Nullité de contrat : 6 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/07886

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Nullité de contrat : 6 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/07886

N° RG 21/07886 – N° Portalis DBVX-V-B7F-N5GA

Décision du Tribunal Judiciaire

de ROANNE

du 01 septembre 2021

RG : 1119000185

ch n°

[K]-[V]

C/

S.A.S. PMCA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 06 Avril 2023

APPELANTE :

Mme [H] [K] ép. [V]

née le 24 Avril 1942 à [Localité 5] (69)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Nathalie VIARD-GAUDIN, avocat au barreau de LYON, toque : 1486

INTIMEE :

S.A.S. PROFESSION MENUISIER CENTRE AUVERGNE (PMCA)

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Philippe GUILMIN, avocat au barreau de LYON, toque : 2501

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 21 Juin 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Mars 2023

Date de mise à disposition : 06 Avril 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Dominique BOISSELET, président

– Evelyne ALLAIS, conseiller

– Stéphanie ROBIN, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Par acte d’huissier de justice du 13 mai 2019, la SAS PMCA (Profession Menuisier Centre Auvergne) a fait assigner [H] [V] à comparaître devant le tribunal d’instance (devenu tribunal judiciaire) de Roanne pour obtenir paiement de deux factures :

– l’une en date du 28 août 2018, correspondant à la fourniture et pose d’une porte de garage, pour un montant de 6.127,77 euros ttc

– l’autre en date du 19 octobre 2018, correspondant à la fourniture et pose d’un bloc-porte, pour un montant de 1.872,23 euros ttc.

En dernier lieu, la société PMCA a formulé les demandes suivantes :

à titre principal,

– condamner Mme [V] à lui verser la somme de 8.000 euros en principal, outre intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2018,

à titre subsidiaire,

– la condamner à lui restituer les éléments posés, à savoir la porte postformée, une porte de garage, une porte coulissante, et les accessoires permettant leur installation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision,

à titre plus subsidiaire,

– la condamner à lui restituer en valeur la somme de 5.000 euros sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant notification de la décision,

– condamner Mme [V] à lui verser la some de 1.352,51 euros au titre des frais de recouvrement,

– la condamner à lui verser la somme de 1.800 à titre de dommages et intérêts,

– la condamner à lui payer la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Mme [V] a demandé au tribunal de :

– prononcer la résolution de plein droit sans indemnité du contrat conclu selon devis du 23 mars 2018,

– en conséquence, prononcer la restitution de la porte coulissante, la porte de communication et la porte de garage en contrepartie des portes qui existaient,

– juger que si cette restitution est impossible, la restitution en valeur aura lieu et elle remettra la somme de 3.800 euros ttc à la société PMCA,

– lui accorder les plus larges délais de paiement pour s’acquitter cette somme,

– juger qu’elle pourra s’acquitter de cette somme de 3.800 euros ttc par mensualité de 100 euros durant 23 mois avec le solde au 24ème mois,

– condamner la société PMCA à lui payer la somme de 1.400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– statuer ce que de droit sur les dépens.

Par jugement en date du 1er septembre 2021, le tribunal judiciaire de Roanne a :

– rejeté la demande tendant à prononcer la résolution du contrat conclu le 23 mars 2018 à raison de l’utilisation de sa faculté de rétractation de la part de Mme [V],

en conséquence,

– rejeté toutes les demandes de Mme [V],

– condamné Mme [V] à payer à la société PMCA la somme de 8.000 euros ttc en réglement des factures n°12487 du 28 août 2018 et n°12850 du 19 octobre 2018, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 janvier 2019,

– condamné Mme [V] à payer à la société PMCA la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté toutes les autres et plus amples demandes des parties,

– condamné Mme [V] aux dépens.

Mme [V] a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 28 octobre 2021

En ses conclusions du 15 janvier 2022, [H] [V] demande à la Cour ce qui suit, au visa des articles L.312-45 et suivants, L.341-11, L 121-1 et suivants et L.132-13 du code de la consommation, 1352 et 1104 du code civil ;

– infirmer le jugement rendu le 1er septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Roanne et, statuant à nouveau,

– juger que le contrat relatif à la porte de communication, porte coulissante et porte de garage, selon devis du 23 mars 2018, est résolu de plein droit et sans indemnité avec effet

rétroactif à la date des conclusions du 19 novembre 2019 ;

– juger qu’il est en tout état de cause nul et de nul effet ;

en conséquence,

– juger la restitution de la porte coulissante, la porte de communication et la porte de garage

en contrepartie de la remise des portes qui existaient ;

– juger que si cette restitution en nature est impossible, Mme [V] sera condamnée au seul règlement de la somme de 3.800 euros ttc à la SAS PMCA ;

– juger que Mme [V] pourra s’acquitter des 3.800 euros par mensualité de 100 euros durant 23 mois avec le solde en 24ème mois ;

en tout état de cause,

– juger que la société PMCA a eu un comportement déloyal dans la conclusion du contrat et a commis un abus de faiblesse lesquels devront être sanctionnés ;

en conséquence,

– juger qu’il sera alloué à Mme [V] la somme de 4.200 euros à titre de dommages et intérêts ;

– condamner la société PMCA à lui payer cette somme, outre intérêt au taux légal à compter du prononcé de la décision ;

– débouter la SAS PMCA de l’intégralité de ses demandes ;

– condamner la SAS PMCA à verser à Mme [V] à la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions du 13 avril 2022, la SAS PMCA demande à la Cour de statuer comme suit, en visant les articles 1113, 1103, 1104, 1217, 1231-1 et 1352 et suivants du code civil :

rejetant toute autre demande, fins et conclusions adverses,

à titre principal,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Roanne le 1er septembre 2021 et condamner Mme [V] à verser à la société PMCA la somme de 8.000 euros ttc en règlement des factures n°12487 du 28 août 2018 et n°12850 du 19 octobre 2018, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 janvier 2019 ;

à titre subsidiaire,

– condamner Mme [V] à restituer à la société PMCA en valeur en intégrant, pour chacun des éléments, la valeur de jouissance ainsi que la valeur de la prestation d’installation ;

– débouter Mme [V] de sa demande de délais de paiement ;

en tout état de cause,

– débouter Mme [V] de sa demande de voir juger que la société PMCA a eu un comportement déloyal dans la conclusion du contrat et qu’elle a commis un abus de faiblesse qui devront être sanctionnés ;

en conséquence, débouter Mme [V] de sa demande en paiement de la somme de 4 200 euros de dommages et intérêts ;

réformant le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Roanne le 1er septembre 2021,

– condamner Mme [V] à verser à la société PMCA la somme de 1.368,51 euros au titre des frais de recouvrement ;

– condamner Mme [V] à verser à la société PMCA la somme de 1.800 euros au titre des dommages et intérêts ;

– condamner Mme [V] à verser à la société PMCA la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner Mme [V] au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit du cabinet JPG Avocat et de lui accorder la faculté d’utiliser le dispositif de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 juin 2022.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes principales

Il résulte des explications des parties et des pièces versées aux débats que Mme [V] est locataire d’une maison à St Germain Lespinasse (42), appartenant à une société familiale (SCI Hôtel de Paris) dont elle est la gérante. En son nom personnel, elle a passé commande à plusieurs reprises, dans le cadre de démarchages à domicile, auprès de la SAS PMCA, spécialisée en menuiseries.

Une première commande a été passée le 30 novembre 2017 pour la fourniture et installation de 3 fenêtres, pour un apport de 89 euros et un complément de 2.200 euros réglé au moyen d’un crédit affecté souscrit auprès de Financo.

Le contrat a été normalement exécuté, les travaux ont été réceptionnés le 5 mars 2018 et Mme [V] s’est acquittée du crédit.

Le 20 mars 2018, Mme [V] a passé commande auprès de la société PMCA d’un système de VMC, pour le prix de 8.000 euros devant être financé par un nouveau contrat de crédit souscrit auprès de Financo. Mme [V] a adressé à la société PMCA le bordereau de rétractation le 26 mars 2018 et la commande n’a pas été exécutée.

Le même jour, Mme [V] a passé commande auprès de la même société pour la fourniture et pose d’une porte-fenêtre de salon et d’une porte de communication, au prix de 3.800 euros devant encore être financé par un crédit Financo. Là encore, Mme [V] a adressé à la société PMCA le bordereau de rétractation de la commande le 4 avril 2018 et les travaux n’ont pas été exécutés.

Le 25 avril 2018, Mme [V] a signé un bon de commande pour une VMC, une porte de garage et une porte de communication pour le prix de 13.900 euros, devant toujours être financé par un crédit Financo. Mme [V] a adressé à la société PMCA le bordereau de rétractation par lettre recommandée avec avis de réception signé le 7 mai 2018 et cette commande a également été annulée.

Le 25 avril 2018 également, Mme [V] a accepté un autre devis de la société PMCA, daté du 23 mars 2018, portant sur la fourniture et pose des matériels suivants :

– un bloc-porte postformé, pour 251,72 euros ht

– une porte de garage, pour 5.570,70 euros ht

– une porte coulissante, pour 542,56 euros ht

– un rail en applique avec cache-rail et butée, pour 782,54 euros ht

– des garnitures sans serrure pour 125,21 euros ht.

L’ensemble totalisant 7.272,73 euros ht, soit 8.000 euros ttc.

Les travaux ont été exécutés. La société PMCA a émis une première facture en date du 28 août 2018 pour la porte de garage, à hauteur de 6.127,77 euros ttc (5.570,70 euros ht), puis une seconde facture en date du 19 octobre 2018 pour les autres prestations, à hauteur de 1.872,23 euros ttc (1.702,03 euros ht).

La société PMCA a ensuite adressé des lettres de relance à Mme [V] les 16 novembre et 4 décembre 2018 pour paiement de la seconde facture.

Elle a ensuite mandaté une société de recouvrement, le cabinet Clique & Associés, qui a réclamé la somme totale de 9.805,71 euros en ajoutant au principal de 8.000 euros des intérêts de retard et indemnité complémentaire.

Il est fait mention sur le devis d’un règlement Financo. En fait, la société PMCA avait obtenu de Financo un accord de financement à hauteur de 8.000 euros, en date du 15 mars 2018, affecté à d’autres biens, désignés comme ‘Fenêtre fermetures’. Mme [V] avait signé ce contrat de crédit affecté.

La société PMCA dit que la commande résultant de la signature du devis du 23 mars 2018 devait bien être financée au moyen d’un crédit mais elle n’a reçu aucun règlement de Financo et en déduit que Mme [V] n’a pas signé l’ordre de déblocage des fonds auprès de l’organisme de crédit.

Mme [V] soutient qu’elle n’a reçu aucun courrier de Financo pour le déblocage des fonds et en tire deux hypothèses : Soit la société PMCA a reçu les fonds de Financo et n’a rien à lui réclamer, soit Financo a refusé le crédit et le contrat de vente doit être résolu.

Sur ce, on peut raisonnablement écarter la première hypothèse, il est en effet inconcevable que Financo ait débloqué les fonds entre les mains de l’entreprise sans réclamer ensuite à l’emprunteuse le règlement des échéances du crédit.

Mme [V] se prétend victime de harcèlement et manoeuvres du commercial de l’entreprise mais ne plaide pas la nullité du contrat à raison d’un vice de son consentement, elle prétend à une résolution du contrat pour défaut d’obtention du crédit.

Le nombre conséquent de devis signés et restés sans suite accrédite l’idée d’un harcèlement du démarcheur de la société PMCA, mais aussi de l’inconséquence de Mme [V]. Il n’en demeure pas moins qu’elle a bien accepté l’exécution des travaux prévus sur le devis qu’elle a signé le 25 avril 2018.

L’accord verbal, selon lequel la société PMCA aurait limité le prix des travaux à 3.800 euros et promis un avoir de la différence avec le montant de 8.000 euros, ne résulte que de l’affirmation de Mme [V], même si le prix facturé pour la porte de garage (5.208,60 euros ttc hors pose) peut paraître très excessif.

Le premier juge, par une motivation exempte de critiques, a exactement retenu que la société PMCA a pu exécuter les travaux au vu de l’accord de financement donné par Financo. Mme [V], qui n’avait pas adressé de bordereau de rétractation et a accepté l’exécution des travaux, a la charge de prouver qu’elle a fait le nécessaire pour le règlement du prix par la société de crédit.

A tout le moins, les factures de la société PMCA sont conformes au devis et Mme [V], qui ne conteste pas la réalité de leur exécution, ne démontre pas qu’elles auraient été réglées par le crédit souscrit auprès de Financo, ce qui est d’autant moins crédible qu’elle ne prétend pas avoir autorisé le déblocage des fonds par le prêteur et ne justifie d’aucune demande de remboursement de sa part.

La confusion qu’elle entretient avec les multiples commandes dont elle s’est rétractée ne saurait fonder la résolution du contrat qui a été normalement exécuté. Le jugement doit être confirmé en son rejet des demandes de Mme [V] et sa condamnation à paiement de la somme de 8.000 euros.

Sur les autres demandes

Pas plus que devant le premier juge, la société PMCA ne justifie pas en appel du règlement de la somme de 1.368,51 euros à la société Clique & Associés. Le jugement est confirmé en son rejet de cette demande.

La société PMCA ne justifie pas d’un préjudice particulier autre que le retard de paiement indemnisé par l’intérêt légal. Le jugement est aussi confirmé en son rejet de sa demande indemnitaire.

Mme [V], partie perdante en principal, supporte les dépens de première instance et d’appel, conserve la charge des frais irrépétibles qu’elle a exposés mais, en équité, compte tenu du prix excessif facturé par la société PMCA, il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement prononcé le 10 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Roanne ;

Condamne [H] [V] aux dépens d’appel ;

Rejette le surplus des demandes des parties.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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