pas de forme arrondie mais en forme d’arche gothique. En conséquence, ces différences suffisent à susciter chez l’utilisateur averti ayant un certain niveau de vigilance, une impression visuelle globale différente entre le modèle FL3 opposé et la chips arguée de contrefaçon.

Les demandes de la société Frito-Lay au titre de la contrefaçon de son modèle FL3 seront rejetées et le jugement confirmé de ce chef.

Le modèle FL10 porte sur une forme ovale ou oblongue comportant des striures parallèles lui donnant un aspect dentelé, les striures étant en forme de V, régulières et de forte amplitude, les bords étant de moindre amplitude.

La société Frito-Lay considère que les chips Bret’s Shark portent atteinte au modèle FL10 en se basant sur trois photographies extraites de sa pièce 14.

Il ressort notamment du procès-verbal de saisie-contrefaçon précité et des photographies susvisées que la chips «’Bret’s Shark’» a une forme ovale ou oblongue et comporte des striures parallèles régulières et de forte amplitude. Néanmoins, ces striures ne sont pas dans le sens parallèle mais dans le sens perpendiculaire par rapport à la forme ovale, elles ne sont pas de forme de V mais en forme d’arche gothique et sont donc plus larges que dans le modèle opposé, ce qui lui donne une apparence moins plissée. En outre, les chips arguées de contrefaçon n’ont pas des bords repliés de moindre amplitude.

Aussi, du point de vue de l’utilisateur averti, l’impression globale produite par le modèle de chips «’Bret’s Shark’» diffère de celle produite par le modèle FL10 antérieur.

Les demandes de la société Frito-Lay au titre de la contrefaçon de son modèle FL10 seront rejetées et le jugement infirmé de ce chef.

Le modèle FL11invoqué est ainsi’décrit par la société Frito-Lay : une forme globale ronde et légèrement incurvée, une surface dentelée constituée de plusieurs striures, des striures dentelées, de grande amplitude et irrégulières, des bords dans des directions opposées.

Elle fait enfin valoir, à titre subsidiaire, que les chips Bret’s Shark portent atteinte au modèle FL11 en se basant sur trois photographies extraites de sa pièce 15.

Ainsi qu’il a été précédemment relevé la chips «’Bret’s Shark’» a une forme ovale ou oblongue et comporte des striures parallèles de forte amplitude. Ces striures sont toutefois régulières contrairement à celles du modèle opposé qui ne le sont pas, elles ne sont pas dans le sens parallèle mais dans le sens perpendiculaire par rapport à la forme ovale, ne sont pas de forme de V mais en forme d’arche gothique et ont donc un aspect plus larges que dans le modèle opposé, ce qui lui donne une apparence moins plissée.

Les demandes de la société Frito-Lay au titre de la contrefaçon de son modèle FL11 seront rejetées, l’impression globale produite par le modèle de chips «’Bret’s Shark’» différant pour l’utilisateur averti de celle produite par le modèle FL11, et le jugement confirmé de ce chef.

– Sur les actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Pepsico

Le principe de la liberté du commerce implique qu’un produit qui n’est pas l’objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moins que la reproduction ou l’imitation du produit ait pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l’esprit du public, comportement déloyal constitutif d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil.

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

La demande en concurrence déloyale et parasitaire présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence à la société Pepsico de rapporter la preuve d’un agissement fautif de la société Altho commis à son préjudice par la création d’un risque de confusion et / ou la captation des investissements consentis pour développer un produit phare.

La société Pepsico qui se présente comme le distributeur en France des produits Deep Ridged reproche à la société Altho au titre des agissements déloyaux la reproduction illicite des modèles de chips précédemment évoqués ainsi que l’imitation du packaging Deep Ridged, en se fondant indifféremment sur les articles 1240 du code civil, L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation.

L’article L. 120-1 du code de la consommation dispose que :

« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service’».

L’article L. 121-1 du même code précise :

« une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’un des circonstances suivantes : 1) lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service (‘) d’un concurrent».

Si l’imitation devient fautive lorsqu’elle révèle une volonté de créer une confusion dans l’esprit du consommateur entre deux produits, il ressort de ce qui précède que les modèles de chips’«’Bret’s Shark’» ne constituent pas une reproduction illicite des modèles en cause et il n’est pas démontré par la société Pepsico que les ressemblances précédemment relevées sont suffisantes à caractériser un risque de confusion dans l’esprit du consommateur fusse-t-il d’attention moyenne.

La concurrence déloyale qui pour être établie suppose la démonstration d’une faute par la création d’un risque de confusion doit être, en conséquence, écartée.

La société Pepsico n’établit pas plus des pratiques commerciales trompeuses ou déloyales de la part de la société Altho, aucun risque de confusion n’étant caractérisé pas plus qu’une pratique altérant ou étant susceptible d’altérer le comportement économique du consommateur qui notamment se détournerait des produits «’Deep Ridged’» au profit des produits «’Bret’s Shark’» ce d’autant que la société Altho démontre que la forme de la chips ne fait pas partie des principaux critères pris en considération par le consommateur lors de l’achat d’un paquet de chips ce quand bien même cette forme serait nouvelle (sondage Ifop réalisé en mars 2022 pièce 68 Altho), ce sondage n’étant pas sérieusement contesté par les intimées.

La société Pepsico reproche également à la société Altho des actes de concurrence déloyale du fait de la reprise du packaging. Elle considère que le packaging utilisé par la société Altho reprend les caractéristiques essentielles de son packaging soit un fond systématiquement noir, la marque ombrelle en haut du packaging (la société Altho ayant choisi de réduire la taille de sa marque ombrelle pour ce type de packaging), le nom du produit en gros caractères ainsi que la saveur du produit, des éléments textuels de couleurs vives (jaune, rouge, orange et vert), une photographie en noir et blanc d’un élément naturel et la représentation d’une chips unique de trois quart en surimpression. Elle en déduit que le packaging utilisé par la société Altho engendre avec le sien une même impression visuelle d’ensemble et un risque de confusion évident. Elle ajoute que la société Altho décline son packaging dans les mêmes gammes de couleur.

Le risque de confusion doit, comme le soutient à juste titre la société Pepsico, s’apprécier de manière globale, l’apposition d’une marque ombrelle différente sur un produit étant indifférente à le distinguer d’un autre.

La reprise des éléments caractéristiques du packaging reprochée à la société Altho par la société Pepsico tient aux couleurs, décor et positionnement des marques et noms des produits.

Les packagings en cause ont en commun le positionnement des marques ombrelles en haut du paquet (Lay’s/Bret’s) et celui du nom du produit (Deep Ridged/Shark) inscrit en dessous en couleur pour le paquet Lay’s, en blanc pour le paquet Bret’s, un fond noir, des mentions inscrites en jaune ou en orange selon la saveur du produit et la représentation d’un dessin en noir et blanc (montagnes pour le paquet Lay’s, vagues évoquant la gueule ouverte d’un requin pour la paquet Bret’s).

Or, ainsi que le démontre la société Altho par les éléments qu’elle produit au débat, la majorité des éléments dont la reprise est reprochée par la société Pepsico sont couramment utilisés dans la présentation des paquets de chips (fond noir, mentions jaunes ou orange, représentation du produit, positionnement des marques et nom l’un au-dessus de l’autre) et ne constituent pas des éléments caractéristiques que le consommateur retiendra particulièrement même pris en combinaison.

De même, s’agissant de la représentation de l’élément naturel en noir et blanc, doit être prise en considération dans le cadre de l’appréciation globale de chacun des packagings, l’absence de points communs entre ces deux représentations autre que l’usage du noir et blanc et le lien qui sera fait par le consommateur, s’agissant du packaging de la société Altho, entre le nom du produit «’Shark’», le slogan «’la chips qui a du mordant’» et la représentation des vagues évoquant les dents d’un requin.

Aussi, aucun risque de confusion pour le consommateur entre les deux packagings en cause n’est caractérisé. La circonstance que la société Altho n’aurait pas repris ses codes identitaires classiques pour présenter son produit, à supposer démontrée, est indifférente à établir l’existence d’un risque de confusion entre les deux packagings en cause.

Les demandes au titre de la concurrence déloyale seront rejetées.

Le jugement déféré mérite infirmation sur ce point.

– Sur les actes de parasitisme au préjudice de la société Pepsico

La société Pepsico reproche enfin à la société Altho d’avoir tiré profit sans rien dépenser de ses investissements et de sa notoriété en copiant son packaging et en imitant la forme fortement ondulée de la chips Deep Ridged, parfaitement identifiable car novatrice lors de son lancement.

La société Pepsico démontre avoir investi en 2014 la somme de 820’000 euros en campagne marketing pour le lancement de la chips Deep Ridged en France utilisant notamment l’image du joueur de football [U] [Z] (attestation de sa directrice juridique du 9 juin 2020 pièce 21). Ces investissements d’importance en 2014 ont toutefois été notablement réduits les années suivantes pour n’être que de 79’035 euros en 2016. Elle ne justifie pas en outre de la notoriété qu’elle allègue du produit Deep Ridged en France.

En outre, il ressort de ce qui précède que tant la forme des chips que la présentation des packagings retenus par la société Altho, diffèrent de ceux de la société Pepsico, et il n’est pas établi que le consommateur établisse un lien entre les produits commercialisés par la société Pepsico et ceux vendus par la société Altho. La société Altho justifie avoir elle-même consacré des investissements pour le lancement de son produit, qui sont certes très inférieurs à ceux de la société Pepsico mais qui doivent être mis en rapport avec l’importance de chacune des entités (multinationale / PME).

La société Pepsico échoue donc à démontrer les actes de parasitisme qu’elle reproche à la société Altho et sera également déboutée de ses demandes à ce titre.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

– Sur les autres demandes

Le sens de l’arrêt conduit à l’infirmation des dispositions du jugement concernant les frais irrépétibles et les dépens.

La société Altho demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu’elle a versées au titre de l’article 700 du code de procédure civile en vertu du jugement assorti de l’exécution provisoire.

Cependant le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de la société Altho.

Parties perdantes, les sociétés Frito-Lay et Pepsico sont condamnées aux dépens de première instance et d’appel et à payer à la société Altho, en application de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 50 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a’:

– dit qu’en fabriquant et commercialisant les produits «’Bret’s Shark’» saveurs Barbecue et Hot & Spicy, la société Altho a commis des actes de contrefaçon du dessin communautaire n°001301733-010 au préjudice de la société Frito-Lay North America,

– dit que la société Altho a également été l’auteur d’actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Pepsico France,

– fait interdiction à la société Altho de fabriquer, distribuer, commercialiser et offrir à la vente tous produits de snack reproduisant les caractéristiques du dessin communautaire enregistré n°001301733- 010, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir quinze jours après la signification du jugement, et pour une durée de six mois,

– dit que le tribunal se réserve la liquidation de l’astreinte,

– condamné la société Altho à payer à la société Frito-Lay North America 60 037 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice économique et moral imputable à la contrefaçon du dessin communautaire enregistré n°001301733-010,

– condamné la société Altho à payer à la société Pepsico France 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

– condamné la société Altho aux dépens, qui pourront être recouvrés par le cabinet Hogan Lovells (Paris) LLP dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,

– condamné la société Altho à payer aux sociétés Frito-Lay North America et Pepsico France 40 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute la société Frito-Lay de l’ensemble de ses demandes fondées sur la contrefaçon de ses modèles communautaires n°001301733-003, n°001301733-010 et n°001301733-011,

Déboute la société Pepsico France de l’ensemble de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale,

Y ajoutant,

Condamne in solidum la société Frito-Lay et la société Pepsico France à payer à la société Altho la somme de 50 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Condamne in solidum la société Frito-Lay et la société Pepsico France aux dépens de première instance et d’appel.

La Greffière La Présidente

 


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