N° RG 21/08112 – N° Portalis DBVX-V-B7F-N5ZF
Décision du Juge des contentieux de la protection du Tribunal de Proximité de BELLEY
du 04 octobre 2021
RG : 11-21-16
S.A. COFIDIS
C/
[K]
S.A.R.L. SUNGOLD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 23 Mars 2023
APPELANTE :
S.A. COFIDIS
[Adresse 9]
[Localité 5]
Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983
assisté de Med HELAIN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT HELAIN, avocat au barreau de l’ESSONNE
INTIMES :
M. [D] [K]
né le 12 Juin 1962 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Thomas BOUDIER, avocat au barreau de LYON, toque : 2634
assisté de Me Samuel HABIB de HERACLES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. SUNGOLD
[Adresse 2]
[Localité 6]
défaillante
INTERVENANTE FORCEE :
LA SOCIETE MJS – PARTNERS, représentée par Me [E] [X], en qualité de mandataire ad’litem de la SOCIETE SUNGOLD sous l’enseigne INSTITUT DES NOUVELLES ENERGIES
[Adresse 3]
[Localité 7]
défaillante
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 21 Juin 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 21 Février 2023
Date de mise à disposition : 23 Mars 2023
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Dominique BOISSELET, président
– Evelyne ALLAIS, conseiller
– Stéphanie ROBIN, conseiller
assistés pendant les débats de Priscillia CANU, greffier
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt rendu par défaut publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Dans le cadre d’un démarchage à domicile, [D] [K] a passé commande le 15 janvier 2016 de la fourniture, livraison et pose d’un équipement de production d’électricité photovoltaïque auprès de la Sarl Sungold, exerçant sous l’enseigne Institut des Nouvelles Energies.
Le prix de 22.500 euros a été financé au moyen d’un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la société Cofidis, sous la marque Sofemo Financement, remboursable en 180 échéances mensuelles de 197,82 euros hors assurance, au TAEG de 5,97 %.
La société Sungold a procédé à l’installation de l’équipement photovoltaïque et M. [K] a signé le 24 février 2016 une attestation de fin de travaux remise par l’entreprise à la société Cofidis qui lui a réglé la somme de 22.500 euros.
L’équipement a été raccordé au réseau électrique et mis en service le 15 juin 2016.
La société Sungold a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 20 juillet 2016, puis en liquidation judiciaire par jugement du 6 septembre 2017. La procédure a été clôturée pour insuffisance d’actif par jugement du 26 juillet 2019.
Par ordonnance du 17 février 2020, le président du tribunal de commerce de Nanterre a désigné [M] [T] en qualité de mandataire ad litem de la Sarl Sungold.
Par actes d’huissiers de justice du 14 janvier 2021, M. [K] a fait assigner la société Cofidis et la société Sungold, représentée par son mandataire ad’litem M. [T], à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Belley.
En dernier lieu, M. [K] a demandé au juge qu’il :
– déclare recevables ses demandes,
– ordonne à la société Cofidis la communication du tableau d’amortissement relatif au crédit
souscrit le 15 janvier 2016,
– déboute la société Cofidis de l’ensemble de ses demandes,
à titre principal,
– prononce l’annulation du contrat de vente conclu avec la société Sungold et du contrat de crédit affecté,
– ordonne le remboursement par la société de crédit des sommes versées par le requérant,
à titre subsidiaire,
– condamne la société de crédit à lui payer la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts,
à titre plus subsidiaire,
– prononce la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société Cofidis,
en tout état de cause,
– condamne la société de crédit à lui verser les sommes de :
– 2.850 euros au titre du préjudice financier,
– 3.000 euros au titre du préjudice économique,
– 3.000 euros au titre du préjudice moral,
– condamne in solidum les défendeurs au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La société Cofidis a conclu en principal au débouté de M. [K] de toutes ses demandes.
A titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats, elle a sollicité la condamnation de M. [K] à lui payer la somme de 22.500 euros.
En tout état de cause, elle a réclamé sa condamnation à lui payer la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
M. [T], en qualité de mandataire ad litem de la société Sungold, n’a pas comparu.
Par jugement en date du 4 octobre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Belley a :
– prononcé la nullité du contrat de vente portant sur une installation de panneaux solaires photovoltaïques conclu le 15 janvier 2016 entre M. [K] et la société Sungold, sous l’enseigne Institut des Nouvelles Energies, représentée par [M] [T], en qualité de mandataire ad hoc,
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 15 janvier 2016 entre
M. [K] et la société Cofidis, sous la marque Sofémo Financement,
– condamné la société Cofidis à verser à M. [K] la somme de 8.954,67 euros, le dernier versement pris en compte datant du 11 décembre 2020, en remboursement des sommes versées au titre du prêt du 15 janvier 2016,
– condamné in solidum la société Cofidis et et la société Sungold, sous l’enseigne Institut des Nouvelles Energies, représentée par M. [T] en qualité de mandataire ad’hoc, à verser la somme de 1.000 euros à M. [K] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
– et condamné in solidum la société Cofidis et la société Sungold, sous l’enseigne Institut des Nouvelles Energies, représentée par M. [T] en qualité de mandataire ad’hoc, aux dépens de l’instance.
La société Cofidis a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 10 novembre 2021.
Par ordonnance du 23 novembre 2021 rendue sur la requête de la société Cofidis, le président du tribunal de commerce de Nanterre a désigné la société MJS Partners, représentée par Me [E] [X], en qualité de mandataire ad litem de la société Sungold dans la présente instance d’appel.
En ses dernières conclusions du 13 juin 2022, la SA Cofidis demande à la Cour d’infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,
– déclarer M. [K] prescrit, irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter ;
– déclarer la SA Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;
y faisant droit,
– condamner M. [K] à reprendre l’exécution du contrat de crédit, conformément aux stipulations contractuelles ;
– condamner M. [K] à rembourser à la SA Cofidis, en une seule fois, l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire au jour de l’arrêt à intervenir ;
à titre subsidiaire,
si la Cour confirmait la nullité des conventions,
– réformer le jugement sur les conséquences de la nullité ;
statuant à nouveau,
– condamner M. [K] à rembourser à la SA Cofidis le capital emprunté d’un montant de 22.500 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, en l’absence de faute de la SA Cofidis et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité ;
en tout état de cause,
– condamner M. [K] à payer à la SA Cofidis la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– le voir condamner aux entiers dépens.
Par conclusions du 21 avril 2022, [D] [K] demande à la Cour de :
confirmer la décision rendue sous le numéro 11-21-000016, le 4 octobre 2021, par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Belley en ce qu’elle a :
– prononcé la nullité du contrat de vente portant sur une installation de panneaux solaires photovoltaïques conclu le 15 janvier 2016 entre M. [K] et la société Sungold,
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 15 janvier 2016 entre
M. [K] et la société Cofidis,
– condamné la société Cofidis à verser à M. [K] la somme de 8.954,67 euros, décompte arrêté au 11 décembre 2020, en remboursement des sommes versées au titre du prêt du 15 janvier 2016,
– condamné la société ‘Sofemo’ à verser à M. [K] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société ‘Sofemo’ et la société Sungold aux entiers dépens ;
et l’infirmer en ce qu’elle a débouté M. [K] de ses demandes indemnitaires ;
et, statuant à nouveau,
– débouter la société Cofidis, venant au droit de la Banque Sofemo, de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions.
à titre subsidiaire,
si la Cour ne faisait pas droit aux demandes de M. [K] considérant que la banque n’a pas commis de fautes :
– prononcer la déchéance du droit de la Banque Cofidis, venant aux droits de la Banque Sofemo, aux intérêts du crédit affecté ;
en tout état de cause,
– condamner la Banque Cofidis, venant aux droits de la Banque Sofemo, à verser à M. [K] la somme de :
– 2.850 euros au titre de ‘leur’ préjudice financier,
– 3.000 euros au titre de ‘leur’ préjudice économique,
– 3.000 euros au titre de ‘leur’ préjudice moral
à titre plus subsidiaire,
si la Cour ne faisait pas droit aux demandes de M. [K] :
– déclarer que M. [K] reprendra le paiement mensuel des échéances telles que prévues dans le prêt souscrit initialement.
La société MJS Partners, représentée par Me [E] [X], en qualité de mandataire ad’litem de la société Sungold, a été appelée en intervention forcée par assignation délivrée le 21 février 2022 à la requête de la société Cofidis, avec signification de ses conclusions.
Elle n’a pas constitué avocat.
Les conclusions de M. [K] lui ont été signifiées le 25 avril 2022.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 juin 2022.
Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le bon de commande et l’offre de crédit ayant été signés en date du 15 janvier 2016, les articles du code de la consommation visés ci-après s’entendent dans leur rédaction issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.
Sur la recevabilité de l’action de M. [K]
La société Cofidis persiste vainement à soutenir en appel que la société Sungold n’aurait pas été valablement représentée en première instance alors que M. [K] justifie de l’ordonnance désignant le mandataire ad litem à la demande de son conseil, représentant 65 requérants dont M. [K].
Sur la demande de nullité du contrat passé avec la société Sungold
Sur les insuffisances du bon de commande
Il résulte des articles L.121-18-1, L.121-17 et L.111-1 du code de la consommation que le bon de commande souscrit dans le cadre d’une vente hors établissement doit notamment comporter, à peine de nullité, les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, à son prix et au délai de livraison de bien ou d’exécution du service.
En l’espèce, le bon de commande décrit comme suit la prestation commandée :
‘Panneaux solaires photovoltaïques
garantie standard pièces et main d’oeuvre, système intégré au bâti – Onduleur Schneider
– Coffret de protection – Disjoncteur – Parafoudre
Installation solaire photovoltaïques d’une puissance de 3000 WC,
comprenant………….panneaux photovoltaïques monocristallins Thomson Energie
d’une puissance individuelle de…………..haut rendement certifiés NF EN – 61215 CLASSE II Certifié CE
– Démarches administratives (Mairie, ERDF, CONSUEL, AOA, etc…)
– Raccordement au réseau ERDF à la charge de l’Institut des Nouvelles Energies en totalité.’
Il en ressort que le bon de commande ne décrit pas le matériel commandé en ses caractéristiques essentielles que constituent le nombre et les références des modèles de panneaux, outre leurs dimensions et poids, ainsi que le modèle de l’onduleur.
Par ailleurs, le contrat comporte deux autres anomalies :
– D’une part, comme l’a relevé le premier juge, les dispositions du code de la consommation reproduites au verso du bon de commande ne sont pas celles applicables au contrat en vigueur, s’agissant des articles L.121-23, L121-24 et L121-26 dans leur rédaction antérieure à la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, outre l’article L.121 dans sa rédaction applicable mais dans une version tronquée.
Etant néanmoins rappelé que l’article L.121-23 ancien exigeait déjà que le contrat comporte, à peine de nullité, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés.
– D’autre part, le bordereau de rétractation mentionne à tort un délai expirant au 14ème jour à partir du jour de la commande et non à partir du jour de la réception du bien comme le prévoit l’article L.121-21. al.2 -2°du code de la consommation.
L’indication d’un délai erroné est à la fois sanctionné par la nullité du contrat et par la prolongation du délai de rétractation pour une durée de 12 mois après l’expiration du délai initial de 14 jours à compter de la livraison du bien. A tout le moins, cette mention erronée a induit en erreur M. [K] quant à ses droits et à la possibilité de se rétracter puisqu’il a pu légitimement se croire tenu d’accepter la poursuite du contrat passé le 14ème jour après la commande.
En revanche, contrairement à ce que soutient M. [K] :
– Le coût total du crédit est bien précisé dans le contrat de crédit et il importe peu qu’il ne figure pas dans le contrat de vente, les mentions prévues par l’article L.311-1.5° étant spécifiques au contrat de crédit.
– Le détail du prix de chaque composant de l’installation n’est pas une exigence légale.
– Le délai de livraison, fixé à trois mois maximum, est suffisamment précis et, à tout le moins, la livraison est intervenue et a été acceptée par le client avant l’expiration de ce délai.
– Les exigences d’information sur l’identité et les coordonnées du professionnel, prévues par l’article L.111-1 du code de la consommation, s’appliquent à la société venderesse, suffisamment identifiée dans le contrat, et non au démarcheur. Ce dernier est bien identifié dans le contrat de crédit, de sorte que le prêteur était en mesure de vérifier son agrément.
Sur ce, M. [K] expose qu’il a été démarché à son domicile par la société Sungold, prétendant intervenir à la suite d’une première installation réalisée par la société Elec Eco Energie, dont la production énergétique ne lui permettait pas d’amortir le prêt souscrit pour la cause.
Il verse au débat un jugement rendu le 2 septembre 2019 par le tribunal d’instance de Belley, prononçant notamment la nullité d’un contrat de vente d’un équipement photovoltaïque vendu par une société Elec’Eco Energie et du contrat de crédit affecté souscrit auprès la société Sygma Banque, tous deux en date du 20 septembre 2013.
Il ressort des termes de ce jugement que cet équipement a été raccordé au réseau électrique le 10 juin 2014 et que le contrat passé avec EDF a pris effet au 15 décembre 2014. M. [K] disait s’être aperçu, avec la première facture d’achat d’EDF, que les revenus annuels de la vente d’électricité ne couvraient pas le montant des mensualités de son crédit souscrit pour 16 ans.
Il s’en déduit que M. [K], au jour de la souscription des contrats du 15 janvier 2016, après la première année de production électrique du 15 décembre 2014 au 15 décembre 2015, était déjà au fait de leur défaut d’équilibre économique, tenant à ce que la vente de l’électricité à EDF ne suffit pas à compenser les mensualités du crédit, compte tenu du prix de vente excessif de l’équipement.
Au demeurant, M. [K] a reconnu ce fait :
– dans l’assignation introductive d’instance figurant au dossier de procédure de l’appelante, en indiquant ‘Le 15 janvier 2016, M. [K] était démarché à son domicile par la société Sungold, prétendant intervenir à la suite de l’installation qui avait été réalisée par la société Elec Eco Energie, dont la production énergétique ne lui permettait pas d’amortir le prêt souscrit pour la cause’ ,
– et dans ses conclusions d’appel où il indique que la société Sungold l’a démarché le 15 janvier 2016 ‘en lui affirmant que l’acquisition d’une nouvelle centrale lui permettrait de mettre fin aux préjudices qu’il subissait du fait de l’escroquerie de la société Elec Eco Energie’.
Au surplus, les explications de M. [K] sont incohérentes, dans la mesure où on ne voit pas en quoi l’ajout de nouveaux panneaux photovoltaïques et d’une charge de crédit supplémentaire allait pallier aux difficultés rencontrées avec le premier fournisseur.
M. [K] précise qu’il a également signé des contrats similaires avec les sociétés RTS et Cetelem le 20 janvier 2016, soit 5 jours après les contrats litigieux souscrits avec Sungold et Cofidis. Il est spécifié qu’une procédure était pendante devant la juridiction du Belley relative à cette 3ème série de contrats.
Ce cumul de contrats, avec trois fournisseurs et trois organismes de crédit distincts, interroge sur les intentions de M. [K]. Cela d’autant qu’il ne répond pas à l’observation de Cofidis sur sa déclaration mensongère dans la fiche de dialogue avec ce prêteur. Il a en effet indiqué n’avoir aucun crédit à charge alors que, pour le moins, il était déjà engagé par le crédit souscrit auprès de Sygma Banque.
M. [K] ne répond pas non plus sur le moyen soulevé par Cofidis quant au fait que le contrat de crédit mentionne que l’objet du prêt est désigné comme ‘Photovoltaïque Autoconsommation’. La même indication est reprise dans la Fiche d’information précontractuelle.
M. [K] verse aux débats un contrat et une facture de production EDF n°BTA0640925, dont il ressort que la production électrique a bien débuté le 15 juin 2016. En admettant que ces pièces sont bien relatives à l’équipement vendu par Sungold et non celui vendu par RTS, il n’explique pas la contradiction avec les mentions d’autoconsommation sur le contrat de crédit, ce qui paraît ressortir d’une fausse déclaration délibérée.
La nullité du contrat encourue à raison des insuffisances du bon de commande est une nullité relative, à laquelle le consommateur peut renoncer en exécutant volontairement le contrat. Cette exécution volontaire du contrat ne vaut renonciation de la part du consommateur à se prévaloir de la nullité du contrat que lorsqu’il a pu prendre conscience des atteintes faites à ses droits qu’après l’installation de l’équipement litigieux.
En l’espèce, M. [K], au regard de sa première expérience négative avec la société Elec Eco Energie, avait nécessairement conscience des difficultés pouvant être rencontrées dans le cadre du fonctionnement et du financement de ce type d’équipement. Il est d’ailleurs précisé, dans le jugement du 2 septembre 2019 du tribunal d’instance de Belley, qu’il indiquait s’être trouvé en grandes difficultés, avoir dû renoncer à certains projets et subir une réduction de son niveau de vie à raison de la charge financière consécutive aux contrats souscrits avec Elec Eco Energie et Sygma Banque.
Dans ces conditions, M. [K] ne pouvait ignorer la portée de l’attestation de livraison et demande de financement qu’il a souscrit le 24 février 2016.
Qui plus est, alors qu’il a attrait Elec Eco Energie et Sygma Banque devant le tribunal d’instance de Belley les 19 et 20 septembre 2019, il n’a cru bon d’engager la présente action que le 14 janvier 2021. Soit, dans les deux cas, à l’extrême limite du délai de prescription quinquennale partant de la date de signature des contrats. On ne peut que s’interroger sur le caractère tardif de ces recours.
Il est à noter que M. [K] ne verse aux débats aucun document de nature à établir que l’équipement vendu par Sungold ne fonctionne pas, ni même la moindre réclamation de sa part adressée au vendeur ou au prêteur. De sorte qu’il procéde par pure affirmation quand il indique que l’onduleur serait en panne depuis décembre 2016 et ne produit plus d’électricité.
En admettant néanmoins ce fait, M. [K] n’explique pas pourquoi il a laissé perdurer la situation plusieurs années et, en particulier, n’a pas agi dès septembre 2019 comme dans le premier dossier. Ces éléments interrogent, là encore, sur ses motivations.
Quoiqu’il en soit, il est démontré que M. [K] a renoncé à se prévaloir des irrégularités du contrat passé avec la société Sungold dont il avait nécessairement conscience, tenant notamment à l’insuffisante description des caractéristiques du matériel vendu, la même situation lui étant déjà connue par le précédent contrat souscrit avec la société Elec Eco Energie. Le jugement est réformé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de ce chef.
Sur le vice du consentement
M. [K] soutient que son consentement a été vicié par les agissements dolosifs de la société Sungold.
En réalité, il ne décrit aucune manoeuvre particulière mais se borne de reprocher au vendeur des manquements à ses devoirs d’information du client sur les points suivants :
– la nécessité ultérieure d’avoir à contracter avec d’autres prestataires pour leur installation tels que le Consuel, EDF, ERDF, et encore moins de frais supplémentaires la location obligatoire d’un compteur auprès de la société de gestion du réseau telle qu’ERDF.
– le délai de raccordement,
– l’assurance obligatoire à souscrire en cas d’acquisition de tels matériels,
– le prix d’achat de l’électricité pratiquée par EDF,
– la durée de vie des matériels et notamment, celle de l’onduleur en moyenne de 5 ans et d’une valeur avoisinant les 2.500 euros ttc, pose comprise, dont le remplacement, sera donc nécessaire au moins 3 fois au cours de l’exploitation de la centrale (20 ans).
Or, il ressort du jugement du 2 septembre 2019 que tous ces éléments étaient déjà en réalité connus de M. [K] à raison du précédent contrat souscrit avec Elec’Eco Energie et, à tout le moins, l’information insuffisante du contractant n’est pas constitutive de manoeuvres dolosives.
En conséquence, la demande de nullité du contrat fondée sur le prétendu vice du consentement de M. [K] doit aussi être rejetée.
Sur la demande de nullité du contrat de crédit
En l’absence d’annulation du contrat de vente, la demande d’annulation du contrat de crédit affecté est infondée. Par conséquent, le jugement est réformé en ce qu’il a constaté que le contrat de crédit est annulé de plein droit.
Sur les demandes indemnitaires de M. [K]
A défaut d’annulation du contrat de vente, les considérations relatives à la faute commise par le prêteur par le financement d’un contrat nul sont sans objet. A tout le moins, M. [K] qui, comme il a été dit, a signé des fausses déclarations quant à ses charges mensuelles et quant à l’objet du contrat financé, est mal venu à reprocher au prêteur un défaut de conseil.
Par ailleurs, l’obligation de l’emprunteur ne prend effet qu’à compter de l’exécution de la prestation de services qui doit être complète, et le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s’assurer que celui-ci a exécuté son obligation commet une faute.
En l’espèce, la prestation de la société Sungold devait comprendre, selon les indications du bon de commande, le raccordement de l’onduleur au compteur de production, l’obtention du contrat de rachat de l’électricité (auprès d’EDF) et la démarche d’obtention du consuel d’état (auprès d’ERDF).
La société Cofidis n’ignorait pas que la livraison et la pose de l’installation photovoltaïque ne constituait que l’exécution partielle du contrat et qu’en conséquence, en l’absence de spécification contractuelle du paiement d’un acompte à ce stade d’exécution, le client n’était pas tenu de payer le prix correspondant à l’exécution complète du contrat.
Elle a donc commis une faute en débloquant prématurément la totalité des fonds entre les mains de la société Sungold alors que celle-ci n’avait pas exécuté la totalité de sa prestation et elle ne peut pas valablement se retrancher derrière l’ordre de paiement donné par M. [K] qui n’a fait que recopier les mentions de l’imprimé que Cofidis a elle-même fourni.
Pour autant, M. [K] n’a subi aucun préjudice à raison de cette faute entraînant le déblocage anticipé des fonds puisque la société Sungold a achevé ses prestations avec le raccordement de l’installation au réseau électrique et sa mise en service, ce qui lui donnait droit au paiement intégral du prix.
En conséquence, M. [K] sera débouté de ses demandes formées au titre de préjudices financier, économique et moral.
Sur la demande de déchéance du droit du prêteur aux intérêts contractuels
L’article L.311-9 du code de la consommation prévoit qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris celles fournies par l’emprunteur à la demande du prêteur, lequel doit également consulter le fichier des incidents de paiement prévu à l’article L.333-4 du même code. Le non respect de ces obligations est sanctionné par la déchéance du droit du prêteur au remboursement des intérêts contractuels, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, en vertu de l’article L.311-48 al.2 du même code.
La société Cofidis n’a pas répondu au moyen soulevé par M. [K] quant au défaut de justification de la consultation du FICP et ne verse aucun justificatif de celle-ci. En conséquence, il y a lieu de la priver en totalité du droit aux intérêts contractuels.
Sur la créance de la société Cofidis
En l’absence de déchéance du terme, la société Cofidis demande la condamnation de M. [K] à reprendre le paiement des échéances et à régler les échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire jusqu’au jour du présent arrêt.
Il est indiqué dans les conclusions de l’appelante que M. [K] a payé l’intégralité des mensualités depuis l’origine au jugement assorti de l’exécution provisoire. Toutefois, l’historique du prêt produit par la société Cofidis, établi le 29 janvier 2021, s’arrête à l’échéance de décembre 2020, de sorte qu’il n’est pas justifié des échéances de janvier à septembre 2021.
Il ressort du tableau d’amortissement que M. [K] a réglé une échéance de 256,61 euros et 54 échéances de 224,82 euros jusqu’à septembre 2021 inclus, soit la somme totale de :
256,61 + (54 x 224,82) = 12.396,89 euros.
Sur cette somme, il y a lieu de déduire les assurances et frais, soit :
149,17 + 117,38 + 71,24 + (52 x 27) = 1.741,79 euros.
Il en résulte que le capital prêté est réglé à hauteur de 12.396,89 – 1.741,79 = 10.655,10 euros et qu’il reste dû : 22.500 – 10.655,10 = 11.844,90 euros.
Il reste à régler 180 – 55 = 125 échéances, d’octobre 2021 à février 2032. Le capital restant dû de 11.844,90 euros sera donc réglé par échéances de :11.844,90 : 125 = 94.76 euros, auxquelles s’ajoutent 27 euros pour l’assurance, soit des mensualités de 121,76 euros.
Le retard de 18 mensualités, d’octobre 2021 à mars 2023, s’élève à 18 x 121,76 = 2.191,68 euros.
En conséquence, M. [K] sera condamné à régler la somme de 2.191,68 euros à la société Cofidis et à reprendre le remboursement du prêt par échéances de 121,76 euros à compter du 10 avril 2023 jusqu’au terme du 10 février 2032.
Sur les demandes accessoires
M. [K], partie perdante en principal, supporte les dépens de première instance et d’appel mais il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Réforme, en toutes ses dispositions, le jugement prononcé le 4 octobre 2021 par le tribunal de proximité de Belley ;
Statuant à nouveau,
Déclare [D] [K] recevable mais infondé en son action en nullité du contrat passé le 15 janvier 2016 avec la Sarl Sungold, exerçant sous l’enseigne Institut des Nouvelles Energies ;
Le déboute de ses demandes d’annulation de ce contrat et du contrat de crédit passé le 15 janvier 2016 avec la SA Cofidis ;
Déboute [D] [K] de ses demandes de dommages et intérêts ;
Prononce la déchéance de la SA Cofidis du droit aux intérêts contractuels sur le contrat de crédit passé le 15 janvier 2016 avec [D] [K] ;
En conséquence, dit que [D] [K] devra reprendre le remboursement du crédit par échéances mensuelles de 121,76 euros à compter du 10 avril 2023 jusqu’au terme du 10 février 2032 ;
Condamne [D] [K] à payer à la SA Cofidis la somme de 2.191,68 euros au titre des échéances mensuelles non réglées du 10 octobre 2021 au 10 mars 2023 ;
Condamne [D] [K] aux dépens de première instance et d’appel ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT